D-137 - Décision d'un comité d'arbitrage

L'appelant a rencontré X. Ils ont commencé à se fréquenter au début de 2009, mais leur relation était instable et intermittente. En mars 2009, ils ont emménagé ensemble dans un appartement. Il ressort du dossier que X avait un caractère imprévisible.

À la fin de 2010 ou au début de 2011, l'appelant a indiqué qu'il en avait assez de sa relation avec X et y a mis fin. Toutefois, X a déclaré qu'elle craignait l'appelant et qu'elle avait mis fin à la relation. Ils ont néanmoins continué à se fréquenter. Dans l'intervalle, l'appelant est parti en congé de maladie approuvé et était toujours en congé de maladie lors des incidents décrits ci-après.

À la fin de juillet 2012, l'appelant et X, qui était alors en vacances hors du pays, ont prévu que l'appelant irait la rejoindre. Le 3 août 2012 en soirée, l'appelant a été arrêté et détenu par les autorités du pays, puis a été accusé de vol et de méfait. L'appelant a été reconnu coupable des accusations par un tribunal du pays.

À son retour au Canada, l'appelant n'a pas informé son supérieur qu'il avait été déclaré coupable. Lorsqu'il s'est fait demander s'il avait passé de belles vacances, il a répondu qu'il avait eu un séjour agréable à un autre pays. Ses supérieurs ont appris qu'il avait été déclaré coupable et ont ordonné la tenue d'une enquête. Une enquête a donc été lancée et sept allégations de contravention au code de déontologie ont été formulées contre l'appelant.

L'appelant était mis en cause dans deux autres affaires déontologiques, mais les représentants ont convenu de se limiter à la présente affaire pour l'instant.

À la suite d'une audience, le comité d'arbitrage a rendu sa décision de vive voix les 13 et 14 janvier 2017. Il a conclu que les allégations suivantes avaient été établies : destruction de téléphones cellulaires et vol (allégation no 1), voies de fait contre X (allégation no 2), omission de signaler des accusations criminelles (allégation no 3) et déclaration trompeuse à un enquêteur (allégation no 6). Le comité d'arbitrage avait d'abord conclu que la procédure à l'autre pays n'était pas équitable et n'a donc pas considéré les déclarations de culpabilité comme une preuve prima facie des incidents. Il a donc examiné les éléments de preuve qui lui ont été présentés pour formuler ses conclusions.

Après l'audience sur la peine, le comité d'arbitrage a appliqué le critère juridique servant à déterminer la peine à imposer et a ordonné à l'appelant de démissionner, sans quoi il serait congédié. L'appelant n'a pas démissionné et a donc été congédié de la GRC.

L'appelant a interjeté appel après l'expiration du délai prescrit à cette fin. Il a demandé une prorogation rétroactive du délai pour interjeter appel, laquelle lui a été accordée. Malgré cette prorogation, l'ordonnance de congédiement qui le visait n'a pas été annulée. L'appelant a contesté les conclusions du comité d'arbitrage quant aux allégations no 1 et 2 ainsi que son congédiement. Il a fait valoir que le comité d'arbitrage avait émis des hypothèses, rendu des conclusions de fait incorrectes et fait abstraction de facteurs atténuants. L'appelant soutenait aussi que le comité d'arbitrage avait des préjugés contre lui parce qu'il avait reçu l'avis d'audience au sujet des deux autres affaires dans lesquelles il était mis en cause.

Conclusions du CEE

Sur le plan des questions préliminaires, le CEE a conclu que l'ordonnance de congédiement visant l'appelant ne pouvait être annulée même si ce dernier avait obtenu une prorogation du délai pour interjeter appel. Par ailleurs, le CEE a conclu que la plupart des documents déposés par l'appelant en appel n'étaient pas admissibles parce qu'ils étaient disponibles auparavant sans pour autant avoir été déposés lors de l'audience tenue devant le comité d'arbitrage.

