D-109 - Décision d'un comité d'arbitrage
L'appelant aurait commis trois actes distincts de conduite disgracieuse :
Allégation no 1 : L'appelant a sans cesse suivi la plaignante et a communiqué avec elle à plusieurs occasions, même si cette dernière lui a fait savoir que ce contact n'était pas souhaité.
Allégation no 2 : L'appelant a conduit un véhicule près du domicile de la plaignante, même si la plaignante lui a fait savoir que ce contact n'était pas désiré.
Allégation no 3 : L'appelant a altéré le courrier électronique de la plaignante sans son consentement.
à l'audience, l'appelant a présenté une motion d'arrêt des procédures. Il a soutenu que la Gendarmerie avait commis un abus de procédure dans sa façon de traiter la plainte portée contre lui et que le seul recours approprié consistait en un arrêt de l'audience disciplinaire.
Décision du comité d'arbitrage - En ce qui concerne la motion d'arrêt des procédures présentée par l'appelant, le comité d'arbitrage a conclu que la Gendarmerie n'avait pas agi correctement sous deux rapports. Premièrement, bien qu'elle ait effectué une perquisition au domicile de l'appelant en vertu d'un mandat, elle a saisi des articles qui n'étaient pas visés par ce mandat et a donc violé le droit de l'appelant, garanti par la Charte, à la protection contre des fouilles, perquisitions et saisies abusives. Deuxièmement, la Gendarmerie n'a pas remis à l'appelant tous les articles visés par une ordonnance du tribunal prévoyant le retour des articles qu'elle avait saisis. Toutefois, le comité a déterminé qu'un sursis de la procédure disciplinaire ne s'imposait pas.
Quant au fond, le comité d'arbitrage a conclu que l'allégation no 1 avait été prouvée, tout comme l'allégation no 3. Il n'a toutefois pas conclu que l'allégation no 2 avait été prouvée. Il a accepté la soumission conjointe des parties au sujet de la sanction et a imposé une réprimande et la confiscation de trois jours de rémunération pour la première allégation et une réprimande pour la troisième allégation.
Motifs d'appel - Les motifs d'appel de l'appelant dans cette affaire étaient liés aux aspects suivants :
- la décision du comité d'arbitrage d'annuler l'assignation délivrée à l'officier compétent (OC);
- ses conclusions au sujet de la divulgation tardive d'une pièce;
- ses conclusions au sujet de la demande de l'appelant en vue d'obtenir la divulgation des preuves de réfutation de l'intimé;
- sa décision de rejeter une motion d'arrêt des procédures;
- ses conclusions au sujet des allégations no 1 et 3.
Il n'en a pas été appelé de la sanction ni de la conclusion du comité d'arbitrage au sujet de l'allégation no 2.
Conclusions du Comité externe
Décision d'annuler l'assignation - Pour appuyer sa motion d'arrêt des procédures, l'appelant a voulu obtenir, par la délivrance d'une assignation, que l'OC témoigne au sujet d'une lettre que le représentant de l'officier compétent (ROC) a écrite à l'avocat de l'appelant. Le ROC a déposé une motion en vue d'obtenir l'annulation de l'assignation en se basant sur un affidavit dans lequel l'OC disait n'avoir aucune contribution utile à faire au sujet de cette lettre. Le CEE a conclu que la décision du comité d'arbitrage d'annuler l'assignation était raisonnable puisque l'OC n'était pas au courant de la lettre du ROC.
Divulgation tardive d'une pièce - Durant l'audience, le ROC a divulgué une pièce à l'appelant. Le CEE a conclu qu'il aurait dû le faire antérieurement étant donné que cette pièce touchait la motion d'arrêt des procédures de l'appelant. Toutefois, tout préjudice causé par la divulgation tardive a été compensé par l'offre d'ajournement faite par le comité d'arbitrage et la possibilité donnée à l'appelant de rappeler des témoins. Le CEE a aussi conclu que même si le ROC avait eu tort d'invoquer le privilège relatif au litige pour ne pas communiquer la pièce à l'appelant, ce facteur ne justifiait pas une conclusion d'abus de procédure.
