Évaluation préalable pour le Défi concernant
Archivée
Nitrométhane
Numéro de registre du Chemical Abstracts Service
75-52-5
Environnement Canada
Santé Canada
Juillet 2010
- Sommaire
- Introduction
- Identité de la substance
- Propriété physiques et chimiques
- Sources
- Utilisations
- Rejets dans l'environnement
- Devenir dans l'environnement
- Persistance et potentiel de bioaccumulation
- Potentiel d'effets nocifs sur l'environnement
- Potentiel d'effets nocifs sur la santé humaine
- Conclusion
- Références
- Annexe 1 : Estimations de la limite supérieure de l'absorption quotidienne de nitrométhane pour divers groupes d'âge
- Annexe 2 : Estimation de la limite supérieure de l'exposition par inhalation pour la volatilisation du nitrométhane à partir du dissolvant de colle pour faux ongles
- Annexe 3 : Résumé des renseignements liés aux effets du nitrométhane sur la santé
- Annexe 4 : Marges d'exposition estimées du nitrométhane
En application de l’article 74 de la Loi canadienne sur la protection de l’environnement (1999) [LCPE (1999)], les ministres de l’Environnement et de la Santé ont effectué une évaluation préalable du nitrométhane, dont le numéro de registre du Chemical Abstracts Service est 75-52-5. Une priorité élevée a été accordée à la prise de mesures à l’égard de cette substance durant la catégorisation visant la Listeintérieure dans le cadre du Défi. Le nitrométhane a été jugé hautement prioritaire, car il a été reconnu comme une substance présentant un risque d’exposition intermédiaire pour les particuliers au Canada et avait été classé en fonction de sa cancérogénicité. Bien qu’il réponde aux critères environnementaux de la catégorisation relatifs à la persistance, il ne répond pas à ceux relatifs au potentiel de bioaccumulation ou à la toxicité intrinsèque pour les organismes aquatiques. La présente évaluation est donc axée principalement sur les risques pour la santé humaine.
D’après les renseignements transmis en réponse à un avis publié en application de l’article 71 de la LCPE (1999), le nitrométhane n’a pas été fabriqué en une quantité dépassant le seuil de déclaration de 100 kg en 2006. Les importations déclarées pour cette substance (sous sa forme pure ou comme composant d’un produit, d’un mélange ou d’un article manufacturé) se situaient entre 100 et 1 000 kg en 2006. Selon les renseignements obtenus pour l’année de déclaration 2006, le nitrométhane serait principalement utilisé au Canada comme additif non-traditionnel pour les carburants destinés aux voitures de course d’accélération et à certains modèles de moteurs; solvant dans les laboratoires et les industries; produit intermédiaire dans la synthèse de biocides, de produits chimiques, de produits agricoles et d’autres produits intermédiaires; agent stabilisant dans les solvants de dégraissage; solvant véhiculeur pour opacifier la porcelaine de produits dentaires; dissolvant d’adhésif; agent stabilisant des solvants pour nettoyage à sec et produit de formulation dans les produits décapants, les nettoyants pour têtes de lecture de bandes magnétiques et les lubrifiants universels.
L’exposition de la population au nitrométhane par l’intermédiaire des milieux naturels devrait être faible selon les données qui ont été obtenues et en raison des rejets négligeables dans l’environnement au Canada qui ont été déclarés en réponse à un avis émis en application de l’article 71 de la LCPE (1999) pour l’année de déclaration 2006. Les émissions de nitrométhane dans l’environnement ambiant devraient provenir principalement de sources anthropiques. L’inhalation constitue la principale voie d’exposition environnementale. Il existe en effet sur le marché très peu de produits de consommation contenant du nitrométhane; toutefois, certaines personnes pourraient y être exposées en raison du dégagement gazeux lié à certains produits (p. ex., dissolvants d’adhésif instantané, de colle pour faux ongles et de colle à faux cils). L’exposition potentielle a été estimée pour un dissolvant de colle pour faux ongles à partir des données disponibles et constitue la limite supérieure de l’exposition potentielle liée aux produits de consommation.
Comme le nitrométhane a été classé par d’autres organismes nationaux et internationaux en fonction de sa cancérogénicité, la présente évaluation préalable porte principalement sur cette caractéristique. À la suite d’une exposition au nitrométhane par inhalation, des tumeurs ont été observées dans de nombreux organes chez les souris et dans un organe chez les rats femelles. Les essais in vivo et in vitro ont révélé que le nitrométhane n’est pas génotoxique. Bien que le mode d’action lié à la cancérogénicité ne soit pas élucidé, on ne considère pas que les tumeurs observées résultent d’une interaction directe avec le matériel génétique. Par conséquent, une approche fondée sur le seuil d’innocuité a servi à caractériser les risques pour la santé humaine. Au nombre des autres effets indésirables observés sur la santé des animaux de laboratoire, mentionnons la toxicité pour la reproduction, la formation de gouttelettes hyalines dans l’épithélium des voies respiratoires et la neurotoxicité.
Les marges entre l’estimation prudente de la limite supérieure d’exposition au nitrométhane dans l’air et les concentrations entraînant des effets chez les animaux de laboratoire sont considérées comme adéquates en matière de protection. Les marges entre l’estimation prudente de la limite supérieure d’exposition au dissolvant de colle pour faux ongles et les concentrations entraînant des effets chez les animaux de laboratoire et les humains sont considérées comme adéquates en matière de protection.
Compte tenu de l’adéquation des marges entre l’exposition au nitrométhane présent dans l’air ambiant ou les produits de consommation et les concentrations associées à un effet critique chez les animaux de laboratoire et les humains, on peut conclure que le nitrométhane ne pénètre pas dans l’environnement en une quantité, à une concentration ou dans des conditions de nature à constituer un danger au Canada pour la vie ou la santé humaines.
De plus, le nitrométhane ne satisfait pas aux critères de persistance et de bioaccumulation énoncés dans le Règlement sur la persistance et la bioaccumulation. De plus, on s’attend à ce qu’il présente un faible potentiel de toxicité pour les organismes aquatiques. D'après ces renseignements et les faibles concentrations attendues dans l’environnement, on peut conclure que le nitrométhane ne pénètre pas dans l'environnement en une quantité ou concentration ou dans des conditions de nature à avoir ou à pouvoir avoir, immédiatement ou à long terme, un effet nocif sur l'environnement ou sur la diversité biologique qui met ou peut mettre en danger l'environnement essentiel pour la vie.
D'après des renseignements disponibles, il est conclu que le nitrométhane ne satisfait à aucun des critères de l’article 64 de la LCPE (1999).
L’inclusion de cette substance sera considérée dans la prochaine mise à jour de l’inventaire de la Liste intérieure. De plus, des activités de recherche et de surveillance viendront, le cas échéant, appuyer la vérification des hypothèses formulées au cours de l'évaluation préalable.
La Loi canadienne sur la protection de l'environnement(1999) [LCPE (1999)] (Canada, 1999) exige que les ministres de l'Environnement et de la Santé procèdent à une évaluation préalable des substances qui répondent aux critères de la catégorisation énoncés dans la Loi, afin de déterminer si elles présentent ou sont susceptibles de présenter un risque pour l'environnement ou la santé humaine.
En se fondant sur l'information obtenue dans le cadre de la catégorisation, les ministres ont jugé qu'une attention hautement prioritaire devait être accordée à un certain nombre de substances, à savoir :
- celles qui répondent à tous les critères environnementaux de la catégorisation, notamment la persistance (P), le potentiel de bioaccumulation (B) et la toxicité intrinsèque pour les organismes aquatiques (Ti), et que l'on croit être commercialisées au Canada;
- celles qui répondent aux critères de la catégorisation pour le plus fort risque d'exposition (PFRE) ou qui présentent un risque d'exposition intermédiaire (REI) et qui ont été jugées particulièrement dangereuses pour la santé humaine, compte tenu des classifications qui ont été établies par d'autres organismes nationaux ou internationaux concernant leur cancérogénicité, leur génotoxicité ou leur toxicité pour le développement ou la reproduction.
Le 9 décembre 2006, les ministres ont donc publié un avis d'intention dans la Partie I de la Gazette du Canada(Canada, 2006) dans lequel ils priaient l'industrie et les autres parties intéressées de fournir, selon un calendrier déterminé, des renseignements précis qui pourraient servir à étayer l'évaluation des risques, ainsi qu'à élaborer et à évaluer les meilleures pratiques de gestion des risques et de bonne gestion des produits pour ces substances jugées hautement prioritaires.
On a jugé que le méthane, nitro- (nitrométhane) est une substance dont l'évaluation des risques pour la santé humaine est hautement prioritaire, car on considère qu'elle présente un REI et elle a été classée par d'autres organismes en fonction de sa cancérogénicité. Le volet du Défi portant sur cette substance a été publié dans la Gazette du Canada le 31 janvier 2009 (Canada, 2009). En même temps a été publié le profil de cette substance qui présentait l'information technique (obtenue avant décembre 2005) sur laquelle a reposé sa catégorisation. Des renseignements sur les utilisations de la substance ont été reçus en réponse au Défi.
Bien que le nitrométhane réponde aux critères de catégorisation écologique relatifs à la persistance, il ne répond pas à ceux relatifs au potentiel de bioaccumulation ou à la toxicité intrinsèque pour les organismes aquatiques. Par conséquent, la présente ébauche d'évaluation préalable est axée principalement sur les renseignements utiles à l'évaluation des risques pour la santé humaine.
Les évaluations préalables mettent l'accent sur les renseignements jugés essentiels pour déterminer si une substance répond aux critères de l'article 64 de la LCPE (1999). Les évaluations préalables examinent des renseignements scientifiques et tirent des conclusions fondées sur la méthode du poids de la preuve et le principe de prudence.[1]
La présente évaluation préalable prend en considération les renseignements sur les propriétés chimiques, les dangers, les utilisations de la substance en question et l'exposition à celle-ci, y compris l'information supplémentaire fournie dans le cadre du Défi. Les données pertinentes pour l'évaluation préalable de la présente substance sont tirées de publications originales, de rapports de synthèse, de rapports de recherche de parties intéressées et d'autres documents consultés au cours de recherches documentaires menées jusqu'en août 2009 sur des éléments liés à la santé humaine, et jusqu'en mai 2010 pour les composantes écologiques. Les études les plus importantes ont fait l'objet d'une évaluation critique. Il est possible que les résultats de modélisation aient servi à formuler des conclusions. L'évaluation des risques pour la santé humaine suppose la prise en compte des données utiles à l'évaluation de l'exposition (non professionnelle) de la population dans son ensemble et de l'information sur les dangers et les risques pour la santé (principalement d'après les évaluations s'appuyant sur la méthode du poids de la preuve effectuées par d'autres organismes, lesquelles qui ont servi à déterminer le caractère prioritaire de la substance). Les décisions concernant la santé humaine reposent sur la nature de l'effet critique retenu ou sur la marge entre les valeurs prudentes de concentration donnant lieu à des effets et les estimations de l'exposition, en tenant compte de la confiance accordée au caractère exhaustif des bases de données sur l'exposition et les effets, et ce, dans le contexte d'une évaluation préalable. L'évaluation préalable ne constitue pas un examen exhaustif ou critique de toutes les données disponibles. Il s'agit plutôt d'un sommaire de l'information la plus importante afin d'appuyer la conclusion.
La présente évaluation préalable a été préparée par le personnel du Programme des substances existantes de Santé Canada et d'Environnement Canada et elle intègre les résultats d'autres programmes exécutés par ces ministères. Les parties de la présente évaluation préalable qui portent sur la santé humaine et l'écologie ont fait l'objet d'une étude consignée par des pairs ou d'une consultation de ces derniers. Des commentaires sur les parties techniques concernant la santé humaine ont été reçus de la part d'experts scientifiques, tels que Mike Dourson, Ph. D. (Toxicology Excellence for Risk Assessment, TERA), Michael Jayjock, Ph. D. (The LifeLine Group) et Bob Benson, Ph. D. (US Environmental Protection Agency). De plus, la version provisoire de la présente évaluation préalable a fait l'objet d'une consultation publique de 60 jours. Bien que des commentaires externes aient été pris en considération, Santé Canada et Environnement Canada assument la responsabilité du contenu final et des résultats de l'évaluation préalable. Les méthodes utilisées dans les évaluations préalables du Défi ont été examinées par un Groupe consultatif du Défi indépendant.
Les principales données et considérations sur lesquelles repose la présente évaluation sont résumées ci-après.
La détermination de la conformité à l'un ou plusieurs des critères énoncés à l'article 64 est basée sur une évaluation des risques potentiels pour l'environnement et/ou la santé humaine associés aux expositions dans l'environnement en général. Pour les humains, cela inclut, sans toutefois s'y limiter, les expositions par l'air ambiant et intérieur, l'eau potable, les produits alimentaires et l'utilisation de produits de consommation. Une conclusion établie en vertu de la LCPE (1999) portant sur les substances 1 à 12 énumérées dans le Plan de gestion des produits chimiques (PGPC) n'est pas pertinente à une évaluation, qu'elle n'empêche pas non plus, par rapport aux critères de risque définis dans le Règlement sur les produits contrôlés, qui fait partie d'un cadre réglementaire pour le Système d'information sur les matières dangereuses au travail (SIMDUT) pour les produits destinés à être utilisés au travail.
Aux fins du présent document, la substance est appelée nitrométhane, qui est un nom commun de cette substance. Les renseignements liés à la substance sont résumés dans le tableau 1.
No CAS | 75-52-5 |
Nom dans la LIS | Nitrométhane |
Noms dans les NCI | Méthane, nitro- (AICS, ASIA-PAC, DSL, PICCS, SWISS, TSCA) Nitrométhane (anglais, français) (DSL, ECL, EINECS, ENCS, PICCS) Nitrométhane, inhibé (PICCS) |
Autres noms | Nitrocarbol NSC 428 UN 1261 UN 1261 (DOT) |
Groupe chimique (groupe de la LIS) | Produits chimiques organiques définis |
Principale classe chimique ou utilisation | Hydrocarbures à faible poids moléculaire |
Principale sous-classe chimique | Composés nitrés |
Formule chimique | CH3NO2 |
Structure chimique | |
SMILES | N(=O)(=O)C |
Masse moléculaire | 61,04 g/mol |
Abréviations : AICS (inventaire des substances chimiques de l'Australie); ASIA-PAC (listes des substances de l'Asie-Pacifique); no CAS (numéro de registre du Chemical Abstracts Service); LIS (liste intérieure des substances); ECL (liste des substances chimiques existantes de la Corée); EINECS (inventaire européen des substances chimiques commerciales existantes); NCI (National Chemical Inventories); PICCS (inventaire des produits et substances chimiques des Philippines); SMILES (simplified molecular input line entry specification); SWISS (liste des toxiques 1 et inventaire des nouvelles substances notifiées de la Suisse); TSCA (inventaire des substances chimiques visées par la Toxic Substances Control Act des États-Unis). Source : NCI, 2006 |
Le tableau 2 présente les propriétés physiques et chimiques (valeurs expérimentales et modélisées) du nitrométhane qui se rapportent à son devenir dans l'environnement.
Propriété | Type | Valeur1 | Descripteurs | Référence |
---|---|---|---|---|
Abréviations : Kco, coefficient de partage carbone organique-eau; Koe, coefficient de partage octanol-eau; pKa, constante de dissociation acide 1 Les valeurs et les unités entre parenthèses représentent les valeurs originales signalées par les auteurs ou estimées à l'aide des modèles. Les valeurs suivies d'un astérisque (*) sont celles qui ont été sélectionnées à des fins de modélisation. |
||||
Point de fusion (°C) | Expérimental | -28,50 | PhysProp, 2009 | |
Point d'ébullition (°C) | Expérimental | 101,10 | PhysProp, 2009 | |
Masse volumique (kg/m3 à 20 °C) |
Non précisé | 1 138 kg/m3 (1,138 g/cm3) |
Markofsky, 2005 | |
Pression de vapeur (Pa à 25 °C) |
Expérimental | 4 778,26* (35,84 mm Hg) |
Élevé | Daubert et Danner, 1989 |
Constante de la loi de Henry (Pa·m3/mol à 25 °C) |
Expérimental | 2,9* (2,86 × 10-5 atm·m3/mol) |
Modéré | Gaffney et al., 1987 |
Log Koe (sans dimension) |
Expérimental | -0,35* | Négligeable | Hansch et Leo, 1995 |
Solubilité dans l'eau (mg/L) |
Expérimental (de 15 à 25°C) |
111 000* | Très élevé | Riddick et al., 1986 |
Log Kco (sans dimension) |
Modélisé | 0,913 | Négligeable | PCKOCWIN, 2000 |
pKa (sans dimension) |
Modélisé | 10,2 | ACD/pKaDB, 2005 |
Des modèles fondés sur les relations quantitatives structure-activité (RQSA) ont été utilisés pour générer des données pour certaines des propriétés physiques et chimiques du nitrométhane. Ces modèles sont principalement fondés sur des méthodes d'addition de fragments; autrement dit, ils s'appuient sur la structure d'un produit chimique donné. Seules les formes neutres d'un produit chimique peuvent être fournies comme données d'entrée à ces modèles (forme SMILES); par conséquent, les valeurs modélisées figurant au tableau 2 concernent la forme neutre de la substance.
Le nitrométhane est une substance anthropique qui n'a pas été reconnue comme étant présente naturellement dans l'environnement, sauf éventuellement sous la forme d'un métabolite de champignon qui croît sur des panneaux de particules, ou d'un produit de synthèse issu d'une réaction photolytique entre le dioxyde d'azote et l'éthylène (NTP, 1997; CIRC, 2000; Claeson et al., 2002). La production de nitrométhane implique la nitration en phase gazeuse à température élevée du propane (Bollmeier, 1996). La substance peut également se présenter sous forme de produit de combustion de cigarettes et de combustibles (Seizinger et Dimitriades, 1972; Smith et al., 2003), ou de produit de dégradation de fumigants de sol dérivés du nitrométhane, comme la chloropicrine (Dungan et Yates, 2003).
Les déclarations communiquées en réponse à un avis publié en application de l'article 71 de la LCPE (1999) indiquent que le nitrométhane n'a pas été fabriqué en une quantité dépassant le seuil de déclaration de 100 kg en 2006 (Environnement Canada, 2009a). La même année, on a également déclaré des importations de la substance (seule, en mélange, dans un produit ou dans un produit manufacturé) dans des quantités allant de 100 à 1 000 kg) (Environnement Canada, 2009a).
La quantité que les entreprises ont déclaré avoir fabriquée, importée ou commercialisée au Canada durant l'année civile 1986 se situait entre 100 000 kg et 1 000 000 kg (Environnement Canada, 1986). Le nombre de déclarants pour les années civiles 1984 à 1986 était de moins de cinq. Des doutes persistent quant à la cause de la baisse importante de la quantité importée depuis 1986.
Les déclarations communiquées en réponse à un avis publié en application de l'article 71 de la LCPE (1999) ont indiqué que 100 à 1 000 kg de nitrométhane avaient été utilisés au total pendant l'année civile 2006 au Canada (Environnement Canada, 2009a).
Selon de récentes déclarations faites conformément à l'article 71 de la LCPE (1999) et les renseignements tirés d'autres sources, notamment des publications scientifiques et techniques, le nitrométhane est peut-être utilisé actuellement dans des solvants halogénés servant au dégraissage à la vapeur de pièces à travailler ainsi que comme solvant industriel et de laboratoire, solvant pour la suppression ou le décollement d'adhésif instantané à base d'alpha-cyanoacrylate, solvant véhiculeur pour opacifier la porcelaine de produits dentaires, additif pour les carburants destinés aux voitures de course et aux moteurs à combustion interne de modèles réduits (voitures, bateaux, avions, etc.), produit de formulation dans les produits décapants, nettoyant pour têtes de lecture de bandes magnétiques et nettoyant tout usage, et agent stabilisant des solvants pour nettoyage à sec (Lundberg, 1989; Dow, 2004; FS, 2005, 2007, 2008; NTP, 2005; DENTSPLY TRUBYTE, 2006; TDS, 2006; Environnement Canada, 2009a; Sigma-Aldrich, 2009; courriel du ministère de la Défense nationale adressé au coordonnateur des enquêtes sur la LIS d'Environnement Canada en 2007; source non citée).
