Discours pour l’honorable Patty Hajdu, ministre de l’Emploi, du Développement de la main-d’œuvre et du Travail pour la conférence annuelle de Collèges et instituts Canada
Discours
Ottawa (Ontario)
1er mai 2017
La version prononcée fait foi.
Je suis ravie d’être ici aujourd’hui pour souligner l’importance de l’apprentissage et ses effets sur l’économie.
J’aimerais commencer en disant que c’est une joie d’être ici avec vous, sur le territoire traditionnel des Algonquins. Aujourd’hui, je veux vous parler non seulement de vos contributions aux collectivités, mais également du rôle que vous jouez et du partenariat que nous voulons créer avec vous. Vous collaborez avec le gouvernement depuis très longtemps. Nous croyons que le travail que nous faisons pour nous assurer que les gens ont les compétences nécessaires pour réussir fera de nous un excellent partenaire pour vous.
Nous accordons une grande priorité à l’apprentissage. Le récent budget doit énormément vous plaire, considérant les efforts que nous mettons pour nous assurer que tous acquièrent les compétences dont ils besoin pour réussir. Nous avons parlé presque sans arrêt de la classe moyenne. Vous le savez. Je crois fermement que les études postsecondaires sont essentielles pour rejoindre la classe moyenne et y rester. C’est ma profonde conviction.
Je suis la première, dans ma famille, à avoir obtenu un diplôme universitaire. Je suis entrée à l’université à 17 ans, en partie grâce à un gouvernement qui croyait que l’éducation devait être abordable. Et puis, il y avait également le Régime d’aide financière aux étudiants de l’Ontario, qui m’a permis d’entamer mes études postsecondaires. Cela dit, j’ai tout de même affronté bien des obstacles. Des obstacles dont vous êtes quotidiennement témoins, tels que le fait d’ignorer ce qu’est le bureau du registraire. J’étais incapable de me retrouver sur le campus. J’ignorais l’existence des programmes de soutien pour les étudiants ou la façon d’obtenir l’aide des enseignants. Je ne savais pas comment dire que j’avais des difficultés. J’ai donc abandonné l’université après deux ans. Ce fut une période extrêmement difficile. J’étais très jeune, sans le moindre sou.
Après quelque temps, j’ai quitté Toronto et suis retournée à Thunder Bay, la queue entre les jambes. Je croyais avoir échoué. Je croyais avoir déçu ma famille. Je me sentais extrêmement honteuse.
Je suis retournée sur les bancs d’école à l’âge adulte, après la naissance de mes enfants, afin de poursuivre mes études. Je savais que si je voulais que les portes me restent ouvertes, il me fallait ce diplôme. J’avais un oncle, très sage, qui me répétait toujours : « Tu sais, ce n’est qu’une porte. Une porte que tu dois ouvrir. Et la clé pour l’ouvrir, c’est l’éducation. » Je savais que je devais retourner à l’école et donner l’exemple à mes enfants. Je devais pouvoir subvenir à leurs besoins. J’étais très jeune lorsque je suis devenue mère célibataire, et j’ai vite compris que sans éducation, mes enfants grandiraient comme moi, en luttant et en vivant au jour le jour. Ma mère a été chauffeuse d’autobus jusqu’à sa retraite, alors notre famille n’a jamais eu beaucoup d’argent.
C’est donc ce que j’ai fait. Je suis allée à Lakehead University, j’ai suivi des cours du soir et travaillé en même temps. Ce fut très difficile. Je me souviens avoir été très stricte sur l’heure de coucher de mes enfants. Tous ceux qui ont suivi des cours et élevé des enfants en même temps le savent : à 20 h, c’était au dodo, parce qu’ensuite, je devais étudier.
Après avoir terminé mon baccalauréat ès arts, j’ai fait une spécialisation, et j’ai terminé ma maîtrise de l’Université de Victoria juste avant le début des élections. J’ai donc passé ma vie à étudier.
Aujourd’hui, mes deux enfants sont diplômés. L’un d’entre eux détient un diplôme du Collège Confederation et travaille comme soudeur. Le collège a formé un fantastique partenariat avec l’école secondaire où il est allé, et où travaillait également un soudeur. Un jour, j’ai vu mon fils revenir de l’école tout excité, enthousiaste parce qu’il apprenait des choses.
Puis il est allé au collège, il a suivi un programme d’un an, et maintenant, il est soudeur. Et il est très, très heureux. Il fait 20,00 $ par heure, sent qu’il a un but, qu’il appartient à une collectivité et qu’il est compétent. Il a confiance en lui.
Mon autre fils détient un diplôme du Collège Humber, où il a étudié en journalisme. Il est maintenant ici, à Ottawa, et commence son stage d’été aujourd’hui.
