Tsar du fentanyl du Canada – Rapport intérimaire (juin 2025)
Tsar du fentanyl du Canada
En février 2025, le premier ministre a annoncé la nomination de Kevin Brosseau au nouveau poste de Tsar du fentanyl du Canada, officiellement connu comme Commissaire à la lutte du Canada contre le fentanyl. Ce poste, une composante intégrale des mesures prises pour sécuriser la frontière, fait partie de l’engagement continu du Canada à négocier une nouvelle relation économique et de sécurité avec les États-Unis (É-U).
Fort d’une longue carrière dans le domaine des services de police et dans l'application de la loi - plus récemment à titre de Sous-conseiller à la sécurité nationale et au renseignement auprès du premier ministre - M. Brosseau a pour mandat de travailler en étroite collaboration avec ses homologues américains et les services responsables de l’application de la loi afin d’accélérer le travail continu du Canada dans la lutte contre le trafic du fentanyl.
En tant que personne-ressource dans l’amélioration de la collaboration opérationnelle et de la coopération dans la lutte contre le fentanyl, M. Brosseau dirige une approche « Équipe Canada ». Chaque semaine, il convoque tous les ministères et agences du gouvernement fédéral ayant un rôle à jouer dans la lutte contre le fentanyl afin de mettre en œuvre le Plan frontalier.
Depuis février, le Tsar a rencontré et travaillé en étroite collaboration avec tous les paliers de gouvernement du Canada, ses partenaires américains et internationaux, ainsi qu’avec les intervenants clés partout au Canada. Les interventions du Tsar renforcent les efforts visant à mettre fin à la production et au trafic de fentanyl illégal, tout en déterminant l’impact de ce fléau sur les communautés canadiennes.
Quelques thèmes communs ont émergé :
- Premièrement, une solide collaboration nationale et transfrontalière existe déjà et s'améliore. Bien que le Canada ne soit pas responsable de la crise du fentanyl aux É-U, les investissements et les actions ont eu des effets tangibles.
- Deuxièmement, l'ampleur et la portée considérables de la crise. Des milliers de Canadiens sont morts de surdoses de fentanyl et d'autres opioïdes synthétiques, tandis que les criminels à l'origine de cette crise continuent de s'adapter rapidement - et de manière de plus en plus complexe - pour mener leur commerce.
- Troisièmement, il n'existe pas de solution unique. La lutte contre l’offre et la disponibilité du fentanyl – par des mesures frontalières, un renforcement de l'application de la loi et des mesures contre le crime organisé – doit aller de pair avec des efforts visant à réduire la demande. Ceci inclus les campagnes de sensibilisation, la protection de la population et le soutien aux personnes qui souhaitent sortir et se remettre de leur dépendance.
- Quatrièmement, une réponse efficace au fentanyl doit être fondée sur les faits et appuyée par des données fiables et à jour. Néanmoins, bien que certains points communs aient été relevés, la complexité et la gamme de perspectives portant sur comment adresser la question du fentanyl sont apparues. Ces points de vue variés ont été recueillis et sont représentés tout au long du présent rapport.
Qui nous avons consulté
- Professionnels de la santé de première ligne et travailleurs communautaires : Des experts, des universitaires et des fournisseurs de services de première ligne offrant des traitements ont fourni leurs points de vue. Ces professionnels de la santé et organismes de soutien au niveau national et locale s’attaquent à la fois aux aspects de l’offre et de la demande de cette crise. Ils aident à éclairer les décisions politiques, tout en améliorant l’accès aux traitements et en renforçant la sensibilisation du public et les efforts de prévention.
- Organismes d’application de la loi/personnel de première ligne : Des chefs de services policiers, du personnel opérationnel et des associations de police à la grandeur du pays qui observent de près la crise du fentanyl et jouent un rôle crucial pour empêcher le fentanyl, ses précurseurs et d’autres stupéfiants dangereux de circuler dans nos rues.
