D-064 - Décision d'un comité d'arbitrage

L'appelant a fait l'objet d'une allégation de conduite scandaleuse relativement à l'utilisation d'une force excessive lors de l'arrestation d'un individu. Il avait été acquitté an Cour criminelle de l'accusation de voies de fait portée contre lui à la suite de cet incident. À l'audience, l'appelant a présenté une requête préliminaire afin de faire suspendre les procédures pour le motif que la tenue de l'audience constituerait un abus de procédure. Il a soutenu qu'il serait privé de son droit à une défense pleine et entière et de celui de contre-interroger des témoins importants, puisque la victime présumée de l'excès de force et sa conjointe de fait, qui avait assisté à l'altercation, avaient quitté la province et ne seraient pas présents à l'audience. L'intimé a fait valoir qu'il pourrait établir le bien-fondé de l'allégation sans la présumée victime, que les témoins seraient disponibles pour un contre- interrogatoire et que l'allégation de préjudice faite par l'appelant était prématurée. En outre, a-t-il soutenu, si le comité d'arbitrage jugeait nécessaire d'avoir le témoignage de la présumée victime, il pourrait toujours admettre en preuve la transcription de la déposition faite par celle-ci au procès criminel de l'appelant, en se fondant sur l'approche raisonnée à l'admissibilité de la preuve par ouï-dire. Au procès, la présumée victime avait été assermentée et elle avait été contre-interrogée par l'avocat de l'appelant.

Le comité d'arbitrage s'est rendu aux raisons de l'intimé et a rejeté la requête. Une fois que la requête eut été rejetée, l'appelant a admis les faits allégués et s'est vu infliger la peine suivante : confiscation de la solde pour une période de six jours et recommandation de suivre des cours ou des séances de counseling sur l'auto-évaluation. Il a appelé de la décision rendue au sujet de la requête préliminaire.

Le 19 août 1999, le CEE a émis ses conclusions et recommandations. Le Comité externe a conclu que le comité d'arbitrage avait estimé à juste titre que l'appelant n'avait pas droit à une suspension des procédures. Ce dernier n'a pas su démontrer clairement qu'il serait incapable de présenter une défense pleine et entière du fait que la présumée victime et sa conjointe n'étaient pas disponibles. Qui plus est, son droit de contre-interroger les témoins n'a pas été violé. Ce droit ne s'applique qu'aux témoins qui fournissent des éléments de preuve. Par conséquent, si les témoignages de la présumée victime et de sa conjointe n'allaient pas faire partie de la preuve présentée contre l'appelant, le droit de les contre-interroger n'existait pas. Les témoins qui allaient fournir des éléments de preuve pourraient être contre-interrogés.

Le Comité externe a conclu que le comité d'arbitrage n'avait pas commis d'erreur lorsqu'il avait déterminé que la transcription des témoignages pourrait être admise en preuve. étant donné que le comité d'arbitrage ne connaissait pas le contenu de ces témoignages, il ne pouvait se prononcer sur l'admissibilité de la transcription en son entier. Toutefois, dans le contexte de la requête préliminaire, où la question fondamentale était de déterminer s'il était indispensable que la présumée victime soit présente pour que l'audience soit équitable, le comité d'arbitrage était en droit d'envisager la possibilité d'admettre la transcription des témoignages en preuve. Il n'a pas commis d'erreur dans l'application de l'approche raisonnée à l'admissibilité de la preuve par ouï-dire lorsqu'il a établi que la preuve pourrait être admise, sous réserve d'une déclaration de sa part selon laquelle il évaluerait les différentes parties de la transcription avant de les admettre.

Le Comité externe a recommandé au commissaire de rejeter l'appel.

Le 3 novembre 1999, le commissaire a rendu sa décision. Sa décision, telle que résumée par son personnel, est la suivante :

Le commissaire a souscrit aux conclusions et aux recommandations du Comité externe et il a rejeté l'appel. Il estimait lui aussi que le rejet de la requête par le comité d'arbitrage ou la décision de l'intimé de ne pas inclure les témoignages de [la victime] et de [la conjointe de fait de la victime] dans la preuve produite contre l'appelant ne déniaient nullement à ce dernier le droit de présenter des éléments de preuve, de contre-interroger les témoins ou de faire des observations. Il était également d'avis qu'étant donné que les témoins ne seraient pas appelés par l'intimé, le droit de les contre-interroger n'existait pas. Il rejetait l'argument selon lequel l'appelant était pratiquement forcé de témoigner en raison de l'absence de [la victime]. Le commissaire appuyait la décision du comité d'arbitrage d'autoriser la poursuite de l'audience et il considérait lui aussi que l'appelant n'avait pas réussi à démontrer clairement qu'il y avait abus de procédure. Pour ce qui est de l'admission de la transcription des témoignages, le commissaire était d'accord que le comité d'arbitrage avait bien appliqué les exigences relatives à la « nécessité » et à la « fiabilité » et que la transcription des dépositions était admissible. Il a ajouté que les comités d'arbitrage sont assujettis à des règles de preuve souples et pourraient même admettre des éléments de preuve qui ne seraient pas recevables devant les tribunaux.

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2023-02-27