D-081 - Décision d'un comité d'arbitrage

À partir d'août 1999 jusqu'à juin 2000, l'appelant a accordé aux médias de nombreuses entrevues au cours desquelles il a dénoncé la façon dont la Gendarmerie avait mené une enquête sur la corruption du processus de traitement des demandes d'immigration au Commissariat du Canada à Hong Kong (la « Mission ») à la fin des années 80 et au début des années 90, laissant entendre que la Gendarmerie ne prenait pas l'affaire au sérieux. L'appelant a également remis à plusieurs journalistes des copies de documents tirés du dossier de l'enquête, dont un rapport rédigé par un analyste de la sécurité du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international (MAECI), David Balser, qui, en 1992, avait conclu que le processus de traitement des demandes prêtait le flanc à des pratiques abusives sur une grande échelle, car la Mission n'avait pas pris les garanties appropriées pour prévenir la fraude en matière d'immigration de la part d'employés corrompus. À l'origine, on avait demandé à la Gendarmerie d'enquêter sur les activités de la Mission en 1991-1992 après avoir reçu une plainte de deux résidants de Hong Kong. Ces derniers indiquaient que deux femmes prétendant être des employées de la Mission leur avaient proposé d'accélérer le traitement de leur demande de visa moyennant le versement d'une somme de 10 000 $ par l'entremise d'un consultant local en immigration. Les deux résidants de Hong Kong ont refusé cette offre et ont déposé une plainte par écrit auprès de la Mission à ce sujet. Toutefois, comme ils n'ont pas obtenu de réponse, ils ont décidé de déposer une plainte auprès de la GRC. Informée d'autres faits inhabituels, la GRC a alors décidé de dépêcher un enquêteur à Hong Kong pour interroger certains employés. Deux employés recrutés sur place (ERP) soupçonnés d'être impliqués dans des activités de fraude en matière d'immigration n'ont pas été interrogés, car on avait jugé qu'il n'y avait pas assez de preuve pour les accuser d'actes répréhensibles. En effet, on n'avait pas établi qu'ils possédaient des richesses de source inconnue. Selon l'agent de contrôle de l'immigration Brian McAdam, des groupes du crime organisé (des « triades ») auraient pu infiltrer le système informatique de la Mission, et de faux tampons de visa d'immigrant avaient été trouvés dans le bureau d'un ancien employé. À ce moment-là, l'enquêteur a été informé des conclusions de M. Balser au sujet des vulnérabilités en matière de sécurité à la Mission, mais il n'en a pas fait mention dans son rapport. Faute de preuves, on a mis un terme à l'enquête. Or, en 1993, on a institué une autre enquête pour examiner des allégations voulant que des agents canadiens à l'étranger (ACE) aient accepté des cadeaux dispendieux et de l'argent d'une famille d'industriels de Hong Kong qui tentait de s'insinuer dans les bonnes grâces du personnel affecté à la section de l'immigration de la Mission. La Gendarmerie a refusé d'envoyer deux enquêteurs à Hong Kong pour interroger des témoins, et l'enquête a été terminée en avril 1994, faute de preuves.

