Exposé des objectifs - les 12 et 13 juin 2019

Comité scientifique sur le Plan de gestion des produits chimiques

Approches nouvelles pour l’intégration du devenir des produits chimiques et des échelles spatiales et temporelles dans l’évaluation de l’exposition

1. Introduction

1.1 L’enjeu en cause

La difficulté d’estimation de la concentration moyenne des produits chimiques dans l’environnement rend les évaluations des risques chimiques hautement incertaines. Cette difficulté est en grande partie attribuable au caractère dynamique et variable des conditions environnementales, du devenir des produits chimiques et des émissions de produits chimiques. La plupart des concentrations de produits chimiques présents dans l’environnement qui sont utilisées pour les évaluations des risques écologiques dans le Plan de gestion des produits chimiques (PGPC) sont établies à partir de scénarios locaux, alors que les évaluations des risques pour la santé humaine reposent plutôt que les scénarios locaux ou régionaux. Plus précisément, dans de nombreux cas, l’influence quantitative des taux d’émission, du devenir des produits chimiques et de leur transport sur l’exposition des récepteurs, humains ou non, est très peu considérée au‑delà de l’échelle locale. En somme, le potentiel d’exposition à l’échelle régionale et au‑delà n’est pas systématiquement pris en compte dans l’évaluation de l’exposition écologique que mène le gouvernement du Canada dans le cadre du PGPC. D’après Bonnell et coll. (2018), cette situation s’expliquerait notamment par le fait que l’estimation des concentrations dans l’environnement intègre peu les renseignements sur le devenir des produits chimiques et de la distribution, particulièrement au‑delà des zones d’émission de sources ponctuelles. Conséquemment, il peut y avoir un décalage spatial et temporel entre, d’une part, les concentrations dans l’environnement qui sont utilisées pour établir les priorités ou pour évaluer les risques et, d’autre part, les expositions réelles ou anticipées. Dans son rapport Using 21st Century Science to Improve Risk-Related Evaluations publié en 2017, la National Academy of Sciences (NAS) soulignait ce même défi.

« Amélioration de la connaissance des processus qui déterminent le devenir chimique dans les systèmes. Défi : Pour définir et prédire les expositions, il est essentiel de comprendre l’influence des processus qui conditionnent le devenir, le transport et, au bout du compte, les concentrations des substances chimiques dans les milieux naturels et dans les systèmes de tests chez l’animal et sur des cellules. Les données sur les propriétés des systèmes, les processus et les voies de transformation qui contribuent à l’exposition aux substances chimiques sont insuffisantes, incomplètes et contradictoires, ce qui limite la capacité de mener des évaluations quantitatives approfondies fondées sur l’exposition et le risque. » (NAS, 2017)

Le rapport de 2017 recommande notamment que des bases de données soient créées sur les propriétés chimiques, les taux de conversion et les voies de transformation pour soutenir les progrès de l’expologie. Il souligne en outre le rôle des approches computationnelles prédictives pour améliorer l’expologie des évaluations axées sur les risques, étant donné qu’il existe peu d’indicateurs qui permettent de mesurer l’exposition à la majorité des agents de stress environnementaux. Le rapport de la NAS ajoute enfin que l’absence reconnue d’outils et de renseignements sur l’exposition vient stimuler la recherche pour améliorer l’expologie à petite ou grande échelle.   

Les scénarios à l’échelle locale représentent souvent les pires scénarios envisageables; leur utilisation est souhaitable, dans la mesure où ils constituent une approche prudente qui sied bien aux évaluations des risques. Cependant, lorsqu’une évaluation des risques est menée dans le cadre du PGPC, il peut être nécessaire d’affiner les estimations en matière d’exposition (par exemple, lorsque la marge entre l’estimation de l’exposition et le point d’apparition du danger est faible). Le fait d’étendre la portée du scénario d’exposition au‑delà de l’échelle locale permet de tenir compte de facteurs concrets qui pourraient avoir une incidence sur l’exposition des récepteurs cibles. C’est pourquoi le gouvernement du Canada cherche à mieux intégrer le devenir des produits chimiques et les échelles spatiales et temporelles. Il vise ainsi à améliorer l’estimation quantitative de l’exposition dans plusieurs milieux et au‑delà de l’échelle locale, en tenant compte de conditions d’émissions dynamiques (c’est‑à‑dire épisodiques) ou stables. En quantifiant ainsi l’exposition, les scénarios d’exposition seraient plus perfectionnés et plus réalistes et les prévisions des concentrations dans l’environnement seraient plus précises, tout comme l’estimation du risque. L’intégration du devenir des produits chimiques et des échelles spatiales et temporelles viendrait aussi réduire l’incertitude qui caractérise pour l’instant l’évaluation de l’exposition. Elle permettrait en outre d’accroître la fiabilité des conclusions tirées des évaluations menées dans le cadre du PGCP et, en définitive, d’appuyer le processus décisionnel pour gérer les risques liés aux produits chimiques. Cette intégration viendrait également soutenir les efforts qui seront investis subséquemment dans la gestion des risques et la prévention de la pollution, l’efficacité des réductions d’émission étant mieux saisie lorsqu’elle est étudiée à diverses échelles et lorsqu’elle inclut les régions éloignées sensibles, dans lesquelles vivent des populations vulnérables possiblement touchées par ces émissions (par exemple, MacKay et Reid, 2008). Mais pour comprendre de quelle manière il est possible de relier toutes ces échelles d’exposition, il faut d’abord comprendre les schémas d’émission et le devenir des produits chimiques (ce qui inclut la notion de persistance).

1.2 Objectif du Comité scientifique sur le Plan de gestion des produits et contexte de l’enjeu à aborder

Le Comité scientifique sur le PGPC sollicite des commentaires sur les secteurs à améliorer dans les évaluations de l’exposition afin que ces dernières intègrent mieux le devenir des produits chimiques et les différentes échelles spatiales et temporelles d’exposition. Le présent enjeu cible essentiellement l’exposition des humains et d’autres organismes à des facteurs environnementaux, mais exclut l’exposition des humains aux produits de consommation et à l’air intérieur. L’exposition humaine aux produits chimiques qui se trouvent dans les produits chimiques et dans l’air intérieur est associée à des difficultés et des défis qui lui sont propres. Elle sera exclue afin de permettre de cerner un objectif de discussion approprié pour le Comité scientifique. Les résultats qui découleront de cette discussion pourraient appuyer les activités d’évaluation ou de gestion des risques que mène le gouvernement fédéral dans le cadre de son PGPC actuel. Ils pourraient également venir informer les activités d’établissement des priorités et d’évaluation à venir (par exemple, après 2020). Auparavant, Environnement et Changement climatique Canada (ECCC) recourait à une approche axée sur la classification du risque dans l’environnement qui intégrait la notion de devenir des produits chimiques dans de multiples milieux et une échelle spatiale qualitative d’exposition. Pour la réalisation des évaluations du PGPC, un modèle de devenir des produits chimiques dans plusieurs milieux a été utilisé pour estimer l’exposition humaine à différents environnements. Le gouvernement reconnaît toutefois que cet enjeu peut devenir complexe et exiger des instruments plus sophistiqués. Par conséquent, il est souhaitable que le Comité scientifique discute d’approches adaptées aux besoins du PGPC en matière d’évaluation, possiblement en utilisant une structure de mise en place à plusieurs volets.

Une grande partie de la discussion sur ce sujet portera sur de nouvelles approches ou sur l’adaptation de stratégies actuelles pour la modélisation du devenir des produits chimiques et de l’exposition, étant donné que la majorité des activités d’établissement des priorités et une proportion importante des évaluations des risques du gouvernement sont réalisées en l’absence de données de surveillance.