- Institutions financières : Les intervenants financiers des secteurs public et privé qui offrent leur point de vue sur les éléments financiers de ce commerce illicite, ainsi que sur les forces et les faiblesses du régime canadien de lutte contre le blanchiment d’argent. Ce secteur joue un rôle important dans la détection de l’argent illicite exploitant les systèmes financiers traditionnels. En tant que principaux gardiens du système financier, les efforts de ces institutions pour combattre le blanchiment d’argent sont au cœur de cette lutte.
- Intermédiaires de la chaîne d’approvisionnement mondiale : Des représentants des administrations portuaires, des services postaux/de messagerie ont fourni leur connaissance directe dans ce domaine important dans le trafic du fentanyl. Les groupes et les membres du crime organisé exploitent les chaînes d’approvisionnement mondiales du secteur privé, ainsi que les expéditeurs de marchandises pour faire le trafic de drogues illicites et de précurseurs chimiques non-réglementés.
- Provinces, territoires et municipalités : Les provinces, territoires et municipalités (PTM) sont les principaux fournisseurs de services de santé à leurs citoyens, y compris les services de traitement et de réduction des méfaits, et ils sont chargés de l’application de la loi et de l’engagement de poursuites.
- Autochtones : Des dirigeants et des personnes autochtones ont donné un aperçu de leur rôle dans la prestation de services de santé à leurs communautés, y compris les services de traitement et de réduction des méfaits, ainsi que l’application de la loi, face à ce fléau. Les populations autochtones sont plus à risque de connaître des problèmes de santé mentale et de toxicomanie et de présenter une espérance de vie plus faible. Elles ont été touchées de manière disproportionnée par les méfaits de la consommation de substances et la crise des surdoses.
- Homologues des É-U : De hauts fonctionnaires et des représentants élus (p. ex. gouverneurs, membres du Congrès, membres du Sénat américain et agents diplomatiques) ont offert leur point de vue en tant que partenaires clés en matière de sécurité continentale, sujet pour lequel le Canada et les É-U ont des intérêts et des défis communs en ce qui concerne le fentanyl.
Ce que nous avons entendu
Contexte bilatéral entre le Canada / É.-U.
Les É-U font face à une urgence aiguë liée au fentanyl et en ont fait une question de sécurité nationale et une question bilatérale clé, nécessitant une attention urgente avec le Canada et le Mexique. Il s’agit d’une priorité bilatérale entre le Canada et les É-U depuis un certain temps. Le Canada est un collaborateur important, comme en témoigne la signature du Plan d’action canado-américain sur les surdoses et la création du Comité trilatéral sur le fentanyl. En février 2025, les É-U ont établi des droits de douane à l’encontre du Canada, ayant comme justification que le trafic du fentanyl et de d’autres drogues illicites à la frontière nord constituait un facteur dans leur crise de santé publique.
Bien que le Canada travaille avec diligence pour trouver des solutions nationales et internationales pour réduire à zéro la circulation de fentanyl illicite, il est important de contextualiser cette question. Les volumes de fentanyl transportés du Canada vers les É-U sont négligeables – selon les données de Customs and Border Protection (CBP) (anglais seulement) des É-U, depuis 2022, à peu près un dixième d’un pourcent des saisies de fentanyl sont attribuées à la frontière nord des É-U. Ces volumes sont beaucoup moins élevés que le flux de stupéfiants illégaux au Canada en provenance des É-U.
Nous avons consulté plusieurs homologues américains
Voici ce qu’ils nous ont dit :
- La collaboration entre le Canada et les É-U à la frontière est forte, mais des améliorations sont possibles. Les nombreuses mesures prises par le Canada ont été bien accueillies par les É-U et généralement considérées comme s’appuyant sur la solide coordination opérationnelle déjà en place.
- Les représentants canadiens et américains voient des possibilités d’approfondir la collaboration pour perturber le commerce illégal du fentanyl. Par exemple, la force de frappe conjointe proposée pourrait améliorer l’échange d’information et de renseignements afin de favoriser la prise de mesures d’application de la loi ciblées.
- Le Canada travaille en étroite collaboration avec le Office of National Drug Control Policy, le Department of Homeland Security des É-U, et d’autres agences pour informer des solutions.