Une troisième enquête a été instituée en mai 1995 à la suite d'une plainte déposée par M. McAdam, qui réitérait certaines des questions ayant été soulevées lors de la première et de la deuxième enquêtes. M. McAdam avait démissionné du MAECI l'année précédente pour des raisons de santé. Il prétendait que sa maladie avait été causée par l'ostracisme dont l'avait frappé le MAECI pour avoir prêté assistance à la Gendarmerie lors de ses enquêtes antérieures en lui communiquant des renseignements sur des associations louches entre des employés de la Mission et des résidants de Hong Kong soupçonnés d'entretenir des liens avec le crime organisé. M. McAdam a aussi fait connaître sa plainte à un député fédéral, David Kilgour, qui a écrit au premier ministre pour exiger la tenue d'une enquête publique sur cette affaire. Au lieu de cela, le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration s'est engagé à ce que la GRC mène une enquête complète sur cette affaire. En mai 1996, le nouvel officier responsable de la Section de l'immigration et des passeports de la GRC, le surint. Jean Dubé, a interrogé M. McAdam et en est venu à la conclusion que les allégations étaient vagues et non fondées et que M. McAdam était animé par la volonté de se venger de ses anciens collègues pour la façon dont ils l'avaient traité. En septembre 1996, l'appelant a été chargé par le surint. Dubé d'examiner les allégations de M. McAdam et de recommander un plan d'action pour l'enquête. Entre temps, le surint. Dubé a écrit à son superviseur pour lui dire qu'il souhaitait mettre un terme à l'enquête. L'appelant s'est mis à voir M. McAdam chaque semaine et il a pris de nombreuses dépositions de sa part. Il a présenté régulièrement des rapports d'enquête dans lesquels il se disait convaincu que le personnel de la Mission avait été corrompu et qu'il commettait des actes de fraude en matière d'immigration sur une grande échelle. On a commencé à s'interroger sur le manque d'objectivité de l'appelant lorsqu'il a remis une copie du rapport de M. Balser à M. McAdam, qu'il a rencontré M. Balser pour lui demander de réécrire son rapport afin qu'il contienne moins de jargon, et qu'il a déclaré à un ancien ACE au cours d'un entretien qu'il était convaincu que des accusations criminelles seraient déposées à la suite de l'enquête. Par conséquent, en mars 1997, on l'a enjoint de cesser d'interroger des témoins et on a décidé de confier l'enquête à un autre membre. Au cours des mois suivants, l'appelant a continué de voir M. McAdam et de présenter des rapports dans lesquels il laissait entendre que l'enquête initiale menée en 1991-1992 avait été entachée de négligence ou de corruption de la part de l'enquêteur. Il a également tenté d'illustrer comment les conclusions de M. Balser avaient montré que des employés corrompus de la Mission avaient probablement commis des actes de fraude en matière d'immigration, ce qui avait permis à des membres de triades d'obtenir des visas d'immigration au Canada, et ce, malgré leur implication présumée dans des activités criminelles. En septembre 1997, le serg. Sergio Pasin a pris la relève de l'appelant et s'est vu confier l'enquête. Peu après, il a rencontré M. McAdam et a conclu que l'enquête devait se poursuivre, même si les allégations lui apparaissaient vagues. Au cours de l'année suivante, on s'est efforcé d'obtenir des renseignements auprès de Citoyenneté et Immigration Canada (CIC) au sujet de transactions inhabituelles effectuées dans le système informatique de la Mission pour déterminer si elles laissaient entendre que des actes de fraude en matière d'immigration avaient été commis. Il s'agissait notamment d'analyser les demandes de visa qui avaient été traitées dans un délai de quatre mois ou moins, alors que la moyenne était de 18 mois. Aucun témoin n'a été interrogé au cours de cette période parce que le serg. Pasin avait été affecté à une autre enquête jugée plus urgente.

Entre temps, l'appelant a écrit à son commandant divisionnaire pour se plaindre du fait que le surint. Dubé avait fait obstacle à son enquête. Après avoir été informé du rejet de sa plainte, l'appelant a log une autre plainte auprès de la Commission des plaintes du public contre la GRC en janvier 1998. Il s'en est suivi une enquête menée par la Sous-direction des affaires internes de la GRC qui, sur la foi d'une entrevue avec le surint. Dubé, a conclu que la plainte n'était pas fondée. De son côté, la Commission des plaintes du public a informé l'appelant en janvier 1999 qu'elle en était arrivée à la conclusion qu'elle n'était pas habilitée à régler cette plainte. Par la suite, l'appelant a communiqué avec le Bureau du vérificateur général, qui a accepté d'instituer une enquête.