On a signalé l'utilisation de nitrométhane en tant qu'ingrédient dans deux produits cosmétiques professionnels au Canada qui sont répertoriés dans la base de données du Système de déclaration des cosmétiques de Santé Canada. Cependant, la substance ne figure pas sur la Liste critique des ingrédients dont l'utilisation est restreinte ou interdite dans les cosmétiques (Santé Canada, 2007). Les deux produits cosmétiques en question sont un dissolvant de colle à faux cils et un dissolvant de colle pour faux ongles (SDC, 2009). La présence de nitrométhane a habituellement été observée dans des produits aérosols au Canada; cependant, cette utilisation a été abandonnée (SDC, 2009); courriel de la Division des cosmétiques – Bureau de la sécurité des produits de consommation de Santé Canada, adressé au Bureau de l'évaluation des risques de Santé Canada en 2009; source non citée). Au Canada, on note un pesticide homologué contenant du nitrométhane comme produit de formulation de la liste 2, à une concentration de 0,2 % selon le poids; toutefois, ce pesticide a cessé d'être vendu au Canada et son homologation arrivera à expiration le 1er août 2011 (ARLA, 2007). La substance est utilisée comme intermédiaire chimique dans la fabrication de bronopol, de bêta-bromo-bêta-nitrostyrène (BNS) technique et de chloropicrine technique, mais aucun contrôle des résidus de la substance dans ces pesticides n'a été effectué (courriel de l'Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire de Santé Canada adressé au Bureau de l'évaluation des risques de Santé Canada en 2009; source non citée). Le nitrométhane n'est pas répertorié comme additif alimentaire dans l'Index des additifs alimentaires du Règlement sur les aliments et drogues (Canada, 1978). La substance n'a pas non plus été détectée dans les formulations destinées aux matériaux d'emballage alimentaire (courriel de la Direction des aliments de Santé Canada adressé au Bureau de gestion du risque de Santé Canada en 2009; source non citée). Le Règlement sur les produits contrôlés, établi en vertu de la Loi sur les produits dangereux, prescrit un seuil de déclaration minimal pour une concentration de nitrométhane de 1 % selon le poids sur les fiches techniques santé-sécurité qui accompagnent les substances chimiques sur les lieux de travail, conformément aux instructions de la Liste de divulgation des ingrédients.
Le nitrométhane n'est inscrit ni dans la Base de données sur les produits pharmaceutiques (BDPP), ni dans la Base de données sur les ingrédients des produits de santé naturels (BDIPSN), ni dans la Base de données sur les produits de santé naturels homologués (BDPSNH) en tant qu'ingrédient médicinal ou non médicinal dans les produits pharmaceutiques finaux, les produits de santé naturels ou les médicaments vétérinaires fabriqués au Canada (courriels de la Direction des produits thérapeutiques, de la Direction des produits de santé naturels et de la Direction des médicaments vétérinaires de Santé Canada adressés au Bureau de gestion du risque de Santé Canada en 2009, source non citée). Cependant, la substance est utilisée comme intermédiaire chimique dans la synthèse de certains produits pharmaceutiques, dans lesquels elle peut laisser des traces (courriel de la Direction des produits thérapeutiques de Santé Canada adressé au Bureau de gestion du risque de Santé Canada en 2009, source non citée). Par exemple, la substance est employée comme agent de méthylation dans la synthèse de l'Atorvastatin, un inhibiteur de la 3-hydroxy-3-méthylglutaryl coenzyme A (HMG-CoA) réductase (Radl, 2003). Le nitrométhane est répertorié comme solvant résiduel de catégorie 2 (solvant à limiter) dans les produits pharmaceutiques, les produits de santé naturels et les produits pour animaux, avec une concentration maximale de 50 ppm (lorsque la dose quotidienne maximale de la substance ne dépasse pas 10 g) ou une exposition quotidienne permise de 0,5 mg/jour (Santé Canada, 1999). La fabrication de couronnes et de ponts dentaires implique l'utilisation d'un solvant véhiculeur pour opacifier la porcelaine qui contient la substance à une concentration de 74 % selon le poids (Fiche signalétique, 2005; courriel du Bureau des matériels médicaux de Santé Canada adressé au Bureau de gestion du risque de Santé Canada en 2009, source non citée). Le liquide opacifiant est appliqué à la structure métallique des couronnes et des ponts dentaires pour masquer la structure sous-jacente et agir comme colorant.
Les utilisations de nitrométhane indiquées ci-après ont été recensées dans le monde ou dans le passé, cependant, elles n'ont été pas jugées comme étant actuelles au Canada. En tant que solvant industriel, la substance est utilisée pour dissoudre les esters cellulosiques, les polymères, les cires et les résines artificielles, tels que les revêtements à base d'acrylique (Lundberg, 1989; CIRC, 2000). Le nitrométhane est un composant des agents nettoyants appliqués aux semi-conducteurs, aux lentilles et aux cartes de circuit imprimé électroniques (CIRC, 2000; Markofsky, 2005). Le propergol contient du nitrométhane comme additif de carburant (Lundberg, 1989). Le nitrométhane était auparavant utilisé en tant que composant dans les mélanges binaires et les charges formées (Bollmeier, 1996). Cette substance peut également être employée comme solvant aprotique dans l'électrodéposition des polymères (US Patent, 1992). Elle peut aussi servir d'inhibiteur de corrosion pour le revêtement interne des contenants en acier étamé renfermant des aérosols à base d'eau (Markofsky, 2005). Par ailleurs, le nitrométhane est utilisé comme intermédiaire chimique dans la fabrication de plusieurs dérivés, y compris les antimicrobiens industriels et les produits pharmaceutiques, tels que l'antiulcéreux ranitidine. De même, la substance est impliquée dans la production d'un nitro-alcool destiné à servir de tampon dans plusieurs applications pharmaceutiques (Bollmeier, 1996). Dans le système européen d'information sur les substances chimiques (base de données ESIS : European Chemicals Bureau's European Chemical Substances Information System) du Bureau européen des substances chimiques, il n'y a aucun renseignement sur le nitrométhane relativement à la Directive sur les produits biocides (Directive 98/8CE) (ESIS, 2009); cependant, on sait que la substance est actuellement employée dans les fumigants agricoles (ECB, 2005).
Les déclarations communiquées en réponse à un avis publié en application de l'article 71 de la LCPE (1999) n'ont indiqué aucun rejet de nitrométhane dans l'environnement pendant l'année civile 2006 (Environnement Canada, 2009a). Les données obtenues conformément à l'article 71 révèlent des transferts de nitrométhane, à des quantités inférieures à 100 kg, vers des installations destinées aux déchets dangereux au cours de l'année civile 2006 (Environnement Canada, 2009a). Le nitrométhane n'est pas déclaré dans l'Inventaire national des rejets de polluants (INRP, 2007) ou le Toxics Release Inventory (TRI) des États-Unis; par conséquent, aucune information n'était disponible à partir de ces sources.
D'après les propriétés physiques et chimiques du nitrométhane (tableau 2), les résultats de la modélisation de fugacité de niveau III (tableau 3) indiquent que cette substance devrait demeurer principalement dans l'air, l'eau et le sol, selon le milieu où elle est rejetée. Étant donné la volatilité de la substance, la plupart de ses rejets se retrouveraient probablement dans l'air, bien que cela ne soit pas certain.
Substance rejetée dans | Pourcentage de la substance répartie dans chaque milieu | |||
---|---|---|---|---|
Air | Eau | Sol | Sédiments | |
l'air (100 %) | 68,60 | 25,90 | 5,48 | 0,05 |
l'eau (100 %) | 0,12 | 99.70 | 0,01 | 0,20 |
le sol (100 %) | 0,24 | 36,90 | 62,7 | 0,07 |
La constante de dissociation acide relativement élevée (pKa) de 10,2 pour le groupe fonctionnel acide indique que la moitié du produit chimique sera dissociée à un pH de 10,2. Dans les plans d'eau ayant des pH pertinents du point de vue de l'environnement (entre 6 et 9), 100% du nitroméhane sera non dissocié, ce qui indique qu'il y aura une exposition biotique au produit sous forme neutre. La proportion relativement faible de la substance chimique dissociée indique également que la prévision du comportement de répartition à l'aide des logarithmes Koe et Kco est appropriée.
Persistance dans l'environnement
Le tableau 4a présente les données sur la photodégradation du nitrométhane, qui sont exprimées sous forme de demi-vie dans l'air estimée d'après une constante de vitesse de dégradation empirique (Atkinson, 1989). La demi-vie dans l'air résultant de la photolyse indirecte avec des radicaux hydroxyles est passablement longue – 82 jours. Toutefois, le nitrométhane absorbe le rayonnement ultraviolet supérieur à 290 nm et subit une photodissociation avec une demi-vie mesurée de 4,3 heures (Ryon, 1984). Par conséquent, le nitrométhane n'est probablement pas persistant dans ce milieu.
Milieu | Processus du devenir | Valeur pour la dégradation | Paramètre et unités de la dégradation | Référence |
---|---|---|---|---|
DBO: demande biochimique d'oxygène | ||||
Air | Photodégradation (indirecte) | 82 | Demi-vie (jours) | Atkinson, 1989 |
Eau | Biodégradation (aérobie) | 10 | % DBO à 28 jours | Freitag et al., 1988 |
Air | Photolyse | 4,3 | demi-vie (heures) | Ryon, 1984 |
Eau | Biodégradation (aérobie) | 36,2 | % DBO à 5 jours | Freitag et al., 1988 |
Sol | Biodégradation (aérobie) | 5,1 | % DBO à 35 jours | Freitag et al., 1988 |
Sol | Biodégradation (anaérobie) | 2,2 | % DBO à 35 jours | Freitag et al., 1988 |
Le tableau 4a présente les données empiriques de biodégradation du nitrométhane. Une étude (Freitag et al.,. 1988) indique une DBO de 10 % en 28 jours dans un essai de biodégradation dans le cas du nitrométhane au moyen de la ligne directrice OCDE 301. Toutefois, une autre étude (également Freitag et al., 1988) indique une vitesse de dégradation beaucoup plus rapide : DBO de 36,2 % en 5 jours. Des demi-vies, dans l'eau, allant de 7,7 à 184 jours peuvent être calculées avec une équation de cinétique de premier ordre en utilisant les taux de biodégradation expérimentaux de 36,2 % en 5 jours et de 10 % en 28 jours. Des sommaires rigoureux d'études ont permis de constater que les deux études sont acceptables, mais qu'il y a une préoccupation relativement à la volatilisation au cours de l'essai qui indiquait une faible biodégradation.
Le tableau 4a fournit également des données empiriques sur la dégradation de la substance dans le sol; ces données semblent indiquer que la substance est persistante dans ce milieu, bien que des preuves établissent qu'elle constitue un inhibiteur bactérien (Okamura et al., 1974). On signale qu'une importante volatilisation de nitrométhane s'est produite au cours des essais (22 et 32 %, respectivement).
En raison du peu de données expérimentales sur la dégradation du nitrométhane, une méthode du poids de la preuve reposant sur des RQSA (Environnement Canada, 2007) a aussi été utilisée avec les modèles de la dégradation indiqués dans le tableau 4b. Étant donné l'importance écologique du milieu aquatique, le fait que la plupart des modèles disponibles s'appliquent à l'eau et que la substance devrait être libérée dans ce milieu, on a principalement étudié la biodégradation dans l'eau. Le nitrométhane ne contient pas de groupements fonctionnels pouvant subir une hydrolyse. Le tableau 4b résume les résultats des modèles de prévision RQSA disponibles sur la dégradation dans divers milieux naturels.
Processus du devenir | Modèle et base du modèle | Résultat et prévision du modèle | Demi-vie extrapolée (jours) |
---|---|---|---|
DBO, demande biologique en oxygène; MITI, Ministry of International Trade and Industry, Japon; s.o., sans objet; t½, demi-vie. 1 Le modèle ne précise pas d'estimation pour ce type de structure. 2 Le résultat s'exprime par une valeur numérique de 0 à 5. 3 Le résultat s'exprime par un taux de probabilité. |
|||
Eau | |||
Hydrolyse | HYDROWIN, 2000 | s.o.1 | s.o. |
Biodégradation (aérobie) | BIOWIN, 2000 Sous-modèle 3 : enquête d'expert (biodégradation ultime) |
3,062 « se biodégrade rapidement » (semaines) |
< 182 |
Biodégradation (aérobie) | BIOWIN, 2000 Sous-modèle 4 : enquête d'expert (biodégradation primaire) |
3,762 « se biodégrade rapidement » (jours) |
< 182 |
Biodégradation (aérobie) | BIOWIN, 2000 Sous-modèle 5 : MITI probabilité linéaire |
0,533 « se biodégrade rapidement » |
< 182 |
Biodégradation (aérobie) | BIOWIN, 2000 Sous-modèle 6 : MITI, probabilité non linéaire |
0,693 « se biodégrade rapidement » |
< 182 |
Biodégradation (aérobie) | TOPKAT, 2004 Probabilité |
13 « se biodégrade rapidement » |
< 182 |
Biodégradation (aérobie) | CPOP, 2008 % DBO |
% DBO = 0 « se biodégrade lentement » |
> 182 |
Ainsi, quatre des cinq modèles de biodégradation ultime, y compris TOPKAT (2004), indiquent que la biodégradation de la substance sera probablement rapide et que sa demi-vie dans l'eau serait inférieure à 182 jours. Il subsiste une incertitude concernant certains résultats modélisés. Catabol (CPOP) attribue une probabilité de 0 % de transformation pour ce qui est de l'étape de réduction de la nitro, la seule possibilité qu'il détermine dans le cas de la molécule mère. TOPKAT ne présente pas beaucoup de substances nitrogénées dans l'ensemble d'étalonnage et les substances qui s'y trouvent, qui offrent les résultats les plus rapprochés du nitrométhane, ne comportent pas de groupes nitrogénés. BIOWIN ne comporte pas de composés avec des groupes nitro aliphatiques dans l'ensemble d'étalonnage.
Le nitrométhane ne répond pas au critère de la persistance dans l'air (demi-vie égale ou supérieure à 2 jours) tel qu'il est énoncé dans le Règlement sur la persistance et la bioaccumulation (Canada, 2000). Même si les données expérimentales pour la persistance dans l'eau et le sol ne concordent pas tout à fait, le poids de la preuve appuie la conclusion selon laquelle le nitrométhane ne répond pas aux critères de persistance dans l'eau et le sol (demi-vies dans le sol et l'eau égales ou supérieures à 182 jours) et dans les sédiments (demi-vie dans les sédiment égale ou supérieure à 365 jours), tel qu'ils sont énoncés dans le Règlement sur la persistance et la bioaccumulation (Canada, 2000).
Potentiel de bioaccumulation
Les valeurs expérimentales du log Koe pour le nitrométhane (voir le tableau 2 ci-dessus) laissent entendre que cette substance chimique est peu bioaccumulable dans le biote.
Le tableau 5a présente les valeurs empiriques du facteur de bioconcentration (FBC) chez les poissons et les algues. Même si les résultats indiquent un faible potentiel de bioaccumulation du nitrométhane, il demeure très difficile d'effectuer un essai ou de mesurer le potentiel de bioaccumulation de la substance avec précision, car elle est très volatile.
Organisme d'essai | Paramètre | Valeur (poids humide en L/kg) | Référence |
---|---|---|---|
Poisson | FBC | 1,4 | Freitag et al., 1988 |
Algues | FBC | 960 | Freitag et al., 1988 |
Puisque aucune donnée sur le facteur de bioaccumulation (FBA) et peu de données expérimentales sur le facteur de bioconcentration (FBC) étaient disponibles pour le nitrométhane, une méthode prédictive a été appliquée au moyen de modèles des facteurs de bioaccumulation et de bioconcentration, comme l'indique le tableau 5b. Comme données sur le métabolisme de cette substance n’étaient pas disponibles, elles n’ont pas été prises en compte dans les modèles des facteurs de bioaccumulation et de bioconcentration.
Organisme d'essai | Paramètre | Valeur en poids humide (L/kg) | Référence |
---|---|---|---|
Poisson | FBA | 1 | Arnot et Gobas, 2003 (niveau trophique intermédiaire du FBA) |
Poisson | FBC | 1 | Arnot et Gobas, 2003 (niveau trophique inférieur du FBC) |
Poisson | FBC | 3,12 | CPOP, 2008 |
Poisson | FBC | 3 | BCFWIN, 2000 |
Le modèle modifié du FBA de Gobas pour le niveau trophique intermédiaire chez les poissons a estimé le facteur de bioaccumulation à 1 L/kg, ce qui indique que le nitrométhane ne présente aucun potentiel de bioconcentration importante chez les poissons ni de bioamplification dans les chaînes alimentaires. Ces résultats concordent avec les prévisions, compte tenu de la structure de la substance et de ses propriétés physiques et chimiques. Les résultats des calculs du modèle des FBC fournissent une preuve additionnelle qui appuie le faible potentiel de bioconcentration de cette substance.
D'après les valeurs empiriques et celles obtenues par modélisation cinétique, le nitrométhane ne satisfait pas aux critères de bioaccumulation (FBA ou FBC =5 000) énoncé dans le Règlement sur la persistance et la bioaccumulation(Canada, 2000).
Évaluation des effets sur l'environnement
Les données expérimentales concernant les effets du nitrométhane sur les organismes aquatiques sont résumés au tableau 6a. Dans les deux cas, les conditions du test étaient statiques, sans renouvellement continu, de sorte qu'il aurait pu survenir une perte de nitrométhane dans l'air au cours des tests. Par conséquent, il faut faire preuve de prudence dans l'interprétation des résultats même s'ils semblent appuyer la conclusion selon laquelle le nitrométhane présente une faible toxicité pour les organismes aquatiques.
Organisme d'essai | Type d'essai | Paramètre | Valeur (mg/L) | Référence |
---|---|---|---|---|
Abréviation : CL50 = concentration d'une substance qu'on estime létale pour 50 % des organismes d'essais. | ||||
Tête-de-boule | Toxicité aiguë (96 h) | CL50 | < 278 | Curtis et al., 1981 |
Poisson zèbre, Brachydanio rerio | Aiguë (48 h) | CL50 | ca. 460 | ECB, 2000 |
Les données modélisées concernant les effets du nitrométhane sur les organismes aquatiques sont résumées au tableau 6b.
Tableau 6b. Données modélisées sur la toxicité du nitrométhane pour les organismes aquatiques
Organisme d'essai | Type d'essai | Paramètre | Valeur (mg/L) | Référence |
---|---|---|---|---|
Abréviations : CE50, concentration d'une substance qu'on estime susceptible de causer un effet sublétal toxique chez 50 % des organismes d'essai; CL50, concentration d'une substance qu'on estime létale pour 50 % des organismes d'essai. | ||||
Poissons | Toxicité aiguë (96 h) | CL50 | 2 916 | ECOSAR, 2004 |
3 048 | CPOP | |||
127 | AIES, 2003-2005 | |||
Toxicité aiguë (14 jours) | CL50 | 2 853 | ECOSAR, 2004 | |
Tête-de-boule | Toxicité aiguë (48 h) | CL50 | 127 | AIES, 2003-2005 |
Toxicité aiguë (96 h) | CL50 | 6 347 | ASTER, 1999 | |
Daphnie | Toxicité aiguë (48 h) | CE50 | 1 217 | ECOSAR, 2004 |
399 | TOPKAT, 2004 | |||
Algues | Toxicité aiguë (96 h) | CE50 | 238 | ECOSAR, 2004 |
Une étude de la toxicité aquatique aiguë du nitrométhane chez la tête-de-boule Carassius auratus indique une CL50 de 278 mg/L (tableau 6a). Cette valeur est considérée comme reflétant une toxicité aiguë faible. Par conséquent, le nitrométhane ne devrait pas avoir d'effets nocifs sur les organismes aquatiques à des concentrations relativement faibles. Même s'il subsiste un doute associé au résultat empirique en raison du potentiel de perte de nitrométhane résultant du système d'essai par volatilisation, cette conclusion est étayée par les données modélisées (tableau 6b).
