Stabilisation du pH pendant un essai de létalité d’un effluent d’eau usée chez la truite arc-en-ciel : chapitre 1


Section 1 : Introduction

En 1990, Environnement Canada a publié une méthode d’essai biologique pour la réalisation d’essais de létalité aiguë sur la truite arc-en-ciel : Méthode de référence pour la détermination de la létalité aiguë d’effluents chez la truite arc-en-ciel (SPE 1/RM/13) [EC, 2000]. La méthode (révisée en 2007) a été élaborée expressément pour déterminer la létalité aiguë d’un effluent ; un peu partout au Canada les administrations fédérale, provinciales et territoriales l’ont employée à la surveillance et le contrôle des effluents industriels et des effluents d’eau usée.

L’essai se déroule à 15 ± 1 °C pendant 96 h en conditions statiques (c’est-à-dire sans renouvellement de la solution d’essai). Il peut porter uniquement sur une eau usée non diluée (à 100 %) ou sur des concentrations multiples (par exemple 100 %, 50 %, etc.) pour déterminer la CL50 (concentration d’échantillon d’eau usée que l’on estime être létale, au bout d’une période définie, pour 50 % des animaux qui y sont exposés,). En vertu de la plupart des règlements provinciaux et fédéraux en vigueur, un échantillon est considéré comme « échouant » à l’essai de létalité aiguë si on observe, chez la truite arc-en-ciel, un taux de mortalité supérieur à 50 % dans l’eau usée non diluée.

La méthode d’essai exige l’aération du contrôle et des solutions d’essai au débit de 6,5 ± 1 mL/min. · L. Ce débit est suffisant pour maintenir la concentration d’oxygène dissous dans le contrôle à 70 à 100 % de la saturation en oxygène. Cependant, on maintient le débit d’aération au minimum, parce qu’une aération excessive de l’eau usée risque d’accélérer la variation du pH et l’élimination des composés volatils (ESG, 2002).

L’aération des eaux usées pendant un essai de létalité aiguë peut élever le pH, du fait de l’équilibrage de la pression partielle du dioxyde de carbone (CO2) dans l’eau usée avec celle du même gaz dans l’atmosphère. La perte de CO2 à cause de l’aération modifie le pouvoir tampon carbonaté de l’effluent, ce qui conduit à une élévation du pH. Dans beaucoup d’échantillons d’effluent d’eau usée, la teneur en CO2 peut être artificiellement élevée du fait d’une forte activité biologique ou du fait de l’acidification de l’eau usée avant son rejet (Mount et Mount, 1992). Toute modification du pH de l’eau usée pendant l’essai de létalité aiguë risque de modifier le taux de mortalité si la toxicité de la substance dépend du pH.

L’ammoniac, qui pourrait être préoccupant dans un effluent d’eau usée, serait un exemple de toxique dépendant du pH. La toxicité de l’ammoniac est attribuable à la forme libre ou non ionisée (NH3) par opposition à la forme ionisée. La concentration relative d’ammoniac non ionisé augmente avec le pH et la température de l’eau. Selon le pH initial de l’eau usée non diluée et l’intensité de l’augmentation du pH pendant l’essai, les concentrations d’ammoniac non ionisé qui étaient inférieures aux concentrations létales au début de l’essai pourraient augmenter suffisamment pendant ce dernier pour provoquer une mortalité des truites arc-en-ciel avant la fin de l’essai.

Pour parer à l’éventualité de la toxicité de l’ammoniac résiduel dans un effluent d’eau usée en raison de l’augmentation du pH, Environnement Canada a normalisé trois techniques de stabilisation du pH applicables à l’essai de létalité aiguë sur la truite arc-en-ciel. Ces techniques sont complémentaires à la méthode d’essai SPE 1/RM/13. Cependant, on peut effectuer un essai avec stabilisation du pH uniquement si on respecte trois conditions énoncées dans les § 1.1, 1.2 et 1.3.

On trouvera des renseignements de base à l’appui de l’emploi de ces techniques de stabilisation du pH dans le document intitulé Renseignements de base et conseils supplémentaires pour l’étude de la létalité aiguë d’un effluent d’eau usée pour la truite arc-en-ciel (EC, 2008).

