Regards sur l’évaluation horizontale : Programme des espèces en péril
Le Canada doit assurer la protection et la conservation des espèces en péril aux fins du maintien et de la protection de la biodiversité. La Loi sur les espèces en péril (LEP) fournit le cadre juridique pour la protection des espèces répertoriées comme disparues du pays, en voie de disparition et menacées, ainsi que leur habitat essentiel, et pour la gestion des espèces préoccupantes.
En vertu de la LEP, il incombe au gouvernement fédéral de protéger les oiseaux migrateurs et les espèces aquatiques à tout endroit où ils sont présents et les espèces répertoriées présentes sur les terres fédérales.
À propos du programme
Environnement et Changement climatique Canada (ECCC), Pêches et Océans Canada (DFO) et l’agence Parcs Canada (APC), connus sous le nom de « ministères compétents », partagent la responsabilité de la mise en œuvre de la LEP par le biais du Programme des espèces en péril (PEP). Ces ministères compétents effectuent cette mise en œuvre du PEP par l’entremise d’une gamme d’activités connexes, et ce, tout au long des cinq étapes du cycle de conservation des espèces en péril: évaluation, protection, planification du rétablissement, mise en œuvre et suivi et évaluation. Les dépenses totales engagées dans la cadre du programme pendant la période de cinq ans s’élevaient à environ 444 millions de dollars.
Ce que l’évaluation a révélé
Le Programme des espèces en péril demeure pertinent parce qu'il y a un besoin continu de protéger les espèces en péril et la biodiversité. De plus, le programme est aligné sur les priorités, les rôles et les responsabilités du gouvernement fédéral.
Le rendement du PEP a été évalué par rapport aux résultats escomptés pour chacune des cinq étapes du cycle de conservation. L’évaluation a permis d’établir que, dans l’ensemble, le programme contribue au moins dans une certaine mesure aux résultats qui en sont attendus. Voici quelques‑unes des principales constatations.
- Le rétablissement des espèces constitue l’objectif ultime du PEP. Cependant, le processus devant être suivi pour atteindre cet objectif à long terme peut prendre des décennies pour certaines espèces. Selon les évaluations qui ont été effectuées par le Comité sur la situation des espèces en péril au Canada, 10 ans après avoir été répertoriées, la situation de la plupart des espèces (65 %) est toujours la même dans la liste. Dans le cas de 16 % des espèces évaluées, des preuves indiquent que des progrès sont réalisés vers l’atteinte des objectifs, et 6 % des espèces évaluées qui étaient répertoriées précédemment ne sont plus en péril.
- L’habitat essentiel des espèces terrestres répertoriées et, dans une moindre mesure celui des espèces aquatiques, est protégé dans les aires protégées fédérales. Sur d’autres terres fédérales, la protection nécessaire de l’habitat essentiel est réalisée dans une mesure limitée au moyen d’évaluations de la protection, de déclarations et d’ordonnances de protection. Sur les terres non fédérales, le gouvernement a pris des décrets de protection d’urgence pour deux espèces. Quelques outils de nature non réglementaire comme les accords de conservation (mentionnés dans la LEP), la certification de l’industrie et les plans de gestion de l’utilisation des terres pourraient être bénéfiques dans les circonstances appropriées. Cependant, le PEP a rarement recours à ces outils.
- Le traitement réussi de l’arriéré des plans de rétablissement exercera de nouvelles pressions quant à la mise au point et la publication de plans d’action. La prise en ligne de compte précoce de cette étape de l’établissement des plans de rétablissement pourrait permettre d’éviter de futurs arriérés. En outre, alors qu’il semblait que les partenaires comprenaient mieux les objectifs en matière de conservation des espèces au moyen de l’établissement de plans de rétablissement, les intervenants qui ne participent pas à l’exécution des programmes au plan national semblaient ne pas les comprendre.
- Bien qu’une partie des déclarations obligatoires soient présentées dans les rapports annuels de la LEP, les contraintes de ressources exercent des effets défavorables sur la capacité de surveiller adéquatement toutes les espèces répertoriées, ainsi que la capacité du programme de quantifier l’efficacité des mesures de rétablissement.
La conception du PEP convient et celui-ci est en général bien géré. Il existe toutefois des secteurs dans lesquels l’efficience et l’exécution du programme peuvent être améliorées.