Rejets industriels
Étant donné que le nitrométhane est utilisé dans un cadre industriel et qu'il pourrait être rejeté dans l'eau, le pire des scénarios de rejets industriels a été utilisé avec l'outil d'exposition générique industriel – milieu aquatique (Industrial Generic Exposure Tool – Aquatic, ou IGETA) pour estimer la concentration aquatique de la substance. Le scénario est prudent, c'est-à-dire qu'il suppose que la quantité totale de la substance employée dans l'industrie canadienne n'est utilisée que par une seule installation industrielle sur un petit site hypothétique, que les pertes dans les égouts sont élevées et qu'elles représentent 5 % de la quantité totale provenant du nettoyage de contenants de produits chimiques et d'équipement de traitement. Le scénario présume également que les rejets se produisent 250 jours par an, habituellement pour les petites et moyennes installations, et qu'ils sont acheminés vers une usine de traitement des eaux usées. On a évalué le taux d'élimination de l'usine de traitement des eaux usées à l'aide du programme de modélisation d’usines de traitement des eaux usées (STP, 2001). Au Canada, les eaux réceptrices sur un site aussi petit ont normalement une capacité de dilution de dix fois pour les effluents de l'usine de traitement des eaux usées, ce qui équivaut à 3 456 m3/jour. D'après les hypothèses susmentionnées, l'utilisation industrielle de la substance, notamment à une quantité totale de 100 à 1 000 kg/an donne une concentration aquatique de 0,0026 mg/L (Environnement Canada, 2009b).
Caractérisation des risques pour l'environnement
La démarche suivie dans cette évaluation écologique préalable consistait à examiner les divers renseignements à l'appui et à tirer des conclusions suivant la méthode du poids de la preuve et le principe de prudence requis par la LCPE (1999). Les éléments de preuve pris en compte comprennent les résultats d'un calcul prudent du quotient de risque ainsi que des renseignements sur la persistance, la bioaccumulation, la toxicité, les sources et le devenir de la substance.
Le nitrométhane ne devrait donc pas être persistant dans l'air, l'eau, le sol ou les sédiments. Il devrait présenter un faible potentiel de bioaccumulation. Les volumes d'importation de cette substance au Canada et les renseignements relatifs à ses utilisations indiquent un risque de rejets dans l'environnement au Canada. Une fois dans l'environnement, la substance se trouverait dans l'air, l'eau ou le sol, selon le milieu où elle est rejetée. D'après les données expérimentales et modélisées, on s'attend à ce que le nitrométhane présente un faible potentiel de toxicité pour les organismes aquatiques.
Une analyse du quotient de risque, intégrant des estimations prudentes de l'exposition aux renseignements liés à la substance, a été réalisée pour le milieu aquatique, afin de déterminer si la substance pourrait avoir des effets nocifs sur l'environnement au Canada. Le scénario industriel hypothétique décrit précédemment a donné une concentration environnementale estimée (CEE) de 0,0026 mg/L (Environnement Canada, 2009b). Une concentration estimée sans effet (CESE) a été déterminée à partir de la valeur de toxicité aigüe de 278 mg/L pour la tête-de-boule, en divisant cette valeur par un facteur d'évaluation de 100 (pour tenir compte de la variabilité inter et intraspécifique de la sensibilité et afin d'obtenir une valeur estimée de la concentration sans effet à long terme à partir d'une CL50 à court terme), pour générer une valeur de 2,78 mg/L.. Le quotient de risque (CEE/CESE) se chiffre à 0,0009. Il est donc peu probable que cette substance ait des effets nocifs chez les organismes aquatiques.
À la lumière des renseignements disponibles, il est improbable que le nitrométhane cause des effets écologiques nocifs au Canada.
Incertitudes dans l'évaluation des risques pour l'environnement
Il subsiste une incertitude concernant les données expérimentales pour la persistance dans l'eau parce que les résultats ne correspondent pas tout à fait et qu'on ne sait pas si l'on a tenu compte de la grande volatilité du nitrométhane dans le cadre des études.
Des doutes persistent quant à l'utilisation des modèles RQSA pour estimer la persistance, la bioaccumulation et la toxicité aquatique du nitrométhane. Il existe un nombre limité de composés nitrogénés dans les ensembles d'étalonnage concernant ces RQSA.
En outre, il existe des incertitudes en raison du nombre très restreint de renseignements (p. ex. des données de surveillance) sur les concentrations environnementales du nitrométhane au Canada ou ailleurs. De même, on a des doutes concernant la fraction de nitrométhane commercialisée qui est rejetée dans l'environnement ainsi que sur celle qui est éliminée dans les usines de traitement des eaux usées. On a par conséquent évalué une concentration environnementale estimée à l'aide d'un modèle d'exposition fondé sur des hypothèses prudentes.
Évaluation de l'exposition
Exposition environnementale
Aucune donnée empirique n'a été recensée au sujet des concentrations de nitrométhane mesurées dans les milieux naturels ou les aliments au Canada ou ailleurs. Cependant, des données empiriques ont été déterminées relativement à d'autres sites, notamment en termes de concentrations de nitrométhane dans l'air ambiant et dans un nombre limité de boissons, et elles servent de substitution aux données propres au Canada afin d'estimer l'exposition, tel qu'il est décrit ci-après. Aucune donnée de surveillance n'a été relevée concernant la présence de la substance dans l'air intérieur, l'eau de surface, l'eau potable, le sol ou les sédiments, quel que soit l'endroit. Les niveaux résiduels de la substance ne sont présentement pas soumis à une surveillance de l'Agence canadienne d'inspection des aliments (courriel de l'Agence canadienne d'inspection des aliments adressé au Bureau de gestion du risque de Santé Canada en 2009, source non citée).
Le nitrométhane est un polluant en phase gazeuse provenant des émissions de gaz d'échappement des véhicules qui ont été décelées (le 24 juillet 1996) dans au moins 1 des 44 échantillons d'air ambiant recueillis à Porto Alegre au Brésil, au cours de la période allant du 20 mars 1996 au 16 avril 1997, à une concentration de 10,0 µg/m3(Grosjean et al., 1998). Cette concentration a été utilisée en déterminant l'absorption de la substance dans l'air ambiant (voir l'annexe 1). Une autre étude (Seizinger et Dimitriades, 1972) a révélé la présence de nitrométhane dans l'air ambiant, provenant de gaz d'échappement automobiles à des concentrations allant de 2 à 12,5 mg/m3 (< 0,8 à 5 ppm); cependant, les installations d'essai des émissions (situées sur le chemin River) à Ottawa indiquent que des concentrations de 2,5 à 5 µg/m3 (1 à 2 ppb) sont plus probables, compte tenu des nouveaux règlements relatifs aux émissions et des différents facteurs de dilution (courriel des installations d'essai des émissions situées sur le chemin River à Ottawa adressé au Bureau de gestion du risque de Santé Canada; source non citée). La concentration de nitrométhane dans l'air ambiant à Porto Alegre, au Brésil, est considérée comme étant représentative de l'exposition à la substance, qui est attribuable aux émissions de gaz d'échappement des véhicules au point d'exposition (récepteur humain). Cette concentration de la substance dans l'air ambiant est également utilisée pour refléter l'air intérieur, étant donné que des données sur ce milieu étaient disponibles.
Aux États-Unis et au Canada, les émissions de gaz d'échappement des véhicules peuvent constituer une source d'augmentation des émissions de nitrométhane dans l'air ambiant, puisque les gros moteurs diesel fabriqués à partir du 1er janvier 2010 doivent être munis d'un dispositif de réduction sélective catalytique (SCR) afin de répondre aux nouvelles normes fédérales liées aux émissions de diesel qui visent à réduire les concentrations d'oxydes d'azote (Financial, 2009; Miller, 2009). L'Europe adopte également progressivement la technologie SCR depuis 2006; on devrait compter 3,7 millions de véhicules lourds et 5 millions de véhicules de distribution équipés de cette technologie d'ici 2012 (Peckham, 2003). La technologie SCR utilise un additif liquide contenant de l'azote organique, et on a détecté du nitrométhane en tant que sous-produit du processus (Miller, 2009).
En 1984, du nitrométhane a été mesuré dans l'air à des concentrations allant de 0,21 à 2 µg/m3 à trois sites autour d'une usine de fabrication de munitions dans le Tennessee. Cependant, les données sur l'air ambiant n'ont pas été prises en compte dans l'évaluation de l'exposition de l'ensemble de la population canadienne à la substance, puisque son utilisation dans la fabrication de cyclotriméthylènetrinitramine et de cyclotétraméthylènetétranitramine était obsolète aux États-Unis et n'a pas été signalée au Canada (Ryon et al. 1984; NTP, 2005). En outre, la concentration utilisée pour estimer l'absorption de la substance dans l'air (voir ci-dessus) est supérieure aux valeurs déclarées dans cette étude.
Le nitrométhane est présent dans la fumée principale du tabac à des concentrations allant de 0,3 à 0,6 µg par cigarette non filtrée (Rodgman, 2003). Par conséquent, la fumée de cigarette constitue une source potentielle d'exposition à la substance, en particulier dans l'air intérieur.
En ce qui concerne l'eau potable, une enquête menée par la US Environmental Protection Agency (USEPA) en 1975 a détecté du nitrométhane dans l'eau potable de quatre villes américaines parmi les dix étudiées, mais les concentrations n'ont pas été précisées. La substance a aussi été décelée qualitativement dans l'eau de surface (NTP, 2005).
Un document récent qui décrit une méthode de quantification du nitrométhane dans le sang a également indiqué la présence de la substance dans un nombre limité de boissons, notamment dans neuf échantillons de jus de fruits, de lait de vache et de lait de soja (1 %), à des concentrations allant de 0,13 à 1,4 µg/L (Alwis et al., 2008). En raison du peu de détails disponibles sur l'étude, on ne sait pas si d'autres aliments ont fait l'objet d'essais et on ne connaît pas non plus la concentration moyenne de la substance ou la distribution des concentrations dans ces aliments. Par ailleurs, cette étude ne peut être considérée comme exhaustive pour déterminer les concentrations de nitrométhane dans un panier typique de provisions et de boissons représentatif de la consommation canadienne. Même si Alwis et al. (2008) n'ont pas précisé la source du nitrométhane, ils ont, en se basant sur les renseignements présentés dans une étude précédente (Castro et al., 1983), avancé l'hypothèse selon laquelle la substance est présente dans les légumes et les produits alimentaires, en raison de la déshalogénation des bactéries du trichloronitrométhane par le Pseudomonas sp. Le trichloronitrométhane, aussi connu sous le nom de chloropicrine, est un produit de formulation d'un stérilisant du sol et d'un fumigant pour céréales et grains post-récolte homologués au Canada; ce produit est largement utilisé avec du bromure de méthyle dans les applications de pesticides (Alwis et al., 2008; courriel de l'Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire de Santé Canada adressé au Bureau de gestion du risque de Santé Canada en 2009; source non citée).
Compte tenu du fait qu'aucune autre donnée quantitative sur le nitrométhane dans les aliments n'a été relevée, on suppose que la concentration maximale de 1,4 µg/L déterminée dans neuf échantillons de jus de fruits, de lait de vache et de lait de soja (1 %) représente la concentration de nitrométhane pour 3 des 12 catégories alimentaires, notamment les produits laitiers, les fruits et produits à base de fruits, et les légumes, y compris les légumineuses (annexe 1). Puisque ces catégories d'aliments englobent de nombreux produits qui ne sont pas évalués dans l'étude d'Alwis et al. (2008), on envisage d'utiliser les données issues de cette étude pour établir une estimation prudente de l'exposition. Cette estimation sera également consolidée par l'utilisation d'une concentration maximale ainsi que le manque de détails sur la distribution des concentrations parmi les boissons et l'absence de représentation d'un panier typique de produits alimentaires consommés par les Canadiens.
Même si aucune étude de surveillance n'a été relevée concernant les concentrations de nitrométhane dans le sol ou les sédiments, ces dernières devraient avoir un effet minime sur l'estimation de l'exposition, comparativement aux concentrations de la substance dans l'air et l'eau, à cause de la valeur négligeable du log Kco et des rejets environnementaux allant principalement dans l'air et l'eau, d'après le profil d'utilisation prévu. Toutefois, sachant que la chloropicrine peut se dégrader en nitrométhane, on prévoit des concentrations de la substance dans le sol de régions agricoles (Dungan et Yates, 2003).
Bien que les données supplémentaires relevées agrandissent la base des connaissances sur le nitrométhane, ces données n'ont pas été utilisées pour quantifier l'exposition. La présence de la substance a été déterminée qualitativement dans l'air intérieur en Suède et découle de la prolifération microbienne sur des panneaux de particules (Claeson et al., 2002). Le nitrométhane a été décelé dans trois échantillons expérimentaux d'exsudats d'aliments conservés, à des concentrations non précisées (Wilkins et Larsen, 1995). Dans deux études menées aux États-Unis, on a également détecté la substance dans un des douze échantillons de lait maternel, bien que le seuil de détection n'ait pas été indiqué (Erickson et al., 1980; Pellizzari et al., 1982). En outre, une étude de biomarqueurs a quantifié les concentrations de nitrométhane dans le sang de 632 personnes sans antécédent connu d'exposition au nitrométhane ou aux halonitrométhanes; ces concentrations variaient de 0,28 à 3,79 µg/L (concentration médiane : 0,66 µg/L). L'étude se basait aussi sur des méthodes in vitro afin de démontrer l'hypothèse selon laquelle une déshalogénation des halonitrométhanes ainsi que des réactions induites par le peroxynitrite avec d'autres molécules dans le sang constituent des sources endogènes de nitrométhane dans le corps humain (Alwis et al., 2008). Ainsi, le nitrométhane dans le sang de ces personnes est peut-être attribuable à une exposition directe à la substance, à une exposition aux halonitrométhanes (en partie ou complètement) ou à des réactions biochimiques endogènes impliquant le peroxynitrite.
L'absorption quotidienne maximale de nitrométhane a été estimée à 6,1 µg/kg p.c. (kg p.c.) par jour pour les tout-petits âgés de 0,5 à 4 ans. L'absorption de la substance à partir de l'air constituait une source prédominante d'exposition environnementale, à des concentrations maximales de 10,0 µg/m3 (Grosjean et al., 1998). Néanmoins, puisque la substance a été décelée qualitativement à des concentrations non précisées dans le lait maternel et l'eau potable, on ne peut exclure la théorie selon laquelle ces milieux peuvent contribuer à l'exposition totale. L'annexe 1 présente l'absorption totale estimée du nitrométhane à partir de divers milieux pour différents groupes d'âge.
Exposition par des produits commerciaux et de consommation
En tenant compte de l'exposition au nitrométhane à partir de produits au Canada, on s'est basé sur les utilisations déclarées pour l'année civile 2006 en réponse à un avis publié en application de l'article 71 de la LCPE (1999) ainsi que sur des recherches documentaires et des communications avec l'industrie pour déterminer les usages actuels de la substance dans le pays. Présentement, le nitrométhane est un ingrédient intentionnel dans des utilisations de carburant (course d'accélération, moteurs de modèles réduits), quelques produits de soins personnels employés dans un cadre professionnel (un type de dissolvant de colle à faux cils et un type de dissolvant de colle pour faux ongles), un solvant pour nettoyage à sec et des solvants pour décoller les adhésifs instantanés et enlever les flux décapants, tel qu'il est décrit ci-après.
L'exposition par inhalation est la principale voie d'exposition au nitrométhane provenant de produits étant donné que les nitroalkanes ne sont pas immédiatement absorbés par la peau (Markofsky, 2005). Par ailleurs, une étude in vivo menée sur des singes n'a pas démontré de risque d'absorption cutanée de la substance en raison de son évaporation rapide (Norman, 1990).
En termes d'utilisations de carburant, les amateurs de modèles réduits peuvent être exposés à des vapeurs de nitrométhane lorsqu'ils ravitaillent les moteurs de leur engin. Cependant, le risque d'exposition est considéré comme faible à négligeable du fait que le ravitaillement en carburant s'effectue à l'extérieur, que le volume atmosphérique de la substance est important et que la quantité de carburant contenue dans un réservoir de moteur de modèle réduit est minime (125 mL). Bien que du nitrométhane puisse se déverser sur les mains de l'utilisateur lors du ravitaillement de l'engin, il ne devrait pas y avoir d'absorption cutanée. Par ailleurs, étant donné qu'une certaine quantité de nitrométhane peut être rejetée sous forme de produit non brûlé dans les gaz d'échappement des moteurs à carburant nitro, les spectateurs de courses d'accélération peuvent être exposés à la substance. Sachant que l'on n'a déterminé aucune estimation de l'efficacité de la combustion dans ces moteurs, la concentration de la substance (10,0 µg/m3) dans l'air ambiant au centre-ville de Porto Alegre, au Brésil, est considérée comme étant représentative de l'exposition des spectateurs de courses d'accélération, puisque cette concentration a été associée aux gaz d'échappement automobiles (Grosjean et al. 1998).
Le nitrométhane est en outre présent dans les solvants industriels servant à enlever les flux décapants, à une concentration maximale de 2% par poids (FS, 2002). Un flux décapant est appliqué durant la soudure d'équipement électrique afin de supprimer les oxydes métalliques des deux surfaces, ce qui permet une bonne fixation de l'alliage métallique (GBPPR [date inconnue]). L'exposition n'a pas été caractérisée pour cette utilisation puisqu'on juge que celle-ci a principalement lieu dans un cadre professionnel et qu'elle n'est donc pas applicable à l'exposition de la population générale.
Le nitrométhane a été signalé à Santé Canada en tant qu'ingrédient dans deux produits de soins personnels. Il est présent à une concentration maximale de 100 % par poids dans un dissolvant de colle à faux cils, et de 25 % par poids dans un dissolvant de colle pour faux ongles (SDC, 2009). Ces produits devraient surtout être utilisés dans un cadre professionnel, comme un salon de beauté, où l'exposition de la population générale (clients) à la substance est probable (courriel de la Division des cosmétiques de Santé adressé au Bureau de l'évaluation des risques de Santé Canada en 2009, source non citée). Sachant que le cycle de vie d'un vernis à ongles est de 3 à 6 semaines environ, on a établi à 17 fois par an la limite supérieure de fréquence d'application d'un dissolvant de colle pour faux ongles (courriel de la Division des cosmétiques de Santé adressé au Bureau de l'évaluation des risques de Santé Canada en 2009, source non citée). Cette fréquence ne constituant pas une source d'exposition chronique, la concentration moyenne pondérée dans le temps (MPT) de la substance inhalée a été déterminée à 13 mg/m3. Les hypothèses à l'origine du scénario sont présentées à l'annexe 2. Ce scénario a supposé un modèle à boîte unique (modèle d'une pièce dont l'air ambiant est bien mélangé) plutôt qu'un modèle à deux boîtes (la boîte en champ proche étant la zone dans laquelle l'utilisateur inhalait le dissolvant de colle pour faux ongles durant son application, et la boîte à champ lointain représentant le reste de la pièce), étant donné que le taux de renouvellement de l'air entre les deux parties de la pièce était inconnu (AIHA, 2009). Des doutes subsistent sur le scénario. En se basant sur le modèle des petits déversements, on considère que l'utilisation de l'estimation du taux de dégagement des contaminants pour déterminer le taux de production massique ne produit qu'une estimation de l'ordre de grandeur. Les fonctions du modèle (AIHA, 2009) conviennent mieux pour les substances présentant un rapport pression de vapeur-pression atmosphérique supérieur à 5 % (alors que ce rapport était de 4,7 % pour le nitrométhane) et pour une vélocité de l'air variant de 50 à 500 cm/s (tandis que la vélocité de l'air dans le scénario de l'utilisation d'un dissolvant de colle pour faux ongles dans une pièce était de 2 cm/s). En outre, la densité du nitrométhane (densité relative de 2,1) est plus élevée que celle de l'air, ce qui renforce les incertitudes liées à la capacité de la substance de s'évaporer et de se répartir à partir d'un contenant utilisé. Par ailleurs, il existe d'autres méthodes pour retirer les faux ongles, qui impliquent éventuellement divers volumes de produit et une durée d'utilisation variable.
