Rapport sur la situation des aires protégées du Canada de 2006 à 2011 : introduction


Introduction

Les aires protégées constituent un outil fondamental de la conservation de la diversité biologique. Les aires protégées terrestres et marines du Canada protègent des échantillons représentatifs des écosystèmes et contribuent au maintien de la diversité des espèces indigènes, y compris celles qui sont en péril. Tout en préservant la diversité biologique, les aires protégées procurent des dividendes additionnels, dont un bon nombre sont essentiels au bien-être humain. L'air pur et l'eau propre, les frayères des poissons, la lutte contre les parasites et les maladies, la pollinisation des cultures et les bases de ressources génétiques de nombreuses entreprises pharmaceutiques sont quelques-uns seulement des biens et services également attribuables aux aires protégées.

Une des valeurs importantes des aires protégées récemment reconnues est leur rôle d'atténuation des changements climatiques. La végétation qui croît dans les aires protégées, surtout dans les marais salants et les prairies sous-marines, absorbe et emmagasine le carbone. Par définition, les aires protégées sont exemptes de tout développement ou exploitation. Ainsi, elles assurent la rétention du carbone qui s'ajouterait autrement aux 20 % de gaz à effet de serre émis par la perturbation de la tourbe, des sols et de la végétation. Par ailleurs, les écosystèmes non perturbés des aires protégées servent de point de référence à la recherche sur les effets climatiques et se prêtent parfaitement à d'autres études qui servent à élargir nos connaissances des systèmes naturels.

L'importance économique des aires protégées peut être mesurée de façon tangible et intangible. Le tourisme, le développement rural et les valeurs accrues des biens immobiliers des zones adjacentes sont des avantages économiques tangibles aisément mesurables. Tandis que les bienfaits pour la santé mentale et physique découlant les liens avec la nature sont prouvés, il est néanmoins difficile d'en tirer des statistiques. Les récentes études montrent que les randonneurs pédestres ont obtenu une note 50 % supérieure au test de créativité après avoir passé quatre jours dans la nature, sans aucun appareil électronique (Atchley et coll., 2012). Mettre en contact les Canadiens et les visiteurs avec la nature est un avantage intangible aussi important que les avantages tangibles.

Les écosystèmes intacts dans les aires protégées contiennent des paysages culturels et historiques qui viennent renforcer et soutenir la culture autochtone. Bon nombre des aires protégées récentes du Canada ont été établies dans le cadre de processus de règlement des revendications territoriales en raison de la reconnaissance de cette relation fondamentale de la nature et de la culture au sein des populations autochtones du Canada. Les aires protégées garantissent l'existence de lieux où cette relation peut continuer d'exister.

Mieux encore, les aires protégées fournissent des lieux où peuvent être vécus certains des moments les plus joyeux de la vie. La beauté esthétique, le sentiment de solitude et l'interaction avec la faune peuvent déclencher des moments d'exaltation. Les vacances orientées vers les aires protégées procurent des moments idéaux pour la détente et le partage d'un moment particulier ou d'une aventure avec la famille et les amis. Ces expériences deviennent des moments mémorables et, pour beaucoup, ils peuvent contribuer à transformer la vie.

Les nombreux attributs et les valeurs des aires protégées ont amené les pays du monde à créer plus de 160 000 aires protégées englobant près de 13 % de la superficie terrestre du globe et un peu plus de 7 % des écosystèmes marins. Le Canada tire un peu de l'arrière par rapport à ces données mondiales et doit en outre relever le défi de ses engagements mondiaux qui consistent à étendre la couverture terrestre à 17 % et marine à 10 % d'ici 2020.

Les ressources humaines, financières et autres utilisées pour gérer les aires protégées du monde sont insuffisantes. La capacité humaine de gérer ces aires représente un défi perpétuel auquel font face la plupart des pays du monde. Les ressources financières du Canada consacrées aux aires protégées font sans aucun doute l'envie de bien des pays. Pourtant le Canada, comme bien d'autres, ne respecte pas les critères fondamentaux d'une gestion efficace pour la plupart de ses aires protégées. L'établissement d'objectifs à partir de la consultation des intervenants est un outil fondamental de gestion. Ces objectifs sont normalement fixés au cours de la préparation et de l'approbation d'un plan de gestion des parcs. La plupart des parcs et des aires protégées du Canada ne disposent pas de plan de gestion, de sorte que le but de la gestion n'est pas défini.

Le présent rapport sur la situation des aires protégées du Canada est le deuxième à avoir été préparé, et vise la période de 2006 à 2011. Les résultats présentés ici sont louables. Les organisations gouvernementales ont exposé pour le lecteur une liste détaillée de réalisations des cinq dernières années. La croissance du nombre d'aires protégées et de la superficie ciblée est digne de mention, tout comme les efforts déployés pour relever les défis de gestion particuliers, allant de l'intégrité écologique à l'atténuation des effets des changements climatiques. De plus, en comparant ces réalisations aux cibles et aux objectifs de la Convention internationale sur la diversité biologique, les organisations gouvernementales reconnaissent leur engagement et l'adhésion à cet important instrument mondial de préservation de la diversité biologique.

Ce rapport est remarquable, non seulement parce qu'il fournit au lecteur un exposé des réalisations des cinq dernières années, mais aussi parce qu'il montre clairement où des travaux additionnels sont requis. En précisant les lacunes, on obtient un rapport honnête qui encourage le lecteur à apporter sa contribution afin de s'assurer que les aires protégées sont bien gérées et atteignent les objectifs de conservation de la diversité biologique et d'autres dividendes énumérés ci-dessus et plus en détail dans le rapport.

Enfin, le défi que ce rapport aborde de front consiste à communiquer aux Canadiens l'importance des aires protégées. La promesse, l'intérêt et les bienfaits écologiques, sociaux et économiques qu'offrent les aires protégées doivent être compris et soutenus par les Canadiens. Autrement, la volonté de les protéger à l'avenir en sera amoindrie.

Nikita Lopoukhine
(ancien directeur général des Parcs nationaux et ancien président de la Commission mondiale des aires protégées de l'Union internationale pour la conservation de la nature)

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