Hausse du prix du panier d’épicerie : l’achat local peut-il aider à faire baisser la facture?

Les consommateurs canadiens font face à une hausse importante du prix des aliments. Le Rapport annuel sur les prix alimentaires 2022 du Laboratoire en science analytique agroalimentaire de l’Université Dalhousie estime que l’augmentation moyenne des denrées sera de 5 % à 7 % en 2022, mais pourrait atteindre plus de 20 % pour certaines denrées essentielles. Cette augmentation, conjuguée aux charges croissantes auxquelles font face les ménages, pourrait menacer le pouvoir d’achat des consommateurs… à moins que l’achat local puisse contribuer à contrecarrer les hausses.

Une fille fait ses courses à l'épicerie avec son père.

Perturbations pandémiques et tensions géopolitiques

La pandémie affecte l’offre alimentaire en ralentissant le rythme de production. La COVID-19 est notamment à l’origine d’un ralentissement des services de transport outre-mer, ralentissement qui se transforme parfois en interruption complète, qui a été observée lors de cas positifs déclarés chez les travailleurs portuaires en Chine. La hausse de la demande pour des produits non alimentaires importés d’Asie a aussi eu un impact sur les coûts de transport, le prix des conteneurs maritimes ayant augmenté de près de 400 % à l’été 2021.

La crise en Ukraine, les tensions géopolitiques et les sanctions économiques imposées à la Russie, l’un des trois principaux exportateurs de blé au monde, risquent aussi d’avoir un impact sur le coût du panier d’épicerie. La hausse du prix du pétrole et du gaz fera augmenter les coûts de transformation des aliments en Europe, ce qui pourrait se traduire par des hausses pour les Québécois qui consomment ces produits.


Quand les changements climatiques s’invitent dans l’équation

L’offre alimentaire est aussi mise sous pression par des facteurs systémiques, dont la hausse de la demande mondiale, la rareté de la main-d’œuvre et les désordres climatiques.

À l’été 2021, les changements climatiques ont provoqué une grande sécheresse dans les Prairies canadiennes, une catastrophe pour le rendement de plusieurs grandes cultures. Alors que le Canada joue normalement un rôle clé dans l’approvisionnement alimentaire mondial, les données sur les récoltes de Statistique Canada indiquent que les productions canadiennes de blé, de canola et d’orge ont enregistré leur plus forte décroissance de l’histoire en 2021.Note de bas de page 1

Cela a ramené la production canadienne au niveau d’il y a dix ans et entraînera des hausses directes de prix pour des denrées alimentaires de base, comme les pâtes et les céréales. De plus, étant donné l’importance de ces cultures pour l’alimentation des animaux d’élevage, cela se traduira probablement par des hausses indirectes de prix pour d’autres aliments, comme les produits laitiers.


L’approvisionnement local pour alléger la facture?

Un constat se dégage des données sur les grandes cultures canadiennes : les productions à grande échelle dans une région donnée (blé, orge et canola) sont plus vulnérables aux chocs que les productions locales, comme le maïs (hausse de la production de 3,1 %) et le soya (baisse modeste de 1,4 %). Cela renforce l’idée que l’offre alimentaire locale peut améliorer la résilience de l’approvisionnement en contribuant à l’augmentation de l’offre globale tout en fournissant une meilleure capacité de faire face aux chocs.

Un autre aspect de l’approvisionnement local qui peut contribuer à réduire la facture est la diminution des coûts d’emballage et de transport lorsque les aliments sont destinés à des marchés de proximité. Les coûts d’emballage font pression à la hausse sur le prix des aliments en raison d’une augmentation de près de 40 % des prix du verre, du carton, de l’acier et de la résine de plastique depuis le début de la pandémie. La flambée des prix à la pompe ajoute une hausse de coût supplémentaire à prendre en compte. Ce sont des coûts qui sont significativement réduits quand un produit n’a pas à être emballé de manière à pouvoir encaisser un long transport.


Le terroir en réponse aux augmentations

On constate aussi que l’augmentation de la demande des produits du terroir de renommée mondiale (le champagne, par exemple) dont l’offre est toujours limitée, a fait bondir les prix et réduit leur accessibilité. Pour les producteurs locaux, cette raréfaction se traduit par des occasions, alors que des produits québécois viennent remplacer les produits de luxe sur nos tables. Le développement du créneau des produits alcoolisés du Québec en est un bon exemple : bières de microbrasseries, cidres de glace, vins nature et spiritueux élaborés à partir des produits de la forêt. L’essor qu’ils connaissent démontre que le consommateur peut s’approvisionner localement de produits de grande qualité, pour moins cher que lorsqu’il choisit des produits importés.

Les produits de luxe ne sont pas les seuls qui peuvent trouver leur chemin dans le panier (et le cœur!) des acheteurs locaux. Des producteurs agroalimentaires rivalisent d’originalité pour développer des ressources typiques du terroir québécois afin de remplacer des produits courant. Ces nouveaux produits, qu’ils soient dérivés de la caméline, de l’asclépiade ou de champignons forestiers, sont appelés à séduire de nouveaux adeptes soucieux de leur palais autant que de leur portefeuille et de l’environnement.

Ainsi, s’il est certain que l‘adoption d’alternatives locales et le changement des habitudes de consommation ne suffiront pas à endiguer les hausses prévues, le marché local demeure une option à considérer pour les ménages québécois qui cherchent à réaliser des économies. En additionnant les produits qui sont effectivement moins chers aux produits qui contribuent à la résilience de l’approvisionnement alimentaire, aux produits écoresponsables et aux produits qui mettent en valeur les richesses du terroir québécois, c’est le tissu économique au complet qui bénéficie d’un plus grand recours au marché local.
 

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