En ce qui concerne le dissolvant de colle à faux cils, aucun scénario d'exposition n'a été défini, étant donné que l'estimation de l'exposition serait inférieure à celle qui est engendrée par le dissolvant de colle pour faux ongles, notamment à cause de la durée d'exposition moins longue (5 minutes) et de la quantité du produit utilisée (0,5 g).
En tant qu'agent dissolvant, le nitrométhane est peut-être présent à une concentration maximale de 100 % par poids dans les décapants d'adhésifs instantanés (FS, 2007). On suppose que l'utilisation par les consommateurs de décapants d'adhésifs instantanés est limitée à de petites applications, comme la suppression du surplus d'adhésif instantané lors du recollage de l'anse cassée d'une tasse. L'exposition pour cette utilisation n'a pas été caractérisée puisque son estimation serait inférieure à celle qui est liée au dissolvant de colle pour faux ongles, notamment à cause de la quantité plus faible de produit utilisée (0,5 g) au cours de la même durée d'exposition estimée (0,5 heure).
Il se peut que le nitrométhane soit aussi présent à une concentration de 74 % par poids dans un solvant véhiculeur pour opacifier la porcelaine, qui est appliqué à la structure métallique des couronnes et des ponts dentaires en laboratoire afin de masquer la structure sous-jacente et d'agir comme colorant (FS, 2005). L'exposition à la substance pendant cette application est improbable puisque le liquide appliqué n'est pas biodisponible (courriel du Bureau des matériels médicaux de Santé Canada adressé au Bureau de gestion du risque de Santé Canada en 2009, source non citée). Le nitrométhane est utilisé comme agent stabilisant des solvants pour nettoyage à sec (< 0,6 % par poids; FS, 2008); par conséquent, il peut être présent sous forme de résidus sur les vêtements. Cependant, il n'y a pas d'absorption cutanée des nitroalkanes (Norman, 1990; Markofsky, 2005). Les utilisations possibles de la substance, c'est-à-dire en tant que nettoyant pour têtes de lecture de bandes magnétiques ainsi que nettoyant tout usage ne constitueraient pas un risque préoccupant pour la population générale, étant donné qu'elles n'ont pas été signalées ailleurs que dans un cadre militaire au Canada (courriel du ministère de la Défense nationale adressé au coordonnateur des enquêtes sur la LIS d'Environnement Canada en 2007; source non citée).
Une étude supplémentaire portant sur l'exposition au nitrométhane par l'intermédiaire de produits n'a pas été utilisée étant donné que cela avait lieu dans un cadre professionnel. Cette étude quantifiait l'exposition des travailleurs au nitrométhane dans une usine fabriquant des phares de véhicules; l'exposition se produisait lorsque les travailleurs vaporisaient du nitrométhane, au moyen de bouteilles de pulvérisation, sur les phares afin de nettoyer l'excès de colle (Page et al., 2001). Dans le cadre d'une enquête de l'Occupational Safety and Health Administration (OSHA), on a prélevé des échantillons des concentrations de nitrométhane chez quatre travailleurs ayant inhalé la substance dans leur zone d'exposition individuelle, à une concentration moyenne pondérée dans le temps (MPT) sur huit heures de 50 mg/m3 (20 ppm) et une concentration moyenne de 31,81 mg/m3 (12,75 ppm). Le volume moyen de nitrométhane pure utilisé par chaque groupe de quatre travailleurs par demi-heure était approximativement de 35 mL (totalisant 560 mL dans un quart de huit heures) (Page et al., 2001).
On se fie peu à l'évaluation de l'exposition environnementale. Même si un nombre très limité de données documentaires ont été relevées sur les concentrations dans les divers milieux, les rejets environnementaux déclarés en vertu de l'article 71 de la LCPE (1999) devraient engendrer une exposition négligeable pour la population générale. Toutefois, la détection du nitrométhane sans la quantification de l'exposition dans certaines études indique un écart de données en matière de quantification de l'exposition. L'indice de confiance lié à l'évaluation de l'exposition au produit est modéré, puisque plusieurs utilisations ont été entièrement définies en réponse à un avis publié en application de l'article 71 de la LCPE (1999), en plus des recherches documentaires et du suivi de l'industrie.
Évaluation des effets sur la santé
L'annexe 3 résume les effets du nitrométhane sur la santé des animaux de laboratoire et de l'homme.
Le nitrométhane a été classé comme un cancérogène du groupe 2B (probablement cancérogène pour l'homme) par le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC, 2000), sur la base des preuves suffisantes observées chez des animaux de laboratoire, et il a été jugé comme étant cangérogène pour l'homme par le National Toxicology Program (NTP, 1997, 2005), au vu des preuves évidentes de l'activité cancérigène de la substance chez des souris B6C3F1 et des rats F344/N femelles. La base de données sur la cancérogénicité du nitrométhane due à une exposition chronique par inhalation comprend des incidences très accrues de tumeurs bénignes et malignes dans plusieurs organes de souris mâles et femelles ainsi que dans les glandes mammaires de rats femelles.
Les rats F344/N femelles exposés à la substance de manière chronique par inhalation, à des concentrations de 470 et de 938 mg/m3, ont montré une incidence significativement accrue de fibroadénomes des glandes mammaires, qui était la plus forte incidence observée chez un groupe témoin historique. Les rats femelles exposés à une concentration de 938 mg/m3de la substance ont également présenté une incidence significativement accrue de carcinome des glandes mammaires. Au cours de la même étude, aucun effet cancérogène n'a été noté chez des rats Fischer 344/N mâles (NTP, 1997). Dans une autre étude de l'exposition chronique par inhalation (Griffin et al., 1996), on n'a relevé aucun niveau de cancérogénicité important chez des rats BLU:(LE)BR exposés au nitrométhane à des concentrations de 250 et 500 mg/m3.
Les rats B6C3F1 femelles exposés à la substance de manière chronique par inhalation, à des concentrations de 470 et de 1 875 mg/m3, ont montré une incidence significativement accrue d'adénomes hépatocellulaires, qui était la plus forte incidence observée chez un groupe témoin historique (NTP, 1997). Cependant, le nombre de tumeurs observées à une concentration de 938 mg/m3 n'était pas statistiquement significatif. Par ailleurs, on a noté une hausse importante de l'incidence de carcinome bronchiolo-alvéolaire (CBA) chez les souris femelles exposées au nitrométhane, à une concentration de 938 mg/m3, ainsi que chez les souris mâles exposées à une concentration de 1 875 mg/m3. L'occurrence d'adénomes de la glande de Harder a fortement augmenté chez les souris mâles et femelles exposés à la substance, et ce, aux mêmes concentrations.
Les essais in vivo et in vitro ont révélé que le nitrométhane n'était pas génotoxique. La substance s'est montrée négative dans plusieurs essais liés à la mutagénicité chez les bactéries et le Drosophila (Brusick, 1975; Chiu et al., 1978; Domoradzki, 1980; Gocke et al., 1981; Lofroth et al., 1986; Mortelmans et al., 1986; Dayal et al., 1989; Dellarco et Prival, 1989) et elle n'a pas engendré d'échanges de chromatides sœurs ou d'aberrations chromosomiques dans des cellules de mammifères (NTP, 1997). Le nitrométhane n'a pas non plus entraîné de formation de micronoyaux in vitro ou chez les souris (Gocke et al., 1981; Gibson et al., 1997; NTP, 1997; Witt et al., 2000). Toutefois, la substance a causé une transformation morphologique des cellules embryonnaires du hamster de Syrie aux deux concentrations les plus élevées évaluées et sans l'activation de la fraction S9 (Kerckaert et al., 1996).
Bien que le mécanisme de la cancérogénicité du nitrométhane soit inconnu, d'autres modes d'action ont été proposés puisque le nitrométhane n'est pas génotoxique dans les essais in vitro ou in vivo. On a précédemment émis l'hypothèse selon laquelle les radicaux réactifs peuvent être impliqués dans la cancérogénicité du nitrométhane (NTP, 1997), car le métabolisme de la substance engendre des radicaux superoxydes intermédiaires, du peroxyde d'hydrogène, du nitrite, du formaldéhyde et de l'acétone selon l'enzyme métabolisante (Porter et al., 1972; Kido et Soda, 1978; Sakurai et al., 1980; Dahl et Hadley, 1983; Kido et al., 1984; Dayal et al., 1991). Compte tenu du fait que le nitrométhane s'est révélé positif dans un essai de transformation cellulaire sans l'activation de la fraction S9 (Kerckaert et al., 1996), il est également possible que la molécule mère favorise la croissance d'une tumeur par l'intermédiaire d'un effet direct sur la cellule. La substance est rapidement absorbée par les voies respiratoires et le tractus gastrointestinal (Scott, 1943), néanmoins, la voie métabolique principale chez les mammifères reste inconnue.
En termes d'effets non cancérogènes, une légère congestion nasale (chez un animal sur quatre) et une perte de poids transitoire (chez trois animaux sur quatre) ont été observés chez des rats mâles après qu'ils aient été soumis à une exposition aiguë par inhalation au nitrométhane, à une concentration de 2 495 mg/m3 pendant 4 heures (concentration minimale avec effet observé aigüe, CMEO : 2 495 mg/m3). À une concentration de 9 980 mg/m3, les rats ont présenté un manque de réactivité, et à des concentrations de 14 970 et de 19 960 mg/m3, un rat sur quatre et trois rats sur quatre sont décédés, respectivement (Haskell Laboratory, 1961). Par ailleurs, on a noté des effets sur le foie chez des animaux de laboratoire à la suite d'une exposition par inhalation à court terme ou d'une exposition par voie orale au nitrométhane. La CMEO était de 235 mg/m3, concentration à laquelle on a relevé une augmentation des poids absolu et relatif du foie chez des souris exposées à la substance pendant 16 jours. À des concentrations plus élevées, on a constaté une dégénérescence minimale de l'épithélium olfactif chez les souris et les rats ainsi qu'une dégénérescence liée à la dose du nerf sciatique chez les rats (concentration minimale avec effet nocif observé, CMENO : 938 mg/m3) (NTP, 1997). Comme cela a été caractérisé par les auteurs de l'étude, un trouble hépatique s'est produit chez les rats et les lapins exposés pendant deux mois à la substance par l'intermédiaire d'eau potable (dose minimale avec effet nocif observé, DMEO : 23,5 mg/kg p.c. par jour) (Subbotin, 1967).
La CMEO découlant de l'exposition subchronique par inhalation était de 235 mg/m3, d'après la formation de gouttelettes hyalines dans l'épithélium des voies respiratoires des souris femelles et l'augmentation des poids absolu et relatif des reins des souris mâles exposés à la substance pendant 13 semaines. À des concentrations plus élevées, des rats ont présenté une dégénérescence du nerf sciatique et de la moelle épinière lombaire (CMENO : 938 mg/m3) (NTP, 1997). On a également observé une hausse transitoire de l'activité des transaminases sériques chez les rats et les lapins, dans les deux à trois mois suivant leur exposition au nitrométhane par l'intermédiaire d'eau potable pendant une période de six mois (dose minimale avec effet nocif observé/dose sans effet observé, DMEO/DSEO : 0,05 mg/kg p.c. par jour) (Subbotin, 1967).
L'exposition au nitrométhane a entraîné des changements des paramètres de la reproduction chez des animaux de laboratoire. En outre, on a noté une baisse importante de la motilité des spermatozoïdes chez des rats exposés à la substance à des concentrations de 1 875 et de 3 750 mg/m3, ainsi que chez des souris exposés à la substance par inhalation, à des concentrations de 938, de 1 875 et de 3 750 mg/m3pendant 13 semaines. Les souris femelles ont présenté une augmentation de la durée du cycle œstral aux concentrations de 938, de 1 875 et de 3 750 mg/m3 (NTP, 1997). Cependant, les souris exposées à des concentrations de nitrométhane de 235 et de 470 mg/m3 dans le cadre d'une étude du NTP (1997), n'ont pas été examinées en termes d'effets sur la reproduction, ce qui a diminué l'indice de confiance relativement à la concentration de 938 mg/m3et à la dose minimale avec effet observé (DMEO) pour les changements liés aux paramètres de la reproduction (CMENO pour les effets sur la reproduction : = 938 mg/m3).
Il existe un nombre limité de rapports de cas d'exposition au nitrométhane par inhalation en milieu de travail. Deux travailleurs d'une usine d'assemblage de phares ont été exposés au nitrométhane, à une concentration quotidienne de 31,81 mg/m3 pendant quatre ou six semaines et ont développé une neuropathie périphérique qui se présentait sous la forme d'une diminution des réflexes et d'une faiblesse des jambes. Une personne a présenté des douleurs et des enflures aux jambes et aux pieds (Page et al., 2001). Un autre rapport de cas a signalé un travailleur exposé de manière chronique par inhalation à des vapeurs provenant d'un solvant contenant 0,25 % de nitrométhane; cette personne a développé le parkinsonisme ainsi qu'une dépression (Sandyk et Gillman, 1984). Les effets du nitrométhane sur le système nerveux de l'homme sont similaires à ceux observés chez les animaux de laboratoire exposés à la substance, cependant, les résultats doivent être interprétés avec prudence, car dans les deux cas, les travailleurs ont également été exposés à d'autres composés potentiellement dangereux et dont un d'entre eux au moins présentait une toxicité neurologique connue. On a constaté de graves effets toxiques chez l'homme à la suite d'une exposition par inhalation au nitrométhane, à une concentration de 1 996 mg/m3pendant une heure. Des symptômes de maladie ont également été observés pour l'exposition à une concentration de 1 248 mg/m3 « pendant une période plus longue » (Strafford et al., 1956). Des détails supplémentaires étaient disponibles auprès de la sources principale.
L'indice de confiance attribuable à l'ensemble des données des effets sur la santé du nitrométhane est élevé, car un nombre limité d'études bien réalisées sur la cancérogénicité, la neurotoxicité, les paramètres de la reproduction et d'autres paramètres ont été recueillies. Toutefois, on dispose de peu de données sur la toxicité aiguë non mortelle.
Caractérisation du risque pour la santé humaine
En s'appuyant principalement sur l'évaluation fondée sur le poids de la preuve réalisée par le CIRC (2000) ainsi que sur l'observation de tumeurs dans plusieurs organes chez les souris et dans un organe chez les rats, on a défini la cancérogénicité comme étant un effet critique pour la caractérisation du risque pour l'homme. Les essais in vivo et in vitro ont révélé que le nitrométhane n'était pas génotoxique. Bien que le mode d'action lié à la cancérogénicité ne soit pas élucidé, on ne considère pas que les tumeurs observées résultent d'une interaction directe avec le matériel génétique. Par conséquent, une approche fondée sur le seuil d'innocuité a été utilisée afin de caractériser le risque pour la santé humaine. Au nombre des autres effets indésirables observés sur la santé des animaux de laboratoire, mentionnons la toxicité pour la reproduction et la neurotoxicité. Les effets aigus sont limités à une réduction du poids corporel, à une congestion nasale ou à la létalité à des niveaux d'exposition élevés.
Dans le cas où l'air était considéré comme la principale source d'exposition environnementale, une comparaison qui a été effectuée entre la concentration maximale du nitrométhane dans l'air (10,0 µg/m3) ainsi que la CMEO chronique ou subchronique prudente (235 mg/m3) pour la formation de gouttelettes hyalines, et le poids des souris ainsi que la CMENO subchronique, y compris la neurotoxicité chez les rats (938 mg/m3), a donné des marges d'exposition de 23 500 et de 93 800, respectivement. Les marges d'exposition n'ont pas été calculées pour d'autres voies d'exposition (p. ex. par les milieux naturels ou par les aliments), étant donné que l'air constitue la principale voie d'exposition. Les marges d'exposition calculées sont donc considérées comme étant adéquates à la lumière des incertitudes relevées dans la base de données (annexe 4).
L'utilisation de dissolvant de colle pour faux ongles constitue la principale source d'exposition au nitrométhane par l'intermédiaire de produits de consommation. On ne recense qu'un seul produit de ce genre sur le marché; par conséquent, l'exposition potentielle à ce produit devrait être limitée à une petite sous-population. Une comparaison entre les concentrations de nitrométhane prévues en fonction du dégagement gazeux de la substance à partir du dissolvant de colle pour faux ongles (13 mg/m3), et les concentrations avec effet résultant d'une exposition par inhalation chez les rats (2 495 et 1 248 µg/m3, respectivement) a donné des marges d'exposition allant de 100 à 200 environ (annexe 4). Puisque les effets observés sur les animaux de laboratoire à ce niveau d'exposition sont considérés comme étant minimes, la marge calculée à l'aide des valeurs de toxicité n'exige pas d'extrapolation à l'ensemble des espèces. En outre, compte tenu du fait que l'exposition dans les études sur les dangers était plus longue que la période d'exposition potentielle, les marges sont jugées adéquates en matière de protection de la santé humaine, notamment à la lumière des incertitudes relevées dans la base de données (annexe 4). Par ailleurs, si l'exposition quotidienne moyenne pour la durée de vie est prise en compte, l'exposition devrait être faible et le risque de cancer connexe, très faible.
Incertitudes de l'évaluation des risques pour la santé humaine
La détection de nitrométhane dans l'eau potable et un échantillon de lait maternel sans la quantification de l'exposition indique qu'il est possible que ces milieux contribuent à l'exposition. Cependant, les données en question sont très anciennes, la source potentielle de nitrométhane n'est pas documentée dans les études et leur pertinence par rapport à la situation au Canada est inconnue. En outre, même si cette évaluation préalable traite théoriquement de la possibilité d'une présence du nitrométhane dans certains aliments en raison d'une utilisation agricole de chloropicrine, aucune donnée n'a été relevée quant à la quantité de la substance qui pourrait être présente dans les produits alimentaires à base de céréales ou de grains. L'absorption du nitrométhane à partir de ces aliments, si absorption il y a, n'a pas été incluse dans l'estimation de l'exposition. Bien que des doutes subsistent concernant la modélisation des concentrations du nitrométhane dans l'air durant l'utilisation de produits de consommation, d'après les propriétés physiques et chimiques de la substance ainsi que les taux de renouvellement d'air potentiellement plus élevés dans les salons de beauté, les estimations finales devraient être prudentes.
La portée de la présente évaluation préalable ne prend pas en compte les écarts possibles en termes de sensibilité des espèces au nitrométhane ou la variabilité interpersonnelle de la sensibilité chez les humains.
D'après les renseignements contenus dans le rapport d'évaluation préalable, il est conclu que : le nitrométhane ne pénètre pas dans l'environnement en une quantité ou concentration ou dans des conditions de nature à avoir, immédiatement ou à long terme, un effet nocif sur l'environnement ou sur la diversité biologique, ou à mettre en danger l'environnement essentiel pour la vie. Le nitrométhane ne répond pas aux critères de la persistance ou de la bioaccumulation énoncés dans le Règlement sur la persistance et la bioaccumulation (Canada, 2000).
Compte tenu de l’adéquation des marges entre l'exposition au nitrométhane et les seuils d'effet critique chez les animaux de laboratoire et les humains, il est conclu de considérer le nitrométhane comme une substance qui ne pénètre pas dans l'environnement en quantité, à des concentrations ou dans des conditions qui constituent ou peuvent constituer un danger pour la vie ou la santé humaine au Canada.
Par conséquent, il est conclu que le nitrométhane ne satisfait à aucun des critères de l’article 64 de la LCPE (1999).
L’inclusion de cette substance sera considérée dans la prochaine mise à jour de l’inventaire de la Liste intérieure. De plus, des activités de recherche et de surveillance viendront, le cas échéant, appuyer la vérification des hypothèses formulées au cours de l'évaluation préalable.