Au cours du même mois, le surint. Dubé a pris connaissance d'un document rédigé par M. McAdam dans lequel il expliquait pourquoi il craignait que des triades aient infiltré la Mission et se disait déçu du manque de progrès réalisés par la Gendarmerie dans l'enquête sur sa plainte. Le document décrivait également les conclusions de M. Balser au sujet des vulnérabilités de la Mission en matière de sécurité. À l'époque, on a appris que M. McAdam avait remis ce document à un journaliste de l'émission de télévision The Fifth Estate qui, à son tour, avait communiqué avec la GRC pour obtenir de l'information sur les progrès de l'enquête. Peu après, le surint. Dubé a écrit à son superviseur pour lui recommander de réactiver l'enquête, et ce, même s'il persistait à croire que la plainte de M. McAdam n'était pas fondée. Une semaine plus tard, le surint. Dubé a écrit à l'appelant pour l'avertir que des médias risquaient de communiquer avec lui et pour l'enjoindre de ne pas parler de l'enquête avec les journalistes. Il s'est également informé au sujet d'une boîte de documents manquante que l'appelant avait récupérée à la Direction des renseignements criminels (DRC) en novembre 1996. Cette boîte contenait des coupures de journaux et de magazines au sujet de triades qu'avait recueillies M. McAdam lorsqu'il se trouvait à Hong Kong dans le cadre d'un projet de recherche qu'il poursuivait à cette époque. À la fin de sa période de service, M. McAdam avait laissé cette boîte à l'agent de liaison de la GRC à Hong Kong, étant entendu que son contenu serait catalogué par la DRC, puis retourné à M. McAdam. Cependant, en raison d'une communication déficiente, la DRC n'a pas catalogué le contenu de la boîte et n'a pas retourné celle-ci à M. McAdam. C'est à la demande de M. McAdam que l'appelant a récupéré la boîte à la DRC sans préciser toutefois qu'il entendait la retourner à M. McAdam. Le surint. Dubé et le serg. Pasin ont soutenu que le contenu de la boîte les intéressait parce qu'ils souhaitaient voir si un ou plusieurs documents pourraient les aider dans leur enquête. Toutefois, l'appelant a soupçonné qu'ils tentaient de déterminer s'il avait commis des actes fautifs en traitant le contenu de la boîte. Le serg. Pasin a appris de M. McAdam qu'il avait découvert, dans la boîte qui lui avait été retournée, un document renfermant des renseignements criminels sur des membres de triades soupçonnés. Il a immédiatement retourné ce document à l'appelant parce qu'il présumait qu'il avait été déposé dans la boîte par erreur. En août 1999, le serg. Pasin a interrogé l'appelant au sujet de la boîte et lui a demandé comment il pouvait être sûr qu'elle ne contenait pas de documents classifiés puisqu'il n'avait pas dressé l'inventaire de son contenu avant de la retourner à M. McAdam. À cause de cette question, l'appelant a coupé court à l'entrevue et a décidé de dire aux médias qu'il s'inquiétait du fait que la Gendarmerie ne prenait pas l'enquête au sérieux. Dans l'intervalle, le surint. Dubé a tenté de faire instituer une enquête sur l'appelant en vertu du code de déontologie, en partie sur la base d'allégations voulant qu'il ait communiqué des documents confidentiels à M. McAdam. Sa demande a été rejetée. Toutefois, une enquête en vertu du code de déontologie a été lancée plusieurs jours plus tard après la publication de plusieurs articles de journaux qui rapportaient les inquiétudes de l'appelant au sujet de l'enquête menée par la Gendarmerie sur la plainte de M. McAdam.

Le comité d'arbitrage de la GRC qui a conduit l'audience sur les allégations d'inconduite contre l'appelant a conclu que les agissements de ce dernier avaient été scandaleux parce qu'ils avaient violé le serment du secret qu'il avait prêté lors de son entrée en fonction à la Gendarmerie. Il a également conclu que l'appelant avait communiqué de faux renseignements aux médias, en ce sens qu'« il n'existe pas la moindre preuve de tentative visant à étouffer l'affaire, d'acte fautif ou de conduite contraire à la loi qui nécessiterait un examen public ». Le comité d'arbitrage a aussi conclu qu'« aucune preuve ne laisse entendre que le surint. Dubé souhaitait que cette enquête prenne fin », admettant simplement qu'il « devait composer avec des priorités concurrentes et un manque de ressources, et déterminer la meilleure façon de gérer l'enquête à Hong Kong ». Selon le comité d'arbitrage, le fait que l'appelant ait divulgué des renseignements confidentiels au sujet d'une enquête criminelle en cours, y compris les noms de suspects visés, avait probablement nui au déroulement de cette enquête et entaché la réputation des personnes identifiées comme des suspects, dont des diplomates canadiens occupant des postes supérieurs. Le comité d'arbitrage a rejeté l'affirmation de l'appelant voulant qu'il ait agi ainsi par souci de l'intérêt public. Il a plutôt conclu qu'il avait simplement tenté d'empêcher la Gendarmerie d'enquêter sur sa propre conduite dans le traitement de la boîte retournée à M. McAdam. Pour ce qui est des répercussions de la garantie de liberté d'expression prévue dans la Charte, le comité d'arbitrage a déclaré que, comme cette garantie, conformément à l'article 1 de la Charte, « n'est restreinte que par une règle de droit, dans des limites qui soient raisonnables et dont la justification puisse se démontrer dans le cadre d'une société libre et démocratique », la Gendarmerie était toujours habilitée à imposer des mesures disciplinaires à des membres qui enfreignaient leur serment du secret et qu'il pourrait en être autrement uniquement s'il fallait dénoncer « des actes illégaux graves ou des politiques qui mettent en danger la vie, la santé ou la sécurité de membres du public ». Par conséquent, le comité d'arbitrage a ordonné à l'appelant de démissionner de la Gendarmerie, faute de quoi il serait renvoyé. Il a conclu que l'appelant avait « un défaut de caractère qui l'empêche d'être utile comme agent de la paix et membre de la GRC ».