- La lutte contre le trafic du fentanyl par les services postaux et/ou services privés peu coûteux a été identifié comme un défi commun. La coopération entre les services postaux et de messagerie privée se poursuive sérieusement, y compris l’exploration d’inspections supplémentaires des envois commerciaux à destination des É-U. Le Canada et les É-U considèrent la collaboration avec d’autres pays sur les précurseurs comme un domaine prioritaire de coopération future.
- Les travaux continus du Canada visant à améliorer les capacités des laboratoires antidrogue à analyser des échantillons de drogues illicites et à déterminer où et comment ces drogues sont fabriquées appuieront les efforts bilatéraux visant à retracer l’origine du fentanyl, à surveiller les variants et à mieux cibler le crime organisé.

Contexte national
Bien que l’accent ait été mis sur les É.-U., le Canada fait face à sa propre crise du fentanyl. En moyenne, 20 Canadiens en meurent chaque jour. Le fentanyl est une drogue plus mortelle que celles qui l’ont précédé. Cet opioïde synthétique est très puissant, peu coûteux à fabriquer, facile à expédier et peut être produit n’importe où. Le fentanyl illicite :
- Est de 20 à 40 fois plus puissant que l’héroïne;
- Est 100 fois plus puissant que la morphine;
- Peut tuer avec une petite dose de 2 mg, équivalant à cinq au sept grains de sel;
- Est de plus en plus combiné avec d'autres produits synthétiques très puissants comme le xylazine et les nitazènes, mélangé dans des drogues comme l'héroïne et la cocaïne, et ingéré sans le savoir; et
- Est trouvé dans des pilules contrefaites déguisées pour ressembler à des médicaments sur ordonnance.
Entre janvier 2016 et décembre 2024, 52 544 décès apparemment liés à une intoxication aux opioïdes ont été signalés au Canada, avec des augmentations importantes coïncidant avec la pandémie COVID-19. De tous les décès liés à une intoxication aux opioïdes au Canada entre janvier et décembre 2024, 74% étaient liés au fentanyl.
Nombre de décès apparemment liés à une intoxication aux opioïdes, Canada, 2016 à 2024

Version texte
| Année | Nombre de décès |
|---|---|
| 2016 | 2 832 |
| 2017 | 3 829 |
| 2018 | 4 258 |
| 2019 | 3 739 |
| 2020 | 6 429 |
| 2021 | 7 949 |
| 2022 | 7 560 |
| 2023 | 8 606 |
| 2024 | 7 146 |
Nous avons consulté des fournisseurs de soins de santé, de services de lutte contre la toxicomanie, de soins de santé mentale et de services de soutien de première ligne
Voici ce qu’ils nous ont dit :
- Les gouvernements à tous les niveaux, ainsi que les partenaires communautaires, ont pris diverses mesures pour lutter contre la crise des opioïdes au moyen de politiques, d’investissements et de programmes. Cependant, la situation est en constante évolution et les réponses doivent suivre le rythme. Le modèle de rétablissement de l’Alberta (anglais seulement) se distingue par son approche complète.
- Il n’y a pas de solution unique : des approches flexibles et personnalisées sont essentielles; les réalités locales nécessitent des solutions locales. Les provinces et les territoires ont compétence pour faire progresser ces approches locales uniques.
- L’accès au traitement rapide et abordable demeure un défi. Les longues listes d’attente et la stigmatisation empêchent beaucoup de personnes d’obtenir de l’aide, tandis que les fournisseurs de soins de santé sont confrontés à l’épuisement professionnel et aux ressources limitées. La capacité et les ressources représentent des exigences essentielles pour les systèmes axés sur le rétablissement.
- Les politiques de lutte contre les drogues, fondées sur les données et intégrant la santé et sécurité publique, devraient envisager des moyens visant à éradiquer la disponibilité/ prévenir la consommation de drogues illégales avant qu’elle commence.
- À mesure que les habitudes de consommation de substances évoluent, les meilleures stratégies sont flexibles, car l’adaptabilité est essentielle. Une mobilisation significative des familles et des communautés est également importante.
- Pour répondre à la demande, des réponses équilibrées composées de la prévention, la réduction des méfaits, le soutien en santé mentale, les options de traitement et la sensibilisation permettent un soutien plus complet et centré sur la personne.