L’éducation permet ce genre de réussite. Il n’est pas vraiment question des individus, il s’agit plutôt d’ouvrir la voie pour les générations à venir. Mes enfants ont eu l’exemple d’une mère qui accordait de la valeur à l’éducation, qui a pu y accéder, puis gagner un meilleur revenu. Une mère qui les encourageait et qui pouvait les aider à surmonter les obstacles qu’elle-même avait dû affronter seule. Voilà ce que nous pouvons faire ensemble : égaliser réellement les chances. Et vous tous jouez ce rôle primordial en faisant en sorte que tous, quel que soit leur âge, puissent se joindre à la population active.
Ce que j’aime des collèges, et vous pouvez le voir d’après les histoires que je vous ai racontées, c’est que les programmes qu’ils offrent sont au diapason du marché du travail actuel et répondent aux exigences des employeurs. Les compétences que les étudiants acquièrent au collège leur permettent souvent d’être rapidement, voire immédiatement, embauchés.
En fait, selon des données récentes de l’Enquête nationale auprès des diplômés, 90 % des diplômés de collèges et d’institutions trouvent du travail dans leur domaine. C’est extraordinaire, et c’est exactement ce que l’on veut entendre.
Je dois dire que j’ai été témoin d’une telle chose lorsque j’étais chargée de cours au Collège Confederation. Je donnais un cours obligatoire dans le cadre de plusieurs programmes, dans lesquels les étudiants étaient amenés à interagir avec des Autochtones. C’était le cas notamment pour les préposés en soins de soutien ou les éducateurs en garderie.
Et je me suis rendue compte, en donnant ce cours, que les collèges formaient de meilleurs employés. Pourquoi? Parce que les étudiants comprenaient pourquoi ils avaient besoin des renseignements qu’on leur donnait et des notions qu’ils apprenaient.
J’ai également appris, en tant que chargée de cours, qu’il faut interagir avec des types d’étudiants très différents. Certains de mes étudiants étaient jeunes et sortaient tout juste de l’école secondaire. Ils avaient très peu d’expérience. Mais j’avais également des étudiants plus âgés. Certains quittaient une industrie qui n’allait pas bien, d’autres revenaient au travail après une blessure. J’ai découvert que le dynamisme d’une classe intergénérationnelle est l’un de ces bénéfices intangibles que l’on voit tous les jours dans les collèges. Je n’oublierai jamais cet apprentissage quasi instantané entre les générations, et dont j’ai été témoin dans ma classe.
Former des diplômés prêts à travailler n’est pas juste intelligent, c’est essentiel. Bien des jeunes Canadiens peinent à percer dans le marché du travail. C’est là que nous concentrons nos efforts, afin de combler cette lacune. Mon travail m’accorde le privilège de trouver avec vous des solutions qui empêcheront cette lacune de devenir insurmontable et qui fera en sorte que les jeunes et les moins jeunes acquièrent les compétences dont ils ont besoin pour réussir sur le marché du travail. Nous croyons que votre prochain emploi devrait être meilleur que le précédent. J’ai le sentiment que nous partageons cette philosophie.
Certaines des choses que nous ferons ensemble m’enthousiasment et je tiens à vous parler quelque peu du projet relatif aux compétences essentielles et à la finance sociale.
Les collèges sont les principaux moteurs de l’innovation dans l’économie, alors il nous tarde de travailler avec eux. Je suis contente de collaborer à un projet avec Collèges et Instituts Canada, et j’espère que beaucoup d’autres suivront.
Nous avons hâte de travailler avec vous, car nous savons que vous êtes l’un des moteurs de l’innovation de notre économie.
Nous avons lancé, en collaboration avec Collèges et instituts Canada, des investisseurs privés, des partenaires de la prestation de services et la Société de recherche sociale appliquée, une initiative sans pareille : le projet relatif aux compétences essentielles et à la finance sociale. Il offre de la formation afin d’augmenter le niveau de compétences essentielles des Canadiens adultes sans emploi. Nous rembourserons le capital investi et verserons des intérêts en cas de réussite. Nous testons ce modèle de paiement en fonction des résultats dans l’espoir d’obtenir de meilleurs résultats pour les étudiants. Les signes sont encourageants.
Les participants se sentent davantage prêts pour un emploi une fois la formation terminée. Ils sont plus confiants et ont amélioré leurs compétences en communication et en organisation. Je suis très heureuse de cette collaboration. Il s’agit réellement d’un modèle d’innovation. Nous devons essayer de nouvelles choses. Autrement, nous obtiendrions toujours les mêmes résultats. Innover, c’est une chose que nous pouvons faire ensemble.