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Archivée
Nitrométhane
Numéro de registre du Chemical Abstracts Service
75-52-5
Environnement Canada
Santé Canada
Juillet 2010
- Sommaire
- Introduction
- Identité de la substance
- Propriété physiques et chimiques
- Sources
- Utilisations
- Rejets dans l'environnement
- Devenir dans l'environnement
- Persistance et potentiel de bioaccumulation
- Potentiel d'effets nocifs sur l'environnement
- Potentiel d'effets nocifs sur la santé humaine
- Conclusion
- Références
- Annexe 1 : Estimations de la limite supérieure de l'absorption quotidienne de nitrométhane pour divers groupes d'âge
- Annexe 2 : Estimation de la limite supérieure de l'exposition par inhalation pour la volatilisation du nitrométhane à partir du dissolvant de colle pour faux ongles
- Annexe 3 : Résumé des renseignements liés aux effets du nitrométhane sur la santé
- Annexe 4 : Marges d'exposition estimées du nitrométhane
En application de l’article 74 de la Loi canadienne sur la protection de l’environnement (1999) [LCPE (1999)], les ministres de l’Environnement et de la Santé ont effectué une évaluation préalable du nitrométhane, dont le numéro de registre du Chemical Abstracts Service est 75-52-5. Une priorité élevée a été accordée à la prise de mesures à l’égard de cette substance durant la catégorisation visant la Listeintérieure dans le cadre du Défi. Le nitrométhane a été jugé hautement prioritaire, car il a été reconnu comme une substance présentant un risque d’exposition intermédiaire pour les particuliers au Canada et avait été classé en fonction de sa cancérogénicité. Bien qu’il réponde aux critères environnementaux de la catégorisation relatifs à la persistance, il ne répond pas à ceux relatifs au potentiel de bioaccumulation ou à la toxicité intrinsèque pour les organismes aquatiques. La présente évaluation est donc axée principalement sur les risques pour la santé humaine.
D’après les renseignements transmis en réponse à un avis publié en application de l’article 71 de la LCPE (1999), le nitrométhane n’a pas été fabriqué en une quantité dépassant le seuil de déclaration de 100 kg en 2006. Les importations déclarées pour cette substance (sous sa forme pure ou comme composant d’un produit, d’un mélange ou d’un article manufacturé) se situaient entre 100 et 1 000 kg en 2006. Selon les renseignements obtenus pour l’année de déclaration 2006, le nitrométhane serait principalement utilisé au Canada comme additif non-traditionnel pour les carburants destinés aux voitures de course d’accélération et à certains modèles de moteurs; solvant dans les laboratoires et les industries; produit intermédiaire dans la synthèse de biocides, de produits chimiques, de produits agricoles et d’autres produits intermédiaires; agent stabilisant dans les solvants de dégraissage; solvant véhiculeur pour opacifier la porcelaine de produits dentaires; dissolvant d’adhésif; agent stabilisant des solvants pour nettoyage à sec et produit de formulation dans les produits décapants, les nettoyants pour têtes de lecture de bandes magnétiques et les lubrifiants universels.
L’exposition de la population au nitrométhane par l’intermédiaire des milieux naturels devrait être faible selon les données qui ont été obtenues et en raison des rejets négligeables dans l’environnement au Canada qui ont été déclarés en réponse à un avis émis en application de l’article 71 de la LCPE (1999) pour l’année de déclaration 2006. Les émissions de nitrométhane dans l’environnement ambiant devraient provenir principalement de sources anthropiques. L’inhalation constitue la principale voie d’exposition environnementale. Il existe en effet sur le marché très peu de produits de consommation contenant du nitrométhane; toutefois, certaines personnes pourraient y être exposées en raison du dégagement gazeux lié à certains produits (p. ex., dissolvants d’adhésif instantané, de colle pour faux ongles et de colle à faux cils). L’exposition potentielle a été estimée pour un dissolvant de colle pour faux ongles à partir des données disponibles et constitue la limite supérieure de l’exposition potentielle liée aux produits de consommation.
Comme le nitrométhane a été classé par d’autres organismes nationaux et internationaux en fonction de sa cancérogénicité, la présente évaluation préalable porte principalement sur cette caractéristique. À la suite d’une exposition au nitrométhane par inhalation, des tumeurs ont été observées dans de nombreux organes chez les souris et dans un organe chez les rats femelles. Les essais in vivo et in vitro ont révélé que le nitrométhane n’est pas génotoxique. Bien que le mode d’action lié à la cancérogénicité ne soit pas élucidé, on ne considère pas que les tumeurs observées résultent d’une interaction directe avec le matériel génétique. Par conséquent, une approche fondée sur le seuil d’innocuité a servi à caractériser les risques pour la santé humaine. Au nombre des autres effets indésirables observés sur la santé des animaux de laboratoire, mentionnons la toxicité pour la reproduction, la formation de gouttelettes hyalines dans l’épithélium des voies respiratoires et la neurotoxicité.
Les marges entre l’estimation prudente de la limite supérieure d’exposition au nitrométhane dans l’air et les concentrations entraînant des effets chez les animaux de laboratoire sont considérées comme adéquates en matière de protection. Les marges entre l’estimation prudente de la limite supérieure d’exposition au dissolvant de colle pour faux ongles et les concentrations entraînant des effets chez les animaux de laboratoire et les humains sont considérées comme adéquates en matière de protection.
Compte tenu de l’adéquation des marges entre l’exposition au nitrométhane présent dans l’air ambiant ou les produits de consommation et les concentrations associées à un effet critique chez les animaux de laboratoire et les humains, on peut conclure que le nitrométhane ne pénètre pas dans l’environnement en une quantité, à une concentration ou dans des conditions de nature à constituer un danger au Canada pour la vie ou la santé humaines.
De plus, le nitrométhane ne satisfait pas aux critères de persistance et de bioaccumulation énoncés dans le Règlement sur la persistance et la bioaccumulation. De plus, on s’attend à ce qu’il présente un faible potentiel de toxicité pour les organismes aquatiques. D'après ces renseignements et les faibles concentrations attendues dans l’environnement, on peut conclure que le nitrométhane ne pénètre pas dans l'environnement en une quantité ou concentration ou dans des conditions de nature à avoir ou à pouvoir avoir, immédiatement ou à long terme, un effet nocif sur l'environnement ou sur la diversité biologique qui met ou peut mettre en danger l'environnement essentiel pour la vie.
D'après des renseignements disponibles, il est conclu que le nitrométhane ne satisfait à aucun des critères de l’article 64 de la LCPE (1999).
L’inclusion de cette substance sera considérée dans la prochaine mise à jour de l’inventaire de la Liste intérieure. De plus, des activités de recherche et de surveillance viendront, le cas échéant, appuyer la vérification des hypothèses formulées au cours de l'évaluation préalable.
La Loi canadienne sur la protection de l'environnement(1999) [LCPE (1999)] (Canada, 1999) exige que les ministres de l'Environnement et de la Santé procèdent à une évaluation préalable des substances qui répondent aux critères de la catégorisation énoncés dans la Loi, afin de déterminer si elles présentent ou sont susceptibles de présenter un risque pour l'environnement ou la santé humaine.
En se fondant sur l'information obtenue dans le cadre de la catégorisation, les ministres ont jugé qu'une attention hautement prioritaire devait être accordée à un certain nombre de substances, à savoir :
- celles qui répondent à tous les critères environnementaux de la catégorisation, notamment la persistance (P), le potentiel de bioaccumulation (B) et la toxicité intrinsèque pour les organismes aquatiques (Ti), et que l'on croit être commercialisées au Canada;
- celles qui répondent aux critères de la catégorisation pour le plus fort risque d'exposition (PFRE) ou qui présentent un risque d'exposition intermédiaire (REI) et qui ont été jugées particulièrement dangereuses pour la santé humaine, compte tenu des classifications qui ont été établies par d'autres organismes nationaux ou internationaux concernant leur cancérogénicité, leur génotoxicité ou leur toxicité pour le développement ou la reproduction.
Le 9 décembre 2006, les ministres ont donc publié un avis d'intention dans la Partie I de la Gazette du Canada(Canada, 2006) dans lequel ils priaient l'industrie et les autres parties intéressées de fournir, selon un calendrier déterminé, des renseignements précis qui pourraient servir à étayer l'évaluation des risques, ainsi qu'à élaborer et à évaluer les meilleures pratiques de gestion des risques et de bonne gestion des produits pour ces substances jugées hautement prioritaires.
On a jugé que le méthane, nitro- (nitrométhane) est une substance dont l'évaluation des risques pour la santé humaine est hautement prioritaire, car on considère qu'elle présente un REI et elle a été classée par d'autres organismes en fonction de sa cancérogénicité. Le volet du Défi portant sur cette substance a été publié dans la Gazette du Canada le 31 janvier 2009 (Canada, 2009). En même temps a été publié le profil de cette substance qui présentait l'information technique (obtenue avant décembre 2005) sur laquelle a reposé sa catégorisation. Des renseignements sur les utilisations de la substance ont été reçus en réponse au Défi.
Bien que le nitrométhane réponde aux critères de catégorisation écologique relatifs à la persistance, il ne répond pas à ceux relatifs au potentiel de bioaccumulation ou à la toxicité intrinsèque pour les organismes aquatiques. Par conséquent, la présente ébauche d'évaluation préalable est axée principalement sur les renseignements utiles à l'évaluation des risques pour la santé humaine.
Les évaluations préalables mettent l'accent sur les renseignements jugés essentiels pour déterminer si une substance répond aux critères de l'article 64 de la LCPE (1999). Les évaluations préalables examinent des renseignements scientifiques et tirent des conclusions fondées sur la méthode du poids de la preuve et le principe de prudence.[1]
La présente évaluation préalable prend en considération les renseignements sur les propriétés chimiques, les dangers, les utilisations de la substance en question et l'exposition à celle-ci, y compris l'information supplémentaire fournie dans le cadre du Défi. Les données pertinentes pour l'évaluation préalable de la présente substance sont tirées de publications originales, de rapports de synthèse, de rapports de recherche de parties intéressées et d'autres documents consultés au cours de recherches documentaires menées jusqu'en août 2009 sur des éléments liés à la santé humaine, et jusqu'en mai 2010 pour les composantes écologiques. Les études les plus importantes ont fait l'objet d'une évaluation critique. Il est possible que les résultats de modélisation aient servi à formuler des conclusions. L'évaluation des risques pour la santé humaine suppose la prise en compte des données utiles à l'évaluation de l'exposition (non professionnelle) de la population dans son ensemble et de l'information sur les dangers et les risques pour la santé (principalement d'après les évaluations s'appuyant sur la méthode du poids de la preuve effectuées par d'autres organismes, lesquelles qui ont servi à déterminer le caractère prioritaire de la substance). Les décisions concernant la santé humaine reposent sur la nature de l'effet critique retenu ou sur la marge entre les valeurs prudentes de concentration donnant lieu à des effets et les estimations de l'exposition, en tenant compte de la confiance accordée au caractère exhaustif des bases de données sur l'exposition et les effets, et ce, dans le contexte d'une évaluation préalable. L'évaluation préalable ne constitue pas un examen exhaustif ou critique de toutes les données disponibles. Il s'agit plutôt d'un sommaire de l'information la plus importante afin d'appuyer la conclusion.
La présente évaluation préalable a été préparée par le personnel du Programme des substances existantes de Santé Canada et d'Environnement Canada et elle intègre les résultats d'autres programmes exécutés par ces ministères. Les parties de la présente évaluation préalable qui portent sur la santé humaine et l'écologie ont fait l'objet d'une étude consignée par des pairs ou d'une consultation de ces derniers. Des commentaires sur les parties techniques concernant la santé humaine ont été reçus de la part d'experts scientifiques, tels que Mike Dourson, Ph. D. (Toxicology Excellence for Risk Assessment, TERA), Michael Jayjock, Ph. D. (The LifeLine Group) et Bob Benson, Ph. D. (US Environmental Protection Agency). De plus, la version provisoire de la présente évaluation préalable a fait l'objet d'une consultation publique de 60 jours. Bien que des commentaires externes aient été pris en considération, Santé Canada et Environnement Canada assument la responsabilité du contenu final et des résultats de l'évaluation préalable. Les méthodes utilisées dans les évaluations préalables du Défi ont été examinées par un Groupe consultatif du Défi indépendant.
Les principales données et considérations sur lesquelles repose la présente évaluation sont résumées ci-après.
La détermination de la conformité à l'un ou plusieurs des critères énoncés à l'article 64 est basée sur une évaluation des risques potentiels pour l'environnement et/ou la santé humaine associés aux expositions dans l'environnement en général. Pour les humains, cela inclut, sans toutefois s'y limiter, les expositions par l'air ambiant et intérieur, l'eau potable, les produits alimentaires et l'utilisation de produits de consommation. Une conclusion établie en vertu de la LCPE (1999) portant sur les substances 1 à 12 énumérées dans le Plan de gestion des produits chimiques (PGPC) n'est pas pertinente à une évaluation, qu'elle n'empêche pas non plus, par rapport aux critères de risque définis dans le Règlement sur les produits contrôlés, qui fait partie d'un cadre réglementaire pour le Système d'information sur les matières dangereuses au travail (SIMDUT) pour les produits destinés à être utilisés au travail.
Aux fins du présent document, la substance est appelée nitrométhane, qui est un nom commun de cette substance. Les renseignements liés à la substance sont résumés dans le tableau 1.
No CAS | 75-52-5 |
Nom dans la LIS | Nitrométhane |
Noms dans les NCI | Méthane, nitro- (AICS, ASIA-PAC, DSL, PICCS, SWISS, TSCA) Nitrométhane (anglais, français) (DSL, ECL, EINECS, ENCS, PICCS) Nitrométhane, inhibé (PICCS) |
Autres noms | Nitrocarbol NSC 428 UN 1261 UN 1261 (DOT) |
Groupe chimique (groupe de la LIS) | Produits chimiques organiques définis |
Principale classe chimique ou utilisation | Hydrocarbures à faible poids moléculaire |
Principale sous-classe chimique | Composés nitrés |
Formule chimique | CH3NO2 |
Structure chimique | |
SMILES | N(=O)(=O)C |
Masse moléculaire | 61,04 g/mol |
Abréviations : AICS (inventaire des substances chimiques de l'Australie); ASIA-PAC (listes des substances de l'Asie-Pacifique); no CAS (numéro de registre du Chemical Abstracts Service); LIS (liste intérieure des substances); ECL (liste des substances chimiques existantes de la Corée); EINECS (inventaire européen des substances chimiques commerciales existantes); NCI (National Chemical Inventories); PICCS (inventaire des produits et substances chimiques des Philippines); SMILES (simplified molecular input line entry specification); SWISS (liste des toxiques 1 et inventaire des nouvelles substances notifiées de la Suisse); TSCA (inventaire des substances chimiques visées par la Toxic Substances Control Act des États-Unis). Source : NCI, 2006 |
Le tableau 2 présente les propriétés physiques et chimiques (valeurs expérimentales et modélisées) du nitrométhane qui se rapportent à son devenir dans l'environnement.
Propriété | Type | Valeur1 | Descripteurs | Référence |
---|---|---|---|---|
Abréviations : Kco, coefficient de partage carbone organique-eau; Koe, coefficient de partage octanol-eau; pKa, constante de dissociation acide 1 Les valeurs et les unités entre parenthèses représentent les valeurs originales signalées par les auteurs ou estimées à l'aide des modèles. Les valeurs suivies d'un astérisque (*) sont celles qui ont été sélectionnées à des fins de modélisation. |
||||
Point de fusion (°C) | Expérimental | -28,50 | PhysProp, 2009 | |
Point d'ébullition (°C) | Expérimental | 101,10 | PhysProp, 2009 | |
Masse volumique (kg/m3 à 20 °C) |
Non précisé | 1 138 kg/m3 (1,138 g/cm3) |
Markofsky, 2005 | |
Pression de vapeur (Pa à 25 °C) |
Expérimental | 4 778,26* (35,84 mm Hg) |
Élevé | Daubert et Danner, 1989 |
Constante de la loi de Henry (Pa·m3/mol à 25 °C) |
Expérimental | 2,9* (2,86 × 10-5 atm·m3/mol) |
Modéré | Gaffney et al., 1987 |
Log Koe (sans dimension) |
Expérimental | -0,35* | Négligeable | Hansch et Leo, 1995 |
Solubilité dans l'eau (mg/L) |
Expérimental (de 15 à 25°C) |
111 000* | Très élevé | Riddick et al., 1986 |
Log Kco (sans dimension) |
Modélisé | 0,913 | Négligeable | PCKOCWIN, 2000 |
pKa (sans dimension) |
Modélisé | 10,2 | ACD/pKaDB, 2005 |
Des modèles fondés sur les relations quantitatives structure-activité (RQSA) ont été utilisés pour générer des données pour certaines des propriétés physiques et chimiques du nitrométhane. Ces modèles sont principalement fondés sur des méthodes d'addition de fragments; autrement dit, ils s'appuient sur la structure d'un produit chimique donné. Seules les formes neutres d'un produit chimique peuvent être fournies comme données d'entrée à ces modèles (forme SMILES); par conséquent, les valeurs modélisées figurant au tableau 2 concernent la forme neutre de la substance.
Le nitrométhane est une substance anthropique qui n'a pas été reconnue comme étant présente naturellement dans l'environnement, sauf éventuellement sous la forme d'un métabolite de champignon qui croît sur des panneaux de particules, ou d'un produit de synthèse issu d'une réaction photolytique entre le dioxyde d'azote et l'éthylène (NTP, 1997; CIRC, 2000; Claeson et al., 2002). La production de nitrométhane implique la nitration en phase gazeuse à température élevée du propane (Bollmeier, 1996). La substance peut également se présenter sous forme de produit de combustion de cigarettes et de combustibles (Seizinger et Dimitriades, 1972; Smith et al., 2003), ou de produit de dégradation de fumigants de sol dérivés du nitrométhane, comme la chloropicrine (Dungan et Yates, 2003).
Les déclarations communiquées en réponse à un avis publié en application de l'article 71 de la LCPE (1999) indiquent que le nitrométhane n'a pas été fabriqué en une quantité dépassant le seuil de déclaration de 100 kg en 2006 (Environnement Canada, 2009a). La même année, on a également déclaré des importations de la substance (seule, en mélange, dans un produit ou dans un produit manufacturé) dans des quantités allant de 100 à 1 000 kg) (Environnement Canada, 2009a).
La quantité que les entreprises ont déclaré avoir fabriquée, importée ou commercialisée au Canada durant l'année civile 1986 se situait entre 100 000 kg et 1 000 000 kg (Environnement Canada, 1986). Le nombre de déclarants pour les années civiles 1984 à 1986 était de moins de cinq. Des doutes persistent quant à la cause de la baisse importante de la quantité importée depuis 1986.
Les déclarations communiquées en réponse à un avis publié en application de l'article 71 de la LCPE (1999) ont indiqué que 100 à 1 000 kg de nitrométhane avaient été utilisés au total pendant l'année civile 2006 au Canada (Environnement Canada, 2009a).
Selon de récentes déclarations faites conformément à l'article 71 de la LCPE (1999) et les renseignements tirés d'autres sources, notamment des publications scientifiques et techniques, le nitrométhane est peut-être utilisé actuellement dans des solvants halogénés servant au dégraissage à la vapeur de pièces à travailler ainsi que comme solvant industriel et de laboratoire, solvant pour la suppression ou le décollement d'adhésif instantané à base d'alpha-cyanoacrylate, solvant véhiculeur pour opacifier la porcelaine de produits dentaires, additif pour les carburants destinés aux voitures de course et aux moteurs à combustion interne de modèles réduits (voitures, bateaux, avions, etc.), produit de formulation dans les produits décapants, nettoyant pour têtes de lecture de bandes magnétiques et nettoyant tout usage, et agent stabilisant des solvants pour nettoyage à sec (Lundberg, 1989; Dow, 2004; FS, 2005, 2007, 2008; NTP, 2005; DENTSPLY TRUBYTE, 2006; TDS, 2006; Environnement Canada, 2009a; Sigma-Aldrich, 2009; courriel du ministère de la Défense nationale adressé au coordonnateur des enquêtes sur la LIS d'Environnement Canada en 2007; source non citée).
