Parlons des Compétences futures, une série de baladodiffusions

La série de baladodiffusions Compétences futures explore l'impact de la technologie, des nouveaux modèles commerciaux, du changement climatique, de la pandémie de COVID-19 et d'autres facteurs sur les tendances de la main-d'œuvre et les compétences émergentes en demande. Écoutez les membres du Conseil des Compétences futures et les invités partager les moyens d'agir pour aider les Canadiens à se former et à développer les compétences dont ils ont besoin pour réussir et soutenir la croissance des entreprises aujourd'hui et demain. Les discussions portent sur les priorités et les domaines d'action pour aider à construire une main-d'œuvre qualifiée, agile et inclusive.

Let's talk future skills

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Les épisodes de balados publiés sont des versions éditées des conversations enregistrées.
Le mandat des membres du Conseil a pris fin le 30 juin 2021.

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Épisode 1 : Qu’est-ce que Compétences futures

Partie 1 : Pourquoi Compétences futures est important

Rachel Wernick, Sous-ministre adjointe principale de la Direction générale des compétences et de l'emploi à Emploi et Développement Social Canada et Noel Baldwin, Directeur des Affaires publiques et gouvernementales du Centre des Compétences futures, nous expliquent ce qu’est Compétences futures et pourquoi le développement des compétences est essentiel dans un contexte de changements rapides accélérés par la pandémie de COVID-19. Ils parlent des rôles du Conseil des Compétences futures et du Centre des Compétences futures et comment ils travaillent ensemble.

Durée : 10:46 minutes

Transcription de Pourquoi Compétences futures est important

Rachel Wernick

Je pense qu’une action concertée est nécessaire. Il y a aucune organisation ou institution qui a toutes les solutions. Je pense que durant la pandémie, nous avons vu à quel point tous les secteurs se sont ralliés et ont travaillé ensemble pour le bien commun et c’est ce qu’on doit continuer à faire quand on parle des compétences futures et d’une nation axée sur l’apprentissage.

Isabelle Drouin (animatrice)

Bonjour et bienvenue à la série de balados sur les compétences futures. Je suis votre animatrice, Isabelle Drouin. Étant donné le bouleversement social et économique des 12 derniers mois, y compris la perte d’emploi et l’évolution de l’économie post pandémique, il est plus important que jamais de remédier aux pénuries actuelles et futures de la main-d’œuvre au Canada. Ainsi, le Conseil des compétences futures et le Centre des compétences futures travaillent sur un plan d’action pour y répondre. Dans l’épisode d’aujourd’hui, nous discutons avec Rachel Wernick, membre du Conseil des Compétences futures et sous-ministre adjointe principale de la Direction générale des compétences et de l’emploi, d’Emploi et Développement social Canada (EDSC) ainsi qu’avec Noel Baldwin, directeur des affaires gouvernementales et publiques au Centre des compétences futures. Ensemble, ils nous expliquent ce que nous entendons par compétences futures et ce que cela signifie pour vous.

Rachel Wernick

Je suis sous-ministre adjointe principale de la Direction générale des compétences et de l’emploi avec le ministère qui s’appelle Emploi et Développement social Canada. Dans ma position, je m’occupe de tout ce qui est programme lié au marché du travail. C’est très varié. Ça varie entre les programmes pour les jeunes, l’assurance-emploi jusqu’aux informations sur le marché du travail. J’adore mon travail, c’est très vaste et comme membre du conseil, moi, j’ai été là pour donner un peu la perspective du travail que fait le gouvernement fédéral dans ces domaines.

Noel Baldwin

Alors là, moi je suis directeur des affaires gouvernementales et publiques, et alors, je mène nos relations avec le gouvernement fédéral, étant donné Emploi et Développement social, mais aussi d’autres départements qui ont des enjeux dans le domaine de compétences, mais aussi les treize provinces et territoires qui eux sont de grands acteurs dans le domaine. Le Centre de compétences futures, c’est une partie de l’initiative de Compétences futures. Notre mandat, c’est de tester, expérimenter avec différents initiatives et projets essayant de trouver des façons novatrices et efficaces de développer les compétences des Canadiens tout autour du pays avec un mandat en particulier pour des populations qui sont historiquement peut-être trouvent des barrières à l’éducation ou l’entraînement, tout en essayant de savoir quelles sont les meilleures pratiques ou les pratiques innovatrices qui pourraient supporter les Canadiens à naviguer les changements qui s’en vient dans l'économie et la société.

Isabelle Drouin (animatrice)

Rachel et Noel nous parle maintenant de ce qu’est le Conseil et le Centre des compétences futures et comment ils se complètent.

Rachel Wernick

C’est 2 initiatives distinctes, mais très complémentaires. Le Conseil des compétences futures est un groupe consultatif ministériel qui rassemble des représentants de tous les secteurs et qui travaillent ensemble pour déterminer des priorités, des recommandations qui vont encourager l’action à travers le pays. Le Centre des compétences futures est un centre d’innovation et de recherche appliquée indépendant. Il explore, développe et une mesure l’efficacité des approches novatrices en développement des compétences. Alors, c’est le Centre, si tu veux, qui va prendre en considération le rapport du conseil, ces recommandations et ses analyses pour informer son plan stratégique sur lequel il travaille et qui vont faire la recherche et les évaluations des approches. Ça leur permettre, le Centre, de prendre avantage d’une grande consultation que le conseil a faite et des perspectives très diverses de tous les représentants parce que là, le conseil est très divers en termes de gens qui sont sur le terrain, des académiques, les syndicats, les employeurs. C’est très divers, de toutes les perspectives. Et ça va aider à informer des décisions, non seulement du gouvernement et du Centre, mais on espère de tous les joueurs qui sont impliqués dans tout ce qui est compétences et développement des compétences.

Rachel Wernick

Ce qui est derrière l’initiative, quand ça a commencé, c’était idée de sortir de ce quotidien, puis dévouer une certaine action, réflexion sur le futur. Parce que quand on est en train de faire affaire avec l’immédiat, on a la difficulté à penser plus loin puis Compétences futures est un outil fort pour le Canada. Il permet que tous et chacun travaillent ensemble à trouver des solutions qui répondent aux besoins de la population, mais avec une vision sur le futur. Alors, je pense que c’est très, très important. C’était très important avant la pandémie, mais je dois dire qu’avec la pandémie, ça a mis en valeur encore plus le besoin de prendre du temps pour trouver de nouvelles façons pour s’adapter, parce que ce qui était déjà un changement très rapide est encore plus rapide qu’avant. Alors, je pense qu’on peut profiter du travail du conseil et du Centre pour aider les Canadiens, les employeurs, tous les secteurs à affronter tous les défis qui sont déjà là, mais qui vont continuer dans les prochaines années.

Noel Baldwin

C’est un peu difficile de prédire le futur, mais comme l’avait mentionné Rachel et moi, il y a un moment, qu’il y avait des forces qui bouleversaient les économies et sociétés, même avant la pandémie, comme l’adoption des technologies et l’automatisation. Ces choses, ces forces-là sont encore plus fortes maintenant. Là, quand on essaie de visionner un futur, même après la pandémie, on veut faire certain que ce ne soit pas un rétablissement économique où les individus avec les meilleures compétences et l’éducation reviendront encore au niveau d’emploi et le reste de la société va stagner un petit peu. Alors, les efforts dans le domaine de compétences futures ont des bénéfices, je dirais, à court terme et à long terme. Nous avons plusieurs projets qu’on avait mis sur terre pour essayer de tester des idées, des approches novatrices et différentes. Par exemple, dans le domaine de l’immigration, nous avons un projet où on essaie de vraiment comprendre les compétences des gens qui veulent venir au Canada et les mettre dans une position, des emplois où ils vont avoir du succès. Ce qui aurait un effet sur le marché du travail de façon plus efficace, c’est le système d’immigration plus rapidement pouvoir intégrer des gens qui veulent venir au Canada, qui ont déjà des compétences et les effets, si on a du succès, vont vraiment avoir des impacts à court terme et à long terme. Alors, en terme de ce qui arriverait si on ne réagit pas? Je pense que les analyses qui avaient été faites qui ont mené à l’initiative de Compétences futures sont vraiment encore présentes, mais peut-être avec un plus grand accent dans la période de pandémie.

Isabelle Drouin (animatrice)

Restez à l’écoute pour la deuxième partie de l’épisode sur les compétences futures où Rachel et Noel discuteront du Rapport du Conseil des compétences futures, des priorités identifiées et des appels à l’action pour que tous les Canadiens prennent part à une nation axée sur l’apprentissage. Rendez-vous au Canada.ca/competences-futures ou écoutez-nous sur votre application de balados préférée.

Isabelle Drouin (animatrice)

Parlons des compétences futures est une production d’Emploi et Développement social Canada. Toutes les opinions exprimées dans ce balado sont celles de l’individu et non pas nécessairement celles de leur employeur ou d’EDSC. Merci d’avoir écouté, Parlons des compétences futures.

Télécharger (MP3, 24.7 MB) Pourquoi Compétences futures est important

Partie 2 : Le Canada : Une nation axée sur l’apprentissage, un rapport du Conseil des Compétences futures

Rachel Wernick, Sous-ministre adjointe principale de la Direction générale des compétences et de l'emploi à Emploi et Développement Social Canada et Noel Baldwin, Directeur des Affaires publiques et gouvernementales du Centre des Compétences futures nous parlent du rapport du Conseil des Compétences futures et des 5 priorités pour stimuler le changement afin de mieux préparer les Canadiens à l'avenir du travail. Ils discutent de ce que l'on entend par une nation axée sur l’apprentissage et de l'appel à l'action lancé à tous les secteurs pour aider les Canadiens à saisir les nouvelles opportunités. Noel partage également un exemple de projet de collaboration et d’innovation qui a vu le jour pendant la pandémie de COVID-19.

Durée : 17:15 minutes

Transcription de Le Canada : Une nation axée sur l’apprentissage, un rapport du Conseil des Compétences futures

Noel Baldwin :

Pendant que le rétablissement économique se déroule, on devrait aussi vraiment être attentif aux gens qui ont eu de grandes périodes sans emploi, que ceux qui auraient pu être affectés dans le futur, engagement avec le champ de travail.

Isabelle Drouin (animatrice)

Bonjour et bienvenue à la deuxième partie de l’épisode de notre série de balados sur les compétences futures. Je suis votre animatrice, Isabelle Drouin. Nous discutons encore avec Rachel Wernick et Noel Baldwin, mais cette fois-ci, sur le Rapport du conseil des compétences futures. Bonne écoute!

Rachel Wernick

En 2019 et 2020, les membres du conseil ont fait appel à divers intervenants nationaux et internationaux pour rechercher des perspectives sur les différentes façons dont l’innovation et la technologie affectent les collectivités et les personnes. Ils se sont ensuite réunis pour partager ce qu’ils ont entendu. Ils ont recensé des thèmes récurrents qui couvrent les secteurs, la démographie et la géographie, les enjeux pancanadiens, si vous voulez. Comme j’ai dit avant, la force du conseil réside dans sa diversité. Alors, cet engagement, cette analyse reflète les perspectives de plusieurs secteurs, de tous les Canadiens. Et c’est comme ça, la puissance des recommandations. Parce que ça trouve les terrains d’action commune sur lesquels tout le monde s’entend, il est important d’agir.

Rachel Wernick

Je pense que je vais commencer avec les 5 priorités. Alors, le premier c’est, aider les Canadiens à faire des choix éclairés. Ceci parle du fait que les chercheurs d’emploi, les travailleurs et les employeurs, ils ont tous besoin d’outils accessibles, faciles à utiliser, qui fournissent des informations fiables sur les emplois et les compétences et la formation. La deuxième priorité, c’est égalité des chances en matière d’apprentissage permanent. Alors, ceci parle du fait que le Canada doit abolir des obstacles structurels et systémiques qui se dressent devant des groupes d’iniquités. Chacun devrait avoir une chance de réussir en suivant de la formation et en obtenant et conservant un bon emploi. La troisième priorité, c’est le développement des compétences pour favoriser l’autodétermination des peuples autochtones. Les organisations des Premières Nations, des Inuits et des Métis sont les mieux placées pour concevoir et mettre en œuvre des stratégies, des programmes et des services pour leur propre peuple et leur collectivité. Quatrième priorité, c’est : approches nouvelles et innovatrices en matière de développement et de validation des compétences. La main-d’œuvre d’un domaine devrait répondre à des exigences professionnelles qui évoluent rapidement. Alors, les organismes devront se tenir au courant des nouvelles approches de formation pour répondre aux besoins des travailleurs et des employeurs. Et finalement, la cinquième priorité, c’est le développement des compétences pour un avenir durable. À l’ère des technologies émergentes et du changement climatique, le rapport parle du fait que nous devons équiper nos communautés pour le changement, préparer les chercheurs d’emploi aux emplois, rechercher et soutenir les petites et moyennes entreprises qui sont à la base de notre économie. Je pense que la conclusion que je peux souligner, c’est que ça prend tous les secteurs, les secteurs publics, privés, syndicats, organismes à but non lucratif. Tous les secteurs ont un rôle à jouer pour assurer qu’on peut avancer les recommandations et les priorités élaborées dans le rapport. Selon le conseil, une nation axée sur l’apprentissage c’est une nation où l’apprentissage est priorisé tout au long de la vie. C’est nécessaire pour assurer la prospérité de tout le monde et c’est particulièrement essentiel pour assurer la compétitivité du pays dans un contexte de changement rapide et continu.

Noel Baldwin

Premièrement, je dirais que nous sommes très heureux de constater qu’il y a des liens très forts et importants entre les priorités du rapport et les priorités de notre plan stratégique. Et le rapport suit des perspectives identiques aux nôtres en soulignant l’importance de développer des partenariats clés et de construire un réseau d’intervenants de tous les secteurs afin d’identifier et répondre aux besoins des chercheurs d’emploi, des salariés et des employeurs. Alors, je pense que tout cela permettra aux employeurs et responsables de politiques de préparer les prochaines étapes du rétablissement économique et vraiment, d’aider les travailleurs canadiens à devenir encore plus prêts pour l’avenir. Tu sais, comme je l’avais dit, les priorités sont vraiment en ligne avec ce que nous avons identifié aussi. Alors je pense que ce type de consensus là c’est vraiment important, en particulier dans un pays comme le Canada qui est divers avec un système de politiques où les responsabilités se trouvent également au fédéral, dans les provinces et territoires.

Rachel Wernick

Le rapport veut assurer qu’ils ont les outils qui permettent de développer de nouvelles compétences et pour être mis en contact avec des employeurs et des bons emplois. Quand on parle des employeurs au Canada, je pense qu’on parle plus des recommandations liées aux nouvelles formes de formation plus flexibles et adaptées aux besoins du milieu de travail. Aussi, je pense qu’on fait appel aux employeurs de considérer de diverses populations au Canada et comment ils peuvent faire leur part pour enlever les obstacles, des barrières et des discriminations qui jouent contre l’engagement des Canadiens. Alors, je pense qu’il y a un peu pour tout le monde dans le rapport, en termes d’analyse, de recommandations, des actions qui peuvent prendre pour avancer le mieux de tout le monde.

Rachel Wernick

Je pense que c’est réaliste si tous les secteurs comme on dit, tous les joueurs font leur part pour monter un système de formation plus flexible, plus accessible, où il n’y a pas de barrières et y a du soutien adapté aux besoins des diverses personnes et les diverses régions du Canada. Mais je comprends un certain mal à l’aise avec cette terminologie. Je pense que quand on entend ce qui vient à l’esprit, c’est un peu le modèle classique d’être assis dans une chaise dans une salle de classe. Oh mon dieu, je dois retourner à l’école puis être à l’école toute au long de ma vie, quelle horreur! Que derrière cette idée-là, c’est cette idée plus moderne d’apprentissage continu qui peut prendre toutes sortes de formes et qui est très adapté aux besoins des apprenants et que ça peut être vu comme une richesse, une possibilité de continuer à épanouir, si vous voulez, avec de nouvelles façons d’apprendre et d’atteindre des aspirations de carrière qui était avant, peut-être, un peu plus lointain dans notre esprit, mais que de plus en plus on va pouvoir accéder à des postes et des possibilités très intéressantes.

Rachel Wernick

Je pense qu’une une action concertée. Il n’y a aucune organisation ou institution qui a toutes les solutions. Je pense que durant la pandémie, nous avons vu à quel point tous les secteurs se sont ralliés et travaillé ensemble pour le bien commun et c’est ce qu’on doit continuer à faire quand on parle des compétences futures et d’une nation axée sur l’apprentissage.

Noel Baldwin

Comme j’avais mentionné, nous trouvons beaucoup de liens forts entre le rapport et notre travail déjà. En effet, nous avons déjà une cinquantaine de projets sur terre. Un autre couple qui s’en vient dans le printemps. Nous sommes déjà en train de travailler avec tous les provinces et territoires, avec presque tous les secteurs économiques et comme vient de dire Rachel, c’est notre perspective aussi que c’est vraiment un défi collectif. Nous avons établi une communauté de pratique pour rassembler les projets pour pouvoir apprendre ensemble comment ils confrontent leurs défis dans le domaine de compétences. Alors, nous prévoyons aussi que le rapport va informer les directions qui s’en vient. Alors, nous essayons d’être un acteur parmi d’autres qui contribuent à cette réalisation d’un vrai écosystème de développement de compétences où nous pouvons apprendre ensemble ce qui est efficace, ce qui est des pratiques prometteuses et d’utiliser les réseaux d’autres partenaires dans le centre, comme Conference Board of Canada et autres, les autres réseaux du gouvernement, pour vraiment pouvoir informer les directions futures dans le domaine du développement des compétences.

Isabelle Drouin (animatrice)

La collaboration, d’après Rachel et Noel, est une partie essentielle d’une nation axée sur l’apprentissage. Écoutons cet exemple de collaboration et d’innovation qui a vu le jour pendant les changements économiques et sociaux causés par la pandémie de COVID-19.

Noel Baldwin

Bien, il y en a vraiment beaucoup, mais je pense qu’une des initiatives qui est vraiment intéressantes et aussi vraiment importantes dans l’époque de la pandémie c’est un projet dans les 4 provinces atlantiques, qui est axé sur le développement des compétences pour ceux qui travaillent dans le domaine de l’apprentissage des petits enfants. Alors, nous savons que dans chaque province et territoire, les réglementations, l’administration des systèmes d’éducation et de la petite enfance sont différents, mais les provinces atlantiques se sont joint dans un projet mené à l’Université du Nouveau-Brunswick pour examiner ce secteur et les compétences requises pour vraiment être un succès, également pour les centres de la petite enfance, les enseignants de la petite enfance, pour développer une direction pour le futur afin que ce secteur qui est si important qu’on voit vraiment l’importance dans l’époque de pandémie. Moi, je peux dire d’une façon très personnelle l’importance de ce secteur-là avec 2 petits enfants chez moi. Pour faire certain que c’est un secteur qui va évoluer et vraiment répondre aux besoins de ces 4 provinces-là.

Isabelle Drouin (animatrice)

Rachel et Noel nous résument leurs réflexions face aux recommandations du rapport.

Rachel Wernick

Je pense que mon appel à l’action revient au fait que les défis auxquels nous sommes confrontés sont trop complexes pour être résolus par un seul acteur. Ça prend la collaboration de tous, ça prend tous les niveaux de gouvernements, les entreprises, les syndicats, les fournisseurs de formation, les organismes autochtones et les organismes à but non lucratif. On est toute une gamme des joueurs qui doivent se réunir ensemble pour préparer les Canadiens pour l’avenir du travail. Mais je vais finir avec une note positive parce que cela ne m’inquiète pas. J’ai vu une extraordinaire collaboration depuis un an, depuis qu’on travaille pour aider les Canadiens à passer à travers les conditions de la pandémie et ça m’encourage qu’au Canada, on est capable de faire ce travail ensemble pour bâtir un meilleur avenir. Et je pense que les recommandations du rapport du conseil, ça nous donne une bonne carte à suivre pour faire avancer ce travail ensemble.

Noel Baldwin

Mais c’est évident que même avant la pandémie et certainement pendant l’époque de la pandémie, on voit que certains secteurs ont été plus frappés. Mais néanmoins, d’autres ont vraiment eu de plus grands succès et on doit également soutenir des 2 différentes perspectives. Pendant que le rétablissement économique se déroule, on devrait aussi vraiment être attentif aux gens qui ont eu de grandes périodes sans emploi, que ceux qui auraient pu être affectés dans le futur, engagement avec le champ de travail. C’est peut-être un domaine qu’on devrait mettre encore plus l’accent pour faire certains que ces gens-là vont avoir la chance de bénéficier aussi du rétablissement économique.

Isabelle Drouin (animatrice)

Parlons des compétences futures est une production d’Emploi et Développement social Canada. Toutes les opinions exprimées dans ce balado sont celles de l’individu et non pas nécessairement celles de leur employeur ou d’EDSC. Veuillez vous abonner à notre série de balados et cliquez sur l’onglet de notification pour savoir quand le prochain épisode sera disponible. Merci d’avoir écouté Parlons des compétences futures.

Télécharger (MP3, 39.5 MB) Le Canada : Une nation axée sur l’apprentissage, un rapport du Conseil des Compétences futures

Épisode 2 : Aider les Canadiens à faire des choix éclairés en matière d'apprentissage et de travail

Audio disponible en anglais seulement

David Ticoll, membre du Conseil des Compétences futures et président du Groupe consultatif pancanadien des intervenants du Conseil de l’information sur le marché du travail, et Steven Tobin, directeur général du Conseil de l’information sur le marché du travail, s’associent pour examiner l’importance de disposer d’une bonne information sur le marché du travail pour faire des choix éclairés en matière de développement des compétences et de formation professionnelle. Ils expliquent également l’importance des compétences pour trouver un emploi et réussir.

Durée : 21:40 minutes

Transcription de Aider les Canadiens à faire des choix éclairés en matière d'apprentissage et de travail

Steven

De nombreux Canadiens éprouvent actuellement des difficultés, d’une forme ou autre, à trouver leur prochain emploi. Ou même, comment puis-je trouver mon premier emploi. De quels renseignements ai-je besoin pour prendre une décision éclairée qui produira un résultat positif?

Jamie

Bonjour et bienvenue à notre série de balados sur les Compétences futures. Je suis votre hôte, Jamie Nordstrand. Compte tenu des bouleversements que nous avons tous connus depuis le début de 2020, y compris la perte d’emplois et l’évolution de l’économie postpandémique, il est plus important que jamais pour la population active du Canada de saisir les occasions aujourd’hui et demain. Dans le balado d’aujourd’hui, nous entendrons David Ticoll, membre du Conseil des Compétences futures, et Steven Tobin, directeur général du Conseil de l’information sur le marché du travail. Ensemble, ils discuteront de l’importance de l’information opportune, pertinente et accessible sur le marché du travail pour aider les Canadiens à prendre des décisions éclairées sur les emplois, les compétences et la formation – des éléments clés pour bâtir une nation axée sur l’apprentissage.

David

Bonjour, je m’appelle David Ticoll. Je suis très heureux d’être ici avec mon collègue de longue date, Steven Tobin. Aujourd’hui, nous examinerons une partie du rapport du Conseil des Compétences futures qui vise à aider les Canadiens à faire des décisions éclairées au sujet des emplois et des compétences. Au cours de notre discussion, Steven et moi allons nous concentrer sur un sujet important, bien qu’assez spécialisé. Il s’agit de l’information sur le marché du travail.

Avant d’entrer dans le détail, nous voulons vous en dire un peu plus sur nous-mêmes et notre rôle dans tout cela. Au Conseil des Compétences futures, je représente les enjeux liés à l’information sur le marché du travail à titre de président du groupe consultatif pancanadien des intervenants au Conseil de l’information sur le marché du travail. Steven est directeur général du Conseil de l’information sur le marché du travail et il a participé à des réunions du Conseil des Compétences futures comme observateur invité. Il en sait donc beaucoup sur nos activités.

Steven

Merci, David. Je suis heureux de vous parler aujourd’hui à ce sujet, qui représente à mon avis un enjeu crucial. Eh bien, David et moi avons des discussions, des débats et des conversations sur cet enjeu depuis au moins 3 ans maintenant. Le temps est donc venu d’enregistrer l’une de nos nombreuses conversations. Donc, merci. Je vous remercie beaucoup d’avoir organisé ceci aujourd’hui.

Vous savez, pour nous, l’information sur le marché du travail, c’est tout ce qui concerne les données tirées de cette information – qu’elles soient quantitatives ou qualitatives – qui peuvent être utilisées pour aider les Canadiens à faire de meilleurs choix concernant leur carrière, leur formation, leur éducation ou leur programme études. Ils peuvent se demander où faire des études. Donc, c’est une question générale qui comprend, à mon avis, les éléments habituels auxquels nous pensons, comme les salaires, les compétences – qui sont en quelque sorte le thème central de notre conversation d’aujourd’hui –, mais aussi des aspects comme le coût de la vie, n’est ce pas? Combien est-ce qu’il m’en coûtera pour vivre ou étudier à l’endroit de mon choix? C’est donc une approche globale ou, à vrai dire, une façon de prendre des décisions éclairées en milieu de travail.

David

Donc, vous dirigez l’organisme appelé le Conseil de l’information sur le marché du travail ou CIMT. Qu’est ce que cet organisme au juste?

Steven

Cet organisme était à l’origine une idée qui a été proposée par le Forum des ministres du marché du travail. Donc essentiellement, le conseil d’administration du CIMT se compose de hauts fonctionnaires de partout au pays. Il y a des membres de chaque province et territoire, d’Emploi et Développement social Canada ainsi que de Statistique Canada. Je dirais que l’organisme se situe en quelque sorte à la croisée de 2 mondes, mais qu’il est axé sur le secteur privé. Nous sommes un petit organisme. Un petit organisme souple qui réagit très rapidement, mais qui agit néanmoins dans l’intérêt public. Je crois que c’est en quelque sorte le milieu dans lequel nous évoluons, tout en reconnaissant qu’il y a évidemment de nombreuses différentes entités qui s’impliquent dans ce milieu.

David

Maintenant, Steven, parlons un peu plus de l’information sur le marché du travail. Pourquoi est-ce si important? Et, en même temps, pourquoi n’est ce pas évident pour beaucoup de gens?

Steven

Avant d’en parler, je pense qu’il faudrait s’arrêter à ce qui se passe aujourd’hui, non? En mars et avril de l’an dernier, 3 millions de Canadiens ont perdu leur emploi en très peu de temps. Bon nombre de ces emplois se sont depuis rétablis. Mais il est important de mentionner que ces emplois n’ont pas nécessairement été comblés par les personnes qui avaient perdu leur emploi au départ, n’est-ce pas? Beaucoup de Canadiens éprouvent des difficultés aujourd’hui et, d’une façon ou d’une autre, auront toujours de la difficulté à comprendre ce qu’ils doivent faire pour trouver leur prochain emploi. Ou même, comment puis-je trouver mon premier emploi. De quels renseignements ai-je besoin pour prendre cette décision? Quelle décision devrais je prendre pour produire un résultat positif?

