D-083 - Décision d'un comité d'arbitrage

Quatre allégations d'inconduite ont été formulées contre l'appelant. Toutes ces allégations portent sur des incidents au cours desquels il aurait abusé de son pouvoir dans ses rapports avec le public. Un comité d'arbitrage de la GRC a rejeté une motion de l'avocat de l'appelant voulant que l'on tienne une audience distincte pour chaque allégation. La première allégation a trait au fait que l'appelant aurait confisqué un bâton parce qu'il croyait à tort qu'il s'agissait d'une arme prohibée. L'appelant a admis qu'il avait manqué de professionnalisme avec l'individu auquel il avait confisqué le bâton et à l'égard de plusieurs membres de la GRC. Dans la deuxième allégation, on prétend que l'appelant a maltraité un automobiliste qu'il avait arrêté pour ne pas s'être conformé à son ordre d'arrêter son véhicule. L'automobiliste a soutenu que l'appelant lui avait fait des remarques désobligeantes et qu'il lui avait serré le cou. Le comité d'arbitrage a conclu que les éléments de preuve avancés par l'automobiliste n'étaient pas crédibles à ce sujet; toutefois, il a conclu que le comportement de l'appelant avait été scandaleux parce qu'il avait endommagé le véhicule de l'automobiliste en tapant dessus avec une lampe de poche et parce qu'il avait eu recours à une force excessive en procédant à l'arrestation de l'automobiliste, lui infligeant une blessure à l'épaule. Selon la troisième allégation, l'appelant aurait procédé à l'arrestation injustifiée d'un individu qui lui avait fait une remarque désobligeante dans un bar. L'appelant a prétendu que cet individu l'avait poussé sans ménagement. Toutefois, le comité d'arbitrage a rejeté cette affirmation, en partie parce qu'un membre de la GRC qui était tout près de la scène a déclaré qu'il n'avait pas vu l'appelant se faire pousser. Selon la quatrième allégation, l'appelant aurait donné un coup de poing au visage d'un prisonnier alors que ce dernier était menotté et assis sur le siège arrière du véhicule de police. L'appelant a rejeté l'allégation, mais il a admis qu'il avait asséné un coup de poing au visage du prisonnier avant de lui faire prendre place dans le véhicule. Il a agi ainsi pour maîtriser le prisonnier, car ce dernier venait de lui donner deux coups de pied. Le comité d'arbitrage a accepté la version des faits présentée par l'appelant, mais a tout de même conclu que l'allégation avait été prouvée. En effet, le comité d'arbitrage était d'avis que les gestes du prisonnier ne pouvaient pas compromettre la sécurité de l'appelant, car le prisonnier était menotté au moment où l'appelant l'avait frappé au visage.

Lors de l'audience sur la sanction, on a présenté des preuves à l'effet que l'appelant avait déjà fait l'objet de mesures disciplinaires à quatre reprises, dont deux pour avoir eu un comportement de confrontation avec des membres du public. Au cours de témoignages d'experts, un psychologue et un psychiatre ont attribué l'inconduite de l'appelant à l'alcoolisme et à la tension due à une situation familiale difficile à l'époque. Comme les problèmes familiaux ont été résolus depuis et que l'appelant a cessé de boire, les experts se sont dits persuadés qu'il était peu probable que l'appelant soit impliqué dans d'autres incidents d'inconduite si on lui permettait de garder son poste à la Gendarmerie. Toutefois, le comité d'arbitrage a conclu que le congédiement était une sanction appropriée dans le cas de la troisième allégation et il a aussi imposé un ordre de démissionner en rapport avec la quatrième allégation. Au nombre des facteurs qui ont contribué à cette décision, mentionnons le dossier disciplinaire de l'appelant, son refus de suivre des séances de psychothérapie lorsque cette mesure lui a été proposée la première fois peu de temps avant que surviennent les quatre incidents en question et le fait qu'il n'a pas suivi de programme de traitement interne pour alcooliques, et ce, malgré la recommandation formulée par son psychiatre en ce sens.