On a signalé l'utilisation de nitrométhane en tant qu'ingrédient dans deux produits cosmétiques professionnels au Canada qui sont répertoriés dans la base de données du Système de déclaration des cosmétiques de Santé Canada. Cependant, la substance ne figure pas sur la Liste critique des ingrédients dont l'utilisation est restreinte ou interdite dans les cosmétiques (Santé Canada, 2007). Les deux produits cosmétiques en question sont un dissolvant de colle à faux cils et un dissolvant de colle pour faux ongles (SDC, 2009). La présence de nitrométhane a habituellement été observée dans des produits aérosols au Canada; cependant, cette utilisation a été abandonnée (SDC, 2009); courriel de la Division des cosmétiques – Bureau de la sécurité des produits de consommation de Santé Canada, adressé au Bureau de l'évaluation des risques de Santé Canada en 2009; source non citée). Au Canada, on note un pesticide homologué contenant du nitrométhane comme produit de formulation de la liste 2, à une concentration de 0,2 % selon le poids; toutefois, ce pesticide a cessé d'être vendu au Canada et son homologation arrivera à expiration le 1er août 2011 (ARLA, 2007). La substance est utilisée comme intermédiaire chimique dans la fabrication de bronopol, de bêta-bromo-bêta-nitrostyrène (BNS) technique et de chloropicrine technique, mais aucun contrôle des résidus de la substance dans ces pesticides n'a été effectué (courriel de l'Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire de Santé Canada adressé au Bureau de l'évaluation des risques de Santé Canada en 2009; source non citée). Le nitrométhane n'est pas répertorié comme additif alimentaire dans l'Index des additifs alimentaires du Règlement sur les aliments et drogues (Canada, 1978). La substance n'a pas non plus été détectée dans les formulations destinées aux matériaux d'emballage alimentaire (courriel de la Direction des aliments de Santé Canada adressé au Bureau de gestion du risque de Santé Canada en 2009; source non citée). Le Règlement sur les produits contrôlés, établi en vertu de la Loi sur les produits dangereux, prescrit un seuil de déclaration minimal pour une concentration de nitrométhane de 1 % selon le poids sur les fiches techniques santé-sécurité qui accompagnent les substances chimiques sur les lieux de travail, conformément aux instructions de la Liste de divulgation des ingrédients.
Le nitrométhane n'est inscrit ni dans la Base de données sur les produits pharmaceutiques (BDPP), ni dans la Base de données sur les ingrédients des produits de santé naturels (BDIPSN), ni dans la Base de données sur les produits de santé naturels homologués (BDPSNH) en tant qu'ingrédient médicinal ou non médicinal dans les produits pharmaceutiques finaux, les produits de santé naturels ou les médicaments vétérinaires fabriqués au Canada (courriels de la Direction des produits thérapeutiques, de la Direction des produits de santé naturels et de la Direction des médicaments vétérinaires de Santé Canada adressés au Bureau de gestion du risque de Santé Canada en 2009, source non citée). Cependant, la substance est utilisée comme intermédiaire chimique dans la synthèse de certains produits pharmaceutiques, dans lesquels elle peut laisser des traces (courriel de la Direction des produits thérapeutiques de Santé Canada adressé au Bureau de gestion du risque de Santé Canada en 2009, source non citée). Par exemple, la substance est employée comme agent de méthylation dans la synthèse de l'Atorvastatin, un inhibiteur de la 3-hydroxy-3-méthylglutaryl coenzyme A (HMG-CoA) réductase (Radl, 2003). Le nitrométhane est répertorié comme solvant résiduel de catégorie 2 (solvant à limiter) dans les produits pharmaceutiques, les produits de santé naturels et les produits pour animaux, avec une concentration maximale de 50 ppm (lorsque la dose quotidienne maximale de la substance ne dépasse pas 10 g) ou une exposition quotidienne permise de 0,5 mg/jour (Santé Canada, 1999). La fabrication de couronnes et de ponts dentaires implique l'utilisation d'un solvant véhiculeur pour opacifier la porcelaine qui contient la substance à une concentration de 74 % selon le poids (Fiche signalétique, 2005; courriel du Bureau des matériels médicaux de Santé Canada adressé au Bureau de gestion du risque de Santé Canada en 2009, source non citée). Le liquide opacifiant est appliqué à la structure métallique des couronnes et des ponts dentaires pour masquer la structure sous-jacente et agir comme colorant.
Les utilisations de nitrométhane indiquées ci-après ont été recensées dans le monde ou dans le passé, cependant, elles n'ont été pas jugées comme étant actuelles au Canada. En tant que solvant industriel, la substance est utilisée pour dissoudre les esters cellulosiques, les polymères, les cires et les résines artificielles, tels que les revêtements à base d'acrylique (Lundberg, 1989; CIRC, 2000). Le nitrométhane est un composant des agents nettoyants appliqués aux semi-conducteurs, aux lentilles et aux cartes de circuit imprimé électroniques (CIRC, 2000; Markofsky, 2005). Le propergol contient du nitrométhane comme additif de carburant (Lundberg, 1989). Le nitrométhane était auparavant utilisé en tant que composant dans les mélanges binaires et les charges formées (Bollmeier, 1996). Cette substance peut également être employée comme solvant aprotique dans l'électrodéposition des polymères (US Patent, 1992). Elle peut aussi servir d'inhibiteur de corrosion pour le revêtement interne des contenants en acier étamé renfermant des aérosols à base d'eau (Markofsky, 2005). Par ailleurs, le nitrométhane est utilisé comme intermédiaire chimique dans la fabrication de plusieurs dérivés, y compris les antimicrobiens industriels et les produits pharmaceutiques, tels que l'antiulcéreux ranitidine. De même, la substance est impliquée dans la production d'un nitro-alcool destiné à servir de tampon dans plusieurs applications pharmaceutiques (Bollmeier, 1996). Dans le système européen d'information sur les substances chimiques (base de données ESIS : European Chemicals Bureau's European Chemical Substances Information System) du Bureau européen des substances chimiques, il n'y a aucun renseignement sur le nitrométhane relativement à la Directive sur les produits biocides (Directive 98/8CE) (ESIS, 2009); cependant, on sait que la substance est actuellement employée dans les fumigants agricoles (ECB, 2005).
Les déclarations communiquées en réponse à un avis publié en application de l'article 71 de la LCPE (1999) n'ont indiqué aucun rejet de nitrométhane dans l'environnement pendant l'année civile 2006 (Environnement Canada, 2009a). Les données obtenues conformément à l'article 71 révèlent des transferts de nitrométhane, à des quantités inférieures à 100 kg, vers des installations destinées aux déchets dangereux au cours de l'année civile 2006 (Environnement Canada, 2009a). Le nitrométhane n'est pas déclaré dans l'Inventaire national des rejets de polluants (INRP, 2007) ou le Toxics Release Inventory (TRI) des États-Unis; par conséquent, aucune information n'était disponible à partir de ces sources.
D'après les propriétés physiques et chimiques du nitrométhane (tableau 2), les résultats de la modélisation de fugacité de niveau III (tableau 3) indiquent que cette substance devrait demeurer principalement dans l'air, l'eau et le sol, selon le milieu où elle est rejetée. Étant donné la volatilité de la substance, la plupart de ses rejets se retrouveraient probablement dans l'air, bien que cela ne soit pas certain.
Substance rejetée dans | Pourcentage de la substance répartie dans chaque milieu | |||
---|---|---|---|---|
Air | Eau | Sol | Sédiments | |
l'air (100 %) | 68,60 | 25,90 | 5,48 | 0,05 |
l'eau (100 %) | 0,12 | 99.70 | 0,01 | 0,20 |
le sol (100 %) | 0,24 | 36,90 | 62,7 | 0,07 |
La constante de dissociation acide relativement élevée (pKa) de 10,2 pour le groupe fonctionnel acide indique que la moitié du produit chimique sera dissociée à un pH de 10,2. Dans les plans d'eau ayant des pH pertinents du point de vue de l'environnement (entre 6 et 9), 100% du nitroméhane sera non dissocié, ce qui indique qu'il y aura une exposition biotique au produit sous forme neutre. La proportion relativement faible de la substance chimique dissociée indique également que la prévision du comportement de répartition à l'aide des logarithmes Koe et Kco est appropriée.
Persistance dans l'environnement
Le tableau 4a présente les données sur la photodégradation du nitrométhane, qui sont exprimées sous forme de demi-vie dans l'air estimée d'après une constante de vitesse de dégradation empirique (Atkinson, 1989). La demi-vie dans l'air résultant de la photolyse indirecte avec des radicaux hydroxyles est passablement longue – 82 jours. Toutefois, le nitrométhane absorbe le rayonnement ultraviolet supérieur à 290 nm et subit une photodissociation avec une demi-vie mesurée de 4,3 heures (Ryon, 1984). Par conséquent, le nitrométhane n'est probablement pas persistant dans ce milieu.
Milieu | Processus du devenir | Valeur pour la dégradation | Paramètre et unités de la dégradation | Référence |
---|---|---|---|---|
DBO: demande biochimique d'oxygène | ||||
Air | Photodégradation (indirecte) | 82 | Demi-vie (jours) | Atkinson, 1989 |
Eau | Biodégradation (aérobie) | 10 | % DBO à 28 jours | Freitag et al., 1988 |
Air | Photolyse | 4,3 | demi-vie (heures) | Ryon, 1984 |
Eau | Biodégradation (aérobie) | 36,2 | % DBO à 5 jours | Freitag et al., 1988 |
Sol | Biodégradation (aérobie) | 5,1 | % DBO à 35 jours | Freitag et al., 1988 |
Sol | Biodégradation (anaérobie) | 2,2 | % DBO à 35 jours | Freitag et al., 1988 |
Le tableau 4a présente les données empiriques de biodégradation du nitrométhane. Une étude (Freitag et al.,. 1988) indique une DBO de 10 % en 28 jours dans un essai de biodégradation dans le cas du nitrométhane au moyen de la ligne directrice OCDE 301. Toutefois, une autre étude (également Freitag et al., 1988) indique une vitesse de dégradation beaucoup plus rapide : DBO de 36,2 % en 5 jours. Des demi-vies, dans l'eau, allant de 7,7 à 184 jours peuvent être calculées avec une équation de cinétique de premier ordre en utilisant les taux de biodégradation expérimentaux de 36,2 % en 5 jours et de 10 % en 28 jours. Des sommaires rigoureux d'études ont permis de constater que les deux études sont acceptables, mais qu'il y a une préoccupation relativement à la volatilisation au cours de l'essai qui indiquait une faible biodégradation.
Le tableau 4a fournit également des données empiriques sur la dégradation de la substance dans le sol; ces données semblent indiquer que la substance est persistante dans ce milieu, bien que des preuves établissent qu'elle constitue un inhibiteur bactérien (Okamura et al., 1974). On signale qu'une importante volatilisation de nitrométhane s'est produite au cours des essais (22 et 32 %, respectivement).
En raison du peu de données expérimentales sur la dégradation du nitrométhane, une méthode du poids de la preuve reposant sur des RQSA (Environnement Canada, 2007) a aussi été utilisée avec les modèles de la dégradation indiqués dans le tableau 4b. Étant donné l'importance écologique du milieu aquatique, le fait que la plupart des modèles disponibles s'appliquent à l'eau et que la substance devrait être libérée dans ce milieu, on a principalement étudié la biodégradation dans l'eau. Le nitrométhane ne contient pas de groupements fonctionnels pouvant subir une hydrolyse. Le tableau 4b résume les résultats des modèles de prévision RQSA disponibles sur la dégradation dans divers milieux naturels.
Processus du devenir | Modèle et base du modèle | Résultat et prévision du modèle | Demi-vie extrapolée (jours) |
---|---|---|---|
DBO, demande biologique en oxygène; MITI, Ministry of International Trade and Industry, Japon; s.o., sans objet; t½, demi-vie. 1 Le modèle ne précise pas d'estimation pour ce type de structure. 2 Le résultat s'exprime par une valeur numérique de 0 à 5. 3 Le résultat s'exprime par un taux de probabilité. |
|||
Eau | |||
Hydrolyse | HYDROWIN, 2000 | s.o.1 | s.o. |
Biodégradation (aérobie) | BIOWIN, 2000 Sous-modèle 3 : enquête d'expert (biodégradation ultime) |
3,062 « se biodégrade rapidement » (semaines) |
< 182 |
Biodégradation (aérobie) | BIOWIN, 2000 Sous-modèle 4 : enquête d'expert (biodégradation primaire) |
3,762 « se biodégrade rapidement » (jours) |
< 182 |
Biodégradation (aérobie) | BIOWIN, 2000 Sous-modèle 5 : MITI probabilité linéaire |
0,533 « se biodégrade rapidement » |
< 182 |
Biodégradation (aérobie) | BIOWIN, 2000 Sous-modèle 6 : MITI, probabilité non linéaire |
0,693 « se biodégrade rapidement » |
< 182 |
Biodégradation (aérobie) | TOPKAT, 2004 Probabilité |
13 « se biodégrade rapidement » |
< 182 |
Biodégradation (aérobie) | CPOP, 2008 % DBO |
% DBO = 0 « se biodégrade lentement » |
> 182 |
Ainsi, quatre des cinq modèles de biodégradation ultime, y compris TOPKAT (2004), indiquent que la biodégradation de la substance sera probablement rapide et que sa demi-vie dans l'eau serait inférieure à 182 jours. Il subsiste une incertitude concernant certains résultats modélisés. Catabol (CPOP) attribue une probabilité de 0 % de transformation pour ce qui est de l'étape de réduction de la nitro, la seule possibilité qu'il détermine dans le cas de la molécule mère. TOPKAT ne présente pas beaucoup de substances nitrogénées dans l'ensemble d'étalonnage et les substances qui s'y trouvent, qui offrent les résultats les plus rapprochés du nitrométhane, ne comportent pas de groupes nitrogénés. BIOWIN ne comporte pas de composés avec des groupes nitro aliphatiques dans l'ensemble d'étalonnage.
Le nitrométhane ne répond pas au critère de la persistance dans l'air (demi-vie égale ou supérieure à 2 jours) tel qu'il est énoncé dans le Règlement sur la persistance et la bioaccumulation (Canada, 2000). Même si les données expérimentales pour la persistance dans l'eau et le sol ne concordent pas tout à fait, le poids de la preuve appuie la conclusion selon laquelle le nitrométhane ne répond pas aux critères de persistance dans l'eau et le sol (demi-vies dans le sol et l'eau égales ou supérieures à 182 jours) et dans les sédiments (demi-vie dans les sédiment égale ou supérieure à 365 jours), tel qu'ils sont énoncés dans le Règlement sur la persistance et la bioaccumulation (Canada, 2000).
Potentiel de bioaccumulation
Les valeurs expérimentales du log Koe pour le nitrométhane (voir le tableau 2 ci-dessus) laissent entendre que cette substance chimique est peu bioaccumulable dans le biote.
Le tableau 5a présente les valeurs empiriques du facteur de bioconcentration (FBC) chez les poissons et les algues. Même si les résultats indiquent un faible potentiel de bioaccumulation du nitrométhane, il demeure très difficile d'effectuer un essai ou de mesurer le potentiel de bioaccumulation de la substance avec précision, car elle est très volatile.
Organisme d'essai | Paramètre | Valeur (poids humide en L/kg) | Référence |
---|---|---|---|
Poisson | FBC | 1,4 | Freitag et al., 1988 |
Algues | FBC | 960 | Freitag et al., 1988 |
Puisque aucune donnée sur le facteur de bioaccumulation (FBA) et peu de données expérimentales sur le facteur de bioconcentration (FBC) étaient disponibles pour le nitrométhane, une méthode prédictive a été appliquée au moyen de modèles des facteurs de bioaccumulation et de bioconcentration, comme l'indique le tableau 5b. Comme données sur le métabolisme de cette substance n’étaient pas disponibles, elles n’ont pas été prises en compte dans les modèles des facteurs de bioaccumulation et de bioconcentration.
Organisme d'essai | Paramètre | Valeur en poids humide (L/kg) | Référence |
---|---|---|---|
Poisson | FBA | 1 | Arnot et Gobas, 2003 (niveau trophique intermédiaire du FBA) |
Poisson | FBC | 1 | Arnot et Gobas, 2003 (niveau trophique inférieur du FBC) |
Poisson | FBC | 3,12 | CPOP, 2008 |
Poisson | FBC | 3 | BCFWIN, 2000 |
Le modèle modifié du FBA de Gobas pour le niveau trophique intermédiaire chez les poissons a estimé le facteur de bioaccumulation à 1 L/kg, ce qui indique que le nitrométhane ne présente aucun potentiel de bioconcentration importante chez les poissons ni de bioamplification dans les chaînes alimentaires. Ces résultats concordent avec les prévisions, compte tenu de la structure de la substance et de ses propriétés physiques et chimiques. Les résultats des calculs du modèle des FBC fournissent une preuve additionnelle qui appuie le faible potentiel de bioconcentration de cette substance.
D'après les valeurs empiriques et celles obtenues par modélisation cinétique, le nitrométhane ne satisfait pas aux critères de bioaccumulation (FBA ou FBC =5 000) énoncé dans le Règlement sur la persistance et la bioaccumulation(Canada, 2000).
Évaluation des effets sur l'environnement
Les données expérimentales concernant les effets du nitrométhane sur les organismes aquatiques sont résumés au tableau 6a. Dans les deux cas, les conditions du test étaient statiques, sans renouvellement continu, de sorte qu'il aurait pu survenir une perte de nitrométhane dans l'air au cours des tests. Par conséquent, il faut faire preuve de prudence dans l'interprétation des résultats même s'ils semblent appuyer la conclusion selon laquelle le nitrométhane présente une faible toxicité pour les organismes aquatiques.
Organisme d'essai | Type d'essai | Paramètre | Valeur (mg/L) | Référence |
---|---|---|---|---|
Abréviation : CL50 = concentration d'une substance qu'on estime létale pour 50 % des organismes d'essais. | ||||
Tête-de-boule | Toxicité aiguë (96 h) | CL50 | < 278 | Curtis et al., 1981 |
Poisson zèbre, Brachydanio rerio | Aiguë (48 h) | CL50 | ca. 460 | ECB, 2000 |
Les données modélisées concernant les effets du nitrométhane sur les organismes aquatiques sont résumées au tableau 6b.
Tableau 6b. Données modélisées sur la toxicité du nitrométhane pour les organismes aquatiques
Organisme d'essai | Type d'essai | Paramètre | Valeur (mg/L) | Référence |
---|---|---|---|---|
Abréviations : CE50, concentration d'une substance qu'on estime susceptible de causer un effet sublétal toxique chez 50 % des organismes d'essai; CL50, concentration d'une substance qu'on estime létale pour 50 % des organismes d'essai. | ||||
Poissons | Toxicité aiguë (96 h) | CL50 | 2 916 | ECOSAR, 2004 |
3 048 | CPOP | |||
127 | AIES, 2003-2005 | |||
Toxicité aiguë (14 jours) | CL50 | 2 853 | ECOSAR, 2004 | |
Tête-de-boule | Toxicité aiguë (48 h) | CL50 | 127 | AIES, 2003-2005 |
Toxicité aiguë (96 h) | CL50 | 6 347 | ASTER, 1999 | |
Daphnie | Toxicité aiguë (48 h) | CE50 | 1 217 | ECOSAR, 2004 |
399 | TOPKAT, 2004 | |||
Algues | Toxicité aiguë (96 h) | CE50 | 238 | ECOSAR, 2004 |
Une étude de la toxicité aquatique aiguë du nitrométhane chez la tête-de-boule Carassius auratus indique une CL50 de 278 mg/L (tableau 6a). Cette valeur est considérée comme reflétant une toxicité aiguë faible. Par conséquent, le nitrométhane ne devrait pas avoir d'effets nocifs sur les organismes aquatiques à des concentrations relativement faibles. Même s'il subsiste un doute associé au résultat empirique en raison du potentiel de perte de nitrométhane résultant du système d'essai par volatilisation, cette conclusion est étayée par les données modélisées (tableau 6b).