Le présent document ne vise pas à fournir une étude approfondie de l’ensemble des modèles ou des approches qui existent en ce moment dans le domaine; ces derniers sont déjà bien décrits dans la littérature (par exemple, OCDE, 2004; Zhang et coll., 2012). Il vise plutôt à présenter certaines des approches suivies par le gouvernement du Canada et les besoins de ce dernier pour une meilleure intégration du devenir des produits chimiques et des échelles spatiales et temporelles dans les évaluations de l’exposition à l’environnement. À ce titre, l’accent sera plutôt mis ici sur la modélisation du devenir de certains produits chimiques organiques définis dans l’environnement, ce qui inclut les produits chimiques organiques ionisants, mais non les substances de composition inconnue ou variable, produits de réaction complexes ou matières biologiques inorganiques (UVCB)Note de bas de page 1 . Aussi, l’estimation des concentrations moyennes de ces substances dans l’environnement est associée à d’autres incertitudes ou des lacunes dans les données qui n’ont pas pu être abordées de manière raisonnable ici. L’évaluation de l’exposition à des produits de dégradation est incluse à la portée de l’enjeu abordé ici, sous réserve de la disponibilité de certaines connaissances sur ces produits à des fins de modélisation (quant à leur structure, leurs propriétés physiques et chimiques et leur persistance, par exemple). Enfin, l’enjeu étudié dans le présent document a également une visée conceptuelle, car il peut être appliqué au moment de planifier les programmes de surveillance. En effet, la surveillance, actuelle et future, peut être appliquée à diverses échelles, conformément au devenir des produits chimiques établi; à l’inverse, les résultats de la surveillance peuvent venir améliorer la modélisation du devenir des produits chimiques et de l’exposition.

Les sections qui suivent fournissent la perspective du gouvernement du Canada en matière de devenir des produits chimiques et de l’évaluation de l’exposition dans le cadre du PGPC. Elles traitent également des concepts scientifiques connexes afin d’aider le Comité scientifique dans son examen des questions stratégiques. Les annexes 1 et 2 proposent quant à elles une description sommaire d’une approche générique locale et des concentrations prévues dans l’environnement que le gouvernement fédéral utilise dans ses évaluations des risques environnementaux, que ce soit pour des substances déjà existantes ou nouvelles.

2. Définitions

Aux fins du présent document, les définitions suivantes seront utilisées pour décrire les principaux concepts associés à l’enjeu en cause.

Advection :
Transport de masse d’un produit chimique dans l’eau ou dans l’air hors de l’environnement modélisé à l’échelle régionale (d’après Mackay et coll., 1996a)
Distance de transport caractéristique :
Distance à laquelle la concentration d’un produit chimique dans l’air ou dans l’eau est réduite à 63 % par rapport à sa concentration initiale à la suite de sa dégradation ou de son passage vers un autre milieu (d’après Bennett et coll., 1998; Beyer et coll, 2000).
Délais d’élimination, délai de latence :
Nombre d’heures nécessaires pour réduire la masse d’un produit chimique dans l’environnement selon un pourcentage déterminé (par exemple, 50 %, 95 %) une fois que toutes les émissions ont cessé, tel qu’il a été déterminé selon un modèle impliquant de multiples milieux (basé sur Stroebe et coll., 2004; Gouin et Mania, 2007)
Échelle continentale (portée lointaine) :
Expositions éloignées des points d’émission (par exemple, les régions polaires, les distances intercontinentales, par-delà les frontières), généralement à plus de 1 000 km (d’après van de Meent, 1993 et MacKay et coll. 2014).
Continuellement présent :
Qualité d’un produit chimique émis en continu, pour lequel le délai avant l’exposition est inférieur au délai préalable à la dégradation (d’après MacKay et coll., 2014). Ce terme est à privilégier par rapport à « pseudo‑persistance » (Daughton, 2002) pour éviter toute confusion par rapport à cette propriété intensive des substances.
Échelle locale :
Échelle utilisée pour décrire les expositions touchant les secteurs avoisinants de la source d’émission ou de rejet (par exemple, la sortie d’une conduite destinée au traitement des eaux usées et air intérieur) [d’après van de Meent (1993)Note de bas de page 2  et MacKay et coll. (2014)].
Mode de pénétration :
Milieu dans lequel un produit chimique est rejeté (eau, air ou sol) (d’après OCDE, 2004).
Persistance globale :
Somme de toutes les demi-vies, en heures, d’un produit chimique dans un milieu donné, pondérée en fonction de la fraction massique du produit chimique dans un milieu (d’après Pennington, 1997).
Présence réaliste :
Présence jugée non pertinente dans l’évaluation de l’exposition à un produit chimique, due au faible pourcentage de fraction massique dans un milieu donné (moins de 5 %) (d’après Woodfine et Mackay, 2001).
Échelle régionale :
Échelle utilisée pour évaluer une exposition à des distances modérées (par exemple, dans un rayon de quelques centaines de kilomètres) des points d’émission; dans les modèles de détermination impliquant plusieurs milieux, elle ne dépasse généralement pas une superficie de 100 000 km2 [d’après van de Meent (1993) et MacKay et coll. (2014)].
Délai de séjour :
Estimation établie à partir d’un modèle de détermination impliquant plusieurs milieux de la période (en heures) pendant laquelle un produit chimique se trouve dans l’environnement, compte tenu de la perte subie par ce produit à la suite de la dégradation (réaction) et de l’advection (transport) hors d’un environnement modèle. Le terme est parfois utilisé comme synonyme de la persistance globale, qui ne tient pas compte de la perte résultant de l’advection (par exemple, OCDE, 2004).

3. Schéma d’émission

Il ne fait aucun doute que la concentration prévue dans l’environnement (CPE), qui est utilisée dans l’évaluation de l’exposition de l’environnement à l’échelle locale, est principalement influencée par le schéma d’émission et le mode de pénétration dans l’environnement (voir la section 4.2.1). Ces paramètres contribuent à l’une des plus importantes sources d’incertitude dans l’évaluation des risques, parce qu’ils ne sont pour l’instant pas bien caractérisés (par exemple, en raison d’un manque de données sur l’utilisation en aval postproduction ou postimportation), et les CPE sont, en conséquence, incertains. Par exemple, le volume de production et d’importation des produits chimiques et l’estimation des schémas d’utilisation (à long terme, soit plus de trois ans) ou l’agrégation d’émissions (et les scénarios) ne sont pas intégrés de manière régulière dans l’évaluation de l’exposition. Une fois qu’un produit chimique est inscrit sur la Liste intérieure des substances (LIS), sauf dans certains cas particuliers, il peut être utilisé à n’importe quelle fin, peu importe le volume. Une telle façon de faire mène, en définitive, aux plus récentes évaluations de l’environnement qui sont réalisées dans le cadre du PGPC, qui représentent un « instantané » des émissions actuelles pour des voies d’exposition précises, sans variations spatiales ou temporelles prévues. L’annexe 1 fournit de plus amples détails sur les paramètres et les hypothèses utilisés dans les modèles génériques d’émissions locales utilisés par ECCC et Santé Canada, y compris la déclaration et la détermination des volumes de produits chimiques importés ou produits, les facteurs d’émission et les taux d’émission.

Si le schéma d’émission temporel est connu (par exemple, épisodique ou continu), l’intervalle de temps entre les rejets est utilisé pour qualifier l’écotoxicité (aiguë dans le cas d’une émission épisodique, et chronique dans le cas d’une émission continue) aux fins de l’évaluation des risques écologiques [ce qui rappelle les directives de l’European Union System for the Evaluation of Substances (EUSES); voir la section 4.1]. L’incidence du délai de séjour sur l’exposition à un produit chimique (voir la section 4.3) n’est généralement pas prise en compte dans cette décision.