- Les taux et les répercussions de la consommation de fentanyl et d’opioïdes diffèrent grandement d’une région, d’une collectivité et d’une personne à l’autre. La crise prend de nombreuses formes, allant de la consommation occasionnelle à la dépendance chronique. Les personnes récemment libérées d’un établissement correctionnel, les Autochtones et ceux qui occupent des emplois physiquement exigeants sont également touchés de manière disproportionnée.
Nombre de décès apparemment liés à une intoxication aux opioïdes par province ou territoire, en 2024

Version texte
- Columbie-Britanique - 2 299
- Ontario - 2 231
- Alberta - 1 181
- Québec - 645
- Manitoba - 371
- Saskatchewan - 201
- Nouveau-Brunswick - 78
- Nouvelle-Écosse - 68
- Terre Neuve- 45
- Yukon - 14
- Île-du-Prince-Édouard - 7
- Territoires du Nord-Ouest - 6
- Nunavut - N/A
Remarques :
- Les données de la Colombie-Britannique comprennent les décès liés à toutes les drogues non réglementées, y compris, mais sans s’y limiter, les opioïdes et les stimulants.
- Les données du Québec comprennent les décès liés à toutes les intoxications à des drogues ou à des opioïdes, y compris, mais sans s’y limiter, les opioïdes et les stimulants.
Nous avons consulté des dirigeants, agents et associations canadiennes d’application de la loi
Voici ce qu’ils nous ont dit :
- Le fentanyl arrive au Canada par l’importation illégale de la drogue, ainsi que les précurseurs utilisés pour produire le fentanyl domestiquement. La Chine est une source importante de précurseurs chimiques, dont beaucoup ont des utilisations légitimes, mais qui sont détournés par des groupes criminels organisés qui produisent du fentanyl.
- De réels progrès ont été réalisés dans la lutte contre le fentanyl, mais la difficulté relève du fait que les lois doivent être modifiées et adaptées si l’on veut s’attaquer adéquatement aux menaces à la sécurité nationale et économique.
- Le 4 juin 2025, l’Association canadienne des chefs de police a déclaré que le dépôt du projet de loi C-2 (Loi visant une sécurité rigoureuse à la frontière) : « …témoigne de la volonté de moderniser la législation et de doter les services policiers des outils nécessaires pour lutter contre la criminalité transnationale organisée dans un contexte de menace de plus en plus complexe. »
- À l’heure actuelle, il peut être difficile de concilier la protection des renseignements personnels des Canadiens et la nécessité d’échanger des renseignements autorisés entre les organismes nationaux d’application de la loi. Alors que ça peut souvent poser un obstacle aux poursuites, l’équilibre doit être préservé.
- C’est particulièrement le cas pour l’accès aux données transfrontalières par les agences d’application de la loi qui participent dans la lutte contre la criminalité transnationale et le fentanyl.
- Les enquêtes criminelles et les poursuites pour trafic de drogues, blanchiment d’argent et crime organisé sont très complexes. Ces efforts sont souvent longs, nécessitent beaucoup de ressources et une coordination entre plusieurs organismes et gouvernement. Ces aspects peuvent obliger les organismes d’application de la loi à faire des choix difficiles quant aux cas à poursuivre en fonction des risques criminels, des besoins opérationnels, des ressources disponibles et de la probabilité de condamnation.
- La conversion de renseignements - acquis légalement - en éléments de preuve admissibles par les tribunaux continue également de poser des défis et peut dissuader les enquêtes ou entraver les condamnations.
Nous avons consulté des institutions financières, associations bancaires et intervenants gouvernementaux responsables de la lutte contre le blanchiment d’argent et les crimes financiers
Voici ce qu’ils nous ont dit :
- Davantage d’outils et des peines plus sévères pour les crimes financiers amélioreraient le cadre canadien de lutte contre le recyclage des produits de la criminalité (LRPC).
- Il convient de noter que le projet de loi C-2 (Loi visant une sécurité rigoureuse à la frontière) contient un certain nombre de dispositions clés en matière de lutte contre le recyclage des produits de la criminalité.