Rejets industriels
Étant donné que le nitrométhane est utilisé dans un cadre industriel et qu'il pourrait être rejeté dans l'eau, le pire des scénarios de rejets industriels a été utilisé avec l'outil d'exposition générique industriel – milieu aquatique (Industrial Generic Exposure Tool – Aquatic, ou IGETA) pour estimer la concentration aquatique de la substance. Le scénario est prudent, c'est-à-dire qu'il suppose que la quantité totale de la substance employée dans l'industrie canadienne n'est utilisée que par une seule installation industrielle sur un petit site hypothétique, que les pertes dans les égouts sont élevées et qu'elles représentent 5 % de la quantité totale provenant du nettoyage de contenants de produits chimiques et d'équipement de traitement. Le scénario présume également que les rejets se produisent 250 jours par an, habituellement pour les petites et moyennes installations, et qu'ils sont acheminés vers une usine de traitement des eaux usées. On a évalué le taux d'élimination de l'usine de traitement des eaux usées à l'aide du programme de modélisation d’usines de traitement des eaux usées (STP, 2001). Au Canada, les eaux réceptrices sur un site aussi petit ont normalement une capacité de dilution de dix fois pour les effluents de l'usine de traitement des eaux usées, ce qui équivaut à 3 456 m3/jour. D'après les hypothèses susmentionnées, l'utilisation industrielle de la substance, notamment à une quantité totale de 100 à 1 000 kg/an donne une concentration aquatique de 0,0026 mg/L (Environnement Canada, 2009b).
Caractérisation des risques pour l'environnement
La démarche suivie dans cette évaluation écologique préalable consistait à examiner les divers renseignements à l'appui et à tirer des conclusions suivant la méthode du poids de la preuve et le principe de prudence requis par la LCPE (1999). Les éléments de preuve pris en compte comprennent les résultats d'un calcul prudent du quotient de risque ainsi que des renseignements sur la persistance, la bioaccumulation, la toxicité, les sources et le devenir de la substance.
Le nitrométhane ne devrait donc pas être persistant dans l'air, l'eau, le sol ou les sédiments. Il devrait présenter un faible potentiel de bioaccumulation. Les volumes d'importation de cette substance au Canada et les renseignements relatifs à ses utilisations indiquent un risque de rejets dans l'environnement au Canada. Une fois dans l'environnement, la substance se trouverait dans l'air, l'eau ou le sol, selon le milieu où elle est rejetée. D'après les données expérimentales et modélisées, on s'attend à ce que le nitrométhane présente un faible potentiel de toxicité pour les organismes aquatiques.
Une analyse du quotient de risque, intégrant des estimations prudentes de l'exposition aux renseignements liés à la substance, a été réalisée pour le milieu aquatique, afin de déterminer si la substance pourrait avoir des effets nocifs sur l'environnement au Canada. Le scénario industriel hypothétique décrit précédemment a donné une concentration environnementale estimée (CEE) de 0,0026 mg/L (Environnement Canada, 2009b). Une concentration estimée sans effet (CESE) a été déterminée à partir de la valeur de toxicité aigüe de 278 mg/L pour la tête-de-boule, en divisant cette valeur par un facteur d'évaluation de 100 (pour tenir compte de la variabilité inter et intraspécifique de la sensibilité et afin d'obtenir une valeur estimée de la concentration sans effet à long terme à partir d'une CL50 à court terme), pour générer une valeur de 2,78 mg/L.. Le quotient de risque (CEE/CESE) se chiffre à 0,0009. Il est donc peu probable que cette substance ait des effets nocifs chez les organismes aquatiques.
À la lumière des renseignements disponibles, il est improbable que le nitrométhane cause des effets écologiques nocifs au Canada.
Incertitudes dans l'évaluation des risques pour l'environnement
Il subsiste une incertitude concernant les données expérimentales pour la persistance dans l'eau parce que les résultats ne correspondent pas tout à fait et qu'on ne sait pas si l'on a tenu compte de la grande volatilité du nitrométhane dans le cadre des études.
Des doutes persistent quant à l'utilisation des modèles RQSA pour estimer la persistance, la bioaccumulation et la toxicité aquatique du nitrométhane. Il existe un nombre limité de composés nitrogénés dans les ensembles d'étalonnage concernant ces RQSA.
En outre, il existe des incertitudes en raison du nombre très restreint de renseignements (p. ex. des données de surveillance) sur les concentrations environnementales du nitrométhane au Canada ou ailleurs. De même, on a des doutes concernant la fraction de nitrométhane commercialisée qui est rejetée dans l'environnement ainsi que sur celle qui est éliminée dans les usines de traitement des eaux usées. On a par conséquent évalué une concentration environnementale estimée à l'aide d'un modèle d'exposition fondé sur des hypothèses prudentes.
Évaluation de l'exposition
Exposition environnementale
Aucune donnée empirique n'a été recensée au sujet des concentrations de nitrométhane mesurées dans les milieux naturels ou les aliments au Canada ou ailleurs. Cependant, des données empiriques ont été déterminées relativement à d'autres sites, notamment en termes de concentrations de nitrométhane dans l'air ambiant et dans un nombre limité de boissons, et elles servent de substitution aux données propres au Canada afin d'estimer l'exposition, tel qu'il est décrit ci-après. Aucune donnée de surveillance n'a été relevée concernant la présence de la substance dans l'air intérieur, l'eau de surface, l'eau potable, le sol ou les sédiments, quel que soit l'endroit. Les niveaux résiduels de la substance ne sont présentement pas soumis à une surveillance de l'Agence canadienne d'inspection des aliments (courriel de l'Agence canadienne d'inspection des aliments adressé au Bureau de gestion du risque de Santé Canada en 2009, source non citée).
Le nitrométhane est un polluant en phase gazeuse provenant des émissions de gaz d'échappement des véhicules qui ont été décelées (le 24 juillet 1996) dans au moins 1 des 44 échantillons d'air ambiant recueillis à Porto Alegre au Brésil, au cours de la période allant du 20 mars 1996 au 16 avril 1997, à une concentration de 10,0 µg/m3(Grosjean et al., 1998). Cette concentration a été utilisée en déterminant l'absorption de la substance dans l'air ambiant (voir l'annexe 1). Une autre étude (Seizinger et Dimitriades, 1972) a révélé la présence de nitrométhane dans l'air ambiant, provenant de gaz d'échappement automobiles à des concentrations allant de 2 à 12,5 mg/m3 (< 0,8 à 5 ppm); cependant, les installations d'essai des émissions (situées sur le chemin River) à Ottawa indiquent que des concentrations de 2,5 à 5 µg/m3 (1 à 2 ppb) sont plus probables, compte tenu des nouveaux règlements relatifs aux émissions et des différents facteurs de dilution (courriel des installations d'essai des émissions situées sur le chemin River à Ottawa adressé au Bureau de gestion du risque de Santé Canada; source non citée). La concentration de nitrométhane dans l'air ambiant à Porto Alegre, au Brésil, est considérée comme étant représentative de l'exposition à la substance, qui est attribuable aux émissions de gaz d'échappement des véhicules au point d'exposition (récepteur humain). Cette concentration de la substance dans l'air ambiant est également utilisée pour refléter l'air intérieur, étant donné que des données sur ce milieu étaient disponibles.
Aux États-Unis et au Canada, les émissions de gaz d'échappement des véhicules peuvent constituer une source d'augmentation des émissions de nitrométhane dans l'air ambiant, puisque les gros moteurs diesel fabriqués à partir du 1er janvier 2010 doivent être munis d'un dispositif de réduction sélective catalytique (SCR) afin de répondre aux nouvelles normes fédérales liées aux émissions de diesel qui visent à réduire les concentrations d'oxydes d'azote (Financial, 2009; Miller, 2009). L'Europe adopte également progressivement la technologie SCR depuis 2006; on devrait compter 3,7 millions de véhicules lourds et 5 millions de véhicules de distribution équipés de cette technologie d'ici 2012 (Peckham, 2003). La technologie SCR utilise un additif liquide contenant de l'azote organique, et on a détecté du nitrométhane en tant que sous-produit du processus (Miller, 2009).
En 1984, du nitrométhane a été mesuré dans l'air à des concentrations allant de 0,21 à 2 µg/m3 à trois sites autour d'une usine de fabrication de munitions dans le Tennessee. Cependant, les données sur l'air ambiant n'ont pas été prises en compte dans l'évaluation de l'exposition de l'ensemble de la population canadienne à la substance, puisque son utilisation dans la fabrication de cyclotriméthylènetrinitramine et de cyclotétraméthylènetétranitramine était obsolète aux États-Unis et n'a pas été signalée au Canada (Ryon et al. 1984; NTP, 2005). En outre, la concentration utilisée pour estimer l'absorption de la substance dans l'air (voir ci-dessus) est supérieure aux valeurs déclarées dans cette étude.
Le nitrométhane est présent dans la fumée principale du tabac à des concentrations allant de 0,3 à 0,6 µg par cigarette non filtrée (Rodgman, 2003). Par conséquent, la fumée de cigarette constitue une source potentielle d'exposition à la substance, en particulier dans l'air intérieur.
En ce qui concerne l'eau potable, une enquête menée par la US Environmental Protection Agency (USEPA) en 1975 a détecté du nitrométhane dans l'eau potable de quatre villes américaines parmi les dix étudiées, mais les concentrations n'ont pas été précisées. La substance a aussi été décelée qualitativement dans l'eau de surface (NTP, 2005).
Un document récent qui décrit une méthode de quantification du nitrométhane dans le sang a également indiqué la présence de la substance dans un nombre limité de boissons, notamment dans neuf échantillons de jus de fruits, de lait de vache et de lait de soja (1 %), à des concentrations allant de 0,13 à 1,4 µg/L (Alwis et al., 2008). En raison du peu de détails disponibles sur l'étude, on ne sait pas si d'autres aliments ont fait l'objet d'essais et on ne connaît pas non plus la concentration moyenne de la substance ou la distribution des concentrations dans ces aliments. Par ailleurs, cette étude ne peut être considérée comme exhaustive pour déterminer les concentrations de nitrométhane dans un panier typique de provisions et de boissons représentatif de la consommation canadienne. Même si Alwis et al. (2008) n'ont pas précisé la source du nitrométhane, ils ont, en se basant sur les renseignements présentés dans une étude précédente (Castro et al., 1983), avancé l'hypothèse selon laquelle la substance est présente dans les légumes et les produits alimentaires, en raison de la déshalogénation des bactéries du trichloronitrométhane par le Pseudomonas sp. Le trichloronitrométhane, aussi connu sous le nom de chloropicrine, est un produit de formulation d'un stérilisant du sol et d'un fumigant pour céréales et grains post-récolte homologués au Canada; ce produit est largement utilisé avec du bromure de méthyle dans les applications de pesticides (Alwis et al., 2008; courriel de l'Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire de Santé Canada adressé au Bureau de gestion du risque de Santé Canada en 2009; source non citée).
Compte tenu du fait qu'aucune autre donnée quantitative sur le nitrométhane dans les aliments n'a été relevée, on suppose que la concentration maximale de 1,4 µg/L déterminée dans neuf échantillons de jus de fruits, de lait de vache et de lait de soja (1 %) représente la concentration de nitrométhane pour 3 des 12 catégories alimentaires, notamment les produits laitiers, les fruits et produits à base de fruits, et les légumes, y compris les légumineuses (annexe 1). Puisque ces catégories d'aliments englobent de nombreux produits qui ne sont pas évalués dans l'étude d'Alwis et al. (2008), on envisage d'utiliser les données issues de cette étude pour établir une estimation prudente de l'exposition. Cette estimation sera également consolidée par l'utilisation d'une concentration maximale ainsi que le manque de détails sur la distribution des concentrations parmi les boissons et l'absence de représentation d'un panier typique de produits alimentaires consommés par les Canadiens.
Même si aucune étude de surveillance n'a été relevée concernant les concentrations de nitrométhane dans le sol ou les sédiments, ces dernières devraient avoir un effet minime sur l'estimation de l'exposition, comparativement aux concentrations de la substance dans l'air et l'eau, à cause de la valeur négligeable du log Kco et des rejets environnementaux allant principalement dans l'air et l'eau, d'après le profil d'utilisation prévu. Toutefois, sachant que la chloropicrine peut se dégrader en nitrométhane, on prévoit des concentrations de la substance dans le sol de régions agricoles (Dungan et Yates, 2003).
Bien que les données supplémentaires relevées agrandissent la base des connaissances sur le nitrométhane, ces données n'ont pas été utilisées pour quantifier l'exposition. La présence de la substance a été déterminée qualitativement dans l'air intérieur en Suède et découle de la prolifération microbienne sur des panneaux de particules (Claeson et al., 2002). Le nitrométhane a été décelé dans trois échantillons expérimentaux d'exsudats d'aliments conservés, à des concentrations non précisées (Wilkins et Larsen, 1995). Dans deux études menées aux États-Unis, on a également détecté la substance dans un des douze échantillons de lait maternel, bien que le seuil de détection n'ait pas été indiqué (Erickson et al., 1980; Pellizzari et al., 1982). En outre, une étude de biomarqueurs a quantifié les concentrations de nitrométhane dans le sang de 632 personnes sans antécédent connu d'exposition au nitrométhane ou aux halonitrométhanes; ces concentrations variaient de 0,28 à 3,79 µg/L (concentration médiane : 0,66 µg/L). L'étude se basait aussi sur des méthodes in vitro afin de démontrer l'hypothèse selon laquelle une déshalogénation des halonitrométhanes ainsi que des réactions induites par le peroxynitrite avec d'autres molécules dans le sang constituent des sources endogènes de nitrométhane dans le corps humain (Alwis et al., 2008). Ainsi, le nitrométhane dans le sang de ces personnes est peut-être attribuable à une exposition directe à la substance, à une exposition aux halonitrométhanes (en partie ou complètement) ou à des réactions biochimiques endogènes impliquant le peroxynitrite.
L'absorption quotidienne maximale de nitrométhane a été estimée à 6,1 µg/kg p.c. (kg p.c.) par jour pour les tout-petits âgés de 0,5 à 4 ans. L'absorption de la substance à partir de l'air constituait une source prédominante d'exposition environnementale, à des concentrations maximales de 10,0 µg/m3 (Grosjean et al., 1998). Néanmoins, puisque la substance a été décelée qualitativement à des concentrations non précisées dans le lait maternel et l'eau potable, on ne peut exclure la théorie selon laquelle ces milieux peuvent contribuer à l'exposition totale. L'annexe 1 présente l'absorption totale estimée du nitrométhane à partir de divers milieux pour différents groupes d'âge.
Exposition par des produits commerciaux et de consommation
En tenant compte de l'exposition au nitrométhane à partir de produits au Canada, on s'est basé sur les utilisations déclarées pour l'année civile 2006 en réponse à un avis publié en application de l'article 71 de la LCPE (1999) ainsi que sur des recherches documentaires et des communications avec l'industrie pour déterminer les usages actuels de la substance dans le pays. Présentement, le nitrométhane est un ingrédient intentionnel dans des utilisations de carburant (course d'accélération, moteurs de modèles réduits), quelques produits de soins personnels employés dans un cadre professionnel (un type de dissolvant de colle à faux cils et un type de dissolvant de colle pour faux ongles), un solvant pour nettoyage à sec et des solvants pour décoller les adhésifs instantanés et enlever les flux décapants, tel qu'il est décrit ci-après.
L'exposition par inhalation est la principale voie d'exposition au nitrométhane provenant de produits étant donné que les nitroalkanes ne sont pas immédiatement absorbés par la peau (Markofsky, 2005). Par ailleurs, une étude in vivo menée sur des singes n'a pas démontré de risque d'absorption cutanée de la substance en raison de son évaporation rapide (Norman, 1990).
En termes d'utilisations de carburant, les amateurs de modèles réduits peuvent être exposés à des vapeurs de nitrométhane lorsqu'ils ravitaillent les moteurs de leur engin. Cependant, le risque d'exposition est considéré comme faible à négligeable du fait que le ravitaillement en carburant s'effectue à l'extérieur, que le volume atmosphérique de la substance est important et que la quantité de carburant contenue dans un réservoir de moteur de modèle réduit est minime (125 mL). Bien que du nitrométhane puisse se déverser sur les mains de l'utilisateur lors du ravitaillement de l'engin, il ne devrait pas y avoir d'absorption cutanée. Par ailleurs, étant donné qu'une certaine quantité de nitrométhane peut être rejetée sous forme de produit non brûlé dans les gaz d'échappement des moteurs à carburant nitro, les spectateurs de courses d'accélération peuvent être exposés à la substance. Sachant que l'on n'a déterminé aucune estimation de l'efficacité de la combustion dans ces moteurs, la concentration de la substance (10,0 µg/m3) dans l'air ambiant au centre-ville de Porto Alegre, au Brésil, est considérée comme étant représentative de l'exposition des spectateurs de courses d'accélération, puisque cette concentration a été associée aux gaz d'échappement automobiles (Grosjean et al. 1998).
Le nitrométhane est en outre présent dans les solvants industriels servant à enlever les flux décapants, à une concentration maximale de 2% par poids (FS, 2002). Un flux décapant est appliqué durant la soudure d'équipement électrique afin de supprimer les oxydes métalliques des deux surfaces, ce qui permet une bonne fixation de l'alliage métallique (GBPPR [date inconnue]). L'exposition n'a pas été caractérisée pour cette utilisation puisqu'on juge que celle-ci a principalement lieu dans un cadre professionnel et qu'elle n'est donc pas applicable à l'exposition de la population générale.
Le nitrométhane a été signalé à Santé Canada en tant qu'ingrédient dans deux produits de soins personnels. Il est présent à une concentration maximale de 100 % par poids dans un dissolvant de colle à faux cils, et de 25 % par poids dans un dissolvant de colle pour faux ongles (SDC, 2009). Ces produits devraient surtout être utilisés dans un cadre professionnel, comme un salon de beauté, où l'exposition de la population générale (clients) à la substance est probable (courriel de la Division des cosmétiques de Santé adressé au Bureau de l'évaluation des risques de Santé Canada en 2009, source non citée). Sachant que le cycle de vie d'un vernis à ongles est de 3 à 6 semaines environ, on a établi à 17 fois par an la limite supérieure de fréquence d'application d'un dissolvant de colle pour faux ongles (courriel de la Division des cosmétiques de Santé adressé au Bureau de l'évaluation des risques de Santé Canada en 2009, source non citée). Cette fréquence ne constituant pas une source d'exposition chronique, la concentration moyenne pondérée dans le temps (MPT) de la substance inhalée a été déterminée à 13 mg/m3. Les hypothèses à l'origine du scénario sont présentées à l'annexe 2. Ce scénario a supposé un modèle à boîte unique (modèle d'une pièce dont l'air ambiant est bien mélangé) plutôt qu'un modèle à deux boîtes (la boîte en champ proche étant la zone dans laquelle l'utilisateur inhalait le dissolvant de colle pour faux ongles durant son application, et la boîte à champ lointain représentant le reste de la pièce), étant donné que le taux de renouvellement de l'air entre les deux parties de la pièce était inconnu (AIHA, 2009). Des doutes subsistent sur le scénario. En se basant sur le modèle des petits déversements, on considère que l'utilisation de l'estimation du taux de dégagement des contaminants pour déterminer le taux de production massique ne produit qu'une estimation de l'ordre de grandeur. Les fonctions du modèle (AIHA, 2009) conviennent mieux pour les substances présentant un rapport pression de vapeur-pression atmosphérique supérieur à 5 % (alors que ce rapport était de 4,7 % pour le nitrométhane) et pour une vélocité de l'air variant de 50 à 500 cm/s (tandis que la vélocité de l'air dans le scénario de l'utilisation d'un dissolvant de colle pour faux ongles dans une pièce était de 2 cm/s). En outre, la densité du nitrométhane (densité relative de 2,1) est plus élevée que celle de l'air, ce qui renforce les incertitudes liées à la capacité de la substance de s'évaporer et de se répartir à partir d'un contenant utilisé. Par ailleurs, il existe d'autres méthodes pour retirer les faux ongles, qui impliquent éventuellement divers volumes de produit et une durée d'utilisation variable.