Vous savez, les personnes disposent d’un certain ensemble de renseignements et ont différents points de vue à propos de la formation qu’elles sont prêtes à suivre. Mais les employeurs disposent d’un différent ensemble de renseignements et, bien souvent, les décisions ne sont pas du tout fondées sur la même information. Donc, lorsque je pense à l’information sur le marché du travail, je crois qu’il est vraiment important de parler de la même chose. L’information doit être accessible aux 2 parties ou, à mon avis, également aux fournisseurs de services de formation. Je pense donc que c’est un enjeu fondamental dont il faut tenir compte pour que tous les Canadiens aient l’information nécessaire pour prendre ces décisions difficiles, qui sont de plus en plus complexes en période de pandémie.

Cela nous ramène directement au thème dont nous discutons aujourd’hui, à savoir les compétences. Vous savez, il est assez évident qu’au cours de la dernière décennie, l’accent est passé des qualifications et des titres de compétences aux compétences. C’était aussi évident pour moi, quand j’ai décidé de quitter l’école secondaire et que je pensais à ce que j’allais faire, qu’avoir un titre de compétences ou un diplôme quelconque était la clé qui ouvrait toutes les portes. Mais cela a évidemment changé depuis, n’est-ce pas? Les qualifications et les titres de compétences continuent d’être essentiels pour le perfectionnement de la main-d’œuvre et la réussite des Canadiens. Mais il est clair que les compétences sont maintenant le nouvel élément indispensable que doivent posséder tous les Canadiens. C’est donc un nouveau virage. Mais extrêmement important tout de même. Je crois que c’est là où il y a un écart dans l’information sur le marché du travail, et c’est probablement le plus important, à savoir un ensemble particulier de compétences et de qualifications que chacun possède. Mais quelles compétences dois-je perfectionner ou quelle formation en recyclage dois-je suivre pour tirer parti d’une nouvelle possibilité? Quelles compétences dois-je posséder pour saisir cette nouvelle occasion? Que pouvons-nous faire pour aider à combler cet écart?

David

C’est en fait un problème double, parce que premièrement, je ne sais même pas comment décrire mes compétences. Certes, je sais peut-être en quoi consistent certaines d’entre elles. Mais si quelqu’un me reçoit dans son bureau et me demande « Quelles sont vos compétences? » Je ne sais pas exactement comment répondre à cette question.

Passons maintenant à la question de savoir pourquoi l’information sur le marché du travail est si importante. Je crois qu’il y a un autre aspect à cette question, c’est à dire que l’information sur le marché du travail est omniprésente. Chaque mois, nous recevons, par exemple, le rapport de Statistique Canada sur les emplois, mais il y a évidemment beaucoup plus d’information sur le marché du travail qui est disponible. Steven, je me demande pourquoi ce sujet semble si bizarre et mystérieux pour la plupart des gens.

Steven

Oui, à vrai dire, il y a 2 choses qui me viennent à l’esprit. Vous savez, par le passé, quand on pensait à quitter l’école secondaire et à son avenir, on se laissait surtout guider par ses passions et ses intérêts. Je crois que, dans la plupart des cas, on ne tenait pas compte de l’information sur le marché du travail. Donc, l’essentiel consiste en partie à comprendre, je crois, le pouvoir de l’information sur le marché du travail et ce qu’elle peut faciliter. D’autre part, je crois qu’il était difficile de trouver une bonne information sur le marché du travail. C’était donc assez facile de ne pas en tenir compte lorsque venait le temps de prendre une décision. À mon avis, il faut mieux informer les gens, leur dire que l’information est un outil puissant quand vient le temps de prendre des décisions à propos du marché du travail et de leur carrière. Mais je crois que pour le faire, il faut aussi faire un meilleur travail pour fournir rapidement aux gens de l’information pertinente afin de les aider à prendre les meilleures décisions possible.

David

D’accord, parlons maintenant du contexte actuel. Qu’est-ce qui nous réussit? Quelles améliorations faut-il apporter?

Steven

Oui, je veux dire que ça commence par là, c’est à dire reconnaître qu’il y a eu une transition des titres de compétences et qualifications vers les compétences à titre d’élément indispensable. Je crois, vous savez, que l’organisme en soi, le Conseil des Compétences futures, témoigne en quelque sorte de ce virage, non? Un changement est survenu et il faut s’adapter. Je crois que nous allons dans le bon sens. À mon avis, le rapport fait de l’excellent travail en énonçant ce qu’il faut faire pour instaurer et promouvoir une culture axée sur l’apprentissage à l’échelle nationale, ce qui comprend l’information sur le marché du travail. Je crois donc que nous sommes sur la bonne voie. Encore une fois, le plus grand défi est celui posé par les compétences. Étant donné que c’est assez récent, il reste des éléments à préciser. Nous en sommes donc aux premières étapes du processus, où il faut, je dirais, améliorer les descriptions de travail dans l’optique des compétences et aussi la façon de décrire ses propres compétences.

David

Oui, je suis d’accord avec tout ça. J’aimerais soulever quelques autres points. Ce qui est également évident, c’est que dans le même emploi ou la même profession, les compétences exigées ne sont pas uniformes, même dans une même profession. Vous savez, différents types d’organismes peuvent avoir des exigences très différentes, que l’on pense à un superviseur dans un petit restaurant de quartier comparé à celui qui travaille dans une grande chaîne de restaurants. Donc, si vous voulez faire un choix de carrière, il s’agit de choses importantes à prendre en considération parce que, d’un point de vue personnel, vous pourriez souhaiter travailler dans un milieu plutôt que dans l’autre.

En deuxième lieu, il y a aussi les définitions et descriptions des professions qui sont habituellement utilisées, par exemple dans les rapports mensuels de Statistique Canada ou le recensement effectué tous les 5 ou 10 ans, et qui conviennent dans la plupart des cas. Mais il y a tellement d’innovation actuellement, que ce soit dans les emplois eux-mêmes ou leurs titres ou les descriptions de travail, que ces définitions et descriptions ne couvrent plus toute la gamme de ce qui existe. On n’a qu’à penser, par exemple, à des domaines émergents comme la cybersécurité ou la bio-informatique ou même les professions médicales, qui ne sont pas traités de façon granulaire. Il n’y a qu’une seule profession médicale recensée dans l’ensemble des données de Statistique Canada. Il y a donc beaucoup plus à faire en ce qui concerne la granularité, tant au niveau des professions que des compétences. La dernière chose, bien sûr, c’est qu’une grande partie de ces données sont publiées avec un certain retard. Leur fréquence laisse à désirer et puis elles ne reflètent pas assez le niveau local.

Steven

Vous avez tout à fait raison, je veux dire, certaines choses doivent être faites en marge. Mais j’estime que la question des compétences représente probablement le plus grand défi. Bien entendu, une fois que nous avons une certaine maîtrise de la situation, cela n’est d’aucune utilité si nous ne sommes pas en mesure de transmettre l’information aux gens d’une manière qui les aide à prendre des décisions éclairées, n’est-ce pas? Nous devons donc faire les 2. Il faut faire les 2.

David

Oui, eh bien, il y a une lumière au bout du tunnel pour ce qui est des défis liés à l’information sur le marché du travail. Essentiellement, pour donner une perspective très générale à ce sujet, il y a l’information traditionnelle sur le marché du travail qui provient en grande partie des enquêtes. Par exemple, lorsque nous recevons le rapport mensuel de Statistique Canada sur les emplois, il est fondé sur ce qu’on appelle l’enquête auprès des ménages. Donc, on interroge les membres des ménages pour savoir où ils travaillent, etc. Puis les données sont compilées et enfin présentées dans un rapport.

Mais il y a autre chose qui se passe et qui se dessine très rapidement. Nous en avons un nombre incalculable de manifestations. Ce phénomène suppose une approche très différente. Cela suppose de traiter de très grands ensembles de données qui ont déjà été établis pour d’autres raisons. Il faut examiner ces données parfois à l’aide de techniques analytiques et statistiques traditionnelles. À d’autres moments, il faut utiliser des techniques plus avancées comme l’apprentissage automatique, l’intelligence artificielle, quel que soit le terme utilisé, qui permettent essentiellement d’arriver à des constatations et à des conclusions qui sont fondées sur de très grands ensembles de données. Certaines de ces données sont analysées en temps réel. Par exemple, les offres d’emploi que les employeurs affichent en ligne ou sur leur site Web ou ailleurs. Il y a un flux continu d’offres d’emploi qui se produit au fil du temps. Puis ces offres d’emploi changent, mais elles donnent au moins la perception qu’a l’employeur de la nature du poste et des compétences que doivent posséder les candidats pour des emplois particuliers. Vous pouvez ensuite additionner ces offres pour obtenir le nombre d’emplois qui sont recherchés, etc. Voilà donc les nouveaux horizons de l’information sur le marché du travail.

Ces 2 méthodes, qu’il s’agisse de l’information traditionnelle sur le marché du travail qui est fondée sur des enquêtes ou de celle qui est tirée de grands ensembles de données, ont toutes 2 leurs forces et leurs limites.

Steven

La raison pour laquelle l’information en temps réel est importante est que les choses évoluent si rapidement sur le marché du travail, plus particulièrement en ce qui concerne les compétences, n’est-ce pas? Nous avons donc vu, au cours de la dernière année, des perturbations majeures sur le marché du travail au Canada. À mon avis, elles n’ont fait qu’accélérer le virage vers les compétences requises dans l’ensemble des secteurs, des emplois et des régions. C’est pourquoi je crois que l’information en temps réel est importante parce qu’on peut obtenir les tout derniers renseignements sur les compétences recherchées. Nous avons besoin de cette information pour aider les gens à passer d’un bon emploi à un meilleur emploi ou du chômage à un nouvel emploi. Voilà pourquoi je crois que c’est important.

Vous savez, on souligne aussi le fait que ces nouveaux grands ensembles de données peuvent être exploités en utilisant de nouvelles techniques, ce qui offre une occasion extraordinaire de réfléchir à la façon de combler l’écart dans l’information sur les compétences sur le marché du travail. La question concerne en quelque sorte le « quoi » et le « comment ». Je crois que le rapport du Conseil des Compétences futures insiste à juste titre sur les compétences, et qu’il faut utiliser des techniques nouvelles et différentes parce que les sources et les approches actuelles ne font plus l’affaire. Ce n’est maintenant qu’une question de passer de la parole à l’acte.

David

D’accord, arrêtons-nous à cette question. Comment passer de la parole à l’acte? Eh bien, j’ai le plaisir d’annoncer que le Conseil de l’information sur le marché du travail franchit un grand pas dans cette direction grâce à un partenariat avec le Centre des Compétences futures, qui est une entité sœur du Conseil des Compétences futures.

Steven

Oui, je veux dire, la mise en place de ce partenariat entre le CIMT et le Centre des Compétences futures fait suite aux réflexions et aux recommandations formulées dans le rapport du Conseil des Compétences futures, selon lesquelles il faut améliorer l’information sur le marché du travail, en particulier en ce qui concerne les compétences. C’est vraiment la raison pour laquelle le partenariat a été créé.

Je crois que l’objectif, en général, semble être de rendre l’information sur le marché du travail plus facilement accessible. Cela signifie qu’il faut combler l’écart dans l’information disponible sur les compétences et veiller à ce qu’elle soit accessible aux Canadiens et à ceux qui les aident pour qu’ils puissent prendre des décisions éclairées.

En pratique, à partir de cela, nous pouvons appliquer certaines de ces nouvelles technologies pour déterminer les compétences et les autres exigences professionnelles liées à ces postes, et leurs différences possibles d’un secteur ou d’une région à l’autre. Il faut aussi réfléchir à de nouvelles façons d’analyser les compétences. Parce que, vous savez, l’approche actuelle est généralement fondée sur la fréquence. Pourtant, nous savons que le nombre de fois qu’une information figure dans une offre d’emploi n’en dénote pas nécessairement l’importance. Donc, à notre avis, cela veut dire s’assurer que toute l’information prédominante sur le marché du travail qui existe aujourd’hui – qu’il s’agisse des salaires ou des emplois – est en quelque sorte organisée d’une manière ciblée pour la personne concernée.

Je dirais que le plus grand défi que nous essayons de relever est de stocker toute cette information dans un référentiel infonuagique et de la rendre accessible, en particulier, à ceux que nous considérons comme les clients principaux, c’est-à-dire ceux qui aident les Canadiens à prendre ces décisions. Cela dit, si on construit un site Web extraordinaire, mais que personne au pays n’a accès à Internet, alors à quoi sert il? N’est ce pas? Donc, nous créons cette banque de données infonuagique relativement sophistiquée, à défaut d’un meilleur mot. Comment les gens y accéderont-ils? Ainsi, une grande partie des fonds du projet seront en quelque sorte affectés au système afin d’encourager la création d’outils et de plateformes numériques pour exploiter le référentiel de données afin de faciliter la prise de décisions. Voilà donc les 3 ou 4 principaux éléments que nous considérons.

David

Je tiens à te dire, Steven, parce que nous en parlons et nous avons eu tous 2 des conversations vraiment sérieuses à ce sujet. Je ne peux pas m’empêcher de dire à quel point c’est excitant. Je veux dire, même si nous avons en quelque sorte avancé lentement dans cette voie pour mettre quelque chose au point, pour parvenir au but, cela fait au moins 2 ans que nous en parlons. Quand nous nous rencontrons, nous discutons effectivement de cette question et nous la communiquons à quiconque y est intéressé à l’extérieur. Je ne peux m’empêcher de croire que nous avons vraiment progressé à propos de quelque chose qui est très important. Je vous remercie donc d’avoir eu cette discussion constructive avec moi et de m’avoir permis de participer à ce processus avec vous.

Steven

Je vous remercie d’avoir pris part à cette initiative. Vous avez raison. C’est vraiment excitant.

David

Eh bien, c’est terminé. Merci beaucoup de nous avoir consacré de votre temps aujourd’hui.

Steven

Très bien. Merci, David.

Jamie

Parlons des Compétences futures est une production d’Emploi et Développement social Canada. Toutes les opinions exprimées dans ce balado sont celles des personnes concernées et ne reflètent pas nécessairement celles de leur employeur ou d’EDSC. Pour en savoir plus sur Compétences futures ou pour lire tout le rapport du Conseil, qui comprend une perspective plus en profondeur sur la priorité portant sur l’accès à une information sur le marché du travail, visitez la page Canada.ca/competences-futures.Assurez-vous de vous abonner à notre série de balados et de cliquer sur l’onglet de notification pour savoir quand le prochain sera diffusé. Merci d’avoir écouté ce balado de Parlons des Compétences futures.

Télécharger (MP3, 19.8 MB) Aider les Canadiens à faire des choix éclairés en matière d'apprentissage et de travail

Épisode 3 : Les compétences fondamentales et transférables nécessaires pour les emplois de demain

Audio disponible en anglais seulement

Sandy MacDonald, membre du Conseil des Compétences futures et PDG du Holland College, Laurie Edwards, Directrice des services auprès des étudiants et de carrières au Nova Scotia Community College et Mack Rogers, directeur exécutif du ABC Life Literacy discutent des compétences fondamentales et transférables qui sont en demande auprès des employeurs. Ils font aussi lumière sur l’importance de savoir quelles compétences correspondent à quels emplois disponibles.

Durée : 32:40 minutes

Transcription du balado Les compétences fondamentales et transférables nécessaires pour les emplois de demain

Laurie Edwards

Sandy, c’est une idée enthousiasmante que de penser que nos employeurs et nos partenaires, dans l’industrie et ailleurs, pourraient nous aider à prodiguer les enseignements de ces programmes. Je sais que ça nécessiterait de réécrire certains cours et de cerner les compétences autrement, de manière à ne pas se focaliser uniquement sur les compétences très techniques.

Jamie Nordstrand (animateur)

Bonjour et bienvenue à notre balado sur les compétences futures. Je suis votre animateur, Jamie Nordstrand. Pendant des années, les avancées technologiques, les changements climatiques et les nouveaux modèles d’affaires transforment les milieux de travail dans le monde entier. La pandémie n’a fait qu’accélérer ces transformations. Employeurs, travailleurs et chercheurs d’emplois évoluent et tirent profit des possibilités qui redéfinissent l’avenir du marché du travail du Canada. Pendant notre balado aujourd’hui, vous entendrez Sandy MacDonald, membre du Conseil des compétences futures, Laurie Edwards, directrice des services aux étudiants et des services d’orientation au Nova Scotia Community College, et Mack Rogers, directeur exécutif à ABC Life Literacy. Ils parleront des compétences que les employeurs recherchent le plus et expliqueront l’importance d’apprendre à jumeler vos compétences à un emploi. C’est un élément essentiel dans l’édification d’une nation.

Sandy McDonald :

Bonjour à tous. Je m’appelle Sandy McDonald et j’appartiens au Conseil des compétences futures depuis 2 ans. Comme la majorité d’entre vous le sait, nous venons de publier un rapport intitulé Le Canada – Une nation axée sur l’apprentissage : Une main-d’œuvre qualifiée et souple, prête à définir l’avenir.

Je veux commencer par vous parler quelque peu de mon parcours. Je suis président et directeur général du Holland College, lequel n’a rien à voir avec les Pays-Bas et est un collègue communautaire de l’Île-du-Prince-Édouard. J’occupe ce poste depuis quelques années. Je suis psychologue de formation, mais j’ai également été sous-ministre et superintendant dans des écoles publiques. Et aujourd’hui, je suis, je dois l’avouer, enchanté d’être en aussi bonne compagnie.

Laurie Edwards est directrice des services aux étudiants et des services d’orientation au Nova Scotia Community College, notre institution sœur à Halifax pour toute la Nouvelle-Écosse, et Mack Rogers est directeur exécutif d’ABC Life Literacy, à Toronto, si je ne m’abuse.

Avant d’aller plus loin, je vais d’abord demander à Laurie, puis à Mack, de nous donner une idée globale du travail qu’ils font et de leur vocation.

Laurie Edwards

Super, merci beaucoup Sandy. En effet, je suis directrice des services aux étudiants et des services d’orientation. De ce fait, je chapeaute des activités dans de nombreux domaines, notamment nos services de développement professionnels, nos services d’aide à l’emploi, et nos programmes d’orientation, d’apprentissage en milieu de travail et d’apprentissage coop.

Sandy MacDonald

Et si j’ai bien compris, Laurie, vous couvrez l’intégralité de la Nouvelle-Écosse. Vous opérez plusieurs sites dans les régions rurales et urbaines de la province?

Laurie Edwards

Tout à fait, c’est exact. Le Nova Scotia Community College compte 14 campus, dont un entièrement virtuel, disséminés à travers la province.

Sandy MacDonald

D’accord, c’est très bien. Et vous, Mack? Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur ABC Life Literacy? Je crois savoir que votre organisme est basé à Toronto.

Mack Rogers

Oui, c’est bien cela. Je m’appelle Mack Rogers et je suis directeur exécutif d’ABC Life Literacy. Nous sommes un organisme caritatif national. Notre objectif consiste à sensibiliser les gens et à créer des programmes de développement des compétences, qu’il s’agisse de compétences professionnelles ou autres, comme la littératie financière, la lecture ou l’écriture. Tout ce que nous voulons, c’est amener les gens à se parler, à exercer leurs compétences et à s’améliorer.

Nous déployons beaucoup d’efforts de sensibilisation. Nous rédigeons des produits de marketing et de communications pour nous faire connaître. Nous créons aussi des programmes que nos partenaires, qui sont plus de 600 à travers le pays, mettent ensuite en œuvre. Et tout ce que nous mettons à la disposition des gens est gratuit. Certaines ressources sont en ligne, et si ce n’est pas le cas, nous pouvons les faire parvenir à ceux qui les demandent, parce que la réalité, c’est que nous voulons mettre les gens en contact les uns avec les autres et leur donner le coup de pouce dont ils ont besoin pour apprendre.

Sandy MacDonald

Si nous vous parlons aujourd’hui, c’est pour que nos auditeurs en apprennent plus sur le rapport du Conseil des compétences futures. Nous allons tâcher cependant d’orienter l’essentiel de notre conversation sur les moyens d’aider les Canadiens à prendre des décisions éclairées. Pour commencer, j’aimerais amener la conversation sur le niveau actuel de compétence au Canada et les répercussions que le virus a eues. Et nous pourrions peut-être commencer par vous, Mack. Quels ont été les effets de la pandémie sur votre organisation, sur l’acquisition de compétences? Également, comment pensez-vous que ça va se terminer?

Mack Rogers

L’état actuel des compétences… il faut comprendre que nous avions déjà un problème avant même le début de cette pandémie; il y avait des lacunes au niveau des compétences. Nous avions beaucoup de gens en recherche d’emploi qui n’avait pas les compétences nécessaires, et nous avions beaucoup de postes vacants que nous ne pouvions pas pourvoir, parce que nous ne trouvions pas de gens détenant les compétences requises. C’est un grave problème, et c’est un problème qui perdure depuis au moins aussi longtemps que je travaille à ABC, soit depuis 10 ans. Je crois que c’est en 2010 que Rick Miner a publié un rapport intitulé « People Without Jobs and Jobs Without People » (traduction : Des personnes sans emploi et des emplois sans personne). Alors ce n’est pas quelque chose de nouveau. Ce qui est arrivé à cause de la pandémie, et que nous constatons aujourd’hui, c’est que les plus vulnérables, donc ceux qui ont le moins de compétence en matière de littératie ou qui peinent à acquérir des compétences professionnelles, sont les plus à risque. Pourquoi? Parce que ce sont eux qui occupent des petits boulots. Et le plus souvent, ce sont nos travailleurs de première ligne. Ce sont eux qui, selon l’endroit où ils habitent, perdent leur emploi, puis qui doivent reprendre, puis arrêter le travail au rythme des confinements. Ils sont donc très exposés, et cette situation a de profondes répercussions sur leur état psychologique, sur leurs finances (de toute évidence!), ainsi que sur leur confiance et sur la compréhension qu’ils ont de la priorité qu’ils revêtent aux yeux de leur collectivité. Si vous n’avez pas beaucoup de compétence en matière de littératie, c’est une situation difficile à traverser. Et il n’y a pas que cela. Malheureusement, et j’en suis désolé pour tous les Canadiens, le soutien que nous offrons aux Canadiens qui ont peu de compétences en matière de littératie leur est souvent inaccessible ou difficilement accessible.

Laurie Edwards

Je crois que Mack a mis dans le mille : nos plus vulnérables sont les plus touchés par la pandémie. Et je repense au moment où nous avons commencé à lancer nos programmes pour cet automne, au fait que nombre de nos étudiants autochtones vivant dans des communautés rurales et isolées n’avaient pas assez de bande passante ou d’accès à Internet. Il faut qu’on pense à ça, au fait que du jour au lendemain, nous sommes passés à l’apprentissage en ligne, et que d’innombrables communautés à travers le Canada et énormément de gens n’ont pas d’Internet. Toutes ces personnes sont désormais incapables de poursuivre leurs études. À mes yeux, cette question était l’une des plus importantes et nous devions trouver des moyens d’y répondre avec nos partenaires gouvernementaux.

Une autre question concernait l’accès physique au collège pour aller payer l’équipement et l’ordinateur. Parce que même si l’on a la bande passante, où peut-on aller chercher l’ordinateur? Où peut-on trouver un endroit tranquille? On partage peut-être notre foyer avec 10 autres personnes? À ce moment-là, l’apprentissage en ligne a réellement limité la capacité des gens à interagir.

Sandy MacDonald

Nous sommes nombreux au Canada, je pense, à trouver ça difficile de croire qu’en 2021, il y a des Canadiens qui n’ont pas les compétences littéraires ou mathématiques nécessaires pour réussir un programme postsecondaire. Seriez-vous surpris d’entendre un Canadien vous demander « Quoi, la littératie et la numératie sont encore un problème? »

Mack Rogers

Tout à fait. Ce que je veux dire, c’est que je crois que nous évitons souvent le sujet de la littératie, parce que pour d’innombrables Canadiens, les statistiques n’ont pas de sens. Selon une étude internationale menée auprès d’un large échantillon, 48 % des Canadiens, soit près de la moitié, ont des compétences littéraires inférieures à celles des étudiants du secondaire. Et du côté des mathématiques, c’est plus de 50 % des Canadiens qui n’ont pas de compétences solides. Pour vous mettre en contexte, c’est au point où près de 50 % des Canadiens pourraient ne pas parvenir à lire correctement l’étiquette collée à une bouteille de pilules. C’est donc un problème tangible que nous avons. Cela étant, lorsqu’on en parle, les gens ne vous croient pas. Ils vous disent « Regardez ma famille : nous sommes 5, nous sommes tous d’avides lecteurs et nous sommes tous bons en maths, alors je n’y crois pas. » Mais les chiffres ne mentent pas. Près de 20 % des adultes canadiens ont le plus bas niveau de littératie. Ça veut dire que près d’un Canadien sur 5 éprouve de grandes difficultés. Ils ont le niveau de littératie des élèves du primaire, et ça fait en sorte qu’il est très difficile pour eux d’avoir une vie épanouie.

Laurie Edwards

Oui, quand on pense aux compétences en lecture, en écriture et en mathématiques, il faut les voir comme la colle qui cimentera toute formation éventuelle. On peut suivre tous les cours du monde, mais les notions ne se graveront pas si vous n’avez pas cette colle, ces compétences. C’est ce qui vous aidera à avancer, à progresser. Ce n’est pas donc pas un simple problème de faible niveau de littératie, c’est tellement plus grand.

Sandy MacDonald

C’est intéressant de vous entendre dire ça, Laurie et Mack, parce que juste la semaine dernière, nous avons discuté ici même avec la haute gestion. Nous essayions de déterminer quelle invention nous achèterions si nous avions l’argent nécessaire. Parce que je vous parle à tous les 2, et les mots « bande passante », « technologie », « accès à la technologie », « achat de technologie », « problèmes en matière d’emploi » et « petits boulots » ressortent. Et l’enjeu sous-jacent à tous ces sujets, ce que nous voyons comme le plus gros défi de nos écoles, ce sont les compétences en littératie et en numératie de nos étudiants. C’est le fait que même s’ils choisissent le bon programme, ils n’ont pas les compétences littéraires et mathématiques nécessaires pour réussir.

Et c’est là une bonne façon pour moi d’orienter la conversation vers les compétences essentielles. Je veux m’y attarder un peu, parce que chaque fois que j’entends ce mot, je ris. J’en ai vu pas mal au fil des ans, et vous 2 aussi. Quand j’entends le mot « essentielles », je pense à « compétences essentielles », « compétences non techniques », « compétences professionnelles », « compétences orales », « compétences requises au 21e siècle », et je veux en revenir à votre point, Laurie, à propos de cette colle qui va cimenter toutes les compétences techniques. Nous savons que ces compétences constituent un défi depuis un bon moment, mais en quoi sont-elles si importantes? Pourquoi les Canadiens devraient-ils savoir qu’elles existent?