Les arguments présentés au soutien de l'appel sont principalement axés sur l'analyse de la Charte effectuée par le comité d'arbitrage. Il est allégué que les circonstances dans lesquelles les membres peuvent dénoncer publiquement la Gendarmerie sont beaucoup plus vastes que celles reconnues par le comité d'arbitrage et qu'elles comprennent des questions comme l'entrave à une enquête criminelle.

Conclusions du Comité

Le fait qu'un membre de la GRC viole intentionnellement le serment du secret constitue à première vue un comportement scandaleux susceptible de jeter le discrédit sur la Gendarmerie. Par conséquent, il convient d'imposer des mesures disciplinaires au membre qui affiche ce comportement, à moins qu'il n'ait agi ainsi pour divulguer un sujet d'inquiétude légitime qui nécessite un débat public. Le fait que l'appelant croyait honnêtement que la Gendarmerie commettait des actes fautifs graves n'est pas un élément particulièrement pertinent. Il incombait à l'appelant de présenter au comité d'arbitrage des preuves qui auraient établi que ses allégations reposaient au moins sur une base raisonnable. Même si rien ne prouve que la Gendarmerie ait tenté d'étouffer l'affaire, il y a eu d'importantes lacunes dans le processus d'enquête suivi par la GRC depuis 1991. Par conséquent, il est possible que des employés de la Mission aient été en mesure de commettre des actes de fraude en matière d'immigration sur une grande échelle et que ces actes n'aient pas été décelés jusqu'ici. Le dossier révèle toute une série d'activités louches et déconcertantes sur lesquelles la Gendarmerie n'a pas fait enquête au moment opportun et de façon approfondie. Le serment du secret de la GRC peut sans aucun doute être considéré comme une limite raisonnable à la liberté d'expression d'un membre de la GRC s'il vise à protéger des intérêts légitimes, mais il ne peut empêcher l'examen public d'actes fautifs de la part de la Gendarmerie. La GRC a toujours été réticente à l'idée d'enquêter sur les activités d'ERP à la Mission. L'enquête menée en 1999 n'a pas réussi à combler les lacunes observées dans les enquêtes antérieures. Elle a constitué un examen exhaustif des rapports entre des ACE et des résidants de Hong Kong et a révélé que la portée de l'échange de cadeaux, de sommes d'argent et d'autres avantages était beaucoup plus vaste que ce que le MAECI et CIC avaient fait croire à la Gendarmerie jusque-là. Cependant, le serg. Pasin a décidé de ne pas se pencher sur plusieurs questions importantes qui avaient été cernées lors de l'enquête initiale, comme les activités des ERP, ou encore de les examiner uniquement de manière superficielle. Dès le début de sa participation à cette enquête, le surint. Dubé a déclaré ouvertement que, selon lui, la plainte de M. McAdam était sans fondement. Il était toujours du même avis lorsque l'enquête a été réactivée à la fin du moins de janvier 1999. Le résultat de l'enquête était donc connu d'avance. Le surint. Dubé ne semblait pas prêt à envisager un résultat qui aurait été perçu comme donnant raison à M. McAdam. Les rapports de travail étroits que la Section de l'immigration et des passeports entretenait avec le MAECI et CIC semblent avoir influencé l'approche adoptée à l'égard de cette enquête. La Section estimait que le MAECI et CIC étaient ses clients. Cela posait problème, car une enquête opportune et approfondie aurait pu produire des résultats néfastes pour ces deux ministères, surtout si l'on avait constaté que le relâchement des procédures de sécurité à la Mission avait permis à des employés corrompus de s'adonner à de la fraude en matière d'immigration sur une grande échelle et pendant une longue période. Lorsque l'appelant a fait part de ses préoccupations aux médias en août 1999, il était raisonnable pour lui de croire que le surint. Dubé envisagerait d'instituer une enquête sur ses agissements en vertu du Code de déontologie. Aussi, l'appelant continuait d'être animé par la volonté de voir la Gendarmerie mener une enquête approfondie sur les activités de la Mission. Malgré tout, l'information divulguée aurait dû être considérée comme un sujet d'inquiétude publique légitime, car elle avait révélé que, pendant sept ans, la Gendarmerie n'avait pas su prendre les mesures nécessaires pour déterminer si des employés de la Mission s'étaient adonnés à des actes de fraude en matière d'immigration.