Demande de divulgation des preuves de réfutation de l'intimé - Après un ajournement de l'audience et avant que l'intimé ne présente des preuves pour réfuter la motion d'arrêt, le représentant du membre (RM) a présenté une motion en vue d'obtenir la divulgation du sommaire de la déposition des témoins que l'intimé avait l'intention d'appeler, des notes, documents, dossiers et courriers électroniques pertinents, ainsi que de la jurisprudence que l'intimé voulait invoquer. Le comité d'arbitrage a conclu que l'obligation de divulguer de l'intimé s'appliquait uniquement à l'information relative au fond de l'affaire et non à l'information relative à la motion sur l'abus de procédure. Toutefois, par souci d'efficience, il a ordonné que l'intimé produise le sommaire de déposition des témoins. À la reprise de l'audience, le ROC nouvellement nommé a produit des documents relatifs à la motion en plus du sommaire de déposition des témoins.
Le CEE a conclu que le comité d'arbitrage aurait dû délivrer une ordonnance de divulgation de plus vaste portée au sujet de l'information concernant la motion d'arrêt pour inclure les notes, documents, dossiers et courriels pertinents. Toutefois, le nouveau ROC a communiqué plus d'information, et tout préjudice causé par la divulgation tardive a été compensé par l'offre d'ajournement faite par le comité et la possibilité donnée à l'appelant de rappeler des témoins.
Décision sur la motion d'arrêt des procédures - Le CEE a conclu à l'existence de deux irrégularités dans le traitement par la GRC du cas de l'appelant. Premièrement, une perquisition au domicile de l'appelant était abusive parce que la Gendarmerie a saisi de nombreux articles qui n'étaient pas visés par le mandat de perquisition. Deuxièmement, une perquisition sans mandat dans l'armoire de l'appelant au détachement, qui a mené à la saisie de trois armes à feu appartenant à l'appelant, était aussi abusive. Malgré leur gravité, ces irrégularités n'ont pas satisfait au critère strict pour conclure à un abus de procédure étant donné que celle-ci n'était pas corrompue au point qu'on puisse dire qu'il s'agissait clairement d'un abus de procédure. L'équité n'a donc pas été compromise puisque les éléments de preuve recueillis au cours des perquisitions n'ont pas été utilisés dans la procédure disciplinaire.
Le CEE a en outre conclu que, même si les irrégularités constituaient un abus de procédure, il ne recommanderait pas que le commissaire de la GRC ordonne un arrêt étant donné que le cas ne satisfaisait pas aux critères justifiant ce recours.
Le CEE a également conclu que les autres arguments présentés par l'appelant pour appuyer la motion d'arrêt des procédures ne justifiaient pas la conclusion d'abus de procédure :
- l'appelant a déclaré que le traitement réservé par la GRC aux articles saisis dans son domicile avait entraîné la perte d'éléments de preuve disculpatoires. Le CEE a toutefois constaté que les éléments de preuve présentés par l'appelant n'appuyaient pas cet argument;
- une visite au domicile de l'appelant par deux membres n'a pas violé les droits à l'égalité de l'appelant garantis par l'article 15 de la Charte. En outre, l'appelant ne s'est pas déchargé du fardeau de prouver qu'il y avait eu violation de l'article 7 de la Charte;
- l'appelant a soutenu que la non-conformité par la Gendarmerie avec une ordonnance du tribunal prévoyant le retour à l'appelant des articles saisis constituait un outrage au tribunal. Le CEE a conclu que, bien que la Gendarmerie eût conservé certains articles, en raison de l'interprétation de l'ordonnance possiblement discutable par les membres, la conduite de ces derniers, telle que consignée dans le dossier, ne correspond pas à celle visée par la définition rigoureuse d'un outrage;
- le dossier n'appuyait pas l'argument de parti-pris de la part de l'enquêteur principal.
Décision sur le fond - En ce qui concerne les conclusions du comité d'arbitrage au sujet des allégations no 1 et 3, le CEE a conclu que l'intervention n'était pas justifiée en ce qui concerne les conclusions du comité relatives à la crédibilité vu les explications que ce dernier a données et le fait qu'il s'est fondé sur le dossier pour expliquer ses conclusions quant à la crédibilité.
Le CEE a aussi conclu que les conclusions du comité d'arbitrage au sujet des allégations no 1 et 3 étaient raisonnables et fondées sur les éléments de preuve se trouvant dans le dossier.
Recommandation du Comité externe datée le 30 juin 2009
Le CEE a recommandé que le commissaire de la GRC rejette l'appel.
Décision du commissaire de la GRC datée le 14 juin 2010
Le commissaire a rendu sa décision dans cette affaire, telle que résumée par son personnel :
[TRADUCTION]
Dans une décision datée du 14 juin 2010, le commissaire par intérim William Sweeney a souscrit aux conclusions et recommandations du Comité externe et a rejeté l'appel de l'appelant portant sur la décision du comité d'arbitrage.