Comme vous l’avez entendu dans notre budget de 2017, notre gouvernement s’engage en faveur de la formation permanente pour que le prochain emploi soit aussi un meilleur emploi.
L’engagement en faveur de la formation continue présenté dans le budget de 2017 nous offre une autre parfaite occasion de travailler ensemble. Vous avez entendu mon histoire; vous savez que c’est un sujet qui m’interpelle. Il est évident que je n’ai pas à vous dire pourquoi il est essentiel que vos institutions soient le premier choix de ceux qui retournent à l’école. J’entends toujours dire que les gens se sentent à l’aise dans les collèges. Ils n’ont pas peur de poser des questions difficiles. De fait, certaines des questions les plus difficiles auxquelles j’ai répondu m’ont été posées lors d’événements organisés au Collège Confederation. Je crois que c’est parce que les gens se sentent les bienvenus dans une telle ambiance. Je défends ardemment le soutien aux adultes, car je crois qu’il transforme les générations.
C’est un fait : les milieux de travail changent. Il est plus important que jamais que les travailleurs et les établissements puissent suivre ce changement. Les adultes qui veulent se perfectionner affrontent des obstacles uniques. J’en ai mentionnés certains lorsque je vous ai parlé de mon propre perfectionnement. Ces obstacles sont nombreux. Certains sont visibles, tels que les enfants, la pauvreté et la consommation de temps. Mais il y en a d’autres qu’on ne peut pas voir. Les apprenants plus âgés doivent souvent s’occuper non pas uniquement de leurs enfants, mais également de leurs parents. S’ils étudient à temps plein ou à temps partiel, de la souplesse et du soutien pour traverser l’horaire qu’ils auront en retournant à l’école sont parmi les choses que nous pouvons offrir qui aideront le plus.
C’est là la raison pour laquelle nous voulons aider les adultes qui retournent en classe à améliorer leurs chances et celles de leurs enfants. Nous accroissons l’admissibilité aux prêts et bourses canadiens pour étudiants pour les personnes qui étudient à temps partiel, une mesure qui aidera 23 000 étudiants de plus à retourner à l’école chaque année. Cette mesure sera particulièrement utile pour les femmes, qui représentent plus de 60 % des bénéficiaires de prêts étudiants à temps partiel. Nous savons également que les femmes affrontent des obstacles supplémentaires quand il s’agit d’accéder à l’éducation; obstacles prenant généralement l’apparence de soins aux enfants. Pour cela, nous accroissons également l’accessibilité aux bourses canadiennes pour les étudiants qui ont des enfants. Nous nous attendons à ce que près de quatre étudiants avec enfants sur cinq qui reçoivent des bourses soient des femmes. Cette mesure aidera les étudiants à assumer les frais des soins aux enfants et les autres dépenses connexes, qui peuvent nuire à la poursuite d’études postsecondaires.
Nous mettrons en œuvre un projet pilote d’une durée de trois ans, qui permettra de tester encore plus d’approches visant à faciliter l’admissibilité des adultes aux prêts et bourses canadiens pour étudiants.
La dernière chose que nous souhaitons, c’est voir quelqu’un renoncer aux études postsecondaires par manque de moyens.
Alors que je travaillais à la santé publique, j’ai eu vent d’un programme que beaucoup d’entre vous connaissent : Passeport pour ma réussite. J’ai appris, notamment, que la peur de l’endettement peut à elle seule faire renoncer aux études. Nous voulons être certains que les gens savent qu’ils ont une voie d’accès et qu’ils pourront gérer leur dette. C’est pourquoi nous attendons qu’ils aient au moins 25 000 $ avant de commencer à rembourser. Tout ceci a pour but de réduire cette peur de l’endettement. Car nous avons tous, surtout les personnes pauvres, une crainte justifiée de l’endettement. Et je parle d’expérience.
Notre gouvernement permet à un plus grand nombre de Canadiens à la recherche d’un emploi de retourner aux études afin de recevoir la formation nécessaire, sans craindre de perdre les prestations d’assurance-emploi dont ils ont besoin pour subvenir à leurs besoins et à ceux de leur famille. Il n’est pas logique de ne pas pouvoir toucher ses prestations d’assurance-emploi lorsqu’on retourne à l’école dans le but d’augmenter ses possibilités d’emploi. C’est pourquoi nous changeons tout cela.
Nous élargissons la portée de nos accords de transfert relatifs au marché du travail aux provinces, afin d’aider les familles canadiennes lorsqu’elles en ont le plus besoin, et ce, au moyen de services d’aide pour la recherche d’emploi et de formation pendant les périodes de chômage.
Nous examinons aussi tous les programmes fédéraux à l’intention des étudiants autochtones afin de nous assurer qu’ils appuient l’achèvement des études postsecondaires; ce travail se fera en collaboration avec des partenaires autochtones.