En ce qui concerne le dissolvant de colle à faux cils, aucun scénario d'exposition n'a été défini, étant donné que l'estimation de l'exposition serait inférieure à celle qui est engendrée par le dissolvant de colle pour faux ongles, notamment à cause de la durée d'exposition moins longue (5 minutes) et de la quantité du produit utilisée (0,5 g).
En tant qu'agent dissolvant, le nitrométhane est peut-être présent à une concentration maximale de 100 % par poids dans les décapants d'adhésifs instantanés (FS, 2007). On suppose que l'utilisation par les consommateurs de décapants d'adhésifs instantanés est limitée à de petites applications, comme la suppression du surplus d'adhésif instantané lors du recollage de l'anse cassée d'une tasse. L'exposition pour cette utilisation n'a pas été caractérisée puisque son estimation serait inférieure à celle qui est liée au dissolvant de colle pour faux ongles, notamment à cause de la quantité plus faible de produit utilisée (0,5 g) au cours de la même durée d'exposition estimée (0,5 heure).
Il se peut que le nitrométhane soit aussi présent à une concentration de 74 % par poids dans un solvant véhiculeur pour opacifier la porcelaine, qui est appliqué à la structure métallique des couronnes et des ponts dentaires en laboratoire afin de masquer la structure sous-jacente et d'agir comme colorant (FS, 2005). L'exposition à la substance pendant cette application est improbable puisque le liquide appliqué n'est pas biodisponible (courriel du Bureau des matériels médicaux de Santé Canada adressé au Bureau de gestion du risque de Santé Canada en 2009, source non citée). Le nitrométhane est utilisé comme agent stabilisant des solvants pour nettoyage à sec (< 0,6 % par poids; FS, 2008); par conséquent, il peut être présent sous forme de résidus sur les vêtements. Cependant, il n'y a pas d'absorption cutanée des nitroalkanes (Norman, 1990; Markofsky, 2005). Les utilisations possibles de la substance, c'est-à-dire en tant que nettoyant pour têtes de lecture de bandes magnétiques ainsi que nettoyant tout usage ne constitueraient pas un risque préoccupant pour la population générale, étant donné qu'elles n'ont pas été signalées ailleurs que dans un cadre militaire au Canada (courriel du ministère de la Défense nationale adressé au coordonnateur des enquêtes sur la LIS d'Environnement Canada en 2007; source non citée).
Une étude supplémentaire portant sur l'exposition au nitrométhane par l'intermédiaire de produits n'a pas été utilisée étant donné que cela avait lieu dans un cadre professionnel. Cette étude quantifiait l'exposition des travailleurs au nitrométhane dans une usine fabriquant des phares de véhicules; l'exposition se produisait lorsque les travailleurs vaporisaient du nitrométhane, au moyen de bouteilles de pulvérisation, sur les phares afin de nettoyer l'excès de colle (Page et al., 2001). Dans le cadre d'une enquête de l'Occupational Safety and Health Administration (OSHA), on a prélevé des échantillons des concentrations de nitrométhane chez quatre travailleurs ayant inhalé la substance dans leur zone d'exposition individuelle, à une concentration moyenne pondérée dans le temps (MPT) sur huit heures de 50 mg/m3 (20 ppm) et une concentration moyenne de 31,81 mg/m3 (12,75 ppm). Le volume moyen de nitrométhane pure utilisé par chaque groupe de quatre travailleurs par demi-heure était approximativement de 35 mL (totalisant 560 mL dans un quart de huit heures) (Page et al., 2001).
On se fie peu à l'évaluation de l'exposition environnementale. Même si un nombre très limité de données documentaires ont été relevées sur les concentrations dans les divers milieux, les rejets environnementaux déclarés en vertu de l'article 71 de la LCPE (1999) devraient engendrer une exposition négligeable pour la population générale. Toutefois, la détection du nitrométhane sans la quantification de l'exposition dans certaines études indique un écart de données en matière de quantification de l'exposition. L'indice de confiance lié à l'évaluation de l'exposition au produit est modéré, puisque plusieurs utilisations ont été entièrement définies en réponse à un avis publié en application de l'article 71 de la LCPE (1999), en plus des recherches documentaires et du suivi de l'industrie.
Évaluation des effets sur la santé
L'annexe 3 résume les effets du nitrométhane sur la santé des animaux de laboratoire et de l'homme.
Le nitrométhane a été classé comme un cancérogène du groupe 2B (probablement cancérogène pour l'homme) par le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC, 2000), sur la base des preuves suffisantes observées chez des animaux de laboratoire, et il a été jugé comme étant cangérogène pour l'homme par le National Toxicology Program (NTP, 1997, 2005), au vu des preuves évidentes de l'activité cancérigène de la substance chez des souris B6C3F1 et des rats F344/N femelles. La base de données sur la cancérogénicité du nitrométhane due à une exposition chronique par inhalation comprend des incidences très accrues de tumeurs bénignes et malignes dans plusieurs organes de souris mâles et femelles ainsi que dans les glandes mammaires de rats femelles.
Les rats F344/N femelles exposés à la substance de manière chronique par inhalation, à des concentrations de 470 et de 938 mg/m3, ont montré une incidence significativement accrue de fibroadénomes des glandes mammaires, qui était la plus forte incidence observée chez un groupe témoin historique. Les rats femelles exposés à une concentration de 938 mg/m3de la substance ont également présenté une incidence significativement accrue de carcinome des glandes mammaires. Au cours de la même étude, aucun effet cancérogène n'a été noté chez des rats Fischer 344/N mâles (NTP, 1997). Dans une autre étude de l'exposition chronique par inhalation (Griffin et al., 1996), on n'a relevé aucun niveau de cancérogénicité important chez des rats BLU:(LE)BR exposés au nitrométhane à des concentrations de 250 et 500 mg/m3.
Les rats B6C3F1 femelles exposés à la substance de manière chronique par inhalation, à des concentrations de 470 et de 1 875 mg/m3, ont montré une incidence significativement accrue d'adénomes hépatocellulaires, qui était la plus forte incidence observée chez un groupe témoin historique (NTP, 1997). Cependant, le nombre de tumeurs observées à une concentration de 938 mg/m3 n'était pas statistiquement significatif. Par ailleurs, on a noté une hausse importante de l'incidence de carcinome bronchiolo-alvéolaire (CBA) chez les souris femelles exposées au nitrométhane, à une concentration de 938 mg/m3, ainsi que chez les souris mâles exposées à une concentration de 1 875 mg/m3. L'occurrence d'adénomes de la glande de Harder a fortement augmenté chez les souris mâles et femelles exposés à la substance, et ce, aux mêmes concentrations.
Les essais in vivo et in vitro ont révélé que le nitrométhane n'était pas génotoxique. La substance s'est montrée négative dans plusieurs essais liés à la mutagénicité chez les bactéries et le Drosophila (Brusick, 1975; Chiu et al., 1978; Domoradzki, 1980; Gocke et al., 1981; Lofroth et al., 1986; Mortelmans et al., 1986; Dayal et al., 1989; Dellarco et Prival, 1989) et elle n'a pas engendré d'échanges de chromatides sœurs ou d'aberrations chromosomiques dans des cellules de mammifères (NTP, 1997). Le nitrométhane n'a pas non plus entraîné de formation de micronoyaux in vitro ou chez les souris (Gocke et al., 1981; Gibson et al., 1997; NTP, 1997; Witt et al., 2000). Toutefois, la substance a causé une transformation morphologique des cellules embryonnaires du hamster de Syrie aux deux concentrations les plus élevées évaluées et sans l'activation de la fraction S9 (Kerckaert et al., 1996).
Bien que le mécanisme de la cancérogénicité du nitrométhane soit inconnu, d'autres modes d'action ont été proposés puisque le nitrométhane n'est pas génotoxique dans les essais in vitro ou in vivo. On a précédemment émis l'hypothèse selon laquelle les radicaux réactifs peuvent être impliqués dans la cancérogénicité du nitrométhane (NTP, 1997), car le métabolisme de la substance engendre des radicaux superoxydes intermédiaires, du peroxyde d'hydrogène, du nitrite, du formaldéhyde et de l'acétone selon l'enzyme métabolisante (Porter et al., 1972; Kido et Soda, 1978; Sakurai et al., 1980; Dahl et Hadley, 1983; Kido et al., 1984; Dayal et al., 1991). Compte tenu du fait que le nitrométhane s'est révélé positif dans un essai de transformation cellulaire sans l'activation de la fraction S9 (Kerckaert et al., 1996), il est également possible que la molécule mère favorise la croissance d'une tumeur par l'intermédiaire d'un effet direct sur la cellule. La substance est rapidement absorbée par les voies respiratoires et le tractus gastrointestinal (Scott, 1943), néanmoins, la voie métabolique principale chez les mammifères reste inconnue.
En termes d'effets non cancérogènes, une légère congestion nasale (chez un animal sur quatre) et une perte de poids transitoire (chez trois animaux sur quatre) ont été observés chez des rats mâles après qu'ils aient été soumis à une exposition aiguë par inhalation au nitrométhane, à une concentration de 2 495 mg/m3 pendant 4 heures (concentration minimale avec effet observé aigüe, CMEO : 2 495 mg/m3). À une concentration de 9 980 mg/m3, les rats ont présenté un manque de réactivité, et à des concentrations de 14 970 et de 19 960 mg/m3, un rat sur quatre et trois rats sur quatre sont décédés, respectivement (Haskell Laboratory, 1961). Par ailleurs, on a noté des effets sur le foie chez des animaux de laboratoire à la suite d'une exposition par inhalation à court terme ou d'une exposition par voie orale au nitrométhane. La CMEO était de 235 mg/m3, concentration à laquelle on a relevé une augmentation des poids absolu et relatif du foie chez des souris exposées à la substance pendant 16 jours. À des concentrations plus élevées, on a constaté une dégénérescence minimale de l'épithélium olfactif chez les souris et les rats ainsi qu'une dégénérescence liée à la dose du nerf sciatique chez les rats (concentration minimale avec effet nocif observé, CMENO : 938 mg/m3) (NTP, 1997). Comme cela a été caractérisé par les auteurs de l'étude, un trouble hépatique s'est produit chez les rats et les lapins exposés pendant deux mois à la substance par l'intermédiaire d'eau potable (dose minimale avec effet nocif observé, DMEO : 23,5 mg/kg p.c. par jour) (Subbotin, 1967).
La CMEO découlant de l'exposition subchronique par inhalation était de 235 mg/m3, d'après la formation de gouttelettes hyalines dans l'épithélium des voies respiratoires des souris femelles et l'augmentation des poids absolu et relatif des reins des souris mâles exposés à la substance pendant 13 semaines. À des concentrations plus élevées, des rats ont présenté une dégénérescence du nerf sciatique et de la moelle épinière lombaire (CMENO : 938 mg/m3) (NTP, 1997). On a également observé une hausse transitoire de l'activité des transaminases sériques chez les rats et les lapins, dans les deux à trois mois suivant leur exposition au nitrométhane par l'intermédiaire d'eau potable pendant une période de six mois (dose minimale avec effet nocif observé/dose sans effet observé, DMEO/DSEO : 0,05 mg/kg p.c. par jour) (Subbotin, 1967).
L'exposition au nitrométhane a entraîné des changements des paramètres de la reproduction chez des animaux de laboratoire. En outre, on a noté une baisse importante de la motilité des spermatozoïdes chez des rats exposés à la substance à des concentrations de 1 875 et de 3 750 mg/m3, ainsi que chez des souris exposés à la substance par inhalation, à des concentrations de 938, de 1 875 et de 3 750 mg/m3pendant 13 semaines. Les souris femelles ont présenté une augmentation de la durée du cycle œstral aux concentrations de 938, de 1 875 et de 3 750 mg/m3 (NTP, 1997). Cependant, les souris exposées à des concentrations de nitrométhane de 235 et de 470 mg/m3 dans le cadre d'une étude du NTP (1997), n'ont pas été examinées en termes d'effets sur la reproduction, ce qui a diminué l'indice de confiance relativement à la concentration de 938 mg/m3et à la dose minimale avec effet observé (DMEO) pour les changements liés aux paramètres de la reproduction (CMENO pour les effets sur la reproduction : = 938 mg/m3).
Il existe un nombre limité de rapports de cas d'exposition au nitrométhane par inhalation en milieu de travail. Deux travailleurs d'une usine d'assemblage de phares ont été exposés au nitrométhane, à une concentration quotidienne de 31,81 mg/m3 pendant quatre ou six semaines et ont développé une neuropathie périphérique qui se présentait sous la forme d'une diminution des réflexes et d'une faiblesse des jambes. Une personne a présenté des douleurs et des enflures aux jambes et aux pieds (Page et al., 2001). Un autre rapport de cas a signalé un travailleur exposé de manière chronique par inhalation à des vapeurs provenant d'un solvant contenant 0,25 % de nitrométhane; cette personne a développé le parkinsonisme ainsi qu'une dépression (Sandyk et Gillman, 1984). Les effets du nitrométhane sur le système nerveux de l'homme sont similaires à ceux observés chez les animaux de laboratoire exposés à la substance, cependant, les résultats doivent être interprétés avec prudence, car dans les deux cas, les travailleurs ont également été exposés à d'autres composés potentiellement dangereux et dont un d'entre eux au moins présentait une toxicité neurologique connue. On a constaté de graves effets toxiques chez l'homme à la suite d'une exposition par inhalation au nitrométhane, à une concentration de 1 996 mg/m3pendant une heure. Des symptômes de maladie ont également été observés pour l'exposition à une concentration de 1 248 mg/m3 « pendant une période plus longue » (Strafford et al., 1956). Des détails supplémentaires étaient disponibles auprès de la sources principale.
L'indice de confiance attribuable à l'ensemble des données des effets sur la santé du nitrométhane est élevé, car un nombre limité d'études bien réalisées sur la cancérogénicité, la neurotoxicité, les paramètres de la reproduction et d'autres paramètres ont été recueillies. Toutefois, on dispose de peu de données sur la toxicité aiguë non mortelle.
Caractérisation du risque pour la santé humaine
En s'appuyant principalement sur l'évaluation fondée sur le poids de la preuve réalisée par le CIRC (2000) ainsi que sur l'observation de tumeurs dans plusieurs organes chez les souris et dans un organe chez les rats, on a défini la cancérogénicité comme étant un effet critique pour la caractérisation du risque pour l'homme. Les essais in vivo et in vitro ont révélé que le nitrométhane n'était pas génotoxique. Bien que le mode d'action lié à la cancérogénicité ne soit pas élucidé, on ne considère pas que les tumeurs observées résultent d'une interaction directe avec le matériel génétique. Par conséquent, une approche fondée sur le seuil d'innocuité a été utilisée afin de caractériser le risque pour la santé humaine. Au nombre des autres effets indésirables observés sur la santé des animaux de laboratoire, mentionnons la toxicité pour la reproduction et la neurotoxicité. Les effets aigus sont limités à une réduction du poids corporel, à une congestion nasale ou à la létalité à des niveaux d'exposition élevés.
Dans le cas où l'air était considéré comme la principale source d'exposition environnementale, une comparaison qui a été effectuée entre la concentration maximale du nitrométhane dans l'air (10,0 µg/m3) ainsi que la CMEO chronique ou subchronique prudente (235 mg/m3) pour la formation de gouttelettes hyalines, et le poids des souris ainsi que la CMENO subchronique, y compris la neurotoxicité chez les rats (938 mg/m3), a donné des marges d'exposition de 23 500 et de 93 800, respectivement. Les marges d'exposition n'ont pas été calculées pour d'autres voies d'exposition (p. ex. par les milieux naturels ou par les aliments), étant donné que l'air constitue la principale voie d'exposition. Les marges d'exposition calculées sont donc considérées comme étant adéquates à la lumière des incertitudes relevées dans la base de données (annexe 4).
L'utilisation de dissolvant de colle pour faux ongles constitue la principale source d'exposition au nitrométhane par l'intermédiaire de produits de consommation. On ne recense qu'un seul produit de ce genre sur le marché; par conséquent, l'exposition potentielle à ce produit devrait être limitée à une petite sous-population. Une comparaison entre les concentrations de nitrométhane prévues en fonction du dégagement gazeux de la substance à partir du dissolvant de colle pour faux ongles (13 mg/m3), et les concentrations avec effet résultant d'une exposition par inhalation chez les rats (2 495 et 1 248 µg/m3, respectivement) a donné des marges d'exposition allant de 100 à 200 environ (annexe 4). Puisque les effets observés sur les animaux de laboratoire à ce niveau d'exposition sont considérés comme étant minimes, la marge calculée à l'aide des valeurs de toxicité n'exige pas d'extrapolation à l'ensemble des espèces. En outre, compte tenu du fait que l'exposition dans les études sur les dangers était plus longue que la période d'exposition potentielle, les marges sont jugées adéquates en matière de protection de la santé humaine, notamment à la lumière des incertitudes relevées dans la base de données (annexe 4). Par ailleurs, si l'exposition quotidienne moyenne pour la durée de vie est prise en compte, l'exposition devrait être faible et le risque de cancer connexe, très faible.
Incertitudes de l'évaluation des risques pour la santé humaine
La détection de nitrométhane dans l'eau potable et un échantillon de lait maternel sans la quantification de l'exposition indique qu'il est possible que ces milieux contribuent à l'exposition. Cependant, les données en question sont très anciennes, la source potentielle de nitrométhane n'est pas documentée dans les études et leur pertinence par rapport à la situation au Canada est inconnue. En outre, même si cette évaluation préalable traite théoriquement de la possibilité d'une présence du nitrométhane dans certains aliments en raison d'une utilisation agricole de chloropicrine, aucune donnée n'a été relevée quant à la quantité de la substance qui pourrait être présente dans les produits alimentaires à base de céréales ou de grains. L'absorption du nitrométhane à partir de ces aliments, si absorption il y a, n'a pas été incluse dans l'estimation de l'exposition. Bien que des doutes subsistent concernant la modélisation des concentrations du nitrométhane dans l'air durant l'utilisation de produits de consommation, d'après les propriétés physiques et chimiques de la substance ainsi que les taux de renouvellement d'air potentiellement plus élevés dans les salons de beauté, les estimations finales devraient être prudentes.
La portée de la présente évaluation préalable ne prend pas en compte les écarts possibles en termes de sensibilité des espèces au nitrométhane ou la variabilité interpersonnelle de la sensibilité chez les humains.
D'après les renseignements contenus dans le rapport d'évaluation préalable, il est conclu que : le nitrométhane ne pénètre pas dans l'environnement en une quantité ou concentration ou dans des conditions de nature à avoir, immédiatement ou à long terme, un effet nocif sur l'environnement ou sur la diversité biologique, ou à mettre en danger l'environnement essentiel pour la vie. Le nitrométhane ne répond pas aux critères de la persistance ou de la bioaccumulation énoncés dans le Règlement sur la persistance et la bioaccumulation (Canada, 2000).
Compte tenu de l’adéquation des marges entre l'exposition au nitrométhane et les seuils d'effet critique chez les animaux de laboratoire et les humains, il est conclu de considérer le nitrométhane comme une substance qui ne pénètre pas dans l'environnement en quantité, à des concentrations ou dans des conditions qui constituent ou peuvent constituer un danger pour la vie ou la santé humaine au Canada.
Par conséquent, il est conclu que le nitrométhane ne satisfait à aucun des critères de l’article 64 de la LCPE (1999).
L’inclusion de cette substance sera considérée dans la prochaine mise à jour de l’inventaire de la Liste intérieure. De plus, des activités de recherche et de surveillance viendront, le cas échéant, appuyer la vérification des hypothèses formulées au cours de l'évaluation préalable.
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