Laurie Edwards:

Sandy, je commence toujours en disant que ces compétences sont celles qui nous enseignent comment apprendre. J’ai dit qu’elles constituaient le fondement. Quand je rencontre des clients ou des gens qui veulent venir au collège, mais qui n’ont peut-être pas été à l’école depuis une dizaine d’années et qui avaient à l’époque acquis des compétences qu’ils ont fini par perdre faute de les utiliser, je discute avec eux. On parle de leurs compétences personnelles, de ce à quoi ils font appel pour tenir le coup, de leur capacité à bien travailler en équipe. Sont-ils ingénieux? Cherchent-ils à régler les problèmes? Ces acquis personnels sont notre point de départ, puis nous abordons certains des sujets dont nous venons de parler, comme la lecture, l’écriture et les mathématiques.

Ensuite, je m’attarde aux compétences numériques. Quiconque a travaillé ou étudié au cours de la dernière année a dû acquérir d’assez bonnes compétences numériques pour gérer sa vie. Qu’il s’agisse de prendre rendez-vous avec son médecin, de suivre des cours ou d’acheter des produits en ligne. C’est le genre de compétences que je souligne auprès des clients. Ensuite, nous pouvons nous pencher sur ce qu’ils veulent apprendre de plus, et sur la façon dont nous pourrons greffer ces nouvelles compétences à celles qu’ils ont déjà et dont ils ont besoin pour mener la vie dont ils rêvent.

Sandy MacDonald

Ces gens avec lesquels vous travaillez, Laurie, sont-ils surpris quand vous parlez de ces compétences de cette façon? Sont-ils conscients d’avoir ces compétences, ou d’en être dépourvus?

Laurie Edwards:

En général, oui. Je ne sais pas si c’est propre à la côte est, Sandy, mais je suis toujours étonnée de voir à quel point les gens tiennent peu compte des compétences qu’ils détiennent; ils croient que c’est une question de théorie et qu’ils ont appris ce qu’il fallait à l’école, mais ça n’a rien à voir. Tout tourne autour des compétences dont on se sert au quotidien. On commence donc à démonter cette façon de penser et alors, je peux leur demander d’évaluer leur niveau de compréhension en lecture, sur une échelle de 1 à 10. Souvent, ils me diront que ça tourne aux alentours de 5. Et pourtant, quand je leur demande ensuite de lire un paragraphe tiré d’un livre ou d’un document, on se rend compte que c’est beaucoup plus élevé que ce qu’ils pensaient. Ça leur donne confiance et ça nous permet d’envisager de rafraîchir ces compétences et de les aiguiser, car elles sont tellement cruciales pour leur avenir.

Sandy MacDonald

Et vous, Mack, est-ce que c’est le ressenti que vous avez aussi?

Mack Rogers

Oui, je crois que Laurie résume bien la situation. Tout est dans le fondement; ce sont les pierres posées à la base de tous les autres apprentissages. Cela dit, c’est aussi une question de faire interagir ces compétences, à la fois les compétences essentielles et les compétences non techniques qui sont à la base de toutes les compétences professionnelles. Par exemple, prenons une simple transaction financière et pensons aux compétences requises pour obtenir une nouvelle carte de crédit. Le savoir-faire requis de nos jours pour cela est phénoménal. Vous devez comprendre en quoi consistent les taux d’intérêt, trouver les meilleures offres; ça met en jeu les compétences mathématiques. De nos jours, il faut faire cela en ligne, donc il vous faut aussi des compétences numériques. Vous devez également remplir des formulaires, alors vos compétences en lecture et en écriture entrent aussi en ligne de compte. Vous devez avoir suffisamment confiance en vous pour poser des questions. Et à la fin du processus, vous devez avoir les moyens financiers de payer la carte que vous aurez choisie. La confiance en soi est tellement primordiale, ainsi que la capacité à déterminer vos forces et vos faiblesses. Les meilleurs exemples sont les Canadiens ayant un faible niveau de littératie. Leur résilience est tout à fait incroyable. Et ils sont capables d’avoir un tel succès. Ils sont tellement doués, autant dans leur vie professionnelle que personnelle, pour contourner leurs faiblesses. C’est formidable à voir.

Sandy MacDonald

Vous savez, dans une autre vie, j’ai été psychologue au sein du système carcéral, autant au fédéral qu’au provincial et au privé. J’ai rencontré des gens, qui, selon les tests et les livres, avaient très peu de compétences littéraires ou mathématiques. Et pourtant, ils parvenaient à travailler, à survivre et à s’épanouir parce qu’ils trouvaient des moyens de se débrouiller. Et d’après ce que je vois, l’un des éléments qui manque le plus à nos gens, à nos jeunes, et je le vois parce que je travaille avec eux depuis des années, je l’ai vu avec le groupe que j’ai rencontré hier, ce qui leur manque, c’est la solidité mentale. Parvenez-vous à voir cette construction psychologique sous-jacente, la confiance, la résilience ou le manque de solidité mentale? Y êtes-vous souvent confrontés, tous les 2?

Mack Rogers

Oui, je crois que nous pouvons tout à fait le constater dans nos salles de classe. Souvent, les gens qui s’y retrouvent ont réussi à surmonter ce manque de confiance et à revenir en classe. C’est difficile à faire.

Nous espérons que maintenant, grâce à la pandémie, et oui, c’est un peu bizarre à dire, mais il faut voir le bon côté des choses, alors nous espérons que les gens auront accès aux ressources d’apprentissage qui sont mises à leur disposition. ABC a créé un centre des compétences, dont l’objectif est réellement de permettre aux apprenants ayant un faible niveau de littératie de recourir à l’apprentissage en ligne sans s’empêtrer dans les systèmes complexes qui encadrent souvent les lieux d’apprentissage. C’est un système très simple, clair et accessible. Nous espérons que cela permettra aux personnes qui manquaient de la confiance nécessaire pour poursuivre des études de peut-être s’y mettre depuis leur maison.

Laurie Edwards:

Oui, et pour ajouter à ce que dit Mack, l’une des choses que l’on constate dans un environnement virtuel, c’est que parfois, les gens se présentent différemment, de manière à ne pas se sentir honteux d’être en classe, entourés de gens qu’ils considèrent comme plus intelligents qu’eux. Ils écoutent l’enseignant, utilisent d’autres outils et ressources et ont la chance de rester eux-mêmes, sans avoir à se préoccuper de comment les autres les perçoivent.

Sandy MacDonald

Pensez-vous que l’une des conséquences positives du virus a été de permettre à certains de ces apprenants d’être plus à l’aise, confiants et autonomes?

Mack Rogers

Je crois que ça peut aller dans les 2 sens, pour être honnête, Sandy. Je crois que certains deviendront encore plus vulnérables. Je crois qu’avec le bon encadrement, les bons programmes et les bons enseignants, oui, absolument, certains pourront maintenant commencer leur apprentissage. Mais il ne faut pas oublier non plus les apprenants. L’environnement de travail change rapidement. Cela fait déjà quelques années que nous parlons d’automatisation, mais celle-ci s’est accélérée. Combien de gens de votre connaissance utilisent davantage les technologies numériques et l’automatisation pour faire leur travail? On met plus de systèmes en place, qui peuvent s’avérer tout autant d’obstacles. Un travail qui, auparavant, n’aurait peut-être pas requis de compétences numériques ne peut maintenant plus se faire sans cela, à cause de la pandémie. Je crois qu’il faut un équilibre. Je crains que certaines personnes ne soient laissées derrière dans cette situation.

Sandy MacDonald

Laurie, et surtout vous, Mack, avez-vous constaté un effet à double tranchant dans cette pandémie, qui fait en sorte que l’apprenant concentré et motivé réussit encore mieux, et que l’apprenant un peu moins motivé est laissé de côté?

Laurie Edwards

Vous savez, ce que je constate m’a surprise. Comme l’a dit Mack, je crois qu’il y a des points positifs et négatifs, que certains réussiront au-delà de toute attente et que d’autres échoueront. J’ai été très étonnée de constater que certains nos étudiants souffrant de trouble de l’attention adorent l’horaire en ligne, adorent le fait d’être assis devant leur écran et d’interagir avec l’enseignant, parce que ça leur permet d’éviter toutes les distractions.

J’ai toutefois d’autres étudiants très brillants qui détestent cette formule. Ils veulent revenir, ils veulent faire les laboratoires et les travaux de manipulation que nous avions préparés l’an dernier. Je vois donc les 2. Au bout du compte, on en revient toujours à la motivation et aux relations. Je crois que c’est le cas dans toute institution ces temps-ci, mais au collège, nous investissons beaucoup dans notre enseignement et dans nos méthodes d’apprentissage, afin d’aider les étudiants à acquérir les compétences qui leur permettront de mieux interagir en ligne. Ainsi, nous pourrons étendre notre portée, des apprenants les plus réticents aux plus performants. L’essentiel, c’est vraiment de savoir motiver les étudiants et de nouer des relations avec eux.

Sandy MacDonald

J’aimerais changer de sujet un peu, ici, parce que nous sommes tous aux prises avec les mêmes défis. Je voudrais prendre une minute pour discuter des diplômés postsecondaires, des jeunes qui décrochent leur diplôme du secondaire et de ceux qui décrochent les diplômes que nous donnons.

Laurie, Mack, pensez-vous que les jeunes diplômés de nos collèges ont les aptitudes sociales et émotionnelles, de même que les compétences de la vie dont ils ont besoin pour réussir?

Mack Rogers

En toute honnêteté, non. Et ce n’est pas moi qui le dis, je crois qu’il existe quantité de gens extraordinaires, mais les employeurs que l’on a sondés au cours des dernières années disent que non. Les jeunes manquent de certaines compétences importantes dont on ne parle pas suffisamment, dont les aptitudes émotionnelles. Il s’agit de gestion du temps et du stress, de responsabilité, d’aptitudes qui portent souvent le nom de compétences professionnelles. Et je crois que parler de ces compétences est très important, car ça nous donne un langage, un vocabulaire à partager qui permette de comprendre que l’on a quelque chose à travailler. C’est ça, la responsabilisation. Nous avons tous des forces, des faiblesses et des compétences qui nous sont propres. Nos amis de la côte est, l’organisation Future Works, font un travail incroyable pour définir chacune de ces compétences. Ils aident les gens à en parler, à se rendre compte qu’ils ont quelque chose à améliorer et à déterminer comment y parvenir. Ils les aident aussi à cerner leurs points forts, à en être fiers et à s’entourer de gens qui seront heureux pour eux.

Laurie Edwards

Oui, je crois que nos employeurs cherchent à embaucher des étudiants qui pourront apprendre rapidement et facilement. Ils veulent une main-d’œuvre adaptable et agile, capable de suivre des consignes et de travailler en équipe, capable de réfléchir et de trouver des solutions aux problèmes. C’est un peu comique, mais je connais quelqu’un qui embauche des gens de métier. Il sait que je travaille dans un collège, alors il m’a demandé pourquoi on n’enseignait pas à nos jeunes à lâcher leur téléphone. Je lui ai répondu qu’on essayait, mais qu’on se fiait aussi à nos partenaires de l’industrie pour nous aider à décourager ce genre de comportement pendant les stages. Alors il faut trouver le moyen de mettre les compétences du quotidien au service du marché du travail, afin de faire des étudiants des travailleurs productifs.

Sandy MacDonald

Ces compétences sont souvent subtiles, vous le savez. Les aptitudes interpersonnelles, la responsabilisation dont Mack a parlé, et certaines habitudes de travail simples ne sont pas faciles à enseigner, à plus forte raison à évaluer. Et je crois que c’est difficile pour les établissements d’enseignement postsecondaires, les collèges et les universités de se targuer de le faire. Nous avons l’impression, et je crois qu’un autre collège est d’accord jusqu’à un certain point, que ces compétences sont mieux enseignées en partenariat avec l’industrie.

Laurie Edwards

Sandy, c’est une idée enthousiasmante que de penser que nos employeurs et nos partenaires, dans l’industrie et ailleurs, pourraient nous aider à prodiguer les enseignements de ces programmes. Je sais que ça nécessiterait de réécrire certains cours et de cerner les compétences autrement, de manière à ne pas se focaliser uniquement sur les compétences très techniques. Je sais qu’on doit penser au travailleur compétent en adoptant divers angles, et qu’il faut aborder la résolution de problèmes, la communication, la collaboration, le travail d’équipe, la pensée critique, l’innovation et l’ingéniosité. Je crois vraiment que c’est une responsabilité que nos collèges, les universités et nos employeurs partagent.

Sandy MacDonald

Nous avons un bon exemple avec notre programme de techniques ambulancières. Notre processus d’évaluation est bien conçu, il nous permet de prendre en considération l’attitude des ambulanciers envers les patients. Les ambulanciers doivent maîtriser les compétences techniques, mais le processus d’évaluation comporte également des éléments mesurant les aptitudes interpersonnelles comme la capacité à travailler en équipe, parce qu’ils sont toujours 2 dans l’ambulance. Nous avons découvert qu’il est presque impossible d’évaluer et d’enseigner ce genre de choses sans la collaboration de l’industrie concernée. C’est donc une évaluation conjointe, ça ne relève pas strictement du collège. Et nous intégrons cela à nos autres programmes et nous nous rendons compte que c’est de ça que l’industrie a besoin, et que si c’est ce qui permettrait à nos étudiants de véritablement réussir et de s’épanouir, alors nous manquerions à nos devoirs si nous ne l’enseignions pas. Ça signifie que nous devons ajouter des stages en milieu de travail d’environ 6 semaines à la fin de notre programme de 2 ans. Ce serait probablement mieux aussi de les faire travailler plus tôt pour de courtes périodes, et leur offrir un retour constant. Pour l’instant, nous en sommes aux premières étapes, mais il semblerait que ça puisse bien fonctionner, alors je crois que ce serait l’idéal.

Et puisque nous parlons beaucoup d’employeurs et d’employés, y a-t-il des choses que nous pourrions demander au gouvernement de faire différemment, de manière à mieux appuyer l’initiative?

Mack Rogers

Nous avons besoin d’un outil de mesure national, reconnu de tous, afin d’évaluer toutes les compétences jugées nécessaires au succès par les employeurs, les professeurs et les éducateurs. Qu’il s’agisse d’ingéniosité, d’innovation ou de littératie, si nous ne pouvons pas les mesurer, c’est difficile de voir si on réussit. Je crois que le gouvernement pourrait jouer un rôle majeur là-dessus. Et je crois aussi qu’il faut sensibiliser les gens sur l’importance de ces compétences.

Revenez 10 ans en arrière. Notre perspective sur la santé mentale, et même notre façon d’en parler, étaient bien différents d’aujourd’hui, non? Ça ne figurait pas à l’ordre du jour, nous n’en parlions pas autour du repas. Aujourd’hui, c’est une discussion beaucoup plus ouverte. Nous l’avons révélée au grand jour, et ça nous aide à mieux appréhender le monde, surtout avec cette pandémie qui provoque énormément d’anxiété, de tensions, de stress et de changements. Et nous pouvons en parler. Je crois que créer un vocabulaire sur l’acquisition de compétences, sensibiliser les gens à la façon de l’utiliser, c’est un aspect sur lequel le gouvernement, l’industrie et les établissements d’enseignement peuvent travailler de concert.

Laurie Edwards

Oui, nous avons la littératie financière, pourquoi ne pas avoir une littératie plus axée sur le développement professionnel?

Mack Rogers

Exactement.

Sandy MacDonald

Nous savons depuis un moment qu’il y a des écarts dans les niveaux de compétence, mais aussi un grand potentiel. Cela étant, quelque chose nous freine. Mais quoi? Comment expliqueriez-vous à monsieur madame-tout-le-monde pourquoi nous avons si peu progressé en 10 ans?

Laurie Edwards

C’est tellement une grande question, et ça fait partie des conversations que j’incite les familles à avoir à table. Et même avec des invités. Quand le sujet de l’emploi est lancé, vous suggérez à vos convives d’énumérer 10 emplois. Les gens peuvent généralement nommer leur travail, celui de leur conjoint, et quelques autres qu’occupent des personnes qu’ils ont récemment côtoyées, mais arrivés à 10, ils n’ont plus d’idées. Les connaissances sur le monde du travail sont limitées à ce qu’il y a dans notre cercle et dans notre vie. C’est le premier point, il faut que l’information sur les divers emplois soit accessible. De nouveaux métiers sont créés tous les jours. Et souvent, on n’informe pas les gens sur ces nouveaux emplois. Comment peuvent-ils savoir s’ils veulent aller à l’université ou au collège, ou s’ils veulent s’inscrire à des cours sur l’intelligence artificielle ou sur la création Web, s’ils n’en ont jamais fait l’expérience et n’y ont jamais été exposés? Combler ce manque d’information, c’est le premier pas, selon moi. Il faut penser à des moyens de diffuser cette information de manière intelligible et motivante, afin que les gens la lisent, y réfléchissent, en discutent et prennent une décision sur le type de formation qu’ils veulent suivre ou d’emploi qu’ils veulent occuper.

Mack Rogers

Je suis tout à fait d’accord, mais je crois qu’il faut encore davantage jumeler les forces des gens à ce que l’on sait des emplois. Trouver une meilleure façon de faire concorder les 2 langages utilisés pour parler du marché du travail et des compétences. Visualiser une sorte de roue des compétences, et dire, par exemple, « Pour cet emploi en foresterie, j’ai besoin de telle compétence, à tel niveau. Je dois travailler sur mes compétences en communication orale un peu, mais pour le reste, ça va; c’est donc un chemin qui me correspond. » Être capable de s’autoévaluer et d’évaluer les compétences dans le cadre d’une seule conversation, boucler la boucle en une fois, si je peux me permettre la métaphore bancale.

Je crois que tout cela revient à ce que dit Laurie, au fait que les gens ne peuvent pas nommer plus de 10 emplois, ce qui fait en sorte qu’ils ne savent pas vraiment où ils s’en vont. Et souvent, ils finissent par suivre le même chemin que leurs parents ou leurs mentors, et parfois, ça a du bon. Mais il faut aussi faire des choix de carrière et d’intégrer ses compétences professionnelles à sa vie. C’est ce que je crois. Que nous devrions parler des emplois, et non pas de ce que font les autres. Parler de ce que nous pourrions faire et donner aux gens le choix, tout en les informant des ramifications de ces choix. Et cela, nous devrions le faire dès le début, en passant par la famille et l’éducation. Les gens choisiront de se désintéresser des études ou de s’y accrocher, peut-être auront-ils besoin de prendre une pause ou le temps de mûrir, mais ils comprendront les implications de leurs décisions pour leur carrière. Vous ne pouvez décrocher, ou refuser de suivre des cours de maths, pour ensuite espérer devenir architecte. Il est important de saisir ça. Je crois qu’il faut faire correspondre les connaissances aux aspirations, parce que je crois, et ça, c’est peut-être mon côté optimiste, que ce sont les aspirations qui motiveront l’acquisition de compétences.

Laurie Edwards

Il existe des incitatifs intrinsèques, et des incitatifs extrinsèques, par exemple, le fait de vouloir un emploi qui rapportera un salaire tel, contre la paix retirée; la certitude d’être bon dans ce qu’on fait, d’avoir fait quelque chose de sa vie, de savoir où l’on s’en va. Elles sont là, nos aspirations. Et ensuite, il faut les faire concorder avec les informations sur le marché. Il faut découvrir ce qui est offert, ce que ça rapportera, l’endroit où l’on vivra, les compétences dont on fera usage… je crois que nous devons aider les gens à décider.

Je pense notamment aux travailleurs de chez Michelin, et à l’orientation professionnelle que certains ont reçue concernant le genre de vie qu’ils voulaient mener. Plusieurs ont dit que le travail qu’ils faisaient était routinier, que chaque jour était identique au précédent, mais qu’ils savaient également à quelle heure précise leur journée se terminait. Cela leur permettait d’avoir d’autres intérêts, comme leur famille, leurs amis, leur église, leurs groupes communautaires, le bénévolat. Et je crois que cela redéfinit notre façon de parler de carrière. Il n’est plus uniquement question de notre facette professionnelle, mais aussi de nos facettes apprenante, communautaire, familiale. Il faut combiner toutes ces parties de nous. C’est ainsi qu’on se bâtit une carrière, plutôt que de simplement occuper un emploi.

Sandy MacDonald

Malgré nos prémisses initiales, je crois que nous avons eu une belle discussion. Laurie, Mack, je tiens à vous remercier pour le temps accordé. Ce fut très agréable. J’ai bien hâte de vous rencontrer en personne, et je crois que nous vous devons à tous les 2 un bon verre de vin. Si jamais vous venez faire un tour à l’Île-du-Prince-Édouard, je vous amènerai à notre institut culinaire pour un repas gastronomique, cadeau de la maison.

Laurie Edwards

Dès que les frontières s’ouvriront, je vous garantis que je viendrai faire un tour à l’Île-du-Prince-Édouard, Sandy. Je veux profiter de toutes vos attractions touristiques. Et Mack, vous êtes plus que bienvenu si vous voulez vous joindre à nous en septembre.

Mack Rogers

J’ai hâte d’y être et de vous voir. Merci beaucoup.

Sandy MacDonald

Merci encore, j’ai passé un très agréable moment.

Mack Rogers

Merci.

Jamie Nordstrand (animateur)

« Parlons des Compétences futures » est une production d’Emploi et Développement social Canada. Toute opinion exprimée dans le présent balado appartient aux intervenants et ne reflète pas nécessairement celles de leur employeur ou d’EDSC. Pour obtenir de plus amples renseignements sur Compétences futures ou pour lire le rapport intégral du Conseil, lequel inclut une analyse plus détaillée sur les façons d’aider les Canadiens à prendre des décisions éclairées concernant l’acquisition de compétences, visitez Canada.ca/competences-futures. Abonnez-vous à notre balado et cliquez sur l’onglet des notifications pour savoir quand le prochain sera diffusé. Merci d’avoir écouté « Parlons des Compétences futures ».

Télécharger (MP3, 70,3 Mo) Les compétences fondamentales et transférables nécessaires pour les emplois de demain

Épisode 4 : Égalité des chances en matière d’apprentissage permanent

Audio disponible en anglais seulement

Mike Luff, représentant national du Congrès du travail du Canada et Lisa Langevin, directrice de l’équité et de l’engagement au Industry Training Authority, tous deux membres du Conseil des Compétences futures, discutent avec Angella MacEwen, économiste en chef au Syndicat canadien de la fonction publique des initiatives de développement de compétences aidant les personnes sous-représentées et celles qui font face à des obstacles structurels et systémiques à obtenir un emploi. Ils discutent des moyens possibles pour s’assurer que la population canadienne puisse poursuivre leur apprentissage tout au long de la vie.

Durée : 31:34 minutes

Transcription du balado Égalité des chances en matière d’apprentissage permanent

Lisa Langevin

Selon moi, l’une des choses très importantes que toutes les entreprises et organisations doivent commencer à faire, c’est de tourner les projecteurs vers eux-mêmes. C’est de chercher les obstacles systémiques et structurels au sein de leur propre organisation et ensuite, de trouver ceux que doivent surmonter les gens qui tentent de faire appel à eux.

Jamie Nordstrand (animateur)

Bonjour et bienvenue à notre série de balados sur les compétences futures. Je suis votre animateur, Jamie Nordstrand. Depuis des années, les avancées technologiques, les changements climatiques et les nouveaux modèles d’affaires transforment les milieux de travail du monde entier. La pandémie a tout simplement accéléré cette transformation. Les employeurs, les travailleurs et les chercheurs d’emploi évoluent et accueillent à bras ouverts ces fabuleuses possibilités qui redéfinissent l’avenir de la population active canadienne. Pendant le balado d’aujourd’hui, nous écouterons deux membres du Conseil des compétences futures, Mike Luff et Lisa Langevin, ainsi qu’Angella MacEwen, qui est économiste principale pour le Syndicat canadien de la fonction publique. Aujourd’hui, ils discuteront des obstacles qui nuisent à l’emploi et à l’acquisition de compétences au Canada, en se concentrant tout particulièrement sur les moyens d’aider les groupes sous-représentés. Ils se pencheront également sur des moyens de permettre à tous les Canadiens d’apprendre et d’étudier tout au long de leur vie.

Mike Luff

Bonjour à tous, je m’appelle Mike Luff. Je suis membre du

Conseil des compétences futures et représentant du Congrès du travail du Canada, lequel sert 3,3 millions de travailleurs au pays. Je suis heureux d’avoir Lisa Langevin à mes côtés; elle fait elle aussi partie du Conseil des compétences futures et est directrice de l’Équité et de la Mobilisation à l’Industry Training Authority de la Colombie-Britannique. Nous comptons également une invitée spéciale aujourd’hui, Angella MacEwen. Angella est économiste principale pour le Syndicat canadien de la fonction publique, soit le plus grand syndicat au pays. Aujourd’hui, nous discuterons du rapport publié par le Conseil des compétences futures, et plus précisément, de la deuxième priorité qui y est énoncée, soit l’Égalité des chances en matière d’apprentissage permanent. Vous devriez attacher votre ceinture; la discussion d’aujourd’hui portera sur bien des sujets, dont les moyens d’épauler les groupes sous-représentés et d’aider les travailleurs en milieu de carrière à perfectionner leurs compétences. Commençons. Lisa, pourriez-vous nous dire à qui nous faisons référence lorsque nous parlons des groupes sous-représentés? Et ça veut dire quoi lorsque nous disons qu’il leur faut davantage de chances de développer des compétences?

Lisa Langevin

En règle générale, lorsque nous parlons des groupes sous-représentés, nous faisons référence au fait que dans certains secteurs, ceux où l’on tend à trouver de grandes carrières bien rémunérées, il existe des groupes dont les membres sont très peu nombreux. Même au sein des innombrables conseils à travers le Canada, lorsqu’on parle de groupes sous-représentés, on parle des femmes, des Autochtones, des personnes noires ou de couleur, des immigrants, des personnes handicapées et des jeunes. Ceux-ci ont été très fortement touchés par la COVID-19. Et trop souvent, il leur est difficile de travailler dans certains secteurs.

Mike Luff

Quand on y pense, ces groupes étaient déjà sous-représentés sur le marché du travail avant que la pandémie ne frappe. Maintenant que nous nous en relevons et que nous entamons la relance, nous savons qu’ils sont confrontés à des obstacles plus nombreux que jamais. Peut-être, Angella, pourriez-vous nous éclairer un peu à ce sujet. En quoi consistent certains des obstacles systémiques et structurels que doivent affronter ces groupes?

Angella MacEwen

L’un des problèmes récurrents, c’est que les membres de groupes sous-représentés se font offrir des emplois faiblement rémunérés, sans bonne protection. Ça fait en sorte qu’il peut être très difficile, quand vous occupez deux emplois de manière à gagner assez d’argent pour subvenir à vos besoins et à ceux de votre famille, de trouver le temps et les ressources pour retourner aux études, perfectionner vos compétences, trouver un meilleur travail. Parmi les obstacles, citons le manque d’accès à des services de garde d’enfants. Lorsque vous avez de jeunes enfants, ces services peuvent s’avérer très coûteux. Dans un contexte où vous retournez aux études et où vous ne trouvez pas de service de garde abordable, il s’agit effectivement d’un obstacle immense. Si vous n’avez pas de voiture, ou si la couverture offerte par les transports en commun n’est pas adéquate et que cela vous prend une éternité pour vous rendre à l’école de votre choix, alors le transport devient également un obstacle de taille. L’accès à Internet en est un autre, quand vous vivez dans une région rurale ou éloignée, et que même accéder à vos cours en ligne est une épreuve. Nous l’avons constaté pendant la pandémie. Et puis, nous devons penser aux personnes handicapées, pour qui l’apprentissage n’est pas nécessairement donné dans un format accessible. Et s’il n’y avait pas de fichiers audio pour que les gens puissent entendre le texte plutôt que de devoir le lire? Il faut se demander si nous avons vraiment pensé aux divers obstacles auxquels les gens sont confrontés et si nous avons fait les ajustements nécessaires pour leur donner un meilleur accès?