Par ailleurs, différentes approches peuvent être utilisées pour déterminer les schémas d’émissions spatiaux, qui dépendent de la substance évaluée et des modes d’utilisation déclarés. En voici quelques‑unes :

  1. un seul site représentatif est sélectionné (par exemple, dans le cas des substances qui ont des applications très spécialisées et qui sont susceptibles d’être utilisées par un nombre limité d’installations, lorsqu’il n’est pas prévu, d’un point de vue réaliste, que le marché évolue de manière significative);
  2. plusieurs sites représentatifs (généralement non-agrégés) sont sélectionnés;
  3. la distribution d’un ou de plusieurs paramètres est utilisée pour représenter un secteur (approches probabilistes ou semi-probabilistes)Note de bas de page 3 .

En outre, l’exposition aux produits chimiques selon les différentes étapes du cycle de vie de ces derniers est prise en compte, dans la mesure du possible. Ces étapes incluent la fabrication, la formulation, l’usage industriel, sa durée de vie utile et, parfois, sa fin de vie. La détermination des étapes pertinentes repose sur les données disponibles et sur la probabilité d’un rejet. Une caractérisation quantitative des rejets n’est pas nécessaire pour certaines activités ou pour certains secteurs industriels. La quantification dépend des volumes impliqués, du potentiel de rejet et de la disponibilité des données.

4. Intégrer la notion de devenir des produits chimiques

4.1 Incidence de la catégorisation de la liste intérieure des substances (LIS) sur l’évaluation du devenir des produits chimiques

Depuis les années 1990, l’évaluation du devenir des produits chimiques fait partie intégrante des évaluations des risques réalisées en vertu de la Loi canadienne sur la protection de l’environnement (1999) [LCPE(1999)] [par exemple, les évaluations se rapportant à la Liste des substances d’intérêt prioritaire (LSIP)]. Il y a plusieurs décennies, l’évaluation du devenir des produits chimiques était principalement de nature qualitative, fondée sur les propriétés physiques et chimiques d’une substance donnée ainsi que sur les résultats de la surveillance effectuée dans divers milieux, le cas échéant. Certaines évaluations des substances de la LSIP incluaient une modélisation du devenir des produits chimiques, mais ce n’était pas une pratique courante. Au début du millénaire toutefois, un changement de paradigme s’est opéré au Canada pour favoriser une évaluation rapide des substances, fondée en grande partie sur des propriétés dangereuses (dont la persistance, la bioaccumulation et l’écotoxicité létale médiane). Dès lors, les notions combinées de persistance et de bioaccumulation ont agi comme des substituts au concept de devenir des produits chimiques (et de l’exposition), pour toutes substances, nouvelles et existantes. La Politique de gestion des substances toxiques (PGST) de 1995 énonce ce qui suit :

L’exposition est un élément important de l’évaluation du risque environnemental dans le cadre de la politique. On peut utiliser la persistance et la bioaccumulation comme substituts qualitatifs de l’exposition à long terme d’un biote environnemental.

Le processus de catégorisation de la LIS pour l’exposition de l’environnement et des humains ainsi qu’une grande partie de la première phase du PGPC (correspondant à l’initiative « Défi ») ont utilisé ces propriétés (soit la persistance et la bioaccumulation) comme substituts des évaluations du devenir des produits chimiques et de l’exposition de l’environnement. Cependant, cette approche axée sur les propriétés dites dangereuses, bien qu’elle demeure importante pour évaluer avec prudence une situation pour laquelle la quantification de l’exposition est impossible ou hautement incertaine, réduisait la place du devenir des produits chimiques pour favoriser la détermination des principales propriétés physiques et chimiques. En conséquence, cette approche se révélait inadéquate pour évaluer l’exposition dans bon nombre de circonstances, voire non pertinente dans d’autres (par exemple, lorsque l’exposition peut être quantifiée). Par exemple, cette approche ne conviendrait pas à des substances intrinsèquement toxiques qui ne sont pas associées à une persistance ou une bioaccumulation importante (comme des produits chimiques ionisants) mais qui sont continuellement rejetées dans l’environnement. De la même manière, les substances liées à un volume important et qui ne satisfont pas tout à fait les normes canadiennes en matière de persistance et de bioaccumulation (Canada, 2000) ne seraient pas bien saisies par cette approche. À l’inverse, l’approche axée sur les propriétés dangereuses peut cibler des substances qui ont pourtant un faible potentiel du point de vue de l’exposition de l’environnement (par exemple, des produits chimiques de faible volume) et donc source de peu d’inquiétude, ce qui aurait une incidence importante sur les plans de gestion des produits chimiques et sur les ressources connexes. Enfin, puisque cette « mentalité du danger » est devenue plutôt répandue au fil des ans en ce qui concerne le devenir des produits chimiques et l’exposition, l’expologie s’est peu développée à l’échelle mondiale.

4.2 Modélisation du devenir des produits chimiques dans de multiples milieux dans le cadre du Plan de gestion sur les produits chimiques (PGPC)

4.2.1 Modèles d’évaluation générale du devenir des produits chimiques

Depuis 10 ou 12 ans, les analyses du risque pour l’environnement menées aux termes de la Loi canadienne sur la protection de l’environnement (1999) sont de nouveau axées sur le risque, lesquelles analyses tiennent compte d’évaluations du devenir et de l’évaluation plus détaillées. Historiquement, l’analyse du devenir des produits chimiques a reposé, entre autres choses, sur des modèles génériques impliquant plusieurs milieux pour déterminer la répartition et la distribution de base de la substance dans les milieux ainsi que le transport à grande distance (TGD) dans l’air. Depuis peu, le TGD dans l’eau est également pris en compte dans les analyses écologiques, car la liste des produits chimiques d’intérêt prioritaire, qui n’incluaient auparavant que les polluants organiques persistants (POP) hydrophobes, a été bonifiée de plusieurs classes de substances ionisantes au cours de la troisième phase du PGPC. Le gouvernement du Canada recourt à des modèles de type MacKay pour prédire le devenir de produits chimiques à l’échelle régionale, dont le modèle « Equilibrium Criterion » (EQC) (Mackay et coll., 1996a, b) et le ChemCAN, une version canadienne du modèle EQC (Webster et coll., 2003)Note de bas de page 4 . Certains modèles de bilan massique sont également utilisés pour estimer l’élimination des systèmes de traitement des effluents, comme SimpleTreat 3.0 (Strujis, 1996) et le Sewage Treatment Plant (STP) de Toronto (dans sa version à jour; Seth et coll., 2008), intégré à la suite EPIWIN de l’Environmental Protection Agency (EPA) des États‑Unis.

En ce qui a trait aux expositions environnementales dans un contexte écologique, les modèles régionaux ont pour principale fonction de déterminer la distribution de la fraction massique d’un produit chimique donné (en pourcentage) dans l’air, dans l’eau, dans le sol et dans les sédiments selon un mode de pénétration donné et à l’aide d’un taux d’émission établi par défaut (tableau 1 et figure 1). Le concept de la « présence réaliste » (MacKay et coll., 2014) n’est pas pris en compte de manière constante (c’est-à-dire que les concentrations dans l’eau sont toujours dérivées, même si la fraction massique est faible dans ce milieu).

Le mode de pénétration dans l’environnement (soit l’air, l’eau ou le sol) a une influence importante sur le bilan massique et sur le devenir d’un produit chimique, car le milieu récepteur, du fait que c’est lui qui accueille au départ la masse la plus importante du produit chimique, influence le comportement subséquent de ce dernier et sa distribution. Webster et coll. (1998) expliquent ce concept en détail. Idéalement, la répartition du taux d’émission selon un mode de pénétration connu dans l’environnement (par exemple, 20 % dans l’eau, 75 % dans le sol et 5 % dans l’air) offrirait une représentation plus réaliste du devenir et du bilan massique du produit chimique en question dans l’environnement. En conséquence, le devenir d’un produit chimique et ses concentrations dans l’environnement à l’échelle régionale, estimés grâce au modèle, viendraient refléter le mode de pénétration connu. Toutefois, ces estimations sont rarement effectuées de la manière décrite dans le PGPC pour les analyses écologiques, car il existe souvent peu de renseignements détaillés sur le schéma d’utilisation (par exemple, utilisation en aval)Note de bas de page 5 . Les concentrations entrantes par advection et les concentrations naturelles de la substance à partir de l’air et de l’eau sont prises en considération si elles sont disponibles (ou si elles peuvent être estimées), sauf lorsque des modèles de portée régionale sont utilisés pour mener les analyses écologiques.