- Malgré de récentes améliorations, une meilleure intégration des étapes du cycle de conservation et l’utilisation accrue d’approches multi-espèces ou axées sur l’écosystème pourraient accroître l’efficience.
- Des ressources limitées ont une incidence sur la capacité de mettre le programme en entier en œuvre et de veiller à la conformité avec les exigences de la LEP. En particulier, la charge de travail du programme augmente et certaines activités obligatoires, notamment les méthodes de réglementation aux fins de protection, exigent d’importantes ressources. Cela a aussi un effet sur la mise en œuvre des activités en matière de rétablissement menées par les partenaires et les parties prenantes, qui considèrent que les programmes de subventions et contributions du PEP sont sous-financés. Une plus grande latitude relative au financement de projets permettrait aux gestionnaires du PEP de canaliser les fonds pour régler les problèmes de capacité et de mieux appuyer les approches multi-espèces ou axées sur l’écosystème.
- Les partenaires fédéraux, provinciaux et territoriaux collaborent entre eux et s’engagent auprès d’autres partenaires. Il existe néanmoins des possibilités d’amélioration en ce a trait à la collaboration entre les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux afin de favoriser une protection sans faille des espèces en péril sur l’ensemble des terres fédérales et non fédérales. Par ailleurs, l’engagement accru des peuples autochtones s’impose pour faire en sorte que leurs points de vue soient entendus et intégrés aux étapes du cycle de conservation.
Recommandations et réponse de la direction
Compte tenu de la nature de la présente évaluation, qui était axée sur le PEP dans son ensemble, et des diverses responsabilités des trois ministères compétents, les recommandations reflètent des observations communes à tous ou à la plupart des partenaires fédéraux. Par conséquent, les recommandations sont formulées en termes généraux. Elles s’appliquent généralement aux trois ministères, mais les réponses de la direction précisent les mesures que chaque partenaire fédéral concerné peut prendre pour contribuer au mieux à l’application de chaque recommandation.
Les recommandations suivantes s’adressent à la SMA du Service canadien de la faune (ECCC), le SMA des Écosystèmes aquatiques (MPO) et le vice-président de l’Établissement et la conservation des aires protégées (APC). Ils sont d’accord avec la recommandation et ont mis au point une réponse de la direction qui les traite adéquatement.
Recommandation 1 : prendre des mesures pour éliminer les retards concernant les engagements de publier des plans d’action et d’accumuler des exigences de protection pour l’habitat essentiel des espèces fédérales et des espèces sur le territoire domanial (article 58 de la LEP).
Réponse de la direction : Les Ministères et l’Agence iront de l’avant avec la planification et la protection, conformément à l’orientation stratégique et aux priorités énoncées dans le programme La nature en héritage du Canada proposé dans le budget de 2018, notamment l’avancement des approches écosystémiques et multi-espèces pour les lieux, les espèces, les menaces et les secteurs prioritaires, le cas échéant.
Recommandation 2 : chercher des moyens d’améliorer a) l’efficacité de la consultation et de la mobilisation des peuples autochtones quant à la conservation et à la protection des espèces en péril et b) l’intégration des connaissances autochtones disponibles dans l’évaluation des espèces et la planification du rétablissement.
Réponse de la direction : Les Ministères et l’Agence reconnaissent la pertinence du renforcement des capacités internes et autochtones afin de mieux respecter les obligations de consultation et de coopération de la LEP tout au long du cycle du programme (évaluation, inscription, rétablissement, protection, la délivrance de permis et l’établissement de rapports). Une partie importante de ce programme consiste à aider les peuples autochtones à acquérir la capacité de participer de façon significative à la mise en œuvre de la LEP. ECCC, en collaboration avec le MPO et l’APC, redoublera ses efforts à cet égard, comme il est énoncé dans le programme La nature en héritage.
Beaucoup de sites de l’APC sont gérés avec des conseils de gestion coopérative autochtones. L’APC continuera de travailler en collaboration avec les représentants autochtones sur la gestion des espèces en péril dans les lieux patrimoniaux protégés. L’APC tient également régulièrement des consultations sur les plans d’action multi‑espèces et continuera cette pratique exemplaire. Le MPO augmentera le nombre de programmes actuels liés aux partenariats autochtones en matière de conservation des espèces en investissant davantage dans le renforcement des capacités. Le MPO facilitera également la participation des groupes autochtones aux efforts de mise en œuvre du rétablissement dans les régions prioritaires, pour les espèces prioritaires et pour les menaces prioritaires. ECCC dirigera la collaboration avec le Conseil autochtone national sur les espèces en péril (CANEP) récemment reconstitué, ainsi qu’avec les comités bilatéraux en place ou à créer avec chacune des trois organisations autochtones nationales, pour veiller à ce que les initiatives correspondent aux besoins et aux intérêts des communautés autochtones. Un objectif clé consistera à assurer que les espèces en péril sont protégées sur les terres autochtones considérées comme des terres fédérales en vertu de la LEP, y compris les accords autogérés lorsque les Premières Nations sont d’accord.