Lisa Langevin

Angella a énuméré certains des gros obstacles, mais il existe certains obstacles systémiques et structurels dont personne ne parle suffisamment, comme le racisme, la misogynie et la discrimination flagrante. On aime à penser que ce genre d’obstacle ne relève pas de chacun d’entre nous, ne dépend pas de notre organisation. On s’en sort en disant que trouver des services de garde, c’est dur, que les difficultés financières sont éprouvantes, et qu’on n’y peut rien. Mais selon moi, l’une des choses très importantes que toutes les entreprises et organisations doivent commencer à faire, c’est de tourner les projecteurs vers eux-mêmes. C’est de chercher les obstacles systémiques et structurels au sein de leur propre organisation et ensuite, de trouver ceux que doivent surmonter les gens qui tentent de faire appel à eux.

Angella MacEwen

Ça, c’est certain. Et ça peut concerner des choses tellement simples. J’ai travaillé dans des industries typiquement masculines, et parfois, il ne s’agit que de l’accès aux toilettes. Il fallait traverser le vestiaire des hommes pour atteindre une petite salle de bain improvisée. D’abord, ce n’est guère accueillant. Ensuite, pendant que vous êtes dans cette salle de bain, vous êtes la cible de taquineries et de moqueries. Même si vous décrochez l’emploi, une fois que vous commencez, dans ce type d’environnement, vous ne risquez pas de rester longtemps.

Mike Luff

Vous avez toutes deux mentionné des obstacles particulièrement importants, la marginalisation, la discrimination et le racisme systémique, ainsi que des obstacles typiquement pratiques, et je sais que vous avez toutes les deux une grande expérience personnelle des emplois et des secteurs à prédominance traditionnellement masculine. L’un des obstacles auxquels je pense souvent, c’est la culture. Pas seulement la culture du seul milieu de travail, mais la culture d’une industrie, d’un secteur tout entier, qui a besoin de changer. Et je me demande, Lisa, Angella, si vous pouviez nous en glisser un mot, nous parler de la nécessité de changer la culture dans certains secteurs et industries.

Lisa Langevin

Absolument, on le constate tout à fait dans les métiers. Comme vous le savez, Mike, je suis une électricienne dans le programme Sceau rouge, et l’on voit ça dans les métiers et dans d’autres industries, comme les technologies. Il est nécessaire de changer la culture même, parce qu’elle exclut certaines personnes. Lorsque j’ai commencé, j’ai été choquée par le racisme flagrant qui était toléré à l’heure des repas.

C’est ce qui me fait dire que vous avez raison, Mike, la culture est l’un des éléments qu’il nous faut changer. En Colombie-Britannique, nous sommes chanceux, nous avons établi un partenariat avec la Ending Violence Association de la Colombie-Britannique et les BC Lions, pour leur programme Be More Than a Bystander (traduction : Soyez davantage qu’un simple spectateur). Nous l’avons modifié pour le secteur de la construction afin de nous attaquer à ces problèmes systémiques profondément ancrés qui sont souvent balayés sous le tapis. Et il est temps de non seulement commencer à en parler, mais aussi de commencer à agir pour les régler.

Mike Luff

Nous savons que la bonne chose à faire, manifestement, c’est d’éliminer ces obstacles et d’accroître le nombre de personnes issues de groupes sous-représentés sur le marché du travail. Je crois que rendre nos milieux de travail et nos économies plus diversifiées et inclusives, c’est aussi la chose la plus intelligente à faire sur le plan économique.

Angella MacEwen

De prime abord, nous savons que les milieux de travail inclusifs ont tendance à mieux performer, car les employeurs recueillent les perspectives des employés diversifiés avec lesquels ils travaillent, ce qui leur permet de mieux répondre aux besoins de leurs clients. Ils sont donc plus performants, parce qu’on y soulève des éléments auxquels on ne songerait pas nécessairement autrement, des questions auxquelles on ne pense pas. Par exemple, si vous n’avez jamais eu à utiliser un fauteuil roulant, vous pourriez ne pas remarquer combien il est difficile d’entrer dans votre bâtiment. Suivant cette logique, vous pourriez être en train d’exclure certains clients parce que vous n’avez pas songé aux difficultés auxquelles ils pourraient être confrontés. Ensuite, il y a beaucoup de personnes handicapées qui ne travaillent pas assez, et qui se sentent donc exclues de la société, et ce, de plusieurs façons. Puis vous avez les personnes racisées, les immigrants récents, les Autochtones et les femmes. Cette situation entraîne des problèmes sociaux autant qu’économiques, et le type de pauvreté et d’exclusion que cela crée est transmis aux générations successives. Au Canada, nous voyons un énorme changement, et ce que nous voyons, c’est que la transmission intergénérationnelle de l’inégalité est en train de s’aggraver. Nous voulons éliminer cela. Nous voulons devenir plus égalitaires, car nous gagnons tous en prospérité lorsque nous avons tous une chance. Le genre d’intervention que nous faisons aujourd’hui est l’une des clés pour y parvenir.

Lisa Langevin

La COVID-19 n’a-t-elle pas justement mis en lumière ce que vous venez de dire, Angella? Nous avons constaté que les personnes qui occupaient les emplois les mieux payés étaient celles qui avaient le moins subi de contrecoup financier, tandis que les gens au salaire le plus faible ont eu tendance à perdre le plus. Ce sont également ceux qui couraient le plus de risques lorsqu’ils se rendaient au travail.

Angella MacEwen

Exactement. Et ce sont également ceux qui étaient les moins protégés du point de vue du travail. Ils avaient le moins de chance de pouvoir toucher des congés de maladie, d’avoir une assurance-médicaments ou des prestations de maladie à travers leur travail. Cette réalité est également transposée dans les possibilités de formation. Voici donc le portrait réel : les personnes qui ont les salaires les plus élevés, le plus haut niveau d’éducation et les meilleurs emplois sont aussi celles qui reçoivent le plus de prestations de formation. Ce que nous devons faire, c’est structurer les programmes afin qu’ils ne profitent pas qu’aux employés de bureau les mieux payés. On veut tous s’améliorer, pas vrai? Alors nous devons réfléchir à des moyens d’éliminer les obstacles systémiques et aider les gens à trouver d’autres emplois, car ils sont sous-payés, et ils n’ont ni horaire stable ni de prestations comme nous. Nous devons tous reconnaître que ces travailleurs devraient gagner plus, être mieux protégés et avoir droit à des chances de décrocher de meilleurs emplois s’ils le souhaitent.

Mike Luff

Je crois que ce genre de discours sur le bien commun doit être pris en compte par le gouvernement. Les gouvernements ont des devoirs intrinsèques. Comme vous le savez, j’ai travaillé avec beaucoup d’adultes qui n’avaient tout simplement pas le niveau de littératie et de compétences essentielles requis pour décrocher un emploi. Une fois qu’ils acquièrent ces compétences et obtiennent un emploi, par contre, ils peuvent s’épanouir, aller au travail et être productifs. Ce qui revient le plus souvent, c’est qu’après ça, ils ont pu s’impliquer davantage en tant que citoyen, autant au travail et dans leur collectivité que dans leur famille. Ils pouvaient maintenant lire des histoires à leurs petits-enfants, entre autres. Je veux dire que nous agissons pour le bien commun, et le gouvernement a dans ce domaine une responsabilité et un rôle encore plus grand, celui de faciliter le développement des compétences pour tous, en particulier les groupes sous-représentés.

Lisa Langevin

Je suis contente que vous mentionniez le développement des compétences. Vous avez parlé d’un aspect très précis, mais le développement des compétences dans son ensemble est un sujet qui me passionne. Je suis convaincue que lorsqu’on parle des groupes sous-représentés dans certains secteurs, c’est un point essentiel. Prenons l’exemple des hôpitaux : les emplois les moins bien rémunérés sont occupés par des personnes racisées, tandis que les postes les mieux payés le sont généralement par des hommes de race blanche. Comment pouvons-nous y remédier? Le plus simple serait de rendre plus accessible l’acquisition de ces compétences générales, qui sont, aux yeux de tous les employeurs, tellement importantes. Citons notamment les cours d’élocution : ils ne sont ni difficiles ni coûteux à monter, mais ils ont des répercussions énormes sur les choix de carrière des gens et sur leurs capacités. Je suis donc d’accord avec Mike. Lorsque nous parlons de développement des compétences, il faut viser large, commencer par la littératie pour ensuite se pencher sur les compétences générales comme la gestion d’employés ou l’élocution, des cours qui devraient être rendus plus accessibles et abordables aux groupes sous-représentés.

Angella MacEwen

Exactement. Je crois qu’il existe beaucoup de préjugés autour de cette question. J’ai grandi dans un milieu rural, nombreux étaient ceux qui devaient quitter l’école tôt pour travailler, s’occuper de la ferme ou prendre soin d’un proche malade. C’est une réalité qui a grandement affecté leur confiance en eux. Je crois que si nous en parlons différemment, si nous parlons des bénéfices que nous retirons tous du développement personnel continu et du fait que ça nous suivra dans tous les aspects de notre vie, pas seulement au travail ou auprès de l’employeur, alors nous pourrions apporter un éclairage positif.

Lisa Langevin

Oui. En Colombie-Britannique, nous avons donné aux femmes dans les métiers l’occasion d’acquérir ces compétences générales. Nous avons appelé cela de la formation en leadership. Ce nom la rend plus accessible et donne aux gens l’envie de s’y inscrire. Lorsque nous avons commencé à donner ces cours, seul un syndicat de métiers comptait une femme. Aujourd’hui, c’est le cas de presque tous les syndicats de métiers. Et toutes ces femmes de métier ont suivi les cours de leadership que nous offrons, et elles accèdent de plus en plus à des postes de direction. Étrangement, ce premier syndicat à compter une femme de métier présente aujourd’hui le pourcentage de femmes de métier le plus élevé en Amérique du Nord. Mais l’important, c’est que nous voyons des gens issus d’un groupe sous-représenté occuper des postes de direction. Nous voyons les groupes sous-représentés prendre de plus en plus de place dans ces milieux de travail, syndicats et organisations. C’est pour ça qu’il est tellement crucial d’enseigner ces compétences de vie, et pas uniquement les compétences de base.

Mike Luff

Exact, je crois effectivement que c’est primordial, et ça m’amène à une autre question, que nous avons déjà abordée un peu. Quelles sont les meilleures solutions pour éliminer certains des obstacles que nous avons mentionnés? Et je nous limite tous à une solution chacun. Accordons-nous une dizaine de secondes pour y réfléchir. Si vous aviez une baguette magique à agiter aujourd’hui pour mettre en place une solution, laquelle ce serait?

Angella MacEwen

Voilà qui est intéressant! Je crois que j’irais avec l’éducation postsecondaire gratuite. Je sais qu’énormément de personnes peuvent souscrire des prêts étudiants, qu’ils mettent ensuite des années et des années à rembourser. Cependant, les frais de scolarité augmentent de plus en plus, et je crois que c’est encore pire pour les gens issus de groupes sous-représentés, car ils sont confrontés à des obstacles supplémentaires. Possible que leur famille n’ait jamais travaillé dans cette industrie avant, qu’ils ne croient pas vraiment que ça va fonctionner, ou qu’ils ignorent comment l’industrie fonctionne et ne peuvent donc pas être réellement certains qu’ils vont décrocher un emploi. Contracter une dette aussi importante pour en quelque sorte parier sur une industrie, je crois que c’est un gros obstacle. Je pense que c’est également ce qui pousse les gens à se limiter à des habiletés précises, parce qu’ils se disent qu’ils peuvent dépenser un peu moins d’argent et avoir une plus grande certitude, sachant qu’il y a un emploi dans ce domaine. Ils choisissent l’option sécurisante plutôt que celle qui leur permettrait d’acquérir le vaste ensemble de compétences nécessaires, mais qui exigerait quatre années d’études en menuiserie ou en électricité, par exemple. Cependant, c’est aussi cette deuxième option qui donne les armes pour suivre l’évolution du milieu de travail. Et je crois que c’est là un sujet sur lequel nous devons nous pencher, qu’il s’agisse d’une simple transition, des changements climatiques ou de l’automatisation. Nous devons penser à ce dont notre société aura besoin à mesure qu’elle change, des besoins qui deviendront encore plus criants. Pensons aux préposés aux services de la personne ou aux assistants dans le domaine de l’éducation, qui sont deux emplois très importants. Nous devrons nous assurer que beaucoup de gens auront les compétences pour s’en acquitter. L’une des façons de faire, c’est d’éliminer les frais de scolarité.

Mike Luff

C’est une excellente suggestion.

Lisa Langevin

Très bonne idée. Quant à moi, je retourne à l’une des premières choses que nous avons dites. L’une des premières recommandations du rapport concerne les données. À l’heure actuelle, un important financement gouvernemental est offert à une vaste gamme de projets et de programmes, ce qui est génial. L’une des mesures du gouvernement du Canada a été de se pencher sur la composition des conseils, par exemple, afin de s’assurer qu’ils étaient représentatifs de la population. Nous savons que 18 % des postes dans les conseils sont occupés par des femmes, et il faut que ça change. Donc si une entreprise présente une proposition pour du financement du Centre des compétences futures ou du PFIMS, intéressons-nous à son conseil. Et si la proposition concerne un groupe sous-représenté, mais que le conseil est constitué uniquement d’hommes de race blanche, alors il faudra se demander si nous voulons vraiment donner de l’argent à un tel groupe.

Mike Luff

C’est effectivement une excellente question, et ça m’amène à la solution que je propose. Je crois qu’en tant que pays, nous devons mieux soutenir financièrement les gens qui travaillent à acquérir des compétences. La principale question qu’ils se posent dans ce temps-là, c’est de savoir qui va payer pour tout ça. Vous savez, la plupart des gens sont enthousiastes à l’idée de perfectionner leurs compétences et de suivre des formations, mais comme Angella et vous l’avez dit, ils n’en ont pas les moyens. Et puis, quand il est question des groupes sous-représentés, nous savons que les gens qui en sont issus occupent un pourcentage disproportionné d’emplois faiblement rémunérés. Nous devons éliminer les obstacles financiers d’entrée de jeu, comme Angella le propose avec la suppression des frais de scolarité. Je suis certain que vous avez toutes les deux déjà rencontré des personnes qui adoreraient perfectionner leurs compétences, mais qui n’en ont pas les moyens.

Lisa Langevin

L’une des choses que j’ai remarquées au fil des ans, c’est qu’avant, il existait beaucoup de programmes qui offraient des cours le soir pour permettre le développement des compétences de base. En Colombie-Britannique, la majorité de ces programmes n’existent plus. Je crois donc que vous avez raison, Mike. Dans les cas précis où les cours de soir accessibles et peu coûteux sont ainsi annulés, la seule solution qui reste est de quitter son emploi pour perfectionner ses compétences, et pour bien des gens, ce n’est pas envisageable. Ils ne peuvent se permettre de perdre leur revenu pour retourner aux études à temps plein. Selon moi, à titre de solution simple, les gouvernements devraient s’assurer d’appuyer et de financer ces cours du soir à travers le pays.

Mike Luff

Oui, je crois que c’est très important, et l’une des choses qui me viennent à l’esprit, c’est la nécessité de créer un congé avec protection de l’emploi afin de suivre des formations. Je crois que les gens ne sont pas nécessairement assez confiants pour dire à leur employeur qu’ils voudraient prendre un mois de congé pour suivre un cours au collège local, ou un cours de trois mois ou une formation pour acquérir une compétence en particulier. Si nous améliorions davantage le soutien au revenu et réduisions les obstacles d’ordre financier, si les gouvernements fédéraux et provinciaux collaboraient pour modifier leurs codes du travail et créer des congés avec protection de l’emploi afin de permettre les formations, ce qui, soit dit en passant, est l’une des principales recommandations formulées dans le rapport du Conseil des compétences futures, alors je crois que ce serait un très bon pas en avant. Les travailleurs s’inscriraient davantage à des formations, car ils sauraient qu’ils y ont droit, et n’hésiteraient plus à dire à leur employeur que cette année, ils utiliseront leur congé de formation pour perfectionner leurs compétences.

Angella MacEwen

C’est plein de sens pour moi. Je crois que très souvent, les employeurs sont conscients de l’avantage que cela présente pour eux que d’avoir des employés intéressés par l’apprentissage permanent. Certains déploient d’ailleurs plus d’efforts à cet égard que d’autres. Mais d’un point de vue global, l’écosystème canadien ne s’en sort pas très bien dans ce domaine. Lorsqu’on se compare à d’autres pays riches, la culture au Canada n’est pas propice à ce genre d’efforts de la part des employeurs.

Mike Luff

Je pense également à une approche sectorielle. On entend souvent des employeurs dire qu’ils ne veulent pas que leurs employés perfectionnent leurs compétences, parce qu’ils craignent de voir leurs employés débauchés. Ils se demandent pourquoi ils devraient investir si c’est le résultat qui les attend, pourquoi ils devraient laisser leurs employés suivre des formations, si c’est pour qu’ils s’en servent pour le compte d’un autre. Cela dit, nous avons vu certains secteurs se mobiliser : par exemple, les secteurs de l’hôtellerie et du tourisme à Toronto se sont unis en tant que secteur d’activités pour répondre aux besoins du marché du travail dans toute la région de Toronto.

Lisa Langevin

Vous savez, j’entends souvent des gens parler d’autres modèles d’apprentissage, notamment celui de l’Allemagne, qui prévoie que les entreprises sont celles qui paient pour les formations. Ça ne dépend ni du gouvernement ni des individus. La décision revient entièrement à l’entreprise. Cependant, dès que l’on parle de donner ce genre de responsabilité aux entreprises, nombreux sont ceux qui ne veulent plus en parler. Je crois que c’est le genre de culture que nous devons instaurer dans le système canadien, nous devons donner une plus grande responsabilité aux entreprises pour assurer la formation de leurs employés. Demander à laisser les gens suivre des formations, c’est, selon moi, le strict minimum.

Angella MacEwen

Je crois que c’est en effet un bon point. Et Mike, vos deux solutions, le congé payé et l’approche sectorielle, permettent de surmonter ce problème, un problème qui, selon les économistes, nécessite la participation de plusieurs acteurs. Si vous êtes seul dans tout un secteur à agir de la bonne façon, alors c’est vous qui assumez tous les coûts, et d’autres profitent gracieusement de vos efforts et en retirent des profits.

Mike Luff

Oui. Lisa a parlé du modèle de l’Allemagne, mais en réalité, il existe un modèle très semblable au Canada, mis en œuvre au Québec. Là-bas, la loi exige de l’employeur qu’il contribue à la formation. Si le nombre de vos employés dépasse un certain seuil, vous êtes tenu de réinvestir 1 ou 2 %, je crois, de votre revenu dans la formation de vos employés. Si vous ne dépassez pas ce seuil, vous devez quand même verser ce pourcentage de votre revenu dans un bassin centralisé, contrôlé par les acteurs du marché du travail. Ce sont eux qui décideront des formations et de qui pourra les suivre. Ce genre de modèle n’existe que dans une seule province, mais je crois que cela vaudrait la peine que les autres provinces s’y intéressent également. Et puis, manifestement, comme l’a dit Lisa, les syndicats, quel que soit l’industrie ou le secteur, public, privé, industriel, ou la construction, ont négocié les contributions que doivent verser les employeurs aux fins de formation. Dans de nombreux cas, les syndicats dirigent maintenant de très impressionnants centres de formation modernes, et ils recrutent des gens issus des groupes sous-représentés pour y suivre des formations. Ces centres sont en contact direct avec les employeurs, qui leur décrivent les besoins actuels du marché du travail.

Lisa Langevin

Oui, et le plus beau là-dedans, c’est que les centres ne sont pas entièrement dirigés par les syndicats ou les employeurs, mais par des comités formés de représentants des deux parties, qui décident ensuite ensemble de ce qui est le mieux pour leur secteur. Les deux contribuent, c’est pour ça que ce modèle est tellement génial.

Mike Luff

Oui. Je crois que ça ne fait que souligner le fait que nous avons besoin d’approches et de modèles plus exhaustifs pour surmonter ces défis. Et je crois que ce que vous décrivez, Lisa, est important, dans le sens où un seul intervenant ne peut résoudre ces problèmes par lui-même. À l’image de ce qui a été fait avec le Conseil des compétences futures, nous devons rassembler les intervenants et favoriser les dialogues, la collaboration et les partenariats. Ça n’aide pas si l’accent, par exemple, est mis uniquement sur le secteur de l’éducation ou sur les employeurs. Comme on dit, nous devons tous ramer dans le même sens, et il faut que ce genre de collaboration se produise plus fréquemment, autant d’un point de vue géographique que sectoriel. Lisa, Angella, un dernier mot sur le thème d’aujourd’hui?

Lisa Langevin

Selon moi, l’un des éléments les plus importants de ce sujet, Mike, c’est l’égalité des chances à l’égard de l’apprentissage permanent. Nous l’avons répété au Conseil : ça ne relève pas du gouvernement. Ça ne relève pas non plus des particuliers. Il faut que tout le monde, syndicats, entreprises, gouvernements, individus et travailleurs, travaille ensemble pour assurer l’égalité. Nous devons nous concentrer sur l’apprentissage permanent, afin que personne ne soit laissé pour compte. Et pour être tout à fait honnête, j’ai senti un regain d’espoir quand on a abordé, dans le budget fédéral, tellement d’enjeux concernant les groupes sous-représentés. Ça reflétait vraiment beaucoup de points soulevés dans notre rapport. J’en ai été très reconnaissante, j’ai eu le sentiment que l’on tenait véritablement compte de notre rapport et de nos recommandations.

Mike Luff

J’ai également beaucoup apprécié, et je suis content que nous finissions notre discussion sur une note positive et sur un appel pour encore plus d’initiatives de la part des acteurs dans ce domaine. Je tiens à remercier Lisa et Angella pour cette formidable conversation. Ça m’a fait grand plaisir de parler avec vous des groupes sous-représentés, des personnes marginalisées, et des travailleurs qui ont besoin de perfectionner leurs compétences. À tous ceux qui nous écoutent, nous vous disons au revoir. Mais je vous en prie, continuez d’en parler.

Jamie Nordstrand (animateur)

« Parlons des compétences futures » est une production d’Emploi et Développement social Canada. Toutes les opinions exprimées dans cette baladodiffusion sont le fait des personnes qui les ont exprimées et ne reflètent pas nécessairement celles de leur employeur ou d’EDSC. Pour obtenir plus d’information sur les Compétences futures ou pour lire le rapport intégral du Conseil, lequel inclut une analyse plus détaillée sur les façons d’aider les Canadiens à prendre des décisions éclairées concernant l’acquisition de compétences, visitez Canada.ca/competences-futures. Abonnez-vous à notre balado et cliquez sur l’onglet des notifications pour savoir quand le prochain sera diffusé. Merci d’avoir écouté « Parlons de compétences futures ».

Télécharger (MP3, 28,9 Mo) Égalité des changes en matière d’apprentissage permanent

Épisode 5 : Développement des compétences pour favoriser l’autodétermination des Autochtones

Audio disponible en anglais seulement

Kerry Smith, directrice principale de la Manitoba Métis Federation et membre du Conseil des Compétences futures discute avec Marisa Bennett Caplette, gestionnaire du Nuu-chah-nulth Employment and Training Program et Lucy Kuptana, directrice des opérations, Culture et communications de la Inuvialuit Regional Corporation de la façon dont l’autodétermination est la clé de la réussite du développement des compétences, de l’apprentissage et de l’emploi pour les Autochtones.

Durée : 25:33 minutes

Transcription du balado Développement des compétences pour favoriser l’autodétermination des Autochtones

Kerry Smith

Le logement, le développement économique, les soins de santé et la formation professionnelle correspondent tout à fait aux priorités de la communauté sur lesquelles nous devons travailler. Mais la véritable autodétermination réside dans la capacité de décider de la manière de combiner ces priorités.

Jamie Nordstrand (hôte)

Bonjour et bienvenue à notre série de balados sur les compétences futures. Je suis votre hôte, Jamie Nordstrand. Depuis des années, les avancées technologiques, les changements climatiques et les nouveaux modèles d’affaires transforment les milieux de travail du monde entier. La pandémie a tout simplement accéléré cette transformation. Les employeurs, les travailleurs et les chercheurs d’emploi évoluent et accueillent à bras ouverts ces fabuleuses possibilités qui redéfinissent l’avenir de la population active canadienne. Aujourd’hui, nous écouterons Kerry Smith, membre du Conseil des compétences futures; Marisa Bennett [Caplette], gestionnaire du programme Nuu-chah-nulth pour l’emploi et la formation; et Lucy Kuptana, directrice des opérations, de la culture et des communications pour l’Inuvialuit Regional Corporation. Elles discuteront de l’incidence qu’ont les principales actions ancrées dans la réconciliation et le respect des droits issus des traités, et du savoir traditionnel sur la création d’un environnement favorable au développement des compétences, à l’apprentissage et à l’emploi des Autochtones, autant d’éléments clés dans l’édification d’une nation axée sur l’apprentissage.

Kerry Smith

Bonjour, je m’appelle Kerry Smith et je suis membre du Conseil des compétences futures. Je suis également la directrice principale du département d’emploi et de formation métis de la Fédération métisse du Manitoba. J’ai eu la très grande chance de travailler pour l’administration métisse au Manitoba pendant plus de 20 ans, et plus précisément, dans le domaine de l’emploi et de la formation. Aujourd’hui, je suis rejointe par Marisa Bennett [Caplette] et Lucy Kuptana afin de discuter de la priorité no 3 du rapport publié par le Conseil des compétences futures, laquelle porte sur l’acquisition de compétences pour favoriser l’autodétermination des Autochtones. Bienvenue, Marisa et Lucy. Et si vous nous parliez un peu de vous? Marisa?

Marisa Bennett Caplette

Merci beaucoup, Kerry. Je m'appelle Marisa Bennett [Caplette], et je suis la gestionnaire du programme Nuu-chah-nulth pour l'emploi et la formation, lequel fait partie du conseil tribal Nuu-chah-nulth, sur la côte ouest de l'Île de Vancouver. Nous gérons actuellement l'entente avec le peuple Nuu-chah-nulth dans le cadre du PFCEA. Je suis très contente d’être ici. Merci.