Les renseignements sur les propriétés physiques et chimiques et sur la demi‑vie d’un produit chimique dans les différents milieux sont nécessaires pour simuler, au moyen des modèles de bilan massique, le devenir de ce produit et l’exposition à ce dernier à l’échelle régionale (voir la section 3.0). Puisque les évaluations menées dans le cadre du PGPC ont une portée locale (surtout s’il s’agit d’une analyse écologique), elles n’incluent souvent pas les modèles de bilan massique pour déterminer les concentrations des produits chimiques dans l’environnement. Certaines exceptions s’appliquent. Notamment, les concentrations dispersées dans l’environnement, estimées d’après un modèle de bilan massique de portée régionale, nommément le ChemCAN, servent souvent à estimer l’exposition de la population canadienne à des produits chimiques par l’entremise d’un milieu donné à partir de données prudentes, et en tenant compte de tous les modes de pénétration possibles.

Les concentrations présentes dans un milieu non aquatique, à l’échelle locale, sont essentiellement déterminées grâce à des méthodes simples de partage à l’équilibre (voir l’annexe 2). L’incidence de l’advection (du transport) sur la distribution chimique est souvent évaluée au moyen d’un modèle de bilan massique, qui détermine les distances parcourues par un produit chimique par le transport à grande distance.

Tableau 1. Exemple de résultats de la répartition de la fraction massique obtenus grâce au modèle EQC de niveau III et de portée régionale pour le chlorobenzène, en utilisant un taux d’émission par défaut de 1 000 kg/heure dans l’air, l’eau et le sol
Rejet de la substance dans :Air (en %)Eau (en %)Terre (en %)Sédiment
Air (100 %)9811<1
Eau (100 %)1485<11
Sol (100 %)<1892<1
Figure 1. Exemple de données sur le bilan massique obtenues grâce au modèle EQC de niveau III, illustrant les pertes issues de la réaction et de l’advection et le temps de séjour, dans le contexte d’un rejet complet dans l’eau
Description longue

La figure 1 illustre la répartition à l’état d’équilibre entre plusieurs milieux obtenue avec un modèle de niveau III d’un produit organique (le chlorobenzène, à titre d’exemple) émis dans l’eau dans un environnement modélisé à l’échelle régionale, de 100 000 km2, qui contient les compartiments que sont l’air, l’eau, le sol et les sédiments. Les flèches représentant la vitesse d’émission, la réaction, l’advection et les échanges entre milieux servent à illustrer le mode d’entrée et le déplacement du chlorobenzène entre les différents compartiments de l’environnement du modèle EQC. Les résultats de la distribution massique révèlent qu’à une vitesse d’émission dans l’eau de 1 000 kg/h, environ 85 % du chlorobenzène séjournera dans l’eau, et des quantités moindres séjourneront dans les sédiments (~ 1 %), l’air (14 %) et le sol (< 1 %).  La figure 1 montre aussi que la fraction massique dans l’air découle directement d’un échange entre l’eau et les milieux (répartition) à l’état d’équilibre. Le temps de séjour dans cet environnement modélisé a été évalué, après calculs, à 316 heures. À l’équilibre, l’advection (transport) hors de l’environnement modélisé à l’échelle régionale par l’air et l’eau représentait environ 71 % de la vitesse d’émission dans l’eau de 1 000 kg/h et la proportion résiduelle de 29 % était le résultat d’une réaction chimique (dégradation).

4.2.2 Modélisation du transport à grande distance et de réseau trophique régional

Le gouvernement du Canada a pris part à un vaste examen axé sur les modèles de devenir et de transport des produits chimiques dans plusieurs milieux et leur application dans des programmes réglementaires, une initiative de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) visant à mettre au point un modèle mondialement reconnu sur la persistance et le transport à grande distance (OCDE, 2004; Wegmann et coll., 2008). Le chapitre 5 du document produit par l’OCDE en 2004 fournit une orientation utile pour l’application de modèle impliquant différents milieux dans les programmes réglementaires, particulièrement en ce qui concerne le transport à grande distance. Le réseau canadien de modélisation environnementale (RCME) et Environnement Canada ont également rédigé des lignes directrices pour l’application de modèles de devenir des produits chimiques dans de multiples milieux dans les programmes du gouvernement du Canada, qui demeurent utiles dans ce contexte (Webster et coll., 2005). Le projet de l’OCDE s’est traduit par une prise en compte relativement régulière du transport à grande distance dans les analyses écologiques associées au PGPC, au moyen du modèle de dépistage des polluants organiques persistants (POP) de l’OCDE (Wegmann et coll., 2008) et le modèle de transport et de persistance de niveau III (TaPL3) (Beyer et coll., 2000; Webster et coll., 2003). Ces modèles produisent des estimations de la « distance de transport caractéristique » (DTC), en kilomètres, qui sont ensuite comparées aux DTC des produits chimiques de référence à des fins d’évaluation.

Le devenir des produits chimiques dans les réseaux trophiques aquatiques et terrestres n’est quant à lui pas pris en compte de manière régulière dans les évaluations des risques pour l’environnement du PGPC. Il importe toutefois de souligner que, dans certains cas, l’exposition à la faune aquatique et terrestre a été évaluée au moyen d’une version bioénergétique des modèles d’absorption quotidienne totale de certains produits chimiques (dont les produits ignifuges bromés et les diphénylamines substituées). Des modèles jumelant l’estimation du devenir des produits chimiques dans l’environnement et les réseaux trophiques ont également été utilisés dans le cadre du PGPC à des fins d’établissement des priorités écologiques. Par exemple, le modèle RAIDAR (Risk Assessment, Identification and Ranking) (Arnot et coll., 2008) a été utilisé pour favoriser un dépistage rapide des produits chimiques de la Liste intérieure des substances dans les évaluations gouvernementales des risques pour l’environnement (Environnement Canada et Santé Canada, 2014). Une version modifiée du RAIDAR a également été appliquée à des produits chimiques ionisables qu’on retrouve dans les produits pharmaceutiques et les produits de soins personnels et qui figurent sur la Liste des substances commercialisées (LIC) (Arnot, 2011) pour le compte de Santé Canada. ECCC a également eu recours à cette version du modèle plus récemment, soit durant la troisième phase du PGPC, afin de déterminer à nouveau la nature prioritaire de 640 substances organiques (Arnot, 2014; ECCC, 2016). Le RAIDAR permet d’évaluer le danger, l’exposition et le risque associés à des produits chimiques en regroupant à lui seul les notions de toxicité, de devenir et d’exposition, le tout à l’échelle régionale cependant.