L'appel reposait sur les motifs suivants : le comité d'arbitrage aurait dû accorder la motion visant à traiter séparément les allégations; les procédures étaient injustes pour l'appelant parce que le commandant de son détachement avait fait partie d'un autre comité d'arbitrage en compagnie des mêmes officiers qui constituaient le comité d'arbitrage dans la présente affaire; le comité d'arbitrage a fondé ses conclusions au sujet des deuxième et quatrième allégations sur des faits qui ne faisaient pas partie de ces allégations, selon les détails fournis dans l'avis d'audience; enfin, les conclusions relatives à la crédibilité sur lesquelles a reposé la décision du comité d'arbitrage dans le cas de la troisième allégation étaient manifestement déraisonnables. Pour ce qui est de la décision concernant la sanction, l'appel reposait sur des motifs voulant que les troisième et quatrième allégations soient discriminatoires, car d'autres membres ayant fait preuve d'une inconduite semblable avaient été autorisés à conserver leur poste à la Gendarmerie, et aussi sur le fait que le comité d'arbitrage n'ait pas suffisamment tenu compte des problèmes familiaux vécus par l'appelant et de la mesure dans laquelle ils avaient contribué à ses écarts de conduite.

Conclusions du Comité

Il était opportun que le comité d'arbitrage examine les quatre allégations au cours d'une seule et même audience. Rien ne prouve que le comité d'arbitrage ait été influencé par des facteurs étrangers à l'espèce lorsqu'il a déterminé si chacune des allégations était fondée. La composition du comité d'arbitrage ne laisse pas supposer de crainte raisonnable de partialité, car le commandant du détachement de l'appelant n'a siégé qu'à une seule reprise avec les membres du comité d'arbitrage à l'occasion d'une procédure disciplinaire contestée et rien ne prouve qu'il a profité de l'occasion pour communiquer de l'information au sujet de l'appelant aux membres de ce comité. Cependant, les conclusions du comité d'arbitrage au sujet des deuxième et quatrième allégations devraient être rejetées. Le comité d'arbitrage a outrepassé ses compétences en se fiant à des faits qui n'étaient pas décrits dans les détails des allégations tels qu'ils apparaissaient dans l'avis d'audience et que l'intimé n'a pas invoqués pour appuyer ses dires voulant que la conduite de l'appelant ait été scandaleuse. Pour ce qui est de la troisième allégation, la conclusion du comité d'arbitrage à l'effet que les preuves avancées par l'appelant n'étaient pas crédibles n'est pas manifestement déraisonnable. Toutefois, la sanction imposée pour cette allégation est trop sévère, étant donné que les conclusions formulées par le comité d'arbitrage au sujet de seulement deux des quatre allégations peuvent être accueillies. Le comité d'arbitrage a accordé trop d'importance au dossier disciplinaire de l'appelant, car le seul incident pour lequel des mesures disciplinaires officielles avaient été prises avait eu lieu plus de dix ans auparavant, lorsque l'appelant était toujours une recrue en cours de formation. Le comité d'arbitrage a aussi accordé trop d'importance aux lacunes de l'appelant, lesquelles, selon lui, laissaient entendre que la réhabilitation était impossible dans son cas, et il n'a pas tenu compte du pronostic positif des deux témoins experts.

Recommandation du Comité datée le 13 février 2004

L'appel concernant les conclusions du comité d'arbitrage relativement aux allégations d'inconduite devrait être accueilli en partie. L'appel concernant la décision du comité d'arbitrage relativement à la sanction devrait aussi être accueilli en partie.

Décision du commissaire datée le 27 mai 2004

Le commissaire s'est dit d'accord avec les conclusions et recommandations du Comité externe relativement à certaines questions, mais il a néanmoins rejeté l'appel en ce qui a trait à toutes les allégations. Le commissaire a également rejeté l'appel concernant la sanction.

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