Lucy Kuptana

Bonjour, je m’appelle Lucy Kuptana, je vis à Inuvik, dans les Territoires du Nord-Ouest. Je suis la directrice des opérations, des communications et de la culture ici, à la Inuvialuit Regional Corporation. Il s’agit de l’organisme local responsable de gérer le PFCEA dans la région désignée des Inuvialuit. Nous sommes situés dans l’ouest de l’Arctique canadien et vivons dans diverses régions : Inuvik, Aklavik, Ulukhaktok, Paulatuk, Sachs Harbour, Tuktoyaktuk. Nous gérons donc le PFCEA pour les Inuvialuit qui vivent ici et travaillons au quotidien avec ceux qui vivent en milieu urbain.

Kerry Smith

Et bien, nous avons donc 3 signataires du PFCEA, je crois que ce sera une discussion passionnante. Avant d’entrer dans le vif du sujet, soit le PFCEA et le rapport sur les compétences futures et une nation axée sur l’apprentissage, parlons un peu de ce qui se produit en ce moment. Nous avons tous vu nos familles et nos communautés souffrir énormément depuis que la pandémie a frappé.

Marisa Bennett Caplette

Vous savez, lorsqu’on observe les conséquences de la pandémie, on se rend compte que les obstacles systémiques et structurels ont toujours été là, malheureusement. La pandémie n’a réellement eu pour effet que d’accroître ces inégalités, ainsi que les impératifs sociaux et les besoins en matière de santé et d’emploi, de tout ramener à la surface. Les nations Nuu-chah-nulth sont au nombre de 14, et je sais que près de 80 % d'entre elles ne sont accessibles que par des chemins forestiers, ou par bateau ou avion. Les services sont donc devenus très limités et difficilement accessibles pendant la pandémie, car dans le but de protéger leurs Aînés et leurs enfants, les nations se sont volontairement confinées, ont instauré des couvre-feux communautaires et renforcé la sécurité. Au final, ça a amplifié toutes ces inégalités.

Lucy Kuptana

Les Autochtones sont réputés pour se visiter, avoir de grands cercles sociaux et parler de tout à n’importe qui. La pandémie a forcé les gens à s’isoler, à rester très proches de leur cercle rapproché uniquement. Cela a profondément affecté leur santé mentale, car ils n’ont pas eu droit aux interactions sociales auxquelles ils sont habitués. C’est encore pire quand on reçoit l’ordre de rester chez soi et qu’on vit dans une communauté isolée de l’Arctique, car la communauté est notre famille. C’est le plus difficile.

Kerry Smith

Nos jeunes ont été durement frappés, mais ils se sont aussi élevés en tant que meneurs. Les jeunes Métis m’ont vraiment impressionnée par leur façon de prendre les choses en main et de promouvoir le respect des consignes de confinement. Et ce, même si être séparés de leurs amis et de leur famille et suivre leurs cours à distance a été mentalement éprouvant. Je sais que nos étudiants postsecondaires ont trouvé dur de faire l’école en ligne, car ils n’avaient pas la bande passante dont ils avaient besoin pour participer à leurs cours.

Lucy Kuptana

Nous avons nous aussi de gros problèmes d’Internet, et apprendre à distance constitue un défi énorme. Nous voulons pouvoir l’offrir, et élargir l’offre, mais c’est un service dur à fournir.

Marisa Bennett Caplette

J’ai noté autre chose pendant la pandémie : l’absence, non pas seulement de l’Internet, mais aussi d’ordinateurs portables et de compétences informatiques. Et maintenant, les besoins sont réels, parce que nous plongeons dans ce monde technologique. Nous devons pouvoir fournir la formation et des ordinateurs portables abordables à nos communautés et assurer l’acquisition de compétences informatiques.

Kerry Smith

Les changements technologiques qui se produisent en ce moment sont si rapides. Si nos jeunes n’atteignent pas le même niveau et ne se voient pas offerts les mêmes possibilités et connaissances que les autres Canadiens, alors ils seront laissés pour compte.

Nous avons tous constaté, avec l’apprentissage à distance, que dans certains cas, nous ne pouvions pas offrir de programmes de correspondance. D’abord, notre entente stipule qu’il faut être étudiant à temps plein, et ensuite, nous avions l’impression que les programmes de correspondance ne faisaient que nuire à certains de nos étudiants. Or, nous sommes en train de changer cette façon de penser. Certains de nos programmes ne sont accessibles qu’à distance, et dans certains cas, nos étudiants s’en sortent bien. Ça nous ouvre les yeux sur le fait que certains de nos étudiants n’ont pas besoin de déménager pour aller à l’école. Peut-être pourrions-nous travailler avec eux afin de mettre en place des mesures de soutien qui leur permettront de réussir leurs études tout en restant chez eux. C’est une manière complètement nouvelle d’envisager la formation pour nos gens.

Marisa Bennett Caplette

Je suis une farouche défenseure de l’idée de ramener les programmes de formation au sein de la communauté, qu’il s’agisse de programmes postsecondaires, de métiers ou même d’acquisition de compétences fondamentales, et de les monter au sein de la communauté. Oui, ça va coûter 3 à 4 fois plus cher que de suivre des cours de l’université locale qui se trouve à 5 heures de route, mais ça permet d’élever cette communauté. On ne change pas uniquement la vie des participants au programme, on change la vie de tous les membres de cette communauté. On leur donne les réseaux et le soutien, et les étudiants ont une meilleure chance de réussir le programme, de décrocher leur diplôme ou leur qualification. Nous devons vraiment commencer à ramener nos programmes dans les communautés et à tirer parti du soutien offert par les Aînés, la nation et les familles.

Lucy Kuptana

Oui, c’est une chose pour laquelle on s’est battus. On s’en est rendu compte, surtout avec les différents paliers de gouvernement et les divers établissements d’enseignement dans le nord, que les possibilités de formation étaient nombreuses, mais que pour cela, par exemple, pour qu’une personne acquière les compétences dont elle a besoin grâce au financement communautaire, et bien, elle devait partir. Pendant 2 mois à la fois, elle devait aller plus au sud et quitter sa famille. Et souvent, ces personnes sont des mères. Alors il y a quelques années, nous avons conçu un programme; les instructeurs et le matériel pour la formation étaient acheminés jusqu’à la communauté, plutôt que dans le sens inverse. Cela permettait à davantage de gens de participer, et ils n’étaient pas obligés d’occuper un emploi pour avoir le droit de s’inscrire, vous pouviez tout de même ajouter des cordes à votre arc pour l’avenir. L’instructeur est donc venu sur place et les familles n’ont pas eu à se séparer, les gens n’ont pas eu à laisser leurs proches derrière. Les parents n’étaient pas inquiets pour leurs enfants, ne se demandaient pas ce qu’ils pouvaient bien faire ce soir-là, s’ils avaient fait leurs devoirs ou bien mangé… vous savez, toutes ces choses qui tendent à préoccuper les parents.

Kerry Smith

J’aime aussi cette idée, cette structure. Je trouve que c’est plus encadrant. C’est une bonne façon pour nous de coopérer avec certains centres de formation, collèges et universités, de manière à mieux comprendre nos communautés et nos gens, et ainsi, nous assurer que les programmes sont taillés pour eux, qu’ils offrent les bonnes mesures de soutien, et qu’on ne recourt pas à la formule universelle.

Marisa Bennett Caplette

Et je crois que cette façon de faire nous éloigne de la conception conjointe de nos programmes avec les universités. En tant qu’Autochtones au Canada, nous dirigeons, concevons et mettons sur pied nos propres programmes, ancrés dans nos valeurs profondes. Ce qui nous permettra de réussir, de permettre à nos collectivités d’acquérir des compétences, c’est de faire en sorte que des Autochtones dirigent, conçoivent et mettent sur pied les programmes.

Kerry Smith

Oui, et c’est là qu’on parle d’autodétermination. C’est beaucoup plus vaste que l’emploi et la formation. Mais je crois que ce dont vous parlez, et que j’aime beaucoup, c’est de donner aux Autochtones les outils et le soutien dont ils ont besoin pour tracer ce chemin et le modeler comme ils le souhaitent. C’est de là que viendra le succès.

Marisa Bennett Caplette

Mettre des Autochtones à la tête de ces programmes, responsables de la conception et de la mise en œuvre de ces programmes au sein même de la communauté, c’est décupler les répercussions sur la communauté. Par exemple, si vous montez un programme de menuiserie dans une communauté éloignée, et bien, les retombées en sont multipliées. Non seulement vous avez des gens formés qui travaillent à temps plein, mais ces personnes peuvent maintenant s’attaquer à la pénurie de logements dans cette même communauté. Elles rénovent des maisons qui abritent peut-être plusieurs familles. Alors les bénéfices sont vraiment exponentiels.

Lucy Kuptana

Ça me fait penser au travail que nous avons fait il y a quelques années, sur lequel nous avions publié un rapport. Cela s’appelait Economics of an Inuvialuit Household (en anglais seulement). Nous avons dépêché quelqu’un sur place pour étudier chaque communauté, observer les façons de vivre, les emplois disponibles et la manière dont les gens subsistaient au quotidien, et découvrir sur quoi reposait leur économie. Est-ce que les gens chassaient pour se nourrir, est-ce qu’ils cultivaient? Dépendaient-ils du soutien des gouvernements fédéral et territorial? Ce rapport a indiqué que 21 emplois professionnels étaient offerts, dont des postes d’infirmiers ou d’enseignants, des emplois au sein de la GRC ou l’administration du hameau, et des opérateurs de machinerie lourde. Tous ces emplois nécessitaient un minimum de formation ou de certification et d’expérience, mais c’étaient de très bons emplois, avec de très bons avantages sociaux, une pension de retraite et un salaire avantageux. Et nous nous demandions alors, imaginez ce que ce serait si ces 21 emplois étaient occupés par des Inuvialuit de la communauté, imaginez sur quoi reposerait l’économie. Tous ces gens, ils vivent là, ils y passent toute leur vie. Cette économie serait bâtie avec eux au sein de la communauté et le cycle se perpétuerait. C’est une vision, parce que si tous ces emplois étaient occupés par des membres de ces communautés, alors quel avenir remarquable ce serait pour toutes les communautés autochtones du Canada.

Kerry Smith

Vous savez, dans le cas des Métis, un accord a été signé récemment, en 2018 je crois, pour leur donner du financement l’apprentissage et la garde d’enfants. Ça nous permet de mettre sur pied nos propres services de garde et, manifestement, nous bénéficions de ces emplois, exactement comme Marisa l’a expliqué. Ça fait toute la différence d’avoir des gens de métiers, des travailleurs et des entrepreneurs métis qui peuvent se charger de ces projets. Et par la même occasion, nous mettons sur pied notre propre programme d’apprentissage pour les jeunes enfants, à transmettre à tous nos centres. Nous formons nos propres employés, afin de constituer le personnel et la direction de nos centres. C’est un rêve devenu réalité, vous savez, que de pouvoir envoyer ses enfants dans un service de garde qui renforce votre culture et vos croyances chez les enfants, et ce, depuis leur tout jeune âge. C’est très excitant pour nous, et tout cela découle de cette unique entente et de cette capacité qui nous est donnée de prendre nos propres décisions.

Marisa Bennett Caplette

Tout à fait. C’est important de voir ces postes au sein de nos communautés être occupés par des Autochtones. Mais comment pouvons-nous épauler les autres membres de la communauté? Il n’y a que 21 emplois, pour une population de 250 personnes. Que pouvons-nous faire pour soutenir tout le monde? J’insiste beaucoup pour encourager les économies autochtones au sein de la communauté, et il est possible, c’est vrai que ça ne corresponde pas au marché du travail. Mais c’est parce que je trouve que le marché du travail ne correspond pas aux communautés isolées, les emplois offerts ne sont pas les mêmes. Alors que faire? Nous payons des formations par l’intermédiaire de FOODSAFE et offrons des formations de traiteur, de manière à ce que lorsqu’il y a des rencontres, des ateliers ou des événements, les gens puissent fournir la nourriture et rapporter ce revenu au sein de leur ménage. C’est vraiment la question à se poser : comment soutenir le reste de la communauté?

Kerry Smith

Je suis heureuse de constater un consensus pour les Autochtones, comme dans le cadre du PFCEA, qui permet une plus grande liberté et souplesse dans la conception et l’exécution des programmes. Mais il reste quelques points de négociation. On nous voit encore comme des gens à qui l’on doit fournir un service et ça nous freine un peu. Pour atteindre une véritable autodétermination, nous devons être en mesure de prendre nos propres décisions aux moments que nous jugeons les plus opportuns. Décider si c’est la meilleure façon de soutenir nos gens et d’assurer leur réussite. Les mesures de soutien pour les Métis sont quelque peu différentes, mais tout récemment, nous avons pu en mettre sur pied pour nos étudiants, notamment en matière de santé. Et nous avons eu la capacité de créer des services plus exhaustifs pour nos clients, qu’il s’agisse de garde d’enfants, de prestations de santé, de moyens financiers plus grands pour se rendre à destination ou d’un hôtel pour dormir pendant quelques jours. C’est le genre de mesures dont nos clients ont besoin. Je suis vraiment contente des avancées permises par cette stratégie.

Marisa Bennett Caplette

Si nous voulons réussir et offrir des formations en matière de compétences et d’emploi, nous devons acquérir la capacité d’écouter nos communautés, nos clients, et se servir de ce qu’ils disent pour avancer.

Lucy Kuptana

Je suis d’accord. Nous rencontrons des communautés tous les 2 ans, nous organisons une sorte de grosse tribune, et nous analysons un plan stratégique et déterminons leurs priorités. Les gens nous parlent des besoins de chaque communauté, de l’état de la situation en ce qui concerne l’éducation, la formation professionnelle, la santé, les infrastructures, les langues, la culture. Ce sont eux qui nous énoncent leurs priorités. Et le plus important, c’est qu’après avoir entendu tout cela, nous pouvons nous en inspirer et tenter de répondre aux besoins du mieux que nous pouvons.

Marisa Bennett Caplette

Absolument. Toute la question est de pouvoir offrir ces services au sein des communautés. C’est d’aller les voir, de les écouter, de leur parler, de discuter, de les mobiliser, comme Lucy dit, et de vraiment bâtir tout ça dans la communauté de manière à ce que nos services leur soient profitables.

Lucy Kuptana

Je crois que si nous nous penchons sur notre système d’éducation, c’est parce que nous continuons à répéter des erreurs qui conduisent un certain nombre de personnes à échouer. Nous avons des niveaux de littératie et de numératie qui sont bas, et pourquoi? Comment se fait-il que certains enfants n’aillent pas à l’école? Nous continuons de travailler dans les limites d’un système qui n’aurait jamais dû naître en ce qui concerne les Autochtones. Ce système est conçu pour d’autres sociétés, d’autres pays. Il a été prouvé, encore et encore, au cours des 40 dernières années, que ce système n’est pas adapté aux Autochtones.

Kerry Smith

Je suis entièrement d’accord. Je crois qu’on en revient au fait que nous devons créer des programmes de formation au sein de nos communautés, parce qu’ainsi, nous pouvons les tailler sur mesure pour notre style de vie, nos horaires, nos habitudes d’apprentissage et nos comportements. J’aime beaucoup cette idée. Certains des programmes que nous avons conçus comportent une combinaison de cours en classe et de périodes passées à faire d’autres activités qui nous aident à grandir en tant qu’humains, en tant que contributeur pour notre famille et notre communauté. La création de programmes conçus tout spécialement par nous, pour nous, s’avérera indéniablement une réussite.

Marisa Bennett Caplette

C’est encore plus vrai quand c’est fondé sur qui nous sommes en tant que peuple. Tous nos programmes seront toujours fermement basés sur les façons d'être des Nuu-chah-nulth. Ce n’est pas qu’un certificat, c’est une expérience, c’est la présence des Aînés dans chaque classe, c’est la transmission du savoir de la part des personnes les plus respectées de notre communauté. Tous les jours commencent avec une prière, avec la reconnaissance du territoire sur lequel nous nous trouvons. Chacun participe à une expérience culturelle dans la classe.

Kerry Smith

Le logement, le développement économique, les soins de santé et la formation professionnelle correspondent tout à fait aux priorités de la communauté sur lesquelles nous devons travailler. Mais la véritable autodétermination réside dans la capacité de décider de la manière de combiner ces priorités.

Lucy Kuptana

Il y a une autre chose sur laquelle nous nous penchons également, et c’est la possibilité de multiplier les mentorats et les stages au sein de notre propre organisation et des organismes communautaires, afin que ceux qui se cherchent des emplois, après leurs études postsecondaires et leur formation, puissent faire partie de l’organisation à titre de stagiaires ou avoir droit à un encadrement quotidien. Ainsi, ils pourraient accroître leur confiance en eux et leurs connaissances quant aux rôles occupés dans les divers organismes, dans notre communauté et notre région.

Kerry Smith

Oui, c’est également un gros point pour nous. Et depuis l’été dernier, quand la COVID a eu un réel impact sur l’emploi, nous avons beaucoup insisté sur l’emploi d’été pour nos étudiants. Nous avons découvert que certaines de nos meilleures possibilités étaient offertes par notre propre gouvernement. Je crois que les stages, les possibilités d’emploi et les salaires ciblés sont d’excellents moyens de procurer à votre communauté les compétences nécessaires et le savoir sur la manière dont fonctionne votre leadership et le gouvernement.

Marisa Bennett Caplette

Ça renforce vraiment le pouvoir de l’expérience partagée, qui est, à mes yeux, crucial pour l’emploi et la formation, surtout dans le cadre de programmes de mentorat ou de stage. Vous savez, chez les Nuu-chah-nulth, la structure de gouvernance consiste en un mentorat qui commence dès la naissance pour vous conduire jusque-là. Cela ne fait que renforcer les valeurs des Nuu-chah-nulth, surtout le programme de mentorat par les pairs. Ça empêche vraiment les étudiants, les apprenants et les membres de la communauté de tomber à travers les mailles du filet.

Kerry Smith

C’est pourquoi je pense qu’il est si important d’intégrer cet aspect culturel dans nos programmes, vous comprenez, et s’assurer que quelque soit votre âge, vous êtes fier de qui vous êtes et de la culture dont vous êtes issus. Ça instille une énorme confiance qui ne peut venir d’aucune autre façon. En intégrant la culture dans les programmes de formation, on les rend uniques, on fait en sorte qu’ils soutiennent davantage nos gens.

Et bien, merci, Marisa et Lucy, de vous être jointes à moi aujourd’hui. Ça a été un plaisir de vous parler.

Lucy Kuptana

Non, merci à vous. Je suis vraiment heureuse d’avoir participé à cette discussion.

Marisa Bennett Caplette

Oui, merci beaucoup de m’avoir invitée. C’est tout simplement génial d’apprendre ce qui se passe ailleurs dans le Canada avec les Métis, les Inuits et les Premières Nations, et de découvrir ce qui est fait pour tracer et encourager une voie qui englobe les méthodes autochtones de travailler et de se former.

Jamie Nordstrand (hôte)

Parlons des compétences futures est une production d’Emploi et Développement social Canada. Toutes les opinions exprimées dans ce balado sont le fait des personnes qui les ont exprimées et ne reflètent pas nécessairement celles de leur employeur ou d’EDSC. Pour obtenir plus d’information sur les Compétences futures ou pour lire le rapport intégral du Conseil, lequel inclut une analyse plus détaillée sur le développement des compétences en faveur de l’autodétermination des Autochtones, visitez Canada.ca/competences-futures. Abonnez-vous à notre balado et cliquez sur l’onglet des notifications pour savoir quand le prochain sera diffusé. Merci d’avoir écouté Parlons de compétences futures.

Télécharger (MP3, 23,4 Mo) Développement des compétences pour favoriser l’autodétermination des Autochtones

Épisode 6 : Approches nouvelles et innovatrices en matière de développement et de validation des compétences

Denise Amyot, membre du Conseil des Compétences futures et présidente-directrice générale de Collèges et instituts Canada, et Josée Ouellet, directrice générale du Collège d’Alma et présidente-directrice générale de COlab Innovation sociale et culture numérique, discutent de diverses approches en matière de développement des compétences telles que les micro-certifications ainsi que la reconnaissance des acquis et l’importance de poursuivre l’apprentissage tout au long de la vie.

Durée: 33:22 minutes

Transcription du balado Approches nouvelles et innovatrices en matière de développement et de validation des compétences

Avec Denise Amyot et Josée Ouellet

Durée : 33 : 22 minutes

Josée Ouellet :

Donc, on en parlait de l’apprentissage tout au long de la vie, c’est une culture. C’est une culture, puis je pense qu’en quelque part, il faut croire effectivement que si on investit dans l’apprentissage, puis si on demeure en apprentissage, ça va favoriser notre développement économique et notre croissance économique.

Isabelle Drouin (animatrice) :

Bonjour et bienvenue à la série de balados sur les compétences futures. Je suis votre animatrice, Isabelle Drouin. Depuis des années, les avancées technologiques, les changements climatiques et les nouveaux modèles économiques transforment les milieux de travail dans le monde entier. La pandémie a simplement accéléré ces changements. Les employeurs, les travailleurs et les chercheurs d’emploi s’adaptent et saisissent les occasions extraordinaires qui redéfinissent l’avenir de la main-d’œuvre canadienne. Dans l’épisode d’aujourd’hui, nous discutons avec Denise Amyot, membre du Conseil des Compétences futures et présidente-directrice générale de Collèges et instituts Canada, ainsi qu’avec Josée Ouellet, directrice générale du Collège d’Alma et présidente-directrice générale de CoLab innovation sociale et culture numérique. Ensemble, elles discutent des approches nouvelles et innovatrices en matière de développement des compétences afin que les chercheurs d’emploi, les travailleurs et les employeurs puissent en bénéficier à parts égales et que tous puissent faire partie d’une nation axée sur l’apprentissage.

Denise Amyot :

Bonjour, je m’appelle Denise Amyot, je suis membre du Conseil des compétences futures et je suis aussi présidente-directrice générale de Collèges et Instituts Canada, qui est une association nationale qui regroupe les cégeps, les polytechniques, les différents instituts à travers le pays et, naturellement, les collèges. Alors aujourd’hui, je suis heureuse de discuter avec Josée Ouellet, qui est la directrice générale du Collège d’Alma. Alors, ensemble, nous allons discuter des approches nouvelles et innovatrices en matière de développement et de validation des compétences. Alors, bienvenue Josée.

Josée Ouellet :

Merci Denise. Merci de l’invitation. C’est un plaisir d’échanger avec toi aujourd’hui sur ce beau sujet.

Denise Amyot :

Alors, Josée, avant qu’on commence à parler justement de la priorité numéro quatre du rapport, est-ce que vous pouvez me parler un peu de vous et de votre rôle et expérience au niveau du développement des compétences?

Josée Ouellet :

Bien sûr donc, écoutez, je suis directrice générale du collège d’Alma depuis quatre ans, depuis un peu plus de quatre ans maintenant. Auparavant… Le collège d’Alma, pour ceux qui ne savent pas, se situe dans la région du Saguenay–Lac-Saint-Jean, au Québec. Donc, auparavant, j’ai travaillé beaucoup dans le monde des affaires en entreprise, principalement en gestion, en transformation, en développement de leadership et en développement de compétences. Donc, cette expérience-là, ça m’a amenée, ça m’a guidée pour créer ce qu’on appelle CoLab innovation sociale et culture numérique, qui est un centre qui vise effectivement le développement, l’appropriation des technologies, le développement des compétences et des capacités numériques pour les entreprises et collectivités. Donc, c’est pourquoi ce sujet m’intéresse autant.

Denise Amyot :

Excellent, alors j’ai hâte qu’on en parle davantage plus tard dans notre balado. Alors avant, je vais présenter brièvement le rapport du Conseil des compétences futures. Alors, premièrement, peut-être une petite mise en contexte. Le Conseil des compétences futures rassemble des dirigeants d’organisations publiques, organisations privées, organisations syndicales, organisations autochtones, ainsi que des organisations sans but lucratif. Alors pour le développement du rapport, les membres, dont je faisais partie, on a tenu des consultations avec nos partenaires dans différents secteurs. Alors moi, naturellement, j’ai mis beaucoup d’emphase sur le secteur collégial et postsecondaire, mais aussi avec les différents intervenants du secteur de l’emploi. Alors, le rapport du Conseil des compétences futures, on l’a publié au mois de novembre dernier. Donc, en 2020, et là-dedans, on trouve des recommandations avec des stratégies équitables et compétitives pour le marché du travail, en réponse à, naturellement, tout ce qui se passe au niveau de la technologie, les changements au niveau économique, sociaux, environnementaux. Donc tout ce qui peut perturber en quelque sorte ces milieux-là. Et le rapport, dans le fond, qu’est-ce qu’il donne, c’est une feuille de route pour un avenir plus fort, plus résilient pour le Canada et cet avenir-là, on veut qu’il soit fondé sur le besoin de développer une culture d’apprentissage tout au long de la vie. Et alors qu’on commence juste à se sortir de la pandémie, il faut qu’on examine comment on peut aider les Canadiens et les Canadiennes et surtout ceux et celles qui ont perdu leur emploi. Il faut les aider à développer des compétences rapidement pour réintégrer le marché du travail, mais aussi pour réussir dans ce marché du travail là qui est en évolution constante. Aujourd’hui, notre discussion sur la priorité quatre du rapport est très, très à-propos, parce que pour y arriver, c’est important que les établissements postsecondaires et les employeurs adoptent des approches nouvelles et innovatrices en matière de développement et de validation des compétences. Alors, c’est vraiment là-dessus que porte la recommandation, la priorité quatre. Alors Josée, quand vous entendez tout ça, est-ce que ça résonne pour vous dans votre région du Saguenay-Lac-Saint-Jean? Et qu’est-ce que vous observez?

Josée Ouellet :

Bien, écoutez Denise. C’est certain que ces objectifs-là sont sensés, on y croit. C’est des objectifs effectivement qui sont importants, qui nous guident aussi dans nos décisions. En même temps, puis c’est vrai aussi le point de vue régional, c’est vrai pour le Québec, pour le Canada et ça amène des défis. Ça nous amène des défis pour créer ce que j’appelle des conditions favorables pour vraiment faire cette transition-là. Puis d’entrée de jeu, seulement combler le fossé technologique, c’est déjà un défi pour tous. Donc, d’avoir accès à la technologie partout pour être en mesure d’accompagner changement-là. Ce que j’aimerais aussi souligner, c’est, à travers tous ces enjeux, de tenir en compte, parce que l’on parle d’une région ou une autre région, de la capacité de renouvellement et de résilience de chacune des régions, de partir de la réalité de ce qu’on est, de ce qu’on vit pour être en mesure d’orchestrer les bonnes stratégies. Donc, un beau défi qui va tenir compte sûrement de plusieurs cas; la grande rareté de main-d’œuvre, bien entendu, qu’on vit ici, au Saguenay-Lac-Saint-Jean, le vieillissement de la population, donc, aussi une expertise régionale pas toujours présente sur certains domaines de pointe. Des défis qui amènent sûrement de belles opportunités à travers la proposition qui est faite aujourd’hui.

Denise Amyot :

J’aime beaucoup ce que vous dites, Josée, parce que… de ramener cela au niveau local et de voir qu’est ce qui est le plus pertinent en fonction de son milieu. Et si je vous demandais, pour vous autres, quelles sont ces approches nouvelles et innovatrices qui peuvent justement aider à cette formation-là pour développer et valider les compétences?