- Ces crimes sont très complexes et de plus en plus sophistiqués. Les législateurs et les organismes d’application de la loi à tous les niveaux bénéficieraient de connaissances accrues et spécialisées.
- La mise en œuvre de pratiques exemplaires sur la LRPC, relevées dans des études antérieures qui ont examiné l’application de la loi entre les différents ordres de gouvernement, pourraient aider à éliminer les possibilités d’exploitation criminelle.
- Bien que le Canada et les É-U soient confrontés à des défis juridiques similaires, le régime américain de LRPC est largement perçu comme étant plus efficace avec une meilleure diffusion de l’information.
- Un modèle de coordination plus stratégique, fondé sur un échange d’information entre les partenaires financiers publics et privés, permettrait au Canada de mieux adresser la LRPC et aux partenaires du régime d’avoir des relations de travail plus cohésives avec le personnel d’autres ministères.
Nous avons consulté des intermédiaires de la chaîne d’approvisionnement, comme les expéditeurs, les services de messagerie privée, Postes Canada et les administrations portuaires
Voici ce qu’ils nous ont dit :
- La complexité et le volume du commerce mondial, en particulier avec l’essor du commerce électronique, posent des défis pour distinguer les biens légaux des produits illicites. Les matières non-réglementées importées légalement en vrac peuvent être difficiles à repérer et à saisir sans des renseignements ciblés.
- Il est essentiel, pour la santé économique du Canada, de trouver un équilibre entre la sécurité et le maintien de la fluidité des échanges commerciaux. Le dépistage ciblé et l’échange de renseignements peuvent aider à cerner les risques sans perturber le commerce légitime.
- Puisque le fentanyl est très puissant et peut être emballé en petites quantités physiques, il peut être dissimulé et expédié à peu de frais par la poste ou par messagerie.
- Les partenaires de la chaîne d’approvisionnement désirent collaborer, mais ont besoin d’autorités juridiques plus claires, des outils modernes et de stratégies d’échange d’information bien définies pour contribuer efficacement.
- La technologie de pointe et l’analyse des données peuvent aider à cerner les menaces plus efficacement et à améliorer la sécurité nationale.
- À mesure que les volumes augmentent, les administrations portuaires du Canada jouent un rôle de plus en plus important en matière de sûreté maritime. Une intégration accrue aux efforts fédéraux d’application de la loi constitue une voie potentielle à envisager pour améliorer la capacité du Canada à détecter et à perturber la contrebande maritime.
Contexte international
Le commerce illégal du fentanyl est à la fois lucratif et international. La pratique transcende les frontières et les juridictions, avec des chaînes d’approvisionnement, de production et de commerce de portée globale. Le cycle de production commence avec des précurseurs chimiques fabriqués à l’étranger, acquis et transformés en fentanyl par des groupes du crime organisé en Amérique du Nord.
Plusieurs pays d’Asie et des Amériques, dont les É-U et le Mexique, sont régulièrement utilisés comme voies de transbordement pour faciliter l’entrée au Canada de précurseurs chimiques, ensuite utilisés dans la production nationale. La plupart des grandes saisies de fentanyl au Canada peuvent être liées à la production nationale provenant de précurseurs chimiques importés ou détournés illégalement.
Nous avons consulté des représentants internationaux, y compris l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime
Voici ce qu’ils nous ont dit :
- Le commerce mondial du fentanyl et des précurseurs est effectué par des groupes criminels organisés transnationaux, y compris des cartels basés au Mexique.
- Les criminels achètent des précurseurs de fabricants en Asie et en font le trafic en Amérique du Nord en les déguisant en cargaison commerciale.
- Les criminels échangent et transportent les produits chimiques et les drogues par des routes établies du sud au nord en voiture et en camion.
- Le fentanyl coûte moins cher à fabriquer que les autres opioïdes, ce qui a entraîné une augmentation de la pureté dans la rue.
- Les réseaux criminels transnationaux génèrent d’énormes profits grâce à la distribution de fentanyl, qui :
- Réinvestissent les profits dans la capacité de production et les opérations de trafic;
- Entraînent un cycle d’activités criminelles, de blanchiment d’argent et d’autres crimes financiers.