Recommandation du Comité datée du 10 septembre 2003

L'appel concernant la conclusion du comité d'arbitrage au sujet des allégations d'inconduite devrait être accueilli.

Décision du commissaire datée le 26 novembre 2003

(Apparence de partialité) - L'appelant a soutenu que le commissaire ne pouvait pas rendre de décision au sujet de l'appel parce qu'il avait fait preuve de partialité, ou du moins parce qu'il y avait eu apparence de partialité. En septembre 1999, le commissaire, qui était à l'époque sous-commissaire, avait ordonné un examen administratif des dossiers de toutes les enquêtes menées par la GRC sur des actes répréhensibles qui auraient pu être commis à la Mission de Hong Kong. Il a accepté les conclusions de l'examen administratif selon lesquelles les allégations de l'appelant n'étaient essentiellement pas fondées. Par la suite, il a fait part de ces résultats dans une note d'information au commissaire datée du 6 décembre 1999.

Le Comité d'examen a conclu que, dans une certaine mesure, l'appelant avait probablement raison de croire que le commissaire actuel n'était pas tout à fait impartial compte tenu du rôle qu'il avait joué dans l'examen administratif des dossiers effectué en 1999. Cependant, le Comité d'examen a aussi conclu que la Loi sur la Gendarmerie royale du Canada empêchait le commissaire de déléguer à quiconque les pouvoirs d'entendre les appels [par. 5(2)]. Aussi, comme le Parlement attribue les pouvoirs décisionnels dans les cas d'appel relativement à des mesures disciplinaires à la même personne que celle à qui il confie « pleine autorité sur la Gendarmerie et tout ce qui s'y rapporte » [par. 5(1)], il a reconnu que l'arbitre ne serait pas toujours impartial et indépendant. Le Parlement a plutôt assuré l'équité du processus en créant le Comité externe d'examen et en exigeant que tous les appels lui soient renvoyés avant que le commissaire ne prenne de décision à leur sujet.

Dans une décision datée de novembre 2003, le commissaire a statué que, même si aucun élément n'avait été présenté pour prouver qu'il avait fait preuve de partialité, il était possible que l'appelant perçoive chez lui un manque d'impartialité. C'est pourquoi il a pris la décision de ne pas statuer sur l'appel. À son avis, « le fait que j'ai approuvé la note d'information faisant état des résultats de l'examen administratif voulant que les allégations n'étaient pas fondées pouvait soulever des doutes quant à ma capacité à n'afficher aucun parti pris à l'égard de l'appel ». Le commissaire a invoqué le paragraphe 15(1) de la Loi, qui prévoit que le sous-commissaire au quartier général de la Gendarmerie peut assumer tous les pouvoirs du commissaire en cas d'absence ou d'empêchement de ce dernier ou de vacance de son poste. En l'espèce, l'article 15 pouvait s'appliquer, car le commissaire avait un empêchement attribuable à une crainte de partialité.

Décision du commissaire adjoint datée le 15 janvier 2004

Le commissaire adjoint a accepté les conclusions du comité d'arbitrage et a rejeté l'appel à l'encontre des conclusions de ce dernier sur les allégations. Il a conclu que, étant donné la nature des fonctions des agents de la GRC, une norme plus élevée devrait s'appliquer au respect du devoir de loyauté. Aussi, lorsqu'il y a divulgation de renseignements classifiés de nature délicate, comme des renseignements criminels et des détails au sujet de témoins, de suspects et de parties innocentes, cette mesure doit être d'intérêt public. De l'avis du commissaire adjoint, les critiques de l'appelant au sujet de la Gendarmerie ne reposaient sur aucune base raisonnable, et les faits divulgués par l'appelant aux médias ne représentaient pas un sujet d'inquiétude légitime d'ordre public; l'appelant a plutôt réagi par intérêt personnel.

Le commissaire adjoint a également maintenu la sanction imposée. Il a conclu que le comité d'arbitrage avait tenu compte des facteurs positifs et négatifs. Il n'était pas d'accord avec l'appelant qui prétendait que ses agissements constituaient une simple erreur commise dans le contexte d'un dossier très difficile et tout à fait particulier. Le commissaire adjoint a statué que l'appelant avait fait preuve d'un piètre jugement dans une série de décisions prises tout au long de l'enquête sur l'affaire de la Mission de Hong Kong. Selon lui, la sanction était appropriée, car l'appelant n'avait pas manifesté le degré de confiance nécessaire pour qu'il puisse conserver son emploi.

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2023-02-27