Josée Ouellet :

Bien, actuellement, si on regarde, nous, on a mis en place justement un centre d’innovation sociale et culture numérique dans l’optique de travailler avec les entreprises, de travailler avec les collectivités pour expérimenter, prototyper, identifier ces compétences-là qui sont requises par rapport aux acteurs et aux défis qui les interpellent dans leur entreprise, dans leur milieu, dans leur région. Donc, ce centre-là a comme cet objectif-là, d’être en mesure de lire d’où on part et de se donner une orientation vers où on veut aller d’une part et en même temps, dans les formations qui sont actuellement disponibles au sein du collège, on est en pleine réflexion, changement, évolution sur le fait d’insérer des compétences qui vont être plus des compétences du futur et de créer des formations courtes, modulables aussi, pour faciliter l’accès du marché du travail, à nos programmes de formation, à nos parcours. Finalement, un peu plus innovants, je dirais.

Denise Amyot :

Vous avez parlé des technologies. Alors, j’aimerais savoir, comment peut-on utiliser les nouvelles technologies pour créer des moyens d’apprentissage justement, pour les travailleurs? Parce que vous avez dit que c’est important d’avoir de la formation de courte durée, par exemple. Et puis, avez-vous des exemples de ça?

Josée Ouellet :

Oui, on travaille beaucoup les formules hybrides, bien entendu. Ce n’est pas toutes les compétences qui s’apprennent à distance, mais une bonne partie d’entre elles. Pour favoriser ces éléments-là, on travaille depuis, bien entendu, les formations hybrides, synchrones, asynchrones, immersives, des communautés aussi de codéveloppement. Et là, on est en pleine action sur la pédagogie qu’on appelait immersive, c’est-à-dire, une pédagogie qui favorise l’apprentissage, mais dans un contexte immersif d’exécution de protocoles, de méthodologie, d’emploi. Donc, pour les entreprises, c’est un domaine qui peut être très, très prometteur. Donc, des projets concrets à cet effet-là, puis qui vont sûrement favoriser autant l’intégration à l’emploi des nouveaux travailleurs que le perfectionnement des travailleurs actuels. Donc, toujours en questionnement. Puis, je pense qu’il est important aussi de réfléchir aux référentiels de compétences sur lequel on s’appuie pour injecter des compétences futures, des compétences qui sont attendues dans nos nouveaux environnements, au sein de l’ensemble de nos activités.

Denise Amyot :

Intéressant, parce que naturellement, de nos jours, c’est rare d’avoir des postes ou des professions où on n’utilise pas la technologie.

Josée Ouellet :

Oui, oui, bien entendu. Actuellement, on a des experts ici en technologie immersive. Et puis on débute un projet, notamment d’innovation sociale pour des préposés aux bénéficiaires. Pour les Cris avec le CIUSSS de la Baie-James, pour créer 180 minutes de formation, de gestes spécifiques pour les préposés aux bénéficiaires. On est en train de faire une expérimentation actuellement de recherche sur l’impact de l’apprentissage en réalité immersive en soins infirmiers sur les niveaux d’apprentissage. On va évaluer jusqu’à quel point cette pédagogie immersive peut augmenter la rétention et favoriser un apprentissage plus rapide en peu de temps. Donc on est en expérimentation pendant deux ans avec nos équipes de soins infirmiers ici dans le collège, donc beaucoup d’actions dans ce sens-là, du côté du Collège d’Alma, de nos nouvelles façons d’aborder la formation. Et, très évident, et c’est ce qui amène effectivement l’importance de placer l’apprentissage tout au long de la vie, parce que les emplois évoluent. Ce qu’on a comme emploi aujourd’hui va être différent dans 5 ans, va être différent dans 10 ans. Donc, tous les mécanismes, tous les dispositifs auxquels on devra réfléchir pour soutenir les entreprises à cet effet-là, c’est important, mais pas seulement les employés. Il faut comprendre qu’on a nos dirigeants d’entreprise, on a toutes les personnes qui encadrent ces emplois-là, qui devront injecter aussi de nouveaux savoirs dans leur pratique si on veut vraiment atteindre l’objectif.

Denise Amyot :

Et dans ce cadre-là, Josée, qu’est-ce que vous diriez que seraient, je ne sais pas, les différentes options, par exemple, de formation personnalisées qui permettraient à ces travailleurs-là d’apprendre à leur propre rythme et aux employeurs d’équilibrer à la fois les besoins d’apprentissage et puis, les besoins opérationnels?

Josée Ouellet :

Il y a des moyens qui existent déjà, comme les reconnaissances d’acquis, des formations courtes qui sont qualifiantes, qui sont de plus en plus présentes, mais il va falloir aussi favoriser et diminuer ce qu’on appelle les obstacles structurels, c’est-à-dire, vous savez, quand on est vraiment en présence de rareté de main-d’œuvre, de soutien de financement, pour une PME, c’est très difficile de pouvoir dégager des efforts pour réfléchir à l’emploi de demain, puis à la formation. Donc, il y a là une réflexion qui est importante à tenir en compte, sensibiliser ces PME-là, mais leur apporter le soutien et pas seulement prendre pour acquis qu’on le dit et que ça se fait. Actuellement, il y a beaucoup d’éléments qui sont comme une pensée magique. Mais juste pour clore leurs fins de mois en fin de pandémie, en plus, je vous dirais que la plupart des PME peinent à livrer leurs opérations. C’est là un défi encore plus présent et qui nous amène à être encore plus précis et plus personnalisé peut-être dans nos approches.

Denise Amyot :

En effet, parce que les employeurs et même les syndicats, naturellement, ont un rôle à jouer dans l’apprentissage, dans la formation, en milieu de travail. Mais si je vous demandais, Josée, dans tout ça, quand on parle de développement des compétences, et puis vous avez parlé plutôt de formation tout au long de la vie, quels sont les avantages pour un travailleur de faire de la formation?

Josée Ouellet :

Je pense que pour le travailleur, l’avantage est évident, c’est d’assurer son cheminement, son évolution, sa flexibilité, sa capacité d’adaptation. Puis c’est dans ce contexte-là que même nos jeunes, dans nos nouveaux programmes, il faut de plus en plus injecter cette capacité-là de vivre dans l’ambiguïté, de s’adapter en tout temps. Parce que ce sont les compétences du futur qui sont marquantes, et qui ne s’acquièrent pas nécessairement pour un métier ou un autre, mais qui s’acquièrent au niveau de ma capacité propre à évoluer dans mon cheminement. Au-delà de la culture d’apprentissage, on intègre des compétences qui sont des compétences, je dirais, d’ancrage, pour nous donner cette capacité-là de toujours être en mode évolution. Pour le travailleur, c’est de s’assurer effectivement une continuité, une évolution, tout en reconnaissant son évolution, puis sa réalité. Parce qu’on dit, bon, par exemple, que les femmes ont eu beaucoup de difficultés au niveau de la pandémie, mais est-ce qu’on reconnaît les défis qu’elles ont eus dans leur milieu de travail, dans leur vie familiale pendant cette période? De quelle façon on va aller les rejoindre, ces femmes-là pour les ramener, pour les réintégrer au marché du travail ou encore créer des organisations de travail qui vont tenir compte de ce qu’elles sont et de leur réalité. Alors il y a quand même des dimensions sociales importantes à adresser à travers cette dimension-là.

Denise Amyot :

En effet, et puis, à vous entendre parler, ça paraît justement qu’auparavant, vous travaillez en entreprise, et puis maintenant, c’est intéressant de voir que vous êtes dans le milieu de la formation. Et puis, vous avez une meilleure compréhension des besoins justement des travailleurs. Puis, vous avez mentionné plus tôt, Josée, vous avez parlé de formation de courte durée. Alors, pouvez-vous en parler davantage? Puis pourquoi on devrait favoriser ça? Vous avez donné quelques pistes-là justement, en parlant des femmes qui ont beaucoup de besoins à la maison aussi ou ceux qui ont perdu leur emploi.

Josée Ouellet :

Oui, de courte durée et aussi, adaptées. Par exemple, nous, on a une attestation d’études collégiales en virage numérique 4.0. C’est très difficile pour les gens de s’inscrire de façon structurée dans la formation, même si elle était en ligne et à distance. Donc, on l’a décomposée en blocs, en blocs qui font en sorte qu’à partir d’une évaluation de connaissances de départ, les personnes vont être en mesure d’aller suivre les éléments manquants. Et on va pouvoir reconnaître de façon plus claire les compétences, les connaissances qui sont déjà acquises. Donc, ce sont tous de nouveaux mécanismes dont on avait moins besoin dans le passé, mais qui font en sorte qu’on s’adapte maintenant à chacun. On travaille, en tout cas, à voir comment on peut s’adapter aux besoins de chacun dans leur évolution. Pour certains, c’est la cybersécurité, alors que pour d’autres, ça va être de travailler davantage des aménagements, de nouveaux outils, etc. Donc, il faut vraiment être capable de cibler les différents besoins.

Denise Amyot :

Excellent. C’est un peu un genre de microcertification de compétence, combiné avec les compétences acquises. Puis ce que j’adore dans ce que vous avez mentionné, Josée, c’est que vous parlez justement de reconnaissance des acquis. Cela veut dire que les gens n’ont pas à répéter ce qu’ils ont déjà fait. Et ça m’amène à parler de ce qu’on a fait, nous, comme association au niveau des microcertifications, parce qu’on en a fait un sondage au début, puis on a découvert qu’il y avait beaucoup de gens qui ne savaient pas ce que c’était les microcertifications, en particulier les employeurs. Je pense que ça montait à 75 % le nombre de personnes qui ne savaient pas ce que c’était. Et à partir du moment où on leur expliquait ce que c’était et la diversité de microcertifications qui étaient offertes par les collèges dans différents domaines, tout de suite, ils disaient : « Où puis-je trouver des gens qui ont suivi ces microcertifications-là? » Alors, ce qu’on a fait, parce qu’on s’est aperçu qu’il y avait cette méconnaissance-là, et on voulait s’assurer qu’il y avait aussi une certaine uniformité tout en gardant la diversité, alors, comme association, on a développé, à l’aide de gens qui sont dans les collèges et les cégeps, un cadre de référence national sur les microcertifications, qui donne en fait une définition et des principes directeurs sur ce que c’est une microcertification? À quoi on peut s’attendre? Pour vraiment s’assurer qu’il y a une cohérence dans les approches pour ce type de formation là. Parce que justement, comme vous l’avez dit, c’est de la formation pointue, qui répond spécifiquement aux besoins des employeurs. Et en même temps, ces principes directeurs assurent une qualité qui est reconnue pour les programmes offerts par les collèges dans tout le pays. Et… allez-y, Josée.

Josée Ouellet :

J’aime beaucoup, Denise, cette approche de cohérence, parce que si on veut effectivement qu’un travailleur puisse aller d’un employeur à l’autre avec une microcertification ou puisse vraiment travailler l’évolution ou l’avenir de son emploi, ou même pour les employeurs d’avoir accès à des travailleurs qui ont une microcertification reconnue, c’est que l’on ait une approche écosystémique. C’est-à-dire qu’on ne peut pas faire du un à un partout, mais être en mesure d’aller chercher un besoin d’organisation généralisé, pour bien orienter nos microcertifications. Donc l’approche de cohérence que vous amenez tout à fait à-propos.

Denise Amyot :

Et ce qui est intéressant dans notre définition par rapport aux microcertifications, on a insisté sur le mot compétence. On ne voulait pas que ça soit lié au nombre d’heures passées dans un cours, et on a insisté aussi sur l’évaluation des compétences. Et moi, j’aimerais vous demander, Josée, quels sont les outils ou les technologies qui permettent, en fait, de cartographier les compétences acquises?

Josée Ouellet :

C’est certain qu’au niveau des outils… premièrement, il faut s’entendre au niveau des compétences requises, juste le nombre de référentiels qui existent sur les compétences futures. Il y a des personnes qui peuvent s’y perdre. Il faut prendre attention et se dire « Quelles sont les compétences qui sont à valeur ajoutée? » Par exemple, ce qu’on a développé, c’est que quand on arrive dans une PME, on amène une discussion avec le dirigeant de la PME pour qu’il puisse cibler ses ambitions et identifier les compétences qui vont être requises pour atteindre les ambitions de son entreprise. Une fois ces compétences identifiées, ça devient ses compétences futures et à partir de là, on a des référentiels pour l’amener à réfléchir. Et à partir de là, l’entreprise peut évaluer les compétences qui sont actuellement présentes au sein de son organisation, versus celles qui vont les amener finalement dans leurs ambitions. Et c’est là que les programmes de formation peuvent bien se structurer. C’est des outils qu’on pilote actuellement avec des entreprises qui fonctionnent, je ne vous le cacherai pas, assez bien, mais chacun y va avec ses priorités et ses besoins d’affaires. Et là, ça nous amène vers des compétences d’avenir qui sont importantes. Mais on ne vous cachera pas qu’on sait, à travers toute la littérature et toutes les recherches qui sont faites sur les compétences futures, on a identifié à travers le diagnostic, les compétences les plus critiques pour une organisation et ça, donc, on peut le faire dans plusieurs programmes, sous différentes formes, donc des outils de mesure de connaissances, etc. Donc, il y a plusieurs façons de repenser ces approches pour travailler sur les bons axes de développement.

Denise Amyot :

Et si je vous demandais, Josée, ça seraient quoi vos recommandations pour créer un système qui serait par exemple, uniforme et fiable, pour que les employeurs et les fournisseurs de formation comme les collèges puissent évaluer les compétences?

Josée Ouellet :

Je pense que 1 : Il faudrait peut-être être capable de s’entendre sur des référentiels communs, ce que ça implique, puis bien les documenter par rapport aux différents contextes. Moi, là-dedans, je recommanderais, parce qu’on va vite dans l’action, le terrain, l’évaluation rapide sur la connaissance de base, mais souvent, il faut vraiment y intégrer les dimensions des compétences qui, à première vue, la créativité notamment, pourraient, dans un emploi X, ne pas être vues comme étant prioritaires. Cependant, c’est la façon de voir les choses différemment et de l’injecter, et bien, ça peut être vraiment une valeur ajoutée. Je pense qu’il faut faire connaître ces cadres de compétence là, ces référentiels-là et les rendre accessibles en système ouvert pour que les entreprises puissent apprendre à travailler avec ça et aussi, peut-être, travailler avec les directeurs des ressources humaines des différentes organisations pour les aider eux aussi à voir comment ils peuvent intégrer ça dans la prestation de directeur RH finalement.

Denise Amyot :

Intéressant, et je suis contente que vous ayez mentionné la créativité comme étant justement une compétence qui est nécessaire pour le futur. Et ça, c’est intéressant parce que ça fait un lien avec la priorité numéro un qu’on a mis dans notre rapport, qui est de faire le lien avec les informations du marché du travail et des compétences essentielles pour vraiment s’assurer que les informations du marché du travail sont fiables. Vous avez mentionné, Josée, plus tôt, l’importance d’apprendre tout au long de la vie. Et puis, j’aimerais peut-être parler de la collaboration entre les employeurs et les établissements d’enseignement, par exemple. Parce que naturellement, si je suis un employeur, j’ai des besoins opérationnels et si j’ai un travailleur qui doit être formé, j’ai peut-être un défi. Alors, comment vous gérez ça, vous autres au Saguenay-Lac-Saint-Jean?

Josée Ouellet :

Je ne sais pas si c’est partout pareil, les éléments, mais je pense qu’il est important de développer des plateformes de collaboration et de sensibiliser les employeurs à l’importance, finalement, d’investir dans le développement de leur personne et de leur propre développement pour assurer la croissance de leur entreprise. C’est un élément qui est important. En même temps, il y a des obstacles dans leur capacité. J’en parlais tout à l’heure avec les défis de main-d’œuvre, la rigidité aussi, de certains programmes de financement qui sont très, très orientés vers le soutien pour des achats de technologies et tout ça, mais c’est beaucoup moins facile de faire le lien entre ce que ça veut dire pour mes employés, puis comment mobiliser leurs travailleurs. Comment les amener à faire le pas? Donc, on en parlait de l’apprentissage tout au long de la vie, c’est une culture. C’est une culture, puis je pense qu’en quelque part, c’est parce qu’il faut croire effectivement que si on investit dans l’apprentissage, puis si on demeure en apprentissage, ça va favoriser notre développement économique et notre croissance économique, et c’est un travail, pas seulement des employeurs et des maisons d’enseignement, c’est un travail de tout un écosystème. Ça demande de sensibiliser l’ensemble des responsables du secteur de développement économique, les accompagnateurs, les conseillers en accompagnement des entreprises. On est en train de faire une étude pour voir comment on peut les aider eux à voir comment ils vont accompagner les entreprises à l’intérieur même du développement de l’écosystème. Il y a plusieurs acteurs qui deviennent des acteurs importants à la réussite de cette connexion-là pour s’assurer que le virage va s’enclencher de part et d’autre.

Denise Amyot :

Excellent, vous êtes vraiment passionnée, Josée, ça apparaît dans vos propos, dans votre façon de parler, justement, de la formation et du développement des compétences. Si j’avais à vous demander, c’est quoi votre appel à l’action pour que la main-d’œuvre au Canada continue à s’adapter et à se qualifier pour les emplois de l’avenir?

Josée Ouellet :

Je vous dirais que, s’il y avait une phrase pour moi qui est importante à retenir c’est, s’il vous plaît, plaçons l’humain au cœur de la transformation. N’allons pas croire que l’humain n’est pas l’acteur principal de cette transformation. Il faut y penser, il faut l’accompagner. Il faut réfléchir. Les gens, quand ça fait du sens, ils s’impliquent. Ils avancent. La question, c’est dire comment on soutient cet élément-là, comment on va de l’avant par rapport à ça et on va réussir. Voilà!

Denise Amyot :

J’aime beaucoup ça, placer l’humain au cœur, et c’est intéressant, parce que tout au long de notre balado aujourd’hui, vous avez parlé d’écosystèmes. Vous avez parlé du rôle, justement, des travailleurs. Vous avez parlé du rôle, justement, des institutions qui font la formation et vous avez souvent parlé de formation tout au long de la vie.

Josée Ouellet :

Oui! Non, bien c’est quand on parle d’une culture, c’est parce que c’est présent, c’est parce que c’est la curiosité, c’est le goût de voir les choses autrement. C’est d’intégrer l’innovation à l’intérieur même des pratiques. C’est ça l’apprentissage tout au long de la vie. C’est de croire qu’en développant les personnes, on va assurer le développement économique et on n’y arrivera pas à l’économie du savoir sans y injecter du savoir.

Denise Amyot :

Josée Ouellet. Merci, merci beaucoup, beaucoup pour vos propos inspirants et vos propos qui parlent justement de l’humain et de l’importance de le placer au cœur. Moi, je retiens ça. J’ai trouvé ça très, très intéressant comme échanges, avec vous, et merci d’avoir partagé avec nous les approches innovatrices du Collège d’Alma et de l’impact sur la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean. Alors, je sens qu’il y a un futur en devenir qui est palpitant.

Josée Ouellet :

Merci beaucoup, Denise. C’est un plaisir d’échanger avec vous aujourd’hui.

Isabelle Drouin (animatrice) :

« Parlons des compétences futures » est une production d’Emploi et Développement social Canada. Toutes les opinions exprimées dans ce balado sont celles de l’individu et non pas nécessairement celles de leur employeur ou d’EDSC. Pour obtenir plus de renseignements sur Compétences futures ou pour lire l’intégralité du rapport du Conseil qui approfondit le sujet des approches nouvelles et innovatrices en matière de développement et validation des compétences, visitez le Canada.ca/competences-futures. Veuillez vous abonner à notre série de balados et cliquez sur l’onglet de notification pour savoir quand le prochain épisode sera disponible. Merci d’avoir écouté « Parlons des compétences futures ».

Télécharger (MP3, 78.2 Mo) Approches nouvelles et innovatrices en matière de développement et de validation des compétences

Épisode 7 : Aptitudes à pivoter pour un avenir durable

Audio disponible en anglais seulement

Judy Fairburn, membre du conseil de Compétences futures et cofondatrice/codirectrice générale de The51, Bobbie Racette, directrice générale de Virtual Gurus, et Jeanette Sutherland, directrice de EDGE UP and Workforce, de Calgary Economic Development, discutent du perfectionnement des compétences et d’histoires de pivots réussis en vue d’assurer un avenir durable au Canada.

Durée: 24:21 minutes

Transcription du balado Aptitudes à pivoter pour un avenir durable

Avec Judy Fairburn, Jeanette Sutherland et Bobbie Racette

Durée : 24:21 minutes

Jeanette Sutherland

Nous constatons réellement que cet investissement dans la technologie se réalise dans tous les secteurs. Nous voyons des gens du secteur du pétrole se réorienter, mettre à profit leurs compétences entrepreneuriales pour créer de nouvelles options. Les gens réfléchissent beaucoup en ce moment, ils songent à la façon d’utiliser ces compétences. Nous devons réfléchir à la manière d’aider les gens à acquérir des compétences et à perfectionner celles qu’ils détiennent déjà, de manière à répondre aux besoins de notre nouvelle économique numérique canadienne.

Jamie Nordstrand (hôte)

Bonjour et bienvenue à notre série de balados sur les compétences futures. Je suis votre hôte, Jamie Nordstrand. Depuis des années, les avancées technologiques, les changements climatiques et les nouveaux modèles d’affaires transforment les milieux de travail du monde entier. La pandémie a tout simplement accéléré cette transformation. Les employeurs, les travailleurs et les chercheurs d’emploi évoluent et accueillent à bras ouverts ces fabuleuses possibilités qui redéfinissent l’avenir de la population active canadienne. Aujourd’hui, nous écouterons Judy Fairburn, membre du Conseil des compétences futures; Bobbie Racette, présidente-directrice générale de Virtual Gurus; et Jeanette Sutherland, directrice de EDGE UP, du Conseil de développement économique de Calgary. Elles discuteront d’acquisition de compétences transversales et de réorientations réussies qui favoriseront l’avenir durable du Canada – autant d’éléments clés dans l’édification d’une nation axée sur l’apprentissage.

Judy Fairburn

Bonjour. Nous nous joignons à vous aujourd’hui depuis les territoires traditionnels des peuples de la région du Traité 7, dans l’Ouest canadien. Je m’appelle Judy Fairburn. J’ai été membre du Conseil des compétences futures et honorée de travailler avec des gens aussi remarquables à travers le pays. Je suis également la co-fondatrice et co-présidente-directrice générale de The51, une plateforme et un fonds de financement féministes. Nous avons deux priorités : investir dans les entreprises novatrices dirigées par les femmes et accroître le savoir-faire de tous en matière de finances. Depuis peu, je fais également partie du Conseil de développement économique de Calgary.

Dans l’épisode d’aujourd’hui, nous nous pencherons sur l’acquisition de compétences dans le but de créer un avenir durable. Essentiellement, cela signifie qu’en tant que Canadiens, nous voulons développer des compétences et nous positionner en vue de prospérer dans un monde numérique à faibles émissions de carbone. Plus précisément, nous discuterons d’acquisition de compétences transversales qui permettent des réorientations réussies et favorisent l’avenir durable du Canada. Nous parlerons également d’une main-d’œuvre qualifiée qui adopte sans hésitation de nouvelles technologies, méthodes de travail et modèles d’affaires qui améliorent les entreprises et font progresser le bien-être de nos collectivités et de notre société, chose tellement importante dans le monde d’aujourd’hui.

C’est donc un plaisir pour moi d’en discuter avec Bobbie Racette et Jeanette Sutherland. Et maintenant, si vous nous parliez un peu de vous? Et si vous voulez, donnez-nous un exemple en lien avec l’acquisition de compétences et votre formidable travail.

Bobbie Racette

Je m’appelle Bobbie, je suis la fondatrice et présidente-directrice générale d’une jeune entreprise locale appelée Virtual Gurus. Je l’ai mise sur pied il y a environ cinq ans. Je travaillais alors dans l’industrie du pétrole, ici en Alberta. Manifestement, lorsque la récession a frappé et que mes collègues se sont vus licenciés les uns après les autres, j’ai su que ce serait bientôt mon tour. J’ai donc commencé à explorer d’autres options. J’ai fait mes études en administration et j’ai vite compris qu’à l’époque, je ne trouverais jamais d’emploi, parce que les employés administratifs de l’industrie du pétrole avaient perdu leur travail avant moi, alors contremaîtresse.

Alors lorsque j’ai effectivement perdu mon emploi, je cherchais déjà en ligne pour déterminer ce que je pouvais faire d’autre. Je ne cessais de tomber sur les mots « pigiste » et « économie à la demande ». Je suis donc devenue pigiste pour ceux qui étaient alors nos compétiteurs. Mais c’est alors que j’ai remarqué une sorte de manque pour les employeurs qui utilisent ce genre de plateformes en ligne. À ce moment-là, beaucoup d’entre eux cherchaient des travailleurs venus d’ailleurs, ce qui n’est pas nécessairement une mauvaise chose, seulement, ils n’avaient pas nécessairement les compétences recherchées : ils cherchent des gens qualifiés, mais en même temps, les pigistes offrent leurs services pour seulement 2 $ l’heure.

En bref, c’est ainsi que Virtual Gurus est né. Je l’ai créé de manière à offrir des possibilités de télétravail enrichissantes à des personnes sous-représentées comme moi. Je savais que je ne trouverais pas d’emploi, que personne ne m’engagerait, et j’ai vu tellement de personnes sous-représentées se démener pour trouver un travail, que je me suis donnée pour mission de les aider. Et voilà d’où vient Virtual Gurus.

Jeanette Sutherland

Je m’appelle Jeanette Sutherland. Je suis la directrice du programme EDGE UP au Conseil de développement économique de Calgary, et pendant plus de 20 ans, j’ai été le fer de lance de nombreuses initiatives concernant la main-d’œuvre. Ces initiatives visaient à garantir les bons talents pour répondre aux besoins de l’industrie. Au cours des dernières années, nous avons constaté la demande pour des compétences numériques, et ce que nous devons vraiment faire, c’est réagir au changement structurel, au ralentissement économique observé dans le secteur du pétrole. Nous devons nous attarder aux emplois qui ont subi le plus de changements.

Parmi les milliers de travailleurs qui ont perdu leur place dans l’économie au cours de cette période, nombreux avaient une grande éducation, étaient hautement qualifiés, diplômes en sciences, en technologie, en ingénierie et en mathématiques. Leurs compétences très spécialisées ont entraîné des pertes sans précédent au sein de notre population active pendant deux à cinq ans, et ils n’ont pas réussi à retrouver ce qu’ils avaient. Cette situation constitue un très grand défi pour Calgary.

Ce que nous avons fait en retour, c’est investir dans une étude de cartographie des compétences avec l’ICTC. Nous avons alors appris que le géoscientifique moyen détient près de 60 % des compétences de base nécessaires pour devenir analyste en données, ou que l’ingénieur pétrolier compte plus de la moitié des compétences nécessaires pour occuper des postes de contrôle de la qualité ou de gestion de projet.