Ceci m’amène à parler de réconciliation. Je l’ai souvent répété : c’est un gros projet. Un gros projet que le gouvernement ne peut pas mener à bien seul. Nous avons besoin de tous nos partenaires. Nous sommes convaincus qu’un des éléments clés de la réconciliation réside dans l’égalité. L’une n’est pas possible sans l’autre. Il faut l’égalité sur le plan des chances, du financement et de l’accès. C’est essentiel. Je peux également vous dire que le chemin vers la réconciliation est inégal et semé d’embûches. Nous devrons compter les uns sur les autres pour réussir. Plus encore, je crois que nous devrons entretenir une communication constante avec nos partenaires autochtones et discuter de leurs besoins, plutôt que d’opter pour une conception unilatérale comme par le passé. Voilà le genre de travail que nous accomplirons avec les Peuples autochtones.
Nombre d’entre vous jouent déjà un rôle clé quand il s’agit de recruter les jeunes Autochtones et de les soutenir dans l’obtention de leurs diplômes et de leurs certificats. Je sais, par exemple, que le Collège Confederation fait un travail extraordinaire pour égaliser l’accès. Pas uniquement en ce qui concerne le nombre d’étudiants autochtones, mais également la possibilité pour eux de poursuivre leurs études dans leur propre collectivité. Je crois que c’est primordial. Merci à tous pour vos efforts soutenus.
Une autre chose que nous avons souvent entendue, c’est qu’il faut harmoniser les attentes avec les exigences des employeurs. Les employeurs veulent des diplômés prêts pour le travail, armés des compétences nécessaires. Nous recueillons également les commentaires des jeunes, qui disent avoir obtenu un diplôme dans un domaine spécialisé, mais qui n’ont aucun moyen d’acquérir de l’expérience dans leur domaine. Nous pensons qu’il est très important que les étudiants aient une expérience pratique qui contrebalance la théorie. L’avantage évident d’une telle chose pour les employeurs, c’est la capacité de ces étudiants d’appliquer leurs connaissances de façon pratique. En plus, cela leur permet d’acquérir des compétences générales, telles que comment travailler dans un bureau, collaborer avec les collègues, rendre des comptes à son gestionnaire, se perfectionner et gérer un conflit sur le lieu de travail. Nous ne pensons pas ces compétences comme étant essentielles, et pourtant, elles le sont. Elles peuvent également être très difficiles à développer dans un milieu académique.
Résultat, nous accroissons l’accès à l’apprentissage intégré en milieu de travail en offrant aux entreprises des subventions salariales et en soutenant leurs partenariats avec des institutions comme les vôtres. Notre but : nous assurer que les programmes coop et les possibilités offertes aux étudiants correspondent à vos programmes. Nous pensons qu’il est indispensable que les étudiants acquièrent une expérience pratique des compétences générales. Les diplômés auront ainsi une éducation plus complète et l’expérience que les employeurs recherchent, ce qui augmentera leurs chances de trouver un bon emploi.
Nous savons que vous avez besoin de données solides et de renseignements, afin de prendre des décisions éclairées et d’harmoniser les formations avec le marché du travail. Vous serez donc heureux d’apprendre que nous collaborons étroitement avec les provinces et les territoires pour améliorer les données auxquelles vous avez accès.
Vous avez entendu notre gouvernement; nous croyons en des décisions fondées sur des faits. Sans eux, prendre de bonnes décisions est très dur. Nous investissons et collaborons avec des partenaires pour nous assurer que nous recueillons les données qui nous aideront tous à prendre de bonnes décisions.
Investir dans les gens est, selon moi, la meilleure des mises de fonds. Elle rapporte gros et les gens qui sont mieux éduqués et formés sont plus heureux. De fait, une classe moyenne forte signifie que les gens ont l’espoir d’un avenir meilleur pour eux-mêmes et leurs enfants, et que la trame de notre société est plus solide.
Vous avez entendu notre discours sur la classe moyenne. Je la crois importante pour la cohésion sociale et la stabilité de notre pays. Grâce à elle, les gens ont de l’espoir, et ils se sentent productifs et valorisés.
Mon oncle disait qu’il n’y a rien de pire qu’une vie dénuée de but. Nous avons tous besoin de nous sentir utiles et je crois que c’est ce que permettent les collèges et les universités. Grâce à eux, peu importe le sentier emprunté, nous avons tous de la valeur.
Je tiens à tous vous remercier pour tout le travail que vous faites.
Merci d’avoir pris le temps de m’écouter aujourd’hui.
Je suis impatiente d’entreprendre cette aventure avec vous. Merci beaucoup.
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