1.1 Première condition - dosage de l’ammoniac total

Dans tous les échantillons d’effluent d’eau usée soumis à un essai de toxicité par la méthode SPE 1/RM/13, il faut doser l’ammoniac total (en milligrammes/litre). On peut ainsi déterminer si la stabilisation du pH convient aux échantillons ultérieurs. Cette concentration d’ammoniac total sert au calcul de la teneur en ammoniac non ionisé au pH initial (pH i)Footnote 1 de l’effluent à 15 °C (cf. la condition 3, § 1.3).

1.2 2e condition - échec de la méthode de référence SPE 1/RM/13 sur la létalité aiguë

Les techniques décrites dans le présent document pour la stabilisation du pH de l’effluent d’eau usée doivent uniquement être utilisées lorsqu’il a été montré qu’un échantillon antérieur d’effluent d’eau usée de la même source a échoué à l’essai de létalité aiguë sur la truite arc-en-ciel (SPE 1/RM/13 ; c’est-à-dire que le taux de mortalité des truite a excédé 50 %)Footnote 2.

1.3 3e condition - Concentration maximale d’ammoniac

Les procédures décrites dans le présent document ne peuvent être utilisées que lorsque la concentration d’ammoniac non ionisé présent dans l’échantillon d’effluent usé non dilué est inférieure à 1,25 mg/L à 15 °C ou que la concentration d’ammoniac total est inférieure au maximum (y), en milligrammes/litre, déterminé à l’aide de la formule ci-dessous et du pH initial de l’échantillon à 15 °C :

On a fixé ces concentrations maximales de l’ammoniac pour dépister les eaux usées qui feraient mourir les truites arc-en-ciel, peu importe la dérive du pH observée pendant l’essai de létalité aiguë. Autrement dit, les techniques de stabilisation du pH ne conviennent pas si la concentration d’ammoniac est déjà suffisamment élevée pour provoquer une mortalité chez la truite arc-en-ciel au début de l’essai de létalité aiguë. Si l’ammoniac non ionisé excède ce maximum, il est évident que, en raison de la piètre qualité de l’effluent d’eau usée, il est inutile de prendre en considération le phénomène de dérive du pH (c’est-à-dire que l’ammoniac se trouve déjà à une concentration létale aiguë avant le début de l’essai). Pour de plus amples renseignements et un exposé du fondement logique, prière de consulter Environnement Canada (2008).

Comme l’« ammoniac total » = NH3+ NH4+, il faut calculer la concentration d’ammoniac non ionisé, en milligrammes/litre, à l’aide de la formule suivante (United States Environmental Protection Agency (USEPA), 1999) :

Ammoniac non ionisé = (ammoniac total) × [1/(1 + 10 pK - pH)]

Où :

pK = 9,56 à 15 °C ; pH est le pH initial de l’effluent d’eau usée à 15 °C ; et la concentration d’ammoniac total est exprimée en milligrammes/litre, telle qu’elle a été mesurée pour satisfaire à la première condition, § 1.1.

1.4 Survol des techniques de stabilisation du pH

Pendant l’essai de létalité aiguë d’échantillons d’effluent d’eau usée employant la truite arc-en-ciel, on peut utiliser trois techniques de stabilisation du pH, lorsque l’on satisfait à leurs conditions d’emploi. Ces techniques sont les suivantes :

  1. la technique d’injection de CO2 ;
  2. la technique de recyclage ou recirculation ;
  3. la technique du pH-mètre régulateur.

Peu importe la technique choisie, l’application d’une procédure de stabilisation du pH à un essai de létalité aiguë employant la truite arc-en-ciel exige une formation pratique préalable à l’essai sur un échantillon réel d’effluent d’eau usée. Il faudra probablement effectuer des expériences avec chaque échantillon, puisque la chimie particulière de l’eau variera d’un réseau d’assainissement à l’autre ou même à l’intérieur d’un réseau donné.

Pendant la réalisation des essais, il faut respecter, outre les exigences expérimentales particulières des techniques de stabilisation du pH, toutes les procédures et exigences méthodologiques de la méthode SPE 1/RM/13. La raison d’être de chaque technique est de remplacer le CO2 perdu pendant l’aération en cours d’essai afin de maintenir le pH de l’échantillon à sa valeur initiale (pH i). Les techniques ne visent pas à ajouter plus de CO2 qu’il ne s’en trouve déjà dans l’effluent d’eau usée. La section 2 renferme une description détaillée de chacune de ces techniques.

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