Alors ce que nous devions faire, c’était créer un programme d’acquisition de compétences, et c’est ce que nous avons réussi avec EDGE UP, qui signifie Energy to Digital Growth Education and Upskilling Project (adaptation : projet pour donner aux travailleurs du secteur de l’énergie une éducation numérique et un perfectionnement des compétences). Il s’agit d’un programme de consultation multilatéral lancé il y a quelques années en collaboration avec le Centre des compétences futures. Il a pour but de tester de nouvelles approches en ce qui concerne l’acquisition de compétences par les travailleurs en milieu de carrière, et de mener à la création, dans tous les secteurs, d’emplois faisant appel aux technologies. Parce que, comme vous le savez, au cours de la dernière année, on a beaucoup discuté du besoin de créer une main-d’œuvre prête pour l’avenir et de l’accélération des avancées de la technologie numérique.

L’avenir est là, et ce type de programme aide les travailleurs à réorienter leur carrière vers des options durables, vers des emplois où la demande est forte, dans des secteurs prioritaires en ce moment à Calgary.

Judy Fairburn

Très belle entrée en matière. Ce genre d’histoires en dit tellement long sur ce qui se passe dans cette partie du Canada en ce moment. C’est très excitant de voir tous ces défis devenir des possibilités. Si la dernière année et demie nous a appris quelque chose, c’est que les compétences futures ne sont plus une histoire d’avenir, mais de présent. Réfléchir selon le prisme de l’apprentissage est absolument primordial. Et c’est probablement là que réside le secret permettant de transformer les obstacles en tremplins : cette façon de réfléchir axée sur les possibilités. Et je serais curieuse de savoir ce que vous pensez de ce changement. Nous connaissons beaucoup d’exemples de réorientation, alors parlons-en, parlons de ce que vous avez constaté dans cette partie du monde, de la manière dont nous privilégions maintenant la durabilité et des technologies numériques.

Jeanette Sutherland

Je crois que ce recentrage sur les technologies et l’innovation requièrent véritablement des compétences technologies dans tous les secteurs. Tout change dans le domaine du pétrole, on se tourne vers les technologies propres et l’énergie renouvelable, on parle des technologies en santé et en finance, des technologies créatives.

Nous avons vu un tel changement, une augmentation de 233 % dans les entreprises consacrées aux technologies en Alberta au cours des neuf dernières années, et 40 % de ces entreprises ont enregistré des revenus de plus d’un million de dollars. La demande pour le développement des compétences numériques doit demeurer une priorité. C’est à Calgary que l’on trouve 58 % des 3 000 entreprises de technologies de l’Alberta. Dans ces conditions, nous avons récemment procédé à une estimation des dépenses prévues dans le domaine numérique en 2024 pour l’Alberta, et celle-ci s’élève à 20 milliards de dollars.

Nous constatons réellement que cet investissement dans la technologie se réalise dans tous les secteurs. Nous voyons des gens du secteur du pétrole se réorienter, mettre à profit leurs compétences entrepreneuriales pour créer de nouvelles options. Les gens réfléchissent beaucoup en ce moment, ils songent à la façon d’utiliser ces compétences. Nous devons réfléchir à la manière d’aider les gens à acquérir des compétences et à perfectionner celles qu’ils détiennent déjà, de manière à répondre aux besoins de notre nouvelle économique numérique canadienne.

Judy Fairburn

Oui, c’est incroyablement excitant. Bobbie, je me tourne maintenant vers vous pour parler de ce que ça représente de créer une entreprise. Comment vous l’avez bâtie, et à quoi ressemble l’évolution des compétences numériques chez vous. Je crois que c’est vraiment génial que votre entreprise offre l’apprentissage automatique et l’intelligence artificielle parmi ses services. Parlez-nous de votre parcours, de celui de votre communauté. Au départ, c’était des pigistes, maintenant, ce sont des assistants virtuels, et votre main-d’œuvre est, pour la majorité, très connaisseuse en technologie numérique.

Bobbie Racette

Oui, absolument. Je suis une ardente défenseure de l’apprentissage et du perfectionnement continus. Chez Virtual Gurus, nous aidons les communautés sous-représentées à participer au travail de pigiste et au télétravail. Si nous voulons leur donner du travail, nous devons nous assurer qu’ils comprennent comment l’effectuer depuis chez eux. Comment fait-on pour devenir pigiste? Comment fonctionne le travail administratif? Comment fait-on tout ça?

C’est ainsi que nous avons créé la Virtual Gurus Academy. Elle offre 45 cours en ce moment, et l’on en ajoutera 40 autres bientôt. C’est une plateforme créée par des assistants virtuels, pour des assistants virtuels. Certains des cours offerts visent à montrer comment épauler son client, dans presque tout : la gestion des relations, le marketing numérique, les médias sociaux, les ventes, la comptabilité. Et tout ça parce que beaucoup d’employés de Virtual Gurus n’ont pas les moyens d’aller à l’école. Nous cherchons donc des moyens de travailler et de collaborer avec de plus grandes entreprises, de manière à pouvoir leur offrir l’éducation qui leur permettra de travailler pour nous à la maison.

En ce qui me concerne, il faut mettre en place des mesures pour encourager l’apprentissage à l’échelle de toute l’entreprise, y compris pour mes employés. Nous donnons à tous nos assistants virtuels un accès gratuit aux cours en ligne pour les programmes de leur choix. C’est l’une des choses qui m’a le plus stimulée dans la création de l’entreprise; je n’avais pas les bonnes compétences moi non plus et j’ai dû apprendre. Un petit coup de main peut faire beaucoup.

Judy Fairburn

Génial. Vous savez, si je pense à tout ce concept d’apprentissage continu, je me dis que c’est véritablement l’aspect clé du rapport du Conseil des compétences futures. Jeanette, creusons plus loin sur le sujet de l’apprentissage continu, de votre expérience et des conseils que vous donneriez à nos auditeurs. Qu’avez-vous remarqué depuis les premiers jours suivant la création du programme EDGE UP, qu’est-ce qui en fait un succès?

Jeanette Sutherland

Ça prend énormément de courage pour faire ce premier pas et entamer une réorientation de carrière. Et je sais que les gens sont fatigués d’en entendre parler, mais je crois que c’est un besoin crucial sur lequel nous devrons nous pencher dans peu de temps : comment les gens peuvent-ils se réorienter et prendre un nouveau départ, comment peuvent-ils se lancer dans une nouvelle carrière durable? Grâce à EDGE UP, nous avons appris que lorsqu’il est question de travailleurs qui ont 10, 20 ans d’expérience, qui sont très immergés dans un secteur, il devient très difficile d’opérer cette réorientation et de s’intéresser aux compétences numériques, qui sont très nouvelles pour eux.

Dans le cadre de EDGE UP, nous avons eu 320 participants au programme, des professionnels du secteur du pétrole, des géoscientifiques qui, encore, ont perdu leur poste il y a deux à cinq ans. Nous leur avons donné une courte formation pour les aider à acquérir les compétences qui leur permettraient de devenir analystes, développeurs ou encore, gestionnaires de projet en technologies informatiques. Nous leur avons donc donné cette formation, combinée à une expérience en milieu de travail à la fin, afin qu’ils puissent mettre leurs compétences en pratique, et nous leur avons permis la transition vers la formation technique. Nous avons cependant appris que de nombreux professionnels techniques du secteur du pétrole, qui occupent pourtant un travail très technique, ne sont pas nécessairement conscients de l’étendue de la transformation numérique. Nous avons donc constaté que si ce segment de la population n’a pas cette conscience, alors il y a peu de chance pour que le reste de notre main-d’œuvre le sache. Nous devons donc travailler rapidement afin de permettre à ces personnes d’acquérir ces compétences numériques, grâce auxquelles ils pourront retourner sur le marché du travail.

En acquérant ce genre de compétences, les gens deviennent plus adaptables, plus aptes à accepter d’autres possibilités d’emploi. Nous créons donc une main-d’œuvre beaucoup plus agile. Il est donc primordial maintenant que les gens visent plus d’une carrière. Ce sera une évolution, et l’apprentissage continu deviendra une composante essentielle pour assurer la durabilité d’une carrière. Nous allons devoir garder nos compétences aiguisées et pertinentes, à jour, de manière à demeurer des acteurs compétitifs au sein de notre économie.

Judy Fairburn

Je crois qu’il s’agit là d’un très bon point, en effet. Ce sont deux exemples de carrières, oui, mais également de réorientation. Ce que vous racontez, Jeanette, ce n’est plus seulement l’histoire d’une carrière, c’est l’histoire d’une évolution. Et quand je pense au rôle du Conseil des compétences futures, lorsque nous nous sommes réunis il y a environ deux ans, je me dis que c’était dans le but de déterminer, avec les gouvernements, tous les paliers, bien sûr, ainsi que les organisations autochtones, les caractéristiques essentielles d’un champion et d’accélérer l’apprentissage dans notre pays. Parce que ce monde n’est pas figé.

Je crois qu’il convient de mentionner que ce travail en est un de coopération. C’est devenu fréquent dans notre coin de pays au cours des dernières années. Et je crois que le dire, que discuter un peu plus en détail du travail incroyable qui a été réalisé, de la mise en commun de tous ces efforts en faveur de l’acquisition de compétences, ça en vaut la peine.

Jeanette Sutherland

La collaboration sera essentielle pour nous. À travers EDGE UP, je constate de réels efforts de coopération au sein de l’industrie et dans les établissements postsecondaires. Cinq de ces établissements participent à notre programme, tout comme le gouvernement. La pleine et entière participation de l’industrie est également un incontournable sans lequel rien ne pourrait se passer, car il faut faire savoir aux gens quelles compétences sont recherchées. Ainsi, les entreprises pourront envisager l’embauche de ces personnes pour des stages et pour des emplois une fois leurs études terminées.

Je crois que c’est ainsi qu’on créera une main-d’œuvre agile, capable de s’adapter, de suivre l’évolution des technologies et de l’économie, et que pour y arriver, nous devons tout faire pour nous assurer d’inculquer les bonnes compétences. Et nous devons y parvenir rapidement. Cela nécessitera des fonds gouvernementaux, du temps et des efforts de la part des établissements postsecondaires, ainsi qu’une nouvelle approche concernant l’acquisition de compétences. Peut-être n’avons-nous pas besoin de cinq années d’études pour chaque emploi, maintenant. Et peut-être que ces cinq années d’instruction seront effectuées sur plusieurs années, dorénavant. Cet engagement envers l’apprentissage continu deviendra réellement la clé.

Bobbie Racette

Je suis entièrement d’accord avec l’un des points soulevés, soit celui de rendre accessibles et efficaces les formations axées sur les compétences. J’ai toujours défendu les gens habitant dans des régions éloignées, surtout les autochtones. Ils n’ont pas beaucoup d’occasions de perfectionner l’éducation qu’ils ont reçue et qui leur permettrait de travailler de la maison. C’est l’une des choses que nous essayons de faire ici, combler le fossé pour leur montrer qu’eux aussi peuvent travailler de la maison, travailler tout court, et se perfectionner.

Ces collectivités éloignées fourmillent de talents incroyables. L’autre jour, j’ai entendu parler d’un jeune Autochtone qui apprend le codage par lui-même, dans sa réserve. À quelle école pourrait-il aller, comment pourrait-il apprendre autrement? Parce que ces gens n’ont pas nécessairement les moyens, vous comprenez? Alors c’est ce que je m’efforce de faire, collaborer avec les entreprises afin d’aider à ce niveau.

Judy Fairburn

Vous parlez toutes deux du pouvoir de la coopération, du fait que grâce à elle, nous pouvons accomplir des choses dont nous ne pourrions que rêver si nous étions seuls. Des choses qui seraient impossibles. C’est incroyable ce que nous sommes capables de faire, d’apprendre et de changer lorsque l’on unit nos forces. Si vous pouviez, d’un coup de baguette magique, garantir la prospérité et la capacité d’adaptation de la main-d’œuvre canadienne, comment le feriez-vous? Quel serait votre appel à l’action?

Bobbie Racette

Je crois que je nous appellerais tous à travailler de concert et à continuer à éliminer les obstacles. Parce que c’est ce qu’on fait en ce moment, je le vois. Et beaucoup d’Autochtones se font également connaître pour accélérer le mouvement.

Des incitateurs à la diversité et à l’inclusion sortent également du lot. Ça se produit partout dans le monde, et je crois que ce n’est que le début. Il nous reste beaucoup de travail à faire, mais je crois que vraiment que j’appellerais les gens à éliminer ces obstacles et à aider ces communautés à se perfectionner et à s’éduquer pour qu’elles puissent s’en sortir.

Judy Fairburn

Bobbie, vous êtes une championne dans le domaine, et faites preuve d’un grand courage sur plusieurs fronts, surtout quand l’on tient compte de vos origines. Je reviens à vous sous peu, Jeanette. Je crois, Bobbie, que cela vaudrait la peine d’étoffer un peu à ce sujet, si vous n’y voyez pas d’inconvénient.

Bobbie Racette

Bien sûr que non. J’ai tellement l’habitude que les gens me voient sur Zoom, mais ce que nos auditeurs ignorent, c’est que je suis une Autochtone de la communauté LGBTQ et que je travaille dans le domaine de la technologie. C’est extrêmement rare. Et j’ai conscience que je peux utiliser mon histoire pour encourager et inspirer d’autres jeunes femmes autochtones ou des gens de la communauté LGBTQ à faire preuve de courage et à lancer leur propre entreprise.

Et s’ils ne savent pas comment le faire, ce n’est pas grave. Il existe de nombreuses ressources en ligne, c’est comme ça que je m’y suis prise. J’ai pris contact avec des collectivités, ici à Calgary, qui pouvaient m’aider. J’ai fait appel à Startup Calgary et au Conseil de développement économique de Calgary pour partir du bon pied. Et ma mission, c’est de m’assurer de constituer une communauté diversifiée et inclusive au sein de Virtual Gurus. C’est pourquoi 95 % de nos pigistes s’identifient comme femmes, que 65 % d’entre eux sont des personnes noires ou de couleur et que 45 % sont membres de la communauté LGBTQ.

J’ai entendu tellement d’histoires sur des personnes en transition qui souhaitaient aller au travail vêtues comme leur identité de genre le permettait, et qui ne le pouvaient pas. Tant qu’elles étaient en transition, elles devaient travailler de la maison. J’ai entendu parler d’Autochtones aux compétences extraordinaires qui ne parvenaient pas à décrocher un emploi. Je me suis donc donnée pour mandat de leur offrir un travail épanouissant et de travailler à la création de leur propre entreprise tout en travaillant pour Virtual Gurus. C’est ma vocation, en quelque sorte, ça l’a toujours été. Il suffit d’inspirer une seule personne pour parfois inspirer toute une nation.

Judy Fairburn

C’est très bien dit. Quant à vous, Jeanette, vous avez été au-devant de cela. Je suis extrêmement fière de ce qu’a réalisé le Conseil de développement économique de Calgary. Pour les auditeurs qui nous écoutent, sachez que la stratégie de Calgary, c’est Calgary dans la nouvelle économie. Jeanette, quel est votre appel à l’action pour propulser plus avant ce qui a été accompli dans le domaine de la réorientation, ce changement qui se produit chez nous, au Canada? Que suggéreriez-vous?

Jeanette Sutherland

Nous devons vraiment nous assurer de d’abord réduire l’écart numérique, en fournissant aux collectivités et aux communautés sous-représentées la bande passante nécessaire. Nous devons aussi rendre les programmes de formation accessibles, et les adapter à ces groupes. Si nous pouvons cultiver les talents, les industries souhaiteront travailler avec ces collectivités.

Je crois que nous devons également assurer une coopération, ainsi que des fonds pour déterminer quels sont les bons moyens d’épauler les travailleurs qui changent de carrière et de les aider à comprendre les compétences qui seront nécessaires pour leur nouvel emploi. Si un travailleur ne peut pas se voir en train de faire un nouveau travail, jamais nous ne pourrons les convaincre d’essayer. Nous devons leur montrer qu’ils sont capables de se perfectionner et d’acquérir de nouvelles compétences, qu’ils sont capables de rapidement retourner sur le marché du travail. Ils doivent comprendre que les compétences qu’ils détenaient sont toujours utiles, et que l’acquisition de nouvelles compétences ne les rendra que plus attrayants aux yeux d’un nouvel employeur.

Ensuite, l’industrie doit soutenir le perfectionnement de sa propre main-d’œuvre. Cela ne relève pas seulement des établissements postsecondaires et du gouvernement. Nous devons nous pencher sur les méthodes de l’industrie, la pousser à investir dans sa propre équipe, son propre personnel, sous peine de les perdre. Je le répète, pour rester sur le coup, nous devons nous concentrer sur l’apprentissage continu et appuyer notre main-d’œuvre afin qu’elle acquière ces compétences aussi rapidement que possible.

Judy Fairburn

Que de merveilleux points de vue aujourd’hui. Je vais essayer de résumer tout cela, tout ce qui a été dit. S’il y a une chose que je retiens, c’est le courage qui a transparu dans tous les exemples que nous avons donnés. Le courage est à la base de tout cela. Nous avons mentionné le besoin de pouvoir se visualiser faisant un nouveau travail. Nous avons parlé de coopération à plusieurs reprises, du fait que, traditionnellement parlant, nous donnions toute la responsabilité au gouvernement ou aux établissements d’enseignement, qui avaient le rôle de propulser l’apprentissage. Nous avons tous un rôle à jouer, une responsabilité, en tant que personne, en tant que petite ou grande entreprise, de consacrer une part de nous-mêmes et d’investir dans nos équipes. Encore une fois, je vous remercie toutes les deux et j’espère que nos auditeurs se sentiront inspirés. Merci.

Jamie Nordstrand (hôte)

Parlons des compétences futures est une production d’Emploi et Développement social Canada. Toutes les opinions exprimées dans ce balado sont le fait des personnes qui les ont exprimées et ne reflètent pas nécessairement celles de leur employeur ou d’EDSC. Pour obtenir plus d’information sur les compétences futures ou pour lire le rapport intégral du Conseil, lequel inclut une analyse plus détaillée sur les compétences transversales qui assureront un avenir durable, visitez Canada.ca/competences-futures. Abonnez-vous à notre balado et cliquez sur l’onglet des notifications pour savoir quand le prochain sera diffusé. Merci d’avoir écouté Parlons de compétences futures.

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Épisode 8 : Adopter de nouvelles technologies et de nouveaux modèles d'affaires pour le bien-être de notre société

Audio disponible en anglais seulement

Melissa Sariffodeen, membre du Conseil des Compétences futures et directrice générale de Canada en programmation, Tara Khazaei, responsable nationale en matière d’intelligence artificielle à Microsoft Canada, et Vik Pant, scientifique en chef et conseiller scientifique en chef à Ressources naturelles Canada discuteront de l’adoption de nouvelles technologies et de nouveaux modèles d’affaires, comme l’intelligence artificielle et l’automatisation, tout en assurant le bien être des collectivités et de la société.

Durée: 32:41 minutes

Transcription d’Adopter de nouvelles technologies et de nouveaux modèles d'affaires pour le bien-être de notre société

Vik Pant :

Et nous ne disons pas que l’IA remplacera les emplois, mais plutôt que dans de nombreux cas, elle les simplifiera, les multipliera, les complémentera ou leur donnera une valeur ajoutée. Je crois qu’une façon de voir les choses, c’est de se demander comment nous pouvons augmenter le quotient numérique cumulatif. Comment pouvons-nous accroître le savoir numérique collectif de notre main-d’œuvre à un niveau qui fait en sorte que les gens, sans devenir des experts dans le domaine, soient conscients du rôle que joue l’IA dans leur travail au quotidien, non seulement aujourd’hui, mais dans le futur?

Jamie Nordstrand (animateur) :

Bonjour et bienvenue à notre série de balados sur les compétences futures. Je suis votre hôte, Jamie Nordstrand. Depuis des années, les avancées technologiques, les changements climatiques et les nouveaux modèles d’affaires transforment les milieux de travail du monde entier. La pandémie a tout simplement accéléré cette transformation. Les employeurs, les travailleurs et les chercheurs d’emploi évoluent et accueillent à bras ouverts ces fabuleuses possibilités qui redéfinissent l’avenir de la population active canadienne. Aujourd’hui, nous écouterons Melissa Sariffodeen, membre du Conseil des compétences futures; Tara Khazaei, de l’unité de réussite client, dans le département du Responsable national de l’intelligence artificielle, chez Microsoft Canada; et Vik Pant, scientifique en chef et conseiller scientifique à Ressources naturelles Canada, et fondateur du Synthetic Intelligence Forum. Ils discuteront des répercussions de l’intelligence artificielle et de l’automatisation sur les futurs travailleurs, ainsi que la nécessité pour les travailleurs et les employeurs canadiens d’adopter la transformation numérique, de manière à rester compétitif dans le marché d’aujourd’hui et à ne pas perdre pied.

Melissa Sariffodeen :

Bonjour à tous. Je m’appelle Melissa Sariffodeen et je suis membre du Conseil des compétences futures. Je suis également co-fondatrice et présidente-directrice générale de Canada Learning Code, un organisme caritatif national qui vise à permettre à tout le monde au Canada d’acquérir les compétences et la confiance nécessaires pour bâtir, et non juste consommer, les technologies dans notre monde de plus en plus numérique. Aujourd’hui, je suis heureuse de me joindre à Tara Khazaei, de l’unité de réussite client, dans le département du Responsable national de l’intelligence artificielle, chez Microsoft Canada; et à Vik Pant, scientifique en chef et conseiller scientifique à Ressources naturelles Canada, et fondateur du Synthetic Intelligence Forum.

Nous discuterons de l’automatisation et de l’intelligence artificielle et, plus précisément, de la priorité numéro 5 du rapport du Conseil des compétences futures intitulé Le Canada – Une nation axée sur l’apprentissage. Cette priorité porte sur l’édification d’une main-d’œuvre qualifiée capable d’adopter les nouvelles technologies et de nouveaux modèles d’affaires, tout en assurant le bien-être de nos collectivités et de notre société. Avant que nous plongions dans le vif du sujet, je vais demander à Tara et à Vik de se présenter un peu. À vous la parole, Tara.

Tara Khazaei :

Merci, Melissa. C’est un plaisir pour moi de me trouver ici avec vous et Vik pour discuter de l’avenir de la population active dans un monde dominé par l’intelligence artificielle. J’ai commencé ma carrière à titre de spécialiste des données appliquées, à la Banque TD, avant de travailler pour Royalty One en tant que chercheur spécialisé. Par la suite, j’ai travaillé pour Microsoft en tant que spécialiste des données axées sur les clients, principalement avec nos clients des services financiers, ici à Toronto. Et il y a deux ans, j’ai pris la tête de notre équipe nationale sur les données spécialisées axées sur les clients. Cette équipe aide les clients dès lors qu’il est question d’intelligence artificielle. J’ai donc particulièrement hâte de discuter avec vous de ce dont sera fait un avenir propulsé par l’intelligence artificielle.

Melissa Sariffodeen :

Fantastique, merci. Et de votre côté, Vik?

Vik Pant :

Merci, Melissa, de m’accueillir parmi vous. C’est un véritable plaisir pour moi que de me joindre à Tara, mon estimée collègue dans l’industrie. Ma carrière débute de façon similaire à celle de Tara. J’ai commencé dans le domaine de l’intelligence artificielle et des données appliquées, tout en travaillant à mon doctorat. Dans le même temps, je travaillais aussi à temps plein dans l’industrie du logiciel. Après avoir quitté la grande entreprise de logiciel, je me suis joint à MaRS Discovery District. Il s’agit d’un écosystème mondialement reconnu pour les entreprises en démarrage de Toronto, mais à portée mondiale. J’étais surtout un conseiller dans ce poste, un consultant en intelligence artificielle, alors du concept au codage, tout était permis. Peu de temps après, je me suis joint au gouvernement fédéral, à Ressources naturelles Canada, où je travaille toujours. Et comme nous le soulèverons pendant notre discussion, il existe d’excellentes possibilités d’applications novatrices et créatives dans le domaine de l’intelligence artificielle et des données appliquées, qui nous permettraient de faire progresser la mission et le mandat de notre organisation. Alors encore une fois, merci de nous accueillir ici, Melissa.

Melissa Sariffodeen :

Merci à vous deux, Vik et Tara, c’est également un plaisir pour moi que de me joindre à vous pour cette discussion. Puisque nous parlerons beaucoup de l’automatisation et de l’intelligence artificielle, je voudrais d’abord expliquer brièvement en quoi ça consiste, car oui, nous en discuterons en détail. Pour commencer, l’intelligence artificielle et l’automatisation sont deux concepts souvent confondus. Ils sont liés, mais très différents. Lorsque nous parlons d’intelligence artificielle, IA pour faire court, nous parlons en réalité de la technologie qui tend à imiter les actions et les décisions permises par l’intelligence humaine. Cela nécessite une grande quantité de données.

L’automatisation, de son côté, fait plutôt référence à la technologie qui permet de simplifier les tâches répétitives et redondantes, avec ou sans le recours à l’intelligence artificielle. Avant d’entrer dans le vif du sujet, j’aimerais que vous donniez à nos auditeurs un exemple personnel d’automatisation ou d’intelligence artificielle observé dans votre quotidien ou sur votre lieu de travail. Et si vous commenciez, Vik?

Vik Pant :

Bien sûr, et je suis d’accord avec vous, dans le langage courant, les termes « automatisation » et « intelligence artificielle » sont utilisés indépendamment l’un de l’autre. Comme vous l’avez indiqué si éloquemment, je crois qu’il est important de faire cette distinction. Voici donc un exemple intéressant, et pour lequel Ressources naturelles Canada est mondialement reconnu, pas seulement au pays. Je parle ici de la télédétection et de l’analyse de l’imagerie satellitaire.

Ressources naturelles Canada collabore étroitement avec l’Agence spatiale canadienne et d’autres membres de la famille fédérale. Lorsque les images satellites nous parviennent dans nos stations au sol, elles doivent être analysées, car de ces images dépendent les décisions des programmes et des politiques, et les concepts politiques. Tout cela est basé sur ce que nous pouvons tirer des images brutes transmises par les appareils satellites. Aujourd’hui, nous comptons de grandes quantités de données, et nous pouvons modeler des systèmes qui apprennent d’eux-mêmes. Ils sont capables d’appliquer des algorithmes, soit, essentiellement, une série d’étapes logiques visant à trouver les schémas, les tendances et les relations entre les différents éléments à analyser, soit l’imagerie satellitaire en l’occurrence. Et maintenant, nous avons une panoplie de satellites et nous recevons de nombreux types d’imageries. Nous les recevons à une grande vitesse, nous entendons parler de volume, de vélocité, de valeurs et de variétés… mais maintenant, ces systèmes machine peuvent apprendre d’eux-mêmes, ils comportent des échelons et peuvent être remodelés de manière tellement dynamique qu’il est désormais possible de faire une analyse d’image automatique des images satellitaires qui nous sont transmises.