4.3 Le rôle de la persistance dans l’évaluation de l’exposition

Pour appréhender l’exposition, il est fondamental de comprendre la notion de persistance d’un produit chimique. D’après MacKay et coll. (2014), il s’agirait sans doute du critère d’influence le plus important, pris individuellement, sur l’exposition à un produit chimique et le risque provenant de l’environnement. 2014). La persistance est directement reliée au temps de séjour et au temps d’élimination (ou délai de latence) d’un produit chimique dans l’environnement de même qu’à la distribution de la fraction massique d’un produit chimique dans divers milieux (MacKay et coll., 1996a). Les produits chimiques qui se dégradent lentement peuvent contribuer à une exposition prolongée et peuvent potentiellement être transportés sur de longues distances s’ils se retrouvent dans des milieux mouvants (comme l’air, l’eau et le biote). Les évaluations menées dans le cadre du PGPC reposent sur une hypothèse de base selon laquelle les concentrations prévues dans l’environnement sont le reflet d’émissions produites dans des conditions stables et, donc, qu’elles ne varieront pas au fil du temps. Comme il a été mentionné précédemment, ces estimations constituent des instantanés de l’exposition qui sont extrapolées dans le temps et dans l’espace. Cette hypothèse convient sans doute aux expositions près de la source d’émissions continues de produits chimiques relativement persistants (ce qui représente l’hypothèse la plus commune adoptée pour la réalisation des évaluations du PGPC). Dans un tel contexte, le produit chimique est considéré comme étant « continuellement présent » et il est supposé que la période préexposition est inférieure au délai de dégradation, à quelque distance que ce soit de la source. Il est donc présumé que tous les produits chimiques sont traités comme s’ils étaient associés à une période préexposition supérieure au délai de dégradation, ce qui n’est pas nécessairement le cas. Autrement dit, la concentration de l’exposition est considérée comme homogène, peu importe la distance (même dans un cours d’eau mouvant, par exemple) et il est supposé que l’exposition varie en fonction de la dilution dans le milieu. De telles suppositions ne tiennent donc pas compte de la persistance dans l’évaluation de l’exposition. D’ailleurs, près du point de rejet, dans le contexte d’un produit chimique continuellement présent, la notion de persistance est plutôt sans importance, en raison du court délai d’exposition. En somme, il serait possible de conclure que les concentrations, les expositions et le risque sont constants dans le temps, mais non dans l’espace (MacKay et coll. 2014). Dans les cas où la durée d’exposition est plus longue, le temps de séjour (établi selon la dégradation, l’advection et la dilution) dans l’environnement devient un déterminant majeur de l’exposition, particulièrement à une certaine distance de la source d’émissions.

La persistance et le temps de séjour sont également des facteurs importants dans l’examen des émissions épisodiques de produits chimiques dans l’environnement. Si le temps de séjour en heures est beaucoup plus court que l’intervalle qui sépare des émissions épisodiques (par exemple, par un facteur de trois), chaque rejet du produit chimique pourra être traité de manière indépendante, puisqu’il n’y aura pas d’accumulation possible. L’exposition peut alors être représentée par un schéma d’exposition en dents de scie inversé (c’est-à-dire une alternance de pointes et de creux). Il s’agit d’un scénario d’exposition commun pour l’application de biosolides sur des terres agricoles. Les concentrations de produits chimiques modérément persistants déclinent au cours de l’année selon leur temps de séjour dans le sol, et atteignent de nouveau un sommet à l’application suivante de biosolides. Les organismes de réglementation recourent souvent à des scénarios d’exposition aiguë (qui incluent l’utilisation de données sur la toxicité aiguë) pour évaluer les rejets épisodiques dans l’environnement. Cependant, lorsque le temps de séjour est égal ou supérieur à l’intervalle entre les émissions, il y a accumulation du produit chimique et les concentrations peuvent atteindre un état d’équilibre (MacKay et coll., 2014). L’accumulation dans un milieu non mouvant comme le sol et les sédiments peut se transformer en un problème d’exposition, puisque la perte du produit chimique sera essentiellement due à des processus naturels, comme l’enfouissement et la volatilisation dans certains cas (c’est-à-dire que le temps de séjour est plus long que les intervalles d’expositions). Les concentrations chimiques de produits très persistants augmentent graduellement au fil du temps, et les expositions à long terme sont supérieures à ce qui a été prévu initialement à partir d’un cas de rejet isolé. Dans un tel cas, le risque peut être sous-estimé. En utilisant un modèle de portée régionale ou lointaine, toutefois, il est possible d’estimer la hausse des concentrations de produits chimiques très persistants, causée (ou aggravée) par le transport à grande distance. Une pareille accumulation de produits chimiques rejetés de manière épisodique peut également survenir à grande distance. MacKay et Reid traitent de l’effet des changements dans les émissions chimiques sur les concentrations à grande distance en fonction du temps de séjour (« temps de séjour à distance). Il est essentiel de pouvoir prédire l’accumulation de produits chimiques persistants (et toxiques) à l’échelle régionale et lointaine pour pouvoir cerner les risques qu’ils posent à long terme pour l’environnement et pour la santé humaine.

4.4 Résumé et lectures recommandées

Le lien couramment établi entre le devenir des produits chimiques et l’exposition a été quelque peu perdu dans les évaluations du risque menées à l’échelle mondiale, en raison de l’incidence de l’approche axée sur le danger et de son influence sur l’élaboration d’outils intégrés sur le devenir et l’exposition pour les évaluations du risque qui intègrent des conditions régionales/lointainesNote de bas de page 6 . Le schéma d’émission, le mode de pénétration, la répartition et la persistance des produits chimiques ont tous une incidence importante sur l’exposition des organismes aux produits chimiques présents dans l’environnement, car ils influencent tous le temps de séjour dans un milieu donné ou dans l’ensemble de l’environnement. Ces facteurs sont essentiels pour comprendre la distribution élémentaire des produits chimiques dans l’environnement et leur influence directe sur les échelles spatiales et temporelles de l’exposition. Il est essentiel de comprendre leur influence pour déterminer le potentiel de risque à différentes échelles d’exposition (Scheringer et coll., 1996; MacKay et coll., 2014).

Lectures recommandées

5. Intégrer les échelles spatiales et temporelles

Dans une analyse rétrospective des méthodes d’évaluation de l’exposition de l’environnement et des humains, Bonnell et coll. (2018) formulent plusieurs recommandations relativement à de nouvelles approches et de nouvelles orientations pour évaluer l’exposition, dont un besoin fondamental de mieux harmoniser le devenir des produits chimiques et les échelles d’exposition (temporelles et spatiales) avec les scénarios d’émission pour prévoir les concentrations dans l’environnement. Les auteurs soulignent également que ce mauvais alignement est en partie dû au fait qu’il existe peu de modèles dynamiques d’exposition dans de multiples milieux et qui sont adaptables à diverses échelles; aucun n’a encore été créé pour les milieux canadiens. Tel qu’il a été mentionné précédemment, le gouvernement utilise plusieurs autres outils ou approches pour étudier les expositions dans divers compartiments de l’environnement et à diverses échelles spatiales, mais aucune méthode de modélisation ne les intègre tous pour l’instant.

5.1 Échelle spatiale

Le Système européen pour l’évaluation des substances (EUSES, pour European Union System for the Evaluation of Substances) est un exemple d’utilisation d’une approche intégrée de modélisation de l’exposition par un organisme de réglementation. Le système EUSES intègre en effet SimpleBox (première version, van de Meent, 1993), un modèle d’imbrication (c’est-à-dire qui superpose diverses échelles) de plusieurs milieux, ce qui permet d’adapter le devenir d’un produit chimique et l’exposition à ce dernier d’une échelle locale à une échelle mondiale (figure 2). Le système EUSES fournit aux pays membres un outil central qui leur permet d’estimer les concentrations dans l’environnement pour les évaluations des risques réalisées dans le cadre du programme REACH, et ce, à diverses échelles spatiales. L’agence qui en est responsable, ECHA (pour European Chemicals Agency), dirige actuellement un vaste effort afin de réviser et de mettre à jour la science derrière le système EUSES, une initiative qui pourrait bénéficier au gouvernement du Canada pour la suite des choses.

Figure 2. Concept de base d’un modèle d’imbrication de plusieurs milieux au moyen de SimpleBox (dans le système EUSES)
Description longue

À la figure 2, est illustré le modèle d’imbrication au moyen de SimpleBox qui comprend quatre compartiments distincts de l’environnement à l’échelle locale, régionale, continentale et éloignée ou lointaine (Arctique, tropique), représentés par des boîtes de différentes tailles. La boîte la plus grande, qui représente la portée éloignée, contient toutes les autres boîtes; la boîte continentale contient les boîtes régionale et locale; et la boîte régionale contient uniquement la boîte de l’échelle locale. Des flèches doubles illustrent l’échange (flux) d’un produit chimique type entre ces compartiments dans les deux directions (c’est-à-dire, vers le compartiment et hors de ce dernier), à l’exception de l’échelle locale qui ne présente qu’une seule flèche qui pointe de l’échelle régionale à l’échelle locale.