Exploiter les faits et les données
Une meilleure collecte des informations et de données probantes permet une analyse en temps réel des marchés du fentanyl en constante évolution, ainsi qu’une analyse systématique de l’impact de nos actions collectives. Ces actions peuvent éclairer les politiques et la prise de décisions.
En améliorant nos données, nous pouvant mieux évaluer l’efficacité des mesures visant à lutter contre la dépendance, à réduire les surdoses et à sauver des vies. L’utilisation de données fiables nous aide également à surveiller la frontière pour arrêter la propagation du fentanyl en veillant à ce que les niveaux de trafic de fentanyl restent proches de zéro.
Cela peut être réalisé au moyen d’une gamme d’indicateurs acceptés et émergents, tels des techniques d’analyse des eaux usées. Si ces mesures sont mises en place de façon uniforme, fréquente et exhaustive partout au Canada, elles peuvent fournir un avertissement précoce de l’entrée du fentanyl dans de nouvelles régions du pays. Par ailleurs, les techniques de traçage en laboratoire permettent de déterminer l’origine des échantillons, donnant aux organismes d’application de la loi un aperçu important des canaux de distribution possibles, des habitudes de consommation et des nouvelles variations dans la composition des drogues.
Les données quantitatives et qualitatives peuvent aussi souligner la façon dont nous mesurons le succès et les résultats des stratégies d’intervention, ainsi que les réalités géographiques et démographiques sur le terrain.
Mise à jour sur ce que l’on fait / résultats
Loi visant une sécurité rigoureuse à la frontière
La protection de notre souveraineté et la sécurité des Canadiens sont des fonctions essentielles du gouvernement du Canada. Une frontière solide assure à la fois notre stabilité économique et contribue à notre sécurité publique en empêchant l'entrée de drogues illégales, d'armes et d'individus qui pourraient menacer la sécurité nationale.
L'ensemble des mesures législatives du projet de loi C-2 (Loi visant une sécurité rigoureuse à la frontière), déposé le 3 juin 2025, fait progresser le Plan frontalier et appuie les priorités liées à la sécurité publique afin de mieux sécuriser la frontière et de réaliser les éléments clés d'un partenariat économique et de sécurité Canada-d'abord avec les É-U. La Loi propose de nouveaux outils pour aider à lutter contre la migration illégale, le commerce illégal de fentanyl, le crime organisé transnational, le recyclage des produits de la criminalité et le financement du terrorisme.
La modernisation de nos lois pour faire face aux menaces à la sécurité nationale et économique et pour répondre aux défis en constante évolution protégera les Canadiens et fera du Canada un endroit plus difficile pour le crime organisé transnational pour opérer et tirer profit du commerce illicite de fentanyl.
Plan élargi de renforcement de la sécurité frontalière
Investissement de 1,3 milliard de dollars dans un Plan frontalier complet, avec d'autres investissements à venir
- La GRC a renforcé ses capacités de surveillance 24/7 en déployant :
- 3 hélicoptères de type « Black Hawk », 60 drones tactiques, 40 drones des FAC, des unités modernes de simulateurs de sites cellulaires, une couverture satellite complète utilisant la Mission de la Constellation RADARSAT. Des actifs supplémentaires de surveillance et de lutte contre les drones sont en cours d'approvisionnement.
Groupes criminels transnationaux listés
- Le 20 février 2025, le Canada a désigné sept groupes criminels transnationaux et organisés d'Amérique du Sud et d'Amérique centrale comme entités terroristes en vertu du Code criminel.
Cellule de partage de renseignements ciblée, appuyée par 200 millions de dollars, lancée avec les agences de renseignement canadiennes, la GRC, l'ASFC, CANAFE et d'autres acteurs clés
- 180 millions de dollars au Centre de la sécurité des télécommunications du Canada et 20 millions de dollars à Sécurité publique Canada pour établir la Cellule interopérée de renseignement opérationnel afin de mieux exploiter le partage d'informations pour cibler le crime organisé transnational, le lutte contre le recyclage des produits de la criminalité, et améliorer la sécurité frontalière.