Nous pouvons faire ressortir de nombreuses caractéristiques. Nous pouvons les utiliser, par exemple, pour découvrir où se trouvent de vieilles mines abandonnées au Canada. C’est un projet que nous sommes heureux de mener en collaboration avec Microsoft. Nous essayons maintenant d’utiliser l’IA avec l’imagerie par satellite, de manière à identifier les structures qui sont situées près de ces vieilles mines abandonnées, car elles peuvent conduire à des dangers économiques ou écologiques, à de la dégradation environnementale, ce genre de chose.

En bref, je viens de vous donner une petite idée de la manière dont nous pouvons utiliser l’intelligence artificielle pour orienter toute tentative visant à simplifier les activités de politiques, et ce, en partant du sommet. L’exploitation minière est l’une de ces activités. Une autre consiste à faire l’inventaire de la couverture forestière du Canada. Et il y a tellement d’autres exemples que je vais m’arrêter là.

Melissa Sariffodeen :

C’est fascinant, vraiment, c’est très intéressant. Merci beaucoup de nous en avoir parlé. Et vous, Tara, avez-vous un exemple des effets de l’automatisation ou de l’IA dans votre vie ou sur votre lieu de travail?

Tara Khazaei :

Oui, absolument. L’IA est pleinement intégrée dans notre quotidien et notre travail, et parfois, sans que nous en soyons nécessairement conscients. Et la plupart d’entre nous utilisent des assistants numériques personnels de façon régulière. Au quotidien, nous recourrons à des moteurs de recherches fondés sur l’intelligence artificielle, si ce n’est toutes les heures. Et nous avons tous tiré profit des recommandations qui nous sont envoyées pour décider de notre prochain achat, de la prochaine série ou musique que nous allions écouter. Cela dit, puisque l’objectif de ce balado est de discuter du milieu de travail, je vais vous donner un exemple de la manière dont l’automatisation, à l’aide de l’IA, dans ce cas précis, a changé ma façon de travailler, surtout depuis le début de la pandémie.

Comme je l’ai mentionné plus tôt, je fais partie d’une organisation de Microsoft axée sur les clients, et nous servons tous les organismes canadiens, d’un océan à l’autre. Comme vous pouvez l’imaginer, surtout ces derniers temps, nous nous reposons lourdement sur la technologie, notamment Microsoft Teams et les fonctionnalités issues de l’IA qui nous permettent de nous connecter les uns aux autres et de coopérer avec nos clients. L’une de ces fonctionnalités très utiles que nous utilisons maintenant, c’est celle qui nous permet de faire des transcriptions instantanées. Nos réunions deviennent plus productives, ainsi que plus inclusives pour les participants qui ont des déficiences auditives ou une moins bonne maîtrise de la langue, par exemple. Autre chose que je trouve utile, c’est l’aide visuelle offerte par l’IA de Teams, surtout si l’on tient compte du fait que maintenant, beaucoup de participants aux réunions travaillent de la maison, où il y a le bruit des enfants et des animaux qui courent. C’est la même chose pour la possibilité de faire de l’interprétation simultanée, les recommandations accessibles de PowerPoint et les capacités de détection dans Outlook. Il n’y a pas de limite aux exemples que je pourrais donner de ce que l’IA fait pour améliorer mon travail au quotidien, Melissa.

Melissa Sariffodeen :

Merci. Mon expérience à Canada Learning Code témoigne de la même chose que vous, nous avons recouru à cette technologie et ça a énormément augmenté l’accessibilité, exactement comme vous avez dit. Les possibilités sont tout simplement infinies.

Il y a quelques sujets dont j’aimerais discuter avec vous aujourd’hui. Commençons par l’apport de l’intelligence artificielle dans le développement de la main-d’œuvre et dans la planification. Je vous laisse décider qui commence, mais je tiens à ce qu’on aborde les implications que ça peut avoir, les manières dont nous pouvons mesurer la réussite du développement et de la planification. Comment l’intelligence artificielle peut-elle constituer une possibilité de croissance pour les organisations? Alors, qui se lance?

Vik Pant :

Moi, je veux bien. C’est une idée très intéressante. Je crois qu’il y a deux façons de voir les choses en ce qui concerne la mise en commun de l’intelligence artificielle et de la planification de la main-d’œuvre, surtout en vue du futur. La première, c’est de regarder l’IA et les données, ainsi que les implications en matière de technologie et de logiciel, et de voir les carrières qui peuvent en découler. On ne s’attend pas à ce que tout le monde devienne expert dans le domaine au quotidien. Mais en sachant que l’intelligence artificielle affecte une part grandissante de notre vie, autant professionnelle que personnelle, il est normal de se dire que les gens interagiront avec l’intelligence artificielle au travail de manière de plus en plus prononcée. Et nous ne disons pas que l’IA remplacera les emplois, mais plutôt que dans de nombreux cas, elle les simplifiera, les multipliera, les complémentera ou leur donnera une valeur ajoutée. Je crois qu’une façon de voir les choses, c’est de se demander comment nous pouvons augmenter le quotient numérique cumulatif. Comment pouvons-nous accroître le savoir numérique collectif de notre main-d’œuvre à un niveau qui fait en sorte que les gens, sans devenir des experts dans le domaine, soient conscients du rôle que joue l’IA dans leur travail au quotidien, non seulement aujourd’hui, mais dans le futur?

Parce qu’en toute honnêteté, la presse et les médias populaires véhiculent bien des mythes. C’est le sensationnalisme qui fait dire que l’IA va remplacer les emplois et que des robots prendront la place des humains. Je crois qu’il est important que chacun d’entre nous adopte une vision raisonnable de notre travail, de nos domaines d’action, et que l’on analyse les répercussions qu’a l’IA aujourd’hui, et celles qu’elle aura très probablement dans le futur. C’est une façon de voir les choses.

Et je crois que la deuxième façon de voir, c’est par le prisme de celui qui élabore les politiques, et qui observe notre façon d’utiliser les outils mis à notre disposition, contre les capacités de l’IA, et qui, de là, prend des décisions éclairées quant à l’avenir de la main-d’œuvre.

Melissa Sariffodeen :

Oui, absolument, merci. Je crois que vous soulevez un point important; les emplois ne vont pas tout simplement disparaître, comme nous l’entendons parfois dire dans les médias populaires. Ils seront complémentés par ces technologies, qui leur apporteront une valeur ajoutée. Tara, vous le savez déjà, j’adore votre perspective concernant les effets de l’IA sur le développement de la main-d’œuvre et la planification.

Tara Khazaei :

Je suis entièrement d’accord avec vous deux. De nos jours, de nombreux dirigeants et organisations canadiens avec lesquels nous travaillons pensent que l’IA a déjà prouvé sa valeur. Dans les faits, ils sont de plus en plus nombreux à croire qu’elle pourra grandement changer leur entreprise dans les trois à cinq ans, car elle sera le principal moteur de ces transformations. Le développement des solides capacités de l’IA et leur intégration dans la planification en vue de développer la main-d’œuvre sont indispensables pour accélérer la transformation numérique, pour minimiser les risques qui y sont associés et pour demeurer compétitifs sur le marché, sans perdre pied.

Tout cela requiert le changement culturel auquel vous avez fait allusion, Vik, lorsque vous avez parlé du portrait que dressent les médias de l’IA. Les gens sont inquiets quant au fait que l’IA et l’automatisation rendront certains emplois obsolètes, alors qu’en réalité, il s’agit d’un outil qui les aidera à mieux atteindre leur objectif, à l’obtenir plus facilement, et en l’occurrence, nous parlons de leur emploi. Et il y a deux façons pour que ça marche.

La première : l’IA est là pour aider les employés à gagner du temps, leur éviter certaines tâches répétitives. Voici un exemple : l’une des demandes les plus fréquentes de nos clients concerne la modernisation de leurs centres d’appels. Ceux qui opèrent encore selon la méthode traditionnelle, dirons-nous : une fois l’appel terminé, les agents doivent se souvenir des points saillants de la conversation afin de les noter. Dans le centre d’appels moderne, l’IA se charge de ces tâches répétitives, permettant aux agents de se concentrer pleinement sur les clients, afin de leur procurer une meilleure expérience client, plus rapidement.

Et dans la majorité des cas, il n’est même pas question d’automatisation. Le rôle de l’IA est d’augmenter l’intelligence des employés en leur permettant de découvrir de nouvelles perspectives, en accroissant leur savoir dans le domaine des affaires, et même, en leur permettant, en quelque sorte, de créer et d’innover, et ce, plus vite.

Une autre demande assez fréquente en lien avec l’IA concerne les analyses et la détection dans le domaine de la fraude. Par exemple, l’IA peut facilement repérer les réclamations d’assurance ou les transactions suspectes, ou encore, approfondir les enquêtes menées par les employés, augmentant ainsi les chances des organisations et des employeurs de repérer et de prévenir les activités frauduleuses. Je crois que ce changement culturel dont nous avons parlé est la clé. Et oui, il est certainement impératif que nous incluions dès aujourd’hui l’IA dans la planification du développement de notre main-d’œuvre.

Melissa Sariffodeen :

Merci pour ce point de vue, vraiment, c’est super. Et je veux amener la conversation sur un autre sujet, qui est en quelque sorte lié à quelque chose que vous avez dit tous les deux. Vous le savez, nous nous tournons vers le numérique, et depuis la pandémie, c’est devenu synonyme de survie pour d’innombrables organisations. Cela étant, avez-vous également entendu parler de problématiques concernant notre plongeon dans le monde numérique, y avez-vous été confrontés, notamment en ce qui concerne la cybersécurité? Tara, je vous cède la parole.

Tara Khazaei :

Au quotidien, nous travaillons essentiellement avec des clients qui ont déjà entamé leur transformation numérique vers les systèmes infonuagiques et l’IA. Fort heureusement, nous n’avons pas rencontré de problèmes majeurs auxquels nous n’étions pas préparés. Toutefois, l’un des défis pour beaucoup de nos clients comme pour de nombreuses organisations, c’est justement d’étalonner les obstacles à surmonter.

Beaucoup de gens, toutes organisations confondues, n’étaient pas nécessairement bien outillés pour gérer leurs activités quotidiennes dans un monde virtuel. De plus, il leur a fallu un peu de temps pour atteindre un bon rythme en ce qui concerne l’utilisation des technologies les plus modernes du milieu de travail, pour parvenir à réaliser leurs tâches quotidiennes à la même vitesse qu’avant. Heureusement, je peux affirmer qu’au cours des dernières années, surtout depuis le début de la pandémie, nous n’avons pas constaté de problèmes majeurs, tout particulièrement dans le domaine de la cybersécurité.

Melissa Sariffodeen :

Merci. Il est certain que nous aborderons l’acquisition de compétences, de connaissances, car c’est une grande part du rapport du Conseil des compétences futures, et j’ai très hâte d’en parler. Avant cela, toutefois, Vik, avez-vous un avis sur la question? Que pensez-vous de l’éventualité d’avoir à surmonter des obstacles imprévus dans un monde numérique, surtout lorsqu’on tient compte du fait que cette transition est précipitée par une pandémie mondiale?

Vik Pant :

C’est une excellente question, Melissa. Et j’aimerais dire que les obstacles auxquels tu fais allusion, nous les avons vus venir de loin au gouvernement du Canada, mais ce n’est certainement pas le cas pour beaucoup à l’extérieur du Canada. C’est une réalité qui a orienté nos réflexions sur le sujet, car nous utilisons de plus en plus l’intelligence artificielle tout partout, et non seulement au gouvernement, mais aussi dans le secteur privé, dans l’éducation, dans le secteur sans but lucratif. Dans la plupart des cas, les questions entourant la capacité d’expliquer et de comprendre ces systèmes, entourant l’égalité, l’impartialité et la protection des renseignements personnels ne sont venues qu’après les faits. Les gens mettent sur pied un modèle ou un système basé sur l’IA, et ensuite, comme un complément, ils commencent à ajouter ces considérations concernant l’égalité et l’éthique dans les exigences.

Cependant, si on les oublie d’entrée de jeu, ce sont des sujets qui ne peuvent pas être tout simplement ajoutés à un système fonctionnel. On ne peut pas soudainement rendre un système plus facile à expliquer ou à comprendre, et il est presque trop tard pour les questions d’égalité et d’impartialité.

C’est pour ça qu’on a adopté une approche très proactive au gouvernement du Canada. Et encore, en coopérant avec des partenaires comme Microsoft, nous nous sommes assurés de regarder au-delà des caractéristiques techniques et fonctionnelles d’un système basé sur l’IA, et ce, à mesure que nous le bâtissions. Nous nous attardons également aux très importantes exigences sociales, techniques et, dans bien des cas, juridiques qui entourent notamment la protection des renseignements personnels, l’égalité, l’éthique, l’impartialité et la compréhensibilité.

Melissa Sariffodeen :

Oui, merci. Je vous ai entendu tous les deux dire combien l’IA et l’automatisation sont répandues et omniprésentes, combien elles transforment les milieux de travail et combien elles les préoccupent. Mais parlons maintenant de l’importance pour les chercheurs d’emploi, les travailleurs et les employés canadiens d’acquérir ces compétences numériques, dès aujourd’hui et pour longtemps.

Vik Pant :

Je dirais que c’est extrêmement important, et que ça diffère très certainement d’un emploi, d’un secteur ou d’une industrie à l’autre. Je crois que ça pourra également varier, quoi qu’à plus petite échelle, d’une région à une autre. Mais oui, c’est très important, et on a beaucoup d’exemples. Tara a d’ailleurs mentionné les institutions financières, avec lesquelles il faut coopérer étroitement. Nous savons que ces dernières ont maintenant transformé la majorité de leurs services, ou du moins, y ont ajouté les avancées de l’IA.

Regardez le commerce de détail. Je pense à la façon dont ces organisations ciblent maintenant les consommateurs, comment ils assurent la fidélité, leur façon de recommander des produits qui pourraient plaire aux acheteurs… Dans des industries où les employés viennent de toutes les régions, sans discrimination aucune, même les télécommunications et le transport, l’IA a de grandes répercussions.

Alors tout cela dépend du rôle d’une personne ou du secteur dans lequel elle travaille, de ses ambitions, car elle veut peut-être décrocher une promotion ou changer de secteur. Je crois que c’est une analyse qu’il faut mener sur deux plans. Au premier plan, je dois déterminer, selon le rôle que j’occupe actuellement et le secteur dans lequel je suis, les besoins que je dois combler pour réussir. Parce qu’à un moment donné, l’intégration de l’IA dans les logiciels utilisés ou les processus observés viendra modifier mon rôle.

Mais ensuite, il y a une autre question que je dois me poser, soit qu’il est peut-être temps pour moi de changer d’industrie, ou d’aller chercher une promotion. Ça veut dire que je dois non seulement évaluer les répercussions de l’IA sur mes responsabilités actuelles, mais également sur les responsabilités que j’aurai.

Alors oui, je dirais que l’acquisition de compétences numériques est très importante, surtout que, comme l’a dit Tara, la vitesse du changement s’accélère. Nul besoin de devenir un spécialiste des données ou un gourou de l’IA, mais je crois que tout le monde a besoin d’un certain niveau de connaissances numériques, d’un certain savoir qui leur permettra de faire des choix éclairés en ce qui concerne leur apprentissage et la progression de leur carrière.

Melissa Sariffodeen :

Tout à fait. Et vous, Tara, qu’en pensez-vous?

Tara Khazaei :

Bien sûr. Je suis entièrement d’accord avec Vik. Nous en avons parlé, l’IA est utilisé comme un outil d’automatisation, ou comme complément dans plusieurs professions, maintenant. De ce fait, une connaissance et une expertise de l’IA et des compétences numériques générales sont pertinentes et cruciales dans presque toutes les disciplines. Des professionnels de la santé utilisant l’IA pour pratiquer la médecine de précision ou donner des diagnostics. Des comptables ou des organisations utilisant l’apprentissage machine et l’IA pour analyser des documents de vente ou des contrats de location et ainsi déterminer les tendances et les données aberrantes. Ou encore, des spécialistes en sciences sociales, qui ont maintenant accès à des quantités massives de données tirées des médias sociaux, et qui se servent de l’IA pour comprendre les interactions sociales et les dynamiques entre différents segments de la population, à une échelle qui était auparavant inatteignable.

L’IA est donc en train de faire son chemin à travers toutes les disciplines, dans toutes les formes de service à la clientèle, et ce, qu’importe l’industrie, dans le secteur public comme privé. Elle est vraiment partout. Il est donc essentiel de perfectionner les compétences numériques requises pour développer les applications de l’IA ou pour s’en servir de façon responsable et efficace au quotidien.

Melissa Sariffodeen :

Je suis à 100 % d’accord. Dans le rapport du Conseil des compétences futures, nous parlons d’une nation axée sur l’apprentissage. Je crois que ça tombe à point nommé que ces compétences soient cruciales, pour notre présent comme pour notre avenir. Cela étant, nous pensons également aux aspects pratiques des prochaines étapes. Selon vous, qu’est-ce qui devrait absolument se produire pour garantir que cette génération et la prochaine sont prêtes pour l’avenir du travail? Tara?

Tara Khazaei :

Cette génération comme la prochaine doivent absolument se concentrer sur l’acquisition des compétences et des habiletés qui leur permettront de s’adapter rapidement à l’environnement changeant du marché du travail. Et c’est encore plus essentiel dans un monde propulsé par l’IA, où le taux d’innovation est très élevé. Nous devons nous assurer que notre système d’éducation et les organisations canadiennes valorisent et reconnaissent l’agilité d’apprentissage et la croissance.

Comme vous le savez peut-être, Microsoft a enregistré des rendements records au cours des dernières années, lesquels sont essentiellement attribuables à un changement culturel. Nous avons choisi d’adopter une philosophie de croissance qui favorise cet amour pour l’apprentissage. Cette passion qui pousse à repousser ses limites est primordiale pour parvenir à de grandes réussites en ce monde qui évolue rapidement. En ce qui me concerne, on en revient à la promotion d’une culture d’apprentissage continu qui nous permettra d’atteindre de nouveaux sommets grâce à l’IA.

Melissa Sariffodeen :

C’est excellent, et j’adore cette idée d’agilité d’apprentissage. Vik, je suis curieuse d’entendre votre avis sur la question. D’après vous, que faut-il faire pour soutenir cette génération et la suivante? Je sais que vous enseignez également à l’Université de Toronto; peut-être pouvez-vous également nous parler des compétences ou des connaissances que nous devrions inculquer aux jeunes comme aux adultes dans ce domaine?

Vik Pant :

Absolument. Je crois que l’un des enjeux en ce qui concerne l’IA, c’est le fait qu’il s’agit d’un domaine très vaste, qui a de nombreuses répercussions dans tous les secteurs, emplois et rôles. Cela dit, dans un même temps, si vous intégrez tout juste le domaine ou si votre expérience technique n’est pas des plus orthodoxes, vous pouvez tout de même apporter votre contribution et vous bâtir une carrière réussie. J’aime beaucoup la manière dont l’atelier Ladies Learning Code a structuré son contenu, le rendant, d’un point de vue pratique, tellement ciblé. Je ne dis pas que les gens dans ce domaine deviennent des experts en un clin d’œil, mais ça pourrait leur donner de bonnes bases qu’ils pourront ensuite fortifier et diversifier. Cela permettra une meilleure transition vers le monde de la spécialisation des données.

Je tiens donc à lever mon chapeau à l’organisation Canada Learning Code, et je crois que nous devrions encourager et soutenir ce genre d’organisations. Ensuite, j’ajouterais qu’il est très important d’avoir des communautés de pratique. Nous savons que dans les organisations, les gens se font souvent dire de participer à tel ou tel groupe en dehors de leurs heures de travail régulières. Prenons l’exemple de Meetups. Il s’agit d’un concept incroyable, car il importe peu que vous soyez ou non un expert dans le domaine des données ou de l’IA. Ce genre de groupe constitue cet endroit, sans lien avec votre travail, où vous pouvez prendre contact avec des gens qui pensent comme vous, qui ne vous jugeront pas. Il vous procure un espace sûr où vous pouvez vous informer sur les démarches que vous devez faire en termes d’acquisition de compétences, de formation, d’apprentissage et de réseautage, car dans les faits, il s’agit d’un aspect très important de la transition et de l’avancement professionnels.

Melissa Sariffodeen :

Vous ne pouvez pas le voir, parce que nous enregistrons un balado, mais je suis en train de hocher la tête et de sourire, parce que vous avez tous les deux mentionné tellement de domaines et de facettes sur lesquels l’IA et l’automatisation peuvent influer, et je trouve ça absolument passionnant. Et je sais que le rapport du Conseil des compétences futures énonce une vision particulièrement ambitieuse. Et malheureusement, le temps qui nous est accordé tire à sa fin, alors je crois que je vais nous laisser conclure sur ces dernières grandes questions : quels défis anticipez-vous? Quelles possibilités voyez-vous? Et enfin, avez-vous des conseils ou des mises en garde sur l’IA, l’automatisation et l’édification d’une nation axée sur l’apprentissage, que vous aimeriez transmettre à ceux qui nous écoutent?

Tara Khazaei :

Oui, tout à fait. En ce qui concerne les défis possibles dans l’édification d’une nation axée sur l’apprentissage, j’en vois quatre. Le premier, nous en avons déjà parlé, c’est le manque de confiance dans l’IA et dans ses capacités. Des systèmes biaisés et injustes allant à l’encontre de l’éthique et basés sur l’IA ont été déployés à l’intention du grand public par le passé, entraînant ce manque de foi et de confiance en l’IA. Je veux mettre l’accent sur le fait qu’il est primordial de développer l’IA de manière responsable et de l’encadrer si nous voulons rebâtir la confiance des gens et motiver le pays à se former et à utiliser les technologies qui font appel à l’IA.

Dans le même ordre d’idée, je vois un autre défi, celui qui concerne la manière dont les médias décrivent l’IA. De cela aussi nous avons parlé, du fait que selon les médias, les robots vont débarquer et conquérir le monde. Ils sont nombreux à douter que l’IA puisse nous aider à nous améliorer. Ils croient plutôt qu’elle va faire notre travail à notre place. Par conséquent, promouvoir une culture dans laquelle les gens croient pouvoir s’épanouir grâce à l’IA est essentiel, en plus de constituer un défi.

De plus, à mesure que nous y travaillerons, nous devrons également accroître la diversité dans le secteur. L’IA est un milieu majoritairement masculin. Pour que le Canada puisse devenir une nation axée sur l’apprentissage inclusif, nous devons nous pencher sur l’existence de minorités genrées et ethniques dans ce domaine, et soutenir les organisations comme la vôtre, Melissa, qui s’efforcent d’accroître la diversité dans ce secteur.

Et, le plus évident, c’est le manque de formation, laquelle est en tout temps nécessaire à l’acquisition et au perfectionnement des compétences requises pour utiliser l’IA au sein de la main-d’œuvre actuelle, car de nombreuses organisations sont obnubilées par les répercussions immédiates sur les affaires et le rendement. Nous devons donc inciter les entreprises canadiennes à réserver du temps pour la formation de la main-d’œuvre et à cultiver, au sein de la direction, une philosophie axée sur la croissance.

Melissa Sariffodeen :

Merci. Je crois que ça donne un résumé très pratique, et une bonne idée des prochaines étapes pour les personnes qui nous écoutent. Qu’en pensez-vous, Vik? Vous pensez à d’autres défis, possibilités ou conseils pour nos auditeurs?

Vik Pant :

Oui. J’aimerais soulever deux autres points, orientés autant vers les possibilités que vers les défis. En tant que nation, nous devons avoir cette discussion de manière collective et déterminer quelles sont nos priorités, du point de vue de la science comme de la technologie. J’ai été très content de constater, lors de récentes annonces de financement faites par le gouvernement dans le domaine des sciences et des technologies, que l’intelligence artificielle était l’une des grandes priorités.

Les autres domaines prioritaires cernés sont la physique quantique, la photonique et la génomique. Par conséquent, je crois qu’il est très important de garder en tête que le Canada a une excellente réputation, amplement méritée, de chef de file mondial en ce qui concerne la théorie, la conceptualisation, la pratique et la mise en œuvre de l’IA tout au long de la décennie 2010 et maintenant également, alors que la décennie 2020 commence. Cependant, il n’est pas simplement question de fonds versés au cours des deux dernières années. C’est la conséquence directe d’investissements réalisés par le gouvernement du Canada, qui s’est montré visionnaire, dans les années 70, 80 et 90. C’est ce qui nous a donné une longueur d’avance, tandis que les autres pays se trouvaient en quelque sorte confrontés au fait que le Canada avait déjà fait les premiers pas.

Je veux dire autre chose en lien avec cela. Quand je regarde le plan de financement du gouvernement concernant la photonique, la génomique, l’IA et la physique quantique, par exemple, je pense que c’est un bon plan. C’est une grande source de possibilités, car la science quantique, le mariage entre cette science et la technologie et l’informatique quantique permettront de déverrouiller le potentiel de l’IA qui, à son tour, pourra être utilisée pour concevoir et construire des systèmes quantiques encore meilleurs.

Enfin, mon dernier point, et Tara et moi l’avons déjà mentionné, concerne l’éthique dans le domaine de l’IA. Je crois que penser à l’éthique comme à un ajout intéressant et l’intégrer alors que le système performe déjà très bien selon une échelle métrique technique serait une erreur. C’est pourquoi, si on analyse les mesures du gouvernement du Canada et l’étude d’impact algorithmique, je crois qu’il est très important que les gens en sachent plus sur les aspects techniques de l’IA. Ils doivent être conscients de la valeur et de l’importance des aspects sociotechniques de la question, ils doivent en être conscients et les comprendre tels que je les ai décrits. Merci, Melissa.

Melissa Sariffodeen :

Merci. Cela est tout à fait juste. Je crois que nous en avons terminé pour aujourd’hui, cela dit; le temps passe tellement vite. Vous avez tous les deux mentionné et abordé le sujet de la priorité 5 du rapport, soit l’importance de mettre sur pied une main-d’œuvre équipée des compétences nécessaires pour s’adapter aux nouvelles technologies comme l’IA et l’automatisation. Cela étant, nous devons également assurer le bien-être des collectivités et de la société. C’est un point que vous avez soulevé, Vik, merci beaucoup. J’ai énormément aimé discuter avec vous deux, ce fut un immense plaisir. Tara, Vik, merci à vous deux de vous être joints à moi aujourd’hui. Nous reprendrons bientôt cette discussion. Merci à tous.

Vik Pant :

Merci.

Tara Khazaei :

Merci beaucoup.

Jamie Nordstrand (animateur) :

Parlons des compétences futures est une production d’Emploi et Développement social Canada. Toutes les opinions exprimées dans ce balado sont le fait des personnes qui les ont exprimées et ne reflètent pas nécessairement celles de leur employeur ou d’EDSC. Pour obtenir plus d’information sur les compétences futures ou pour lire le rapport intégral du Conseil, lequel inclut une analyse plus détaillée sur l’adoption de nouvelles technologies et de nouveaux modèles d’affaires pour le bien-être de notre société, visitez Canada.ca/competences-futures. Abonnez-vous à notre balado et cliquez sur l’onglet des notifications pour savoir quand le prochain sera diffusé. Merci d’avoir écouté Parlons de compétences futures.

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