Comment j’ai appris à jouer aux échecs et à échapper à mes bourreaux
Le 22 février 2017, les Canadiens sont invités à participer à la Journée du chandail rose. En portant du rose, vous pouvez montrer votre soutien et contribuer à promouvoir l’inclusion, le respect et l’empathie, et ainsi mettre fin à l’intimidation.
Ma promesse à l’occasion de la Journée du chandail rose est de raconter mon expérience en tant que victime d’intimidation.
C’est le club d’échecs qui m’a offert une issue au calvaire constant qu’était pour moi la récréation.
J’avais neuf ans quand mon oncle a parrainé ma famille pour que nous immigrions au Canada et, à l’époque, nous avions l’impression d’avoir gagné à la loterie. On parle du milieu des années 70. À cette époque, l’Angleterre semblait bien morne, et elle offrait peu de perspectives à une pauvre famille de la classe ouvrière qui vivait dans un logement social.
À côté de cela, le Canada semblait aussi excitant que Disneyworld, c’était un monde plein de possibilités – même quand nous vivions dans le sous-sol de mon oncle, la première année.
Et pourtant, à l’école, j’étais « l’autre ». Il y avait des enfants qui croyaient pouvoir brutaliser quiconque sortait du lot, autant les membres de minorités visibles ou religieuses que les enfants handicapés. En tant que nouveau venu, les premières années, j’étais un de ces enfants considérés comme différents. Ils se permettaient donc de tirer sur mes sous-vêtements, de me battre et de me faire subir d’autres formes d’humiliations bien pires encore. Pour moi, une bonne récréation, c’était quand le pire qui m’arrivait, c’était de ne pas être choisi pour faire partie d’une équipe pour un jeu : le fait d’être ignoré me faisait certes sentir isolé, mais au moins, ce n’était pas de la violence.
La situation a finalement commencé à s’améliorer quand j’ai trouvé un moyen d’éviter carrément la récréation : je me suis joint au club d’échecs. J’ai même gardé le laisser-passez en souvenir.
Maintenant que je suis adulte, je peux voir mes bourreaux comme des enfants plutôt que comme des délinquants. Ils avaient eux-mêmes besoin d’aide. Certains d’entre eux avaient un père incarcéré. Ils étaient négligés, souvent affamés. Ils étaient traités comme des parias par les enseignants qui auraient dû les aider, renvoyés de la classe pour des comportements qu’on attribuerait maintenant au trouble du déficit de l’attention.
En tant que parent moi-même, aujourd’hui, je peux constater les progrès réalisés. Bien que la cyberintimidation offre un anonymat et une portée auxquels les intimidateurs de mon temps n’avaient pas accès et que, comme nous le savons trop bien, ses conséquences sont absolument dévastatrices, j’ai encore de l’espoir. Nous vivons dans une ère ou les parents et les enseignants déploient de grands efforts pour apprendre aux enfants à accepter les autres et à s’entendre pour résoudre les problèmes plutôt que de s’en prendre à leurs camarades. Un enfant victime d’intimidation en est un de trop, cependant je crois que dans l’ensemble le climat est aujourd’hui plus accueillant pour les enfants qui sont différents. En général, les enfants s’en sortent bien.
James Gilbert
Sous-ministre adjoint, Direction générale des affaires publiques et des relations avec les intervenants
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