Détection et perturbation du commerce de fentanyl
Fourniture de nouveaux outils aux agents de première ligne de l'ASFC
- L'ASFC a acquis des outils de première ligne tels que des outils et technologies d'imagerie et de détection chimique dans les points d'entrée à haut risque, des chiens détecteurs (en plus de plus de 80 équipes situées à divers points d'entrée à travers le Canada), et a accru ses efforts au Centre national de ciblage.
Création de nouveaux centres d'analyse des drogues
- Des tests préliminaires (élaboration et validation de méthodes) dans les nouveaux centres d'analyse de drogues de Vancouver et de Toronto sont en cours, et le centre devrait être pleinement opérationnel d'ici 2026. Nous travaillons avec des partenaires internationaux pour offrir une formation aux analystes, discuter du partage des données et aligner le Canada sur la méthodologie technique des États-Unis.
Réglementation des précurseurs
- Santé Canada a créé une nouvelle Unité de gestion des risques liés aux précurseurs chimiques.
- Plus tôt ce printemps, Santé Canada a rapidement inscrit à l’annexe trois précurseurs du fentanyl préoccupants. Des contrôles temporaires sont maintenant en place pour ces trois précurseurs. En janvier dernier, Santé Canada a publié un avis d'intention visant à appuyer des modifications réglementaires visant à accroître la surveillance des précurseurs chimiques et du matériel servant à la fabrication de drogues. Ces modifications réglementaires proposées ont été publiées en juin 2025 aux fins de consultation publique.
- Par le biais de la Loi C-2 (Loi visant une sécurité rigoureuse à la frontière), des modifications à la Loi réglementant certaines drogues et autres substances sont également proposées pour créer une nouvelle voie d'inscription accélérée pour contrôler rapidement les précurseurs chimiques. Ceci améliorera notre capacité à répondre aux menaces émergentes en matière de drogues.
Introduction de nouveaux outils importants pour les forces de l'ordre
Accroître le partage d'informations grâce à un nouveau modèle de partage de renseignements avec les institutions financières
- Le Partenariat intégré de renseignement sur le blanchiment d'argent (PIRBA) a été établi pour faciliter le partage d'informations relatives aux activités de blanchiment d'argent et de crime organisé entre un groupe restreint de ministères fédéraux et les grandes institutions financières.
- Le mandat a été ratifié et le ministère des Finances du Canada a élaboré une proposition législative pour atténuer les risques associés au partage d'informations entre les institutions financières.
Lutte contre le blanchiment d'argent basé sur le commerce
- Une Unité de transparence commerciale a été établie au sein de l'ASFC. L'ASFC finalise un protocole d'entente avec les É-U pour permettre le partage de données commerciales, en vrac, afin de détecter et de dissuader le blanchiment d’argent transfrontalier et d'autres crimes.
Amélioration de la coordination opérationnelle
Force de frappe conjointe canado-américaine
- De nouvelles équipes binationales, coprésidées par la GRC et la DEA des É-U, sont composées de professionnels de l'application de la loi, de la sécurité frontalière et du renseignement. Ils ciblent la production et le commerce de fentanyl, y compris les précurseurs chimiques, par des efforts conjoints.
Centres régionaux d'application de la loi
- Deux centres régionaux d'application de la loi seront établis en tant que composantes de la Force d'intervention : les Équipes régionales intégrées de lutte contre les synthétiques et les Équipes régionales intégrées de lutte antidrogue.
- Les Équipes régionales intégrées de lutte contre les synthétiques, dirigées par la GRC, ont pour mandat la perturbation nationale des réseaux et des acteurs du crime transnational, axées sur la réduction du flux de fentanyl et de précurseurs, avec quatre équipes opérant en Ontario, Québec, Alberta et Colombie-Britannique.
