D-062 - Décision d'un comité d'arbitrage

L'appelant a fait l'objet de trois allégations de conduite disgracieuse concernant un incident au cours duquel il aurait conduit en état d'ébriété, essayé de transgresser l'ordre de se ranger en bordure de la route, frappé un autre véhicule, circulé à grande vitesse alors qu'il était poursuivi et tenté de s'enfuir à pied, avant de finalement s'arrêter. Il a admis les faits à l'origine de deux allégations. Le comité d'arbitrage a conclu que ces deux allégations avaient été établies. Il a conclu que l'autre allégation était de nature répétitive et il l'a écartée. Il a ensuite rejeté la demande de l'officier compétent, qui voulait que l'appelant soit congédié, pour plutôt infliger la peine suivante : rétrogradation d'un grade, avertissement et recommandation d'une mutation et de la poursuite du counseling. La peine a été portée en appel.

Le 5 août 1999, le CEE a émis ses conclusions et recommandations. Le Comité externe a estimé que la rétrogradation n'était pas une peine appropriée dans les circonstances. Selon la solide preuve médicale dont disposait le comité d'arbitrage, l'inconduite de l'appelant, de même que sa dépendance à l'égard de l'alcool, était largement attribuable au syndrome de stress post-traumatique, dont l'appelant souffrait au moment de l'inconduite. Le comité d'arbitrage avait également en main des informations impressionnantes indiquant un pronostic très encourageant quant aux chances de l'appelant de guérir de l'alcoolisme provoqué par ce syndrome. Ces informations donnaient l'assurance, autant que l'on pouvait raisonnablement s'y attendre, qu'une telle inconduite ne se reproduirait pas. Par conséquent, la rétrogradation ne constituait pas une peine juste ni adéquate dans les circonstances.

La question était de déterminer si l'inconduite de l'appelant donnait à penser que celui-ci manquait de jugement et de leadership au point d'être incapable de s'acquitter des fonctions de quelqu'un qui doit être un modèle pour les subalternes et faire preuve d'intégrité et de bon jugement. Dans le présent cas, les erreurs de jugement de l'appelant étaient dues au syndrome de stress post-traumatique dont il souffrait. Il est apparu que son inconduite, notamment la consommation excessive d'alcool et la tentative de franchir le barrage routier, était directement attribuable à ce syndrome. Les opinions d'experts médicaux présentées en preuve pendant l'audience disciplinaire, lesquelles n'ont pas été contestées, ont établi que l'inconduite était causée par une maladie. Le comité d'arbitrage aurait dé prendre ce fait en considération lorsqu'il a évalué le jugement de l'appelant, son leadership et d'autres qualités. Le Comité externe a conclu que la rétrogradation n'était pas une peine appropriée à la lumière de l'élément de preuve. La conduite irresponsable de l'appelant dans la présente affaire n'indiquait pas une perte d'intégrité, de jugement ou d'autres qualités essentielles à l'exercice des fonctions de caporal; elle révélait simplement que l'appelant était malade.

Même si, de toute évidence, le comité d'arbitrage a estimé qu'il ne convenait pas d'ordonner à l'appelant de démissionner étant donné que celui-ci avait d'excellentes chances de revenir à son état normal, cela ne veut pas dire qu'il était raisonnable de lui infliger la peine venant juste après la démission dans l'échelle de sévérité. Le Comité externe a jugé que cela n'était pas raisonnable effectivement, et qu'il fallait reconnaître que le syndrome de stress post-traumatique était à l'origine de l'inconduite de l'appelant. Le Comité externe a recommandé que l'appel soit accueilli, et que la peine imposée consiste plutôt en une confiscation de la solde pour une période de dix jours, un avertissement et une recommandation de mutation et de poursuite du counseling.

Le 18 octobre 1999, le commissaire a rendu sa décision. Sa décision, telle que résumée par son personnel, est la suivante :

Le commissaire n'a pas accepté la recommandation du Comité externe. Il estimait que le membre avait contrevenu très sérieusement au Code de déontologie et que, dans des circonstances normales, une telle inconduite aurait entraîné un congédiement. Lorsque le commissaire a rendu sa décision dans la présente affaire, il a considéré comme une circonstance atténuante le fait que le membre souffrait du syndrome de stress post-traumatique, ce qui pouvait avoir affecté son jugement. Le commissaire n'en pensait pas moins que lorsqu'une personne commet un acte criminel grave, qu'elle soit alors au travail ou non, il faut sérieusement se demander si elle possède toujours ces qualités essentielles pour assumer des fonctions de supervision que sont l'intégrité, la crédibilité et le bon jugement. Selon le commissaire, un corps de police est censé se fixer des normes élevées et montrer qu'il les applique correctement. Compte tenu de tous les facteurs atténuants et aggravants en l'occurrence, le commissaire a estimé que la rétrogradation imposée par le comité d'arbitrage constituait une peine appropriée, car elle conciliait les intérêts des trois parties concernées : 1) le membre, 2) l'organisme, 3) le public. L'appel est donc rejeté. Le commissaire a encouragé le membre à poursuivre ses efforts de désintoxication et l'a invité à faire profiter les autres de ses expériences.

Détails de la page

Date de modification :