Une maquette comme SimpleBox utilise une série d’environnements connectés représentés à la figure 2 comme des « boîtes » locale, régionale, continentale et mondiale. Les environnements des modèles de type MacKay dans ces boîtes sont définis de façon similaire à ceux d’autres modèles fondés sur plusieurs milieux, comme l’EQC (à l’exception de l’environnement local). Ce type d’approche offre un continuum d’exposition, puisqu’il permet de suivre le flux des produits chimiques d’une boîte à l’autre, représentant les phénomènes d’advection et de diffusion vers divers environnements et en dehors de ceux-ci. De cette manière, il est impossible d’« oublier » un produit chimique du milieu d’exposition antérieur.

Lorsque les expositions sont évaluées à l’échelle locale seulement, par exemple, les expositions liées au transport du produit chimique à l’échelle régionale ou continentale par advection ne sont pas prises en compte. À l’inverse, les contributions de l’échelon régional ou continental à l’échelon local ne sont pas non plus considérées (figure 2). Les émissions de produits chimiques peuvent être introduites à n’importe quelle échelle du modèle et, à ce titre, les expositions peuvent être regroupées à partir de différents points et de sources dispersées. Par conséquent, une estimation plus représentative de la concentration d’exposition est générée, à quelque échelle que ce soit. Les estimations de concentration de l’exposition à diverses échelles sont élaborées sur la base du bilan massique à l’intérieur de chaque boîte; fait à noter, à l’échelle locale, les concentrations environnementales ne sont pas basées sur les modèles de bilan massique de type MacKay. Elles sont plutôt fondées sur un modèle de portée locale (similaire à ceux utilisés dans le cadre du PGPC), dans lequel les estimations de la concentration à l’échelle régionale sont ajoutées en tant qu’expositions d’arrière‑plan (EUSES, 2004).

Ainsi, SimpleBox est peut-être le premier jalon d’une approche axée sur un modèle d’imbrication de base pour un milieu environnemental. Plus récemment, Fantke et ses collaborateurs (2016) ont mis au point une approche semblable sur le plan conceptuel pour évaluer l’exposition humaine aux produits chimiques provenant des produits de consommation. Leur cadre a été élaboré pour tenir compte des fractions de transfert de produits chimiques d’un compartiment à un autre à différentes échelles spatiales (de locale à lointaine) afin, en définitive, de déduire la contribution des diverses voies d’exposition et des divers milieux sur l’absorption par les humains (Fankte et coll., 2016). Les auteurs suggèrent que cette approche est également utile pour déterminer les fractions d’absorption quotidienne pour l’évaluation des risques et l’établissement des priorités, de même que pour trouver des solutions de rechange et évaluer le cycle de vie des produits.

Li et ses collaborateurs (2018) ont élaboré un modèle d’exposition à plusieurs échelles théoriquement semblable à celui de Fantke et coll. (2016). Aucune de ces approches n’a toutefois été utilisée pour l’établissement des priorités ou des activités d’évaluation des risques dans un contexte réglementaire canadien à ce jour. Li et ses collaborateurs (2018) ont réussi à démontrer le transport et le devenir des biphényles polychlorés (BPC) d’un environnement intérieur au milieu rural, découvrant ainsi que le temps de séjour des BPC à grande distance est supérieur au temps de séjour à l’échelle locale. Conséquemment, l’exposition humaine aux BPC par le réseau trophique peut être significative au fil du temps.

Figure 3. Modèle conceptuel des expositions humaines aux BPC à l’échelle locale et lointaine de Li et coll. (2018).
Description longue

La figure 3 illustre un type différent de modèle d’imbrication de plusieurs milieux mis au point pour évaluer la santé humaine et l’exposition dans l’environnement. Un environnement modélisé intérieur, urbain et rural en connexion est représenté graphiquement pour indiquer le flux de la masse d’un produit chimique entre ces compartiments résultant du transport dans l’air et dans l’eau. Le compartiment intérieur est divisé en sous-compartiments que sont le film de matière organique, l’air, le plancher en vinyle et la moquette. Le compartiment intérieur comprend aussi la « technosphère » qui représente l’exposition à des produits chimiques en utilisation (produits), à la fin de leur vie utile (produits) et au cours d’un traitement industriel (substance pure). Les compartiments extérieurs comprennent les films de matière organique (urbain), l’air, l’eau (douce et estuarienne), le sol, les sédiments (d’eau douce et estuarienne) et la végétation (canopée). Les flèches servent à représenter les échanges (vers le compartiment et hors de celui-ci) des produits chimiques entre les compartiments intérieur et extérieur et les flèches unidirectionnelles indiquent le flux de la masse des substances chimiques qui se déplacent de la technosphère vers les compartiments intérieur et urbain et les eaux douces de surface.  La surface (m2) et l’épaisseur (m) de tous les compartiments de l’environnement sont aussi précisées.

5.2 Échelle temporelle

Deux aspects relatifs à l’échelle temporelle sont pertinents pour le thème abordé ici. Le premier d’entre eux concerne des conditions de rejet dynamique (instables). La section 4.3 traite de l’influence de la persistance des produits chimiques en cas de rejets épisodiques, notant que la fréquence de rejet d’un produit chimique et son temps de séjour influencent les échelles temporelles et spatiales de l’exposition, ce qui, conséquemment, peut influer sur la pertinence et l’utilisation des données de toxicité aiguë ou chronique pour évaluer les risques. Dans le cadre du PGPC, le gouvernement n’a pas appliqué les modèles de devenir des produits chimiques et d’exposition dans un contexte dynamique pour évaluer les risques. L’incapacité à bien paramétrer les modèles pour des conditions d’émissions dynamiques, l’inexistence de tels modèles qui seraient adaptés à l’échelle locale (sauf ECORAME, Jung et coll, 2014) et la complexité générale du modèle, expliquent cette tradition. Cependant, il existe plusieurs modèles dynamiques de portée régionale et continentale (par exemple, le BETR, MacLeod et coll., 2001) qui pourraient éventuellement être adaptés ou adoptés pour le gouvernement du Canada dans un cadre d’imbrication, tel qu’il a été mentionné ci‑dessus. Ce sont les rejets épisodiques qui ont la plus grande incidence sur les expositions locales, car les expositions à l’échelle régionale et continentale associées à des produits chimiques plus persistants atteignent souvent un point d’équilibre. Le système EUSES, par exemple, suppose a priori des émissions stables et continues, à moins que des renseignements indiquant un rejet intermittent soient disponibles. Les évaluations de l’exposition et de toxicité aiguë sont réalisées pour l’échelle locale sur la base de cette hypothèse de manière à pouvoir composer avec de telles émissions ponctuelles de courte durée. L’utilisation de modèles dynamiques pour les fins de l’évaluation de l’exposition par le gouvernement du Canada est à aborder dans le cadre de la présente réunion, considérant qu’il existe des modèles dynamiques combinant des zones de dilution pourraient être adaptés à l’échelle locale dans certains cas.

Le deuxième aspect temporel, aussi partiellement abordé à la section 4.3, concerne les expositions à long terme, de l’échelle locale à continentale, pour lesquelles les concentrations augmentent progressivement au fil du temps en raison d’un long délai de séjour d’un produit chimique dans l’environnement. Les critères de persistance et de bioaccumulation ont été combinés afin d’offrir une réponse qualitative à cette question. Comme il a été mentionné précédemment, les approches actuellement adoptées dans le cadre du PGPC représentent un instantané des expositions aux produits chimiques qui ne varient pas dans le temps, car elles ne tiennent pour l’instant pas compte du délai de séjour d’un produit chimique dans un milieu donné (ou dans l’ensemble de l’environnement). En intégrant le concept de persistance des produits chimiques dans les estimations de la concentration d’exposition, il sera possible de réaliser des évaluations temporelles (et spatiales) et, peut‑être, d’analyser les régions vulnérables (à l’échelle continentale ou régionale) et de vérifier l’efficacité des mesures de gestion des risques.