- Les Équipes régionales intégrées de lutte antidrogue, dirigées par SP, visent à établir des équipes provinciales/territoriales uniques pour lutter contre le crime organisé lié aux drogues dans les régions du pays connaissant des niveaux élevés de production et de trafic, de manière similaire au programme des Zones de trafic de drogue à haute intensité (HIDTA) de la DEA des É.-U. (anglais seulement). À ce jour, des propositions ont été soumises par l'Ontario, le Québec, l'Alberta et la Colombie-Britannique.
Augmentation du partage d'informations
Établissement d'une Loi sur la banque de données concernant les délinquants sexuels à risque élevé
- À compter du 31 décembre 2024, la loi exige de la GRC qu'elle établisse et administre une base de données centralisée accessible au public contenant des informations sur les personnes qui ont été reconnues coupables d'infractions sexuelles contre un enfant et qui présentent un risque élevé de commettre des crimes de nature sexuelle.
- Les consultations avec les provinces et les territoires pour déterminer les processus sont en cours; l'achèvement est prévu pour la fin de 2025.
Élargir et améliorer le partage d'informations sur l'immigration entre le Canada/É-U
- À compter du 17 janvier 2025, des modifications réglementaires à l'Accord entre le Canada et les É.-U. pour le partage d'informations sur les visas et l'immigration ont été mises en œuvre pour faciliter l'échange automatisé d'informations biographiques et biométriques des résidents permanents des deux pays. Une fois les systèmes nécessaires établis, les informations ne seront échangées que sur demande lors du processus de sélection de l'immigration de l'un ou l'autre pays, comme lors d'une demande de visa.
Minimisation des volumes frontaliers inutiles
Élimination du tour du poteau des ressortissants étrangers
- L'ASFC a mis fin à la pratique du tour du poteau.
- Réduction du fardeau financier de l'expulsion des personnes inadmissibles.
- À compter du 1er avril 2025, de nouvelles mesures sont en place pour réduire le coût de l'expulsion des personnes inadmissibles du Canada en augmentant les frais que ces personnes doivent payer pour revenir.
Augmentation du taux d'expulsion des personnes inadmissibles
- Le gouvernement du Canada a fourni des fonds à l'ASFC pour augmenter le taux d'expulsion des personnes inadmissibles du Canada. La priorité pour les expulsions est basée sur la sécurité et la sûreté, incluant la sécurité nationale, le crime organisé, les crimes contre l'humanité.
- L'ASFC a expulsé plus de 18 000 personnes interdites au territoire en 2024-2025 et en prévoit 20 000 au cours des deux prochains exercices financiers.
Autres investissements à venir
- Ajouter 1 000 nouveaux employés, chacun, pour l’ASFC et la GRC.
- Des investissements dans le Service des poursuites pénales du Canada pour permettre de poursuivre des infractions plus complexes de trafic de drogue et de crime organisé.
- Technologies avancées aux frontières, drones additionnels et des nouvelles équipes de chiens détecteurs pour cibler davantage les colis suspects aux frontières terrestres, dans les ports et les gares de triage.
Conclusion
Les divers points de vue partagés dans ce rapport révèlent que la lutte contre l’épidémie de fentanyl représente une question extrêmement complexe. Il n’y a pas de solution miracle. Elle exige de nombreuses mesures différentes à tous les niveaux – des initiatives de base au niveau local jusqu’aux mesures fédérales – et de multiples organisations, agences, personnes, des institutions financières aux responsables de la santé, des ports aux services de police.
Pour faciliter cela, beaucoup de travaux sont en cours. Le 3 juin 2025, le gouvernement du Canada a déposé la Loi visant une sécurité rigoureuse à la frontière et a pris et prend des mesures supplémentaires, notamment l’amélioration du personnel de l’ASFC et de la GRC et d’autres investissements. Nous continuerons de favoriser l’intégration de ce travail et de collaborer avec les principaux intervenants pour lutter contre cette épidémie et offrir aux Canadiens des solutions qui répriment l’approvisionnement en fentanyl tout en atténuant les méfaits causés par le fentanyl illicite.
Le Canada est bien placé et déterminé à maintenir l’élan nécessaire pour vaincre ce fléau qui touche nos collectivités et tant de familles. Au fur et à mesure que cette crise évoluera, nous ne faiblirons pas, et nos actions et réponses suivront résolument.