La conservation et le rétablissement des espèces en péril dépendent de meilleures connaissances scientifiques, de connaissances traditionnelles et locales et de l’information sur les espèces lorsque l’état des espèces est évalué et que les plans de rétablissement et d’action d’une espèce sont formulés. Le COSEPAC, par l’entremise du Sous‑comité des connaissances traditionnelles autochtones, prépare des plans de travail annuels qui définissent les priorités en lien à la collecte des connaissances autochtones. Les Ministères et l’Agence travailleront avec les peuples autochtones pour discuter de la façon dont les connaissances autochtones peuvent être mieux intégrées dans tous les processus en vertu de la LEP.
Recommandation 3 : préciser et communiquer aux intervenants le rôle et l’utilisation d’outils non réglementaires pour soutenir les résultats de conservation pour les espèces en péril, y compris les besoins en ressources connexes.
Réponse de la direction : Les Ministères et l’Agence reconnaissent que les outils non réglementaires offrent des possibilités de générer des résultats en matière de conservation. Les accords et les initiatives de financement de l’intendance sont utilisés depuis de nombreuses années par les organisations et les propriétaires fonciers pour la conservation et le rétablissement des espèces en péril. À ce jour, ECCC a signé plus de 40 accords de conservation en vertu de l’article 11 avec des Premières Nations ou des producteurs agricoles. ECCC examinera les leçons retenues de ces accords au fur et à mesure que d’autres accords sont mis de l’avant. En outre, des énoncés de politique et des documents d’orientation seront mis au point pour guider la prise de décision et la mise en œuvre d’approches liées à l’utilisation de programmes de certification, de codes de pratique et d’autres mesures de remplacement pour atteindre les résultats de conservation. Le MPO continuera d’utiliser des outils non réglementaires pour faire progresser les objectifs de conservation et de rétablissement.
Les progrès réalisés quant à la mise au point d’accords supplémentaires à des fins précises dépendent de la disponibilité de financement approprié. À cet égard, le budget de 2018 soulignait l’engagement du gouvernement à l’égard du Fonds de la nature, qui soutient des partenariats avec des entreprises, des organismes sans but lucratif, des provinces, des territoires et d’autres partenaires. Parmi ses objectifs, le Fonds permettra d’acquérir des terres privées, de protéger les espèces en péril et leur habitat essentiel sur d’autres terres non fédérales et de renforcer les capacités des Autochtones à conserver les terres et les espèces.
Recommandation 4 : s’attaquer aux problèmes en matière de capacité pour aider le Programme des espèces en péril à respecter ses exigences législatives.
Réponse de la direction : Le 27 février 2018, le gouvernement du Canada a annoncé un financement de 1,3 milliard de dollars sur cinq ans pour soutenir la biodiversité du Canada et protéger les espèces en péril. Des plans de mise en œuvre seront mis au point pour veiller à ce que les problèmes de capacité soient traités dans la mesure du possible, en mettant particulièrement l’accent sur l’obtention de résultats de conservation relatifs aux zones, aux menaces et aux espèces prioritaires. Des capacités supplémentaires seront également investies dans les fonctions de base requises pour maintenir la conformité aux exigences législatives et réglementaires, notamment pour soutenir la consultation et la coopération avec les peuples autochtones.
À propos de l’évaluation
L’évaluation a examiné le PEP sur une période de cinq ans, allant de l’année financière 2011 à 2012 à l’année financière 2015 à 2016, en ajoutant des informations plus récentes pour l’année financière 2016 à 2017 lorsqu’elles étaient disponibles. Plusieurs méthodes d’établissement des faits ont éclairé les résultats de l’évaluation, notamment une recension des écrits, de documents et de données administratives; 64 entrevues avec des intervenants internes et externes; un sondage en ligne auprès de 38 partenaires et intervenants; et trois études de cas de la mise en œuvre du PEP.
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