5.3 Résumé et lectures recommandées

Pour évaluer l’exposition potentielle associée à des produits chimiques rejetés dans l’environnement à différentes échelles spatiales et temporelles sur une base régulière, il faudrait enquêter sur le devenir des produits chimiques et la persévérance, ainsi que sur le schéma d’émissions. En définitive, si une « nouvelle approche » à l’évaluation de l’exposition de l’environnement qui intègre ces facteurs devait être mise en œuvre dans le cadre du PGPC, il faudrait élaborer une approche de modélisation qui relie une série de boîtes, chacune contenant son propre environnement modélisé. Bonnell et coll. (2018) suggèrent d’inclure à une telle approche une adaptation de modèles impliquant plusieurs milieux, comme le modèle QWASI (pour Quantitative Water, Air, Sediment Interaction), mis au point pour étudier le devenir et le comportement de substances émises dans les Grands Lacs (MacKay et coll., 1983a), qui a par la suite été adapté pour les rivières (Mackay et coll., 1983b) et pour les composés inorganiques (Mackay et Diamond, 1989). Le modèle QWASI (ou un modèle similaire) pourrait être adapté davantage pour inclure une séquence connectée de tronçons fluviaux pour répondre aux scénarios d’émissions aquatiques dans les rivières et les sources d’eau potable. Le modèle QWASI pourrait également être jumelé à des modèles comme le RAIDAR pour évaluer les interactions entre le devenir des produits chimiques à l’échelle locale ou régionale et le réseau trophique. Il pourrait aussi être combiné à un modèle de portée continentale comme le Globo-POP (Wania et coll., 1995) ou le BETR-World (Toose et coll, 2004; MacLeod et coll., 2005). Peu importe le ou les modèle(s) utilisé(s), il est souhaitable de se doter d’un modèle d’imbrication du devenir des produits chimiques et de l’exposition de manière à ce que le gouvernement fédéral puisse suivre le sort ultime des composés organiques dans l’environnement et estimer avec plus de réalisme l’exposition pour les récepteurs humains ou de l’environnement. En conséquence, le gouvernement du Canada serait en mesure de moderniser ses activités d’établissement des priorités et d’évaluation du risque dans le cadre du PGPC.

Lectures recommandées

6. Questions stratégiques soumises à l’examen du Comité scientifique

Les trois questions stratégiques qui composent les paragraphes suivants visent à solliciter les commentaires du Comité scientifique sur trois points : (1) les contextes dans lesquels les expositions dépassant la sphère locale sont pertinentes et doivent être considérées dans les évaluations du PGPC; (2) les moyens par lesquels le gouvernement du Canada pourrait se doter d’une approche dynamique du devenir des produits chimiques et de l’exposition à diverses échelles et (3) les avantages, les inconvénients et les incertitudes associés à la mise en place d’une telle approche. Les questions stratégiques ont été formulées de manière à solliciter des avis ciblant expressément les nouvelles approches en la matière, compte tenu des besoins actuels et futurs du PGPC, et tant pour l’évaluation que pour la gestion des produits chimiques à long terme.

D’après la recommandation du Comité scientifique du PGPC, les questions stratégiques et les discussions qui en résulteront à la réunion seront essentiellement axées sur les expositions de l’environnement.

Question stratégique no 1 : Considérant les activités d’établissement des priorités et de l’évaluation des risques, à quel moment convient‑il de prévoir les concentrations dans l’environnement au-delà de l’échelle locale (c’est-à-dire à l’échelle régionale ou continentale)?

Principaux points à examiner :

Question stratégique no 2 : Comment le gouvernement pourrait‑il mieux intégrer le devenir des produits chimiques à des échelles spatiales et temporelles pertinentes afin de dissiper les principales incertitudes relatives aux concentrations prévues dans l’environnement qui serviront à l’établissement des priorités et l’évaluation des risques?

Principaux points à examiner :

Question stratégique no 3 : Quels sont les principaux avantages ou inconvénients et quelles sont les incertitudes clés auxquels le gouvernement du Canada peut s’attendre à la suite de la mise en œuvre d’approches d’évaluation de l’exposition dynamiques et plus précises sur le plan spatial pour la réalisation des évaluations du PGCG? Veuillez décrire des façons de surmonter les inconvénients.

Principaux points à examiner :

7. Références citées et autres

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Annexe 1 : Exemple de paramétrisation fondée sur le modèle de portée locale

Les concentrations dans l’environnement qui sont utilisées pour les évaluations du PGPC reflètent l’exposition près du point de rejet (c’est-à-dire, l’exposition locale), et impliquent généralement une approche axée sur la dilution dans le milieu. L’estimation des concentrations d’émission repose sur des scénarios de rejet d’origine industrielle ou domestique (rejet dans l’égout). Les renseignements propres au site (par exemple, le volume d’utilisation, type de traitement des eaux usées sur place et hors site), combinés avec des hypothèses génériques (par exemple, les facteurs d’émission dérivés des documents de l’OCDE sur les émissions), sont extrapolés à l’échelle du Canada pour caractériser un éventail de situations d’exposition potentielles.

Paramétrisation du modèle de portée locale (scénario type d’une émission dans l’eau)

De nombreux paramètres sont requis pour calculer l’exposition.