Le CEE a conclu que le comité d'arbitrage n'avait pas commis d'erreur dans son appréciation de la crédibilité des principaux témoins et qu'il avait appliqué le bon critère juridique. Il a aussi conclu que le comité d'arbitrage n'avait pas commis d'erreur dans son appréciation de la preuve et que ses conclusions reposaient sur la preuve indiquant qu'il y avait eu altercation entre l'appelant et X, altercation provoquée par X. Le CEE a conclu que les facteurs atténuants invoqués par l'appelant en appel n'avaient pas été invoqués devant le comité d'arbitrage et qu'aucune preuve n'avait été déposée pour les étayer; par conséquent, le comité d'arbitrage ne pouvait être blâmé pour ne pas les avoir examinés. Enfin, le CEE a conclu que l'appelant ne pouvait pas soulever les prétendus préjugés que le comité d'arbitrage avait contre lui, et ce, pour deux raisons : 1) la décision d'entendre uniquement la présente affaire avait été prise d'un commun accord par les représentants des parties avant le début de la procédure; 2) même s'il n'y avait pas eu d'accord, l'appelant aurait dû soulever cette question devant le comité d'arbitrage.

Recommandation du CEE

Le CEE a recommandé que l'appel soit rejeté.

Décision de la commissaire de la GRC datée le 6 décembre 2020

La commissaire a rendu la décision suivante, telle que résumée par son personnel :

[Traduction]

L'appelant était un membre de la GRC affecté à la Division « X ». Il a rencontré X et il a commencé à la fréquenter au début de 2009. Leur relation était toxique et destructrice. Ils se séparaient souvent pour ensuite revenir ensemble. X avait un caractère imprévisible.

Ils ont mis fin à leur relation au début de 2011, mais ont continué à se fréquenter. En juillet 2012, ils ont prévu que l'appelant irait rendre visite à X, où elle était en vacances. Au cours de cette période, l'appelant était en congé de maladie. Le 3 août 2012, une altercation a éclaté entre l'appelant et X. Il a été arrêté par les autorités et déclaré coupable de vol et de méfait. X n'a pas porté plainte contre lui pour voies de fait.

À son retour au Canada, l'appelant a dit à deux de ses supérieurs qu'il avait passé un séjour agréable. Il n'a pas informé la Gendarmerie qu'il avait été déclaré coupable. À la fin de l'été 2012, X est revenue au Canada et a déposé une plainte auprès de la GRC en indiquant que l'appelant l'avait agressée et avait été accusé de destruction de biens et de vol. Une enquête déontologique a été lancée et sept allégations ont été formulées contre l'appelant.

À l'audience, le comité d'arbitrage a conclu que l'allégation no 1 (destruction de biens et vol), l'allégation no 2 (agression physique), l'allégation no 3 (omission de signaler des accusations criminelles) et l'allégation no 6 (déclaration fausse, trompeuse ou inexacte à un supérieur) avaient été établies. À l'audience sur la peine, le comité d'arbitrage a ordonné à l'appelant de démissionner, sans quoi il serait congédié. L'appelant n'a pas démissionné et a donc été congédié.

L'appelant a fait appel de la décision et a contesté les conclusions du comité d'arbitrage quant aux allégations no 1 et 2. Plus précisément, il a fait valoir que le comité d'arbitrage avait mal apprécié la preuve, n'avait pas tenu compte de contradictions et avait émis ses propres hypothèses et suppositions quant à la preuve. Il soutenait aussi que le comité d'arbitrage n'avait pas tenu compte de son état de santé au moment des allégations, qu'il avait fait preuve de discrimination envers lui, qu'il avait des préjugés à son égard et qu'il n'avait pas tenu compte de son rendement en tant que membre de la GRC.

L'appel a été renvoyé devant le CEE pour examen en application du paragraphe 45.15(1) de la Loi sur la Gendarmerie royale du Canada. Le président du CEE a recommandé que l'appel soit rejeté. La commissaire n'a pas été convaincue que le comité d'arbitrage avait commis des erreurs manifestes et déterminantes. L'appel a été rejeté et la décision du comité d'arbitrage a été confirmée.

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