Le volume :
Les renseignements sur le volume d’utilisation de substances existantes sur l’utilisation sont normalement obtenus à partir des réponses soumises aux sondages menés auprès de l’industrie en vertu de l’article 71 (par exemple, mise à jour de la liste intérieure des substances et de l’inventaire). Les données recueillies reflètent les données d’un sondage pour une ou plusieurs années données; à ce titre, elles ne fournissent qu’un instantané de la situation pour l’année en question. Les données recueillies pour différentes substances dans le cadre d’une seule et même évaluation peuvent également avoir été recensées au cours de différentes périodes, ce qui peut poser des défis dans l’interprétation des quantités totales déclarées. Pour combler certaines de ces lacunes en matière de données et lever l’incertitude, d’autres sources peuvent être consultées, dont l’Agence des services frontaliers du Canada (notamment les volumes d’importation pour différents codes, par année). Pour estimer le volume de certaines substances, il est également possible de se fonder sur la capacité maximale d’utilisation d’une installation donnée.
Afin de recueillir des données sur les tendances en matière de volume d’utilisation des substances existantes, les renseignements d’autres administrations sont également consultés [par exemple, la base de données des pays nordiques sur les substances dans les préparations (SPIN) et les rapports sur les données des produits chimiques de l’USEPA] et utilisés de façon qualitative pour évaluer les variations de volume au Canada. Il est difficile d’obtenir les renseignements sur les substances contenues dans les produits, les objets et les articles manufacturés. En effet, les importateurs ne connaissent pas nécessairement la composition de leurs produits.
En vertu du Règlement sur les renseignements concernant les substances nouvelles, il est désormais obligatoire de joindre à l’avis transmis au gouvernement du Canada les données sur le volume d’utilisation annuel des nouvelles substances. Le déclarant doit préciser la quantité anticipée de la substance qui sera fabriquée au Canada, qui y sera importée ou qui en sera exportée au cours des 12 mois qui suivent ainsi la quantité maximale annuelle pour les trois prochaines années. Il doit aussi indiquer la quantité annuelle associée à chaque type d’utilisation de la substance.
Afin d’anticiper les volumes futurs au-delà des activités prévues du déclarant, il est possible de consulter l’historique des volumes notifiés par d’autres déclarants pour la substance en question ou pour des substances similaires dans les bases de données internes. Enfin, tout comme pour l’approche ciblant les substances existantes, il arrive que les renseignements d’autres administrations soient consultés, au besoin.
Les facteurs d’émissions et autres paramètres industriels :
Les renseignements sur les facteurs d’émission s’obtiennent généralement de sources d’information génériques, comme les documents de l’OCDE sur les scénarios d’émission. Lorsqu’il existe aussi des données de surveillance des effluents industriels, ces dernières peuvent être utilisées pour déterminer les facteurs d’émission propres au Canada pour des sites précis, puis extrapolées de façon plus générale à l’ensemble d’un secteur. Les mesures d’atténuation appliquées sur le terrain sont également prises en compte, lorsque des renseignements pertinents sont disponibles. Il existe également des compilations qui regroupent les estimations d’émissions ou de mesures (par exemple, Inventaire national des rejets de polluants), qui peuvent servir à déterminer les facteurs d’émission. L’estimation des facteurs d’émission résultant de l’utilisation de produits et d’objets est souvent produite au cas par cas, et souvent sur une base qualitative seulement. D’autres paramètres industriels qui sont pertinents (par exemple, le nombre de jours d’opérations, les traitements appliqués in situ) sont déterminés soit par l’utilisation de sources d’information générique (par exemple, les tableaux issus de documents d’orientation technique) ou à partir de renseignements provenant d’installations industrielles (par exemple, au moyen de suivis ou de visites sur le terrain).
Le traitement des eaux usées :
Le devenir des produits chimiques et leur taux d’élimination dans les eaux usées sont les plus souvent estimés à l’aide de modèles tels que SimpleTreat v3.0 et le modèle STP‑EX pour les usines de traitement des eaux usées, mais il arrive aussi que ces renseignements soient établis sur la base de données de surveillance ou de documents scientifiques à l’appui. Les modèles de bilan massique pour estimer le devenir des produits chimiques dans les systèmes de traitement des eaux usées couvrent les réseaux primaires et secondaires ainsi que les systèmes de lagunage (modèle STP‑EX) seulement. Le bilan massique des systèmes de traitement des eaux usées est principalement utilisé pour déduire la fraction massique rejetée dans les eaux de surface ainsi que les biosolides. Lorsque la fraction massique d’un produit chimique prévue dans les biosolides est estimée, le modèle de concentration des biosolides est utilisé en combinaison avec des données sur les taux d’application pour obtenir un apport annuel dans les sols agricoles. Dans un tel scénario, il est d’abord présumé que les installations industrielles qui rejettent leurs eaux usées dans les égouts n’ont pas l’équipement nécessaire sur place pour les traiter. S’il y a un traitement effectué sur place, il est présumé que ce dernier est un traitement primaire. Par ailleurs, il est supposé que les installations industrielles qui rejettent des produits chimiques directement dans l’environnement assument leur traitement secondaire (ou un traitement équivalent).
La dilution et les débits des cours d’eau récepteurs :
Il est nécessaire d’obtenir des renseignements sur la dilution et sur les débits des cours d’eau récepteurs pour déterminer la concentration de produits chimiques dans un milieu aquatique. Les renseignements sur les flux d’effluents du système de traitement des eaux usées sont obtenus à partir de diverses sources d’information [par exemple, le Système d’information et de rapports réglementaires sur les effluents (SIRRE), les sites web municipaux, les compilations provinciales]. Les renseignements sur les flux d’effluents de l’industrie sont obtenus de l’industrie directement, des rapports des consultants, ou d’autres sources d’information. Les débits de l’eau de surface sont obtenus à partir des données hydrométriques canadiennes lorsque ces données sont disponibles pour un emplacement en particulier. La distribution de données sur la dilution et sur les débits des cours d’eau qui reçoivent les effluents d’installations industrielles ou d’un système de traitement des eaux usées domestique associé à de telles installations a été compilée pour différents secteurs industriels. Les percentiles de débit (par exemple, 10e, 50e) sont extraits pour les distributions afin de représenter des conditions de dilution dans l’ensemble du Canada, selon le cas. Un facteur de dilution de 10 est souvent utilisé pour rendre compte de l’exposition à une très courte distance de sources de rejet dans les cas où la dilution est exceptionnellement grande (par exemple, Saint-Laurent).

Annexe 2 : Base des calculs des concentrations prévues dans l’environnement (CPE) à l’échelle locale

En milieu aquatique :
L’exposition résultant de rejets industriels ponctuels est généralement estimée à l’aide d’une équation simple reliant la quantité, le rejet et le débit. Quant à l’exposition résultant des rejets dans l’égout, elle est estimée au moyen d’un modèle probabiliste fondé sur la population (usage par habitant). Le modèle fonctionne à l’aide de distributions connues des paramètres d’entrée pour l’utilisation de l’eau par habitant, du facteur de dilution et du niveau de traitement. Les décharges ou les zones de dilution ne sont généralement pas considérées dans l’établissement des concentrations prévues dans un milieu aquatique, et la concentration est déterminée au point de rejet (en supposant une dilution instantanée). L’environnement récepteur peut être un véritable cours d’eau qui recueille des effluents (représentatif de la spécificité du site); il peut aussi s’agir de débit générique déterminé à partir de distributions des débits d’eau (annexe 1).
Dans le sol :
La concentration dans le sol est estimée à partir d’une approche de l’ECHA (document d’orientation technique de l’Union européenne) ciblant l’application de biosolides sur les terres agricoles. Le scénario tient compte de la quantité de la substance accumulée dans le sol à la suite d’applications annuelles pendant plus de 10 ans consécutifs. Les paramètres d’entrée génériques (comme la profondeur du sol, le taux d’application et la fréquence) reflètent les conditions en présence au Canada. Les mécanismes de perte (volatilisation, lessivage, ruissellement) ne sont généralement pas pris en compte, mais la dégradation peut être considérée. Les expositions pour le biote terrestre résultant de l’application de biosolides sont estimées au cas par cas, selon les propriétés intrinsèques du produit chimique (persistance et bioaccumulation) et le taux d’émission dans le sol. Les approches ciblant les résidus dans les tissus et les modèles de bilan massique (comme le BASL4) sont utilisés. Les entrées par l’atmosphère dans le sol ne sont généralement pas prises en considération.
Dans les sédiments :
Les concentrations de sédiments sont estimées pour les sédiments de fonds à partir du partage à l’équilibre entre la colonne d’eau et les sédiments. En principe, deux phases participent à la concentration totale dans la colonne d’eau sus‑jacente (la phase aqueuse et les sédiments en suspension); cette dernière est censée atteindre un état de partage à l’équilibre entre ces deux phases ainsi qu’avec les sédiments de fond sous‑jacent. L’approche tient compte de la concentration de la substance dans l’eau dissoute, de la concentration de solides en suspension et du cloisonnement entre les phases (eau, carbone organique). Elle s’applique aux substances organiques neutres pour lesquelles la matière organique est la phase primaire de la sorption causée par l’hydrophobie. L’approche peut être étendue à des substances ionisantes pour fournir des estimations des concentrations dans les sédiments lorsque l’ionisation n’est pas complète. Le modèle est paramétré à l’aide de propriétés par défaut de matières en suspension et de sédiments de fond.
Dans l’air :
L’exposition dans l’air est généralement déterminée pour des substances très volatiles ou pour des substances dont la principale voie de rejet est l’air. En général, les rejets industriels provenant de sources ponctuelles sont pris en compte pour de telles concentrations. Les concentrations atmosphériques à la sortie d’une installation industrielle générique (valeurs aux limites) sont déterminées. Elles le sont grâce à des modèles comme AERSCREEN et SCREEN3 pour des contrôles, ou AERMOD pour des situations plus complexes ou lorsqu’une estimation des dépôts est nécessaire. Les concentrations atmosphériques prévues sont établies à partir de paramètres génériques par défaut (taille, vitesse, etc.).
Chez la faune prédatrice :
Les concentrations dans les prédateurs aquatiques et les biotes terrestres sont généralement obtenues à partir d’un modèle d’exposition axé sur l’absorption bioénergétique journalière totale ou une approche ciblant les résidus dans les tissus.

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