Abronie à petites fleurs (Tripterocalyx micranthus) évaluation et rapport de situation du COSEPAC : chapitre 6

Biologie

Généralités

Normalement closes, les communautés de vivaces du désert peuvent être envahies par des annuelles pendant de brèves périodes où le sol est très humide. Pour survivre en milieu désertique, une annuelle doit profiter rapidement de conditions favorables pour croître et se reproduire abondamment avant de retourner à l’état de dormance (graine) jusqu’au retour du prochain épisode favorable. Des températures printanières clémentes et une abondance d’eau provenant de la fonte des neiges et des précipitations permettent à la plante de mener son cycle vital à terme en peu de temps. La plante meurt à l’été, lorsque les températures et le degré de sécheresse de la couche superficielle de sol atteignent des valeurs critiques pour l’espèce (Evans et Thames, 1981).

Reproduction

En règle générale, les plantes éphémères, dont fait partie l’abronie à petite fleurs, germent au printemps, croissent rapidement, fleurissent, produisent des graines puis meurent en laissant leur progéniture dispersée sur le sol. La rapidité avec laquelle elles accomplissent leur cycle vital est une adaptation qui les rend très aptes à survivre en milieu désertique, car la plante se trouve ainsi à passer la période de chaleurs intenses et de sécheresse à l’état de dormance, sous forme de graines. Les graines sont très résistantes à ces conditions et assurent la survie de la plante jusqu’au printemps suivant, parfois durant deux ou trois ans, avant qu’elle ne puisse recommencer son cycle (Danin, 1996).

Pour toute annuelle, il existe un risque permanent de déclenchement intempestif de la germination par des précipitations fortes mais de courte durée, accompagné d’un risque de mortalité massive des semis dans le cas où les précipitations sont suivies par une période de grande chaleur et de sécheresse. La plupart des annuelles synthétisent des composés biochimiques qui inhibent la germination assez longtemps pour leur permettre d’échapper à ce danger (Evans et Thames, 1981).

Le fruit (graine) de l’abronie à petites fleurs est un akène enfermé dans une enveloppe ailée persistante. Pour que la graine puisse germer, cette enveloppe doit être ramollie soit par l’action mécanique due au développement de champignons, soit par l’action chimique de substances présentes dans l’enveloppe et libérées par l’humidité. Dans un cas comme dans l’autre, l’eau est indispensable. La germination dépend non seulement de la quantité d’eau disponible, mais aussi de la durée de sa présence. Ainsi, à quantité égale d’eau, une longue pluie fine entraîne une plus grande désagrégation chimique de l’enveloppe et, par conséquent, un taux de germination plus élevé qu’une pluie abondante de courte durée. La température joue également un rôle important dans la germination (Evans et Thames, 1981). La part relative de la température et des précipitations dans la germination de l’abronie à petites fleurs n’est pas bien connue.

Dans l’aire principale de l’espèce, la floraison s’étale de mai à juillet. Cependant, les populations canadiennes fleurissent principalement à la mi-juin et produisent leurs graines à la mi-juillet.

Survie

Pour survivre en milieu aride, les annuelles ont dû développer la capacité de réagir rapidement à l’apparition sporadique de conditions favorables à leur croissance, de se développer rapidement et de produire de grandes quantités de graines pouvant résister longtemps à des conditions défavorables (Evans et Thames, 1981). L’abronie à petites fleurs est parfaitement adaptée à la vie dans les dunes. La plupart des adaptations à la survie en milieu aride se manifestent dans la capacité d’absorption et de rétention de l’eau si nécessaire à la plante. La forme et la hauteur du feuillage de l’abronie à petites fleurs sont adaptées pour capter les particules d’argile et de limon transportées par le vent, qui mollit au niveau du feuillage et de la base de la plante (Danin, 1996). Or, le limon et l’argile possèdent une capacité de rétention de l’eau supérieure à celle du sable, de sorte qu’ils absorbent la rosée du matin avec une plus grande efficacité (Danin, 1996).

Les tiges, les feuilles et la racine de l’abronie à petites fleurs présentent aussi des adaptations aux conditions arides. Les tiges, rigides, sont résistantes à la sécheresse. Leur surface visqueuse peut s’enrober de sable, qui les protège contre l’action d’agents abrasifs, notamment contre le sable transporté par le vent. Les feuilles, dont la face inférieure peut aussi être visqueuse, sont plutôt épaisses et de forme simple, ce qui donne une surface foliaire réduite et diminue la perte d’eau par évapotranspiration (Danin, 1996). Leur face supérieure lisse et leur position dressée servent peut-être à diriger la condensation de la rosée vers le système racinaire (figure 1), en l’occurrence, une racine pivotante simple, typique des annuelles (Welsh, 1987).

De façon générale, les annuelles du désert ressemblent plus, sur le plan de la morphologie et du fonctionnement, aux espèces mésiques qu’aux espèces xériques (Evans et Thames, 1981). En effet, comparativement aux annuelles, les vivaces des milieux désertiques ou xériques ont developpé des adaptations plus poussées au niveau des tiges, des feuilles et des racines par nécessité de survivre plusieurs années dans des conditions adverses.

La constitution d’un réservoir de graines viables est d’une importance capitale pour la survie de l’abronie à petites fleurs. Pour les espèces vivant dans les dunes, la dispersion des graines dans la direction des vents dominants a pour résultat que celles-ci demeurent dans les dunes plutôt que d’être transportées dans un milieu défavorable. En effet, le vent fait rouler ou glisser les fruits (graines) jusqu’à ce qu’ils s’immobilisent sur les pentes sous le vent, où la vitesse du vent est pratiquement nulle. Le sable transporté par le vent qui balaie les dunes finit par les recouvrir. Au fur et à mesure que les dunes se déplacent, d’autres fruits sont déposés sur les faces nouvellement formées. Ainsi, des graines sont réparties à la grandeur des dunes, enfouies à différentes profondeurs, où elles sont à l’abri des animaux. Les fruits gisant à la surface du sol peuvent être transportés dans les environs, où les graines germeront si la température et le degré d’humidité du sol sont propices (Danin, 1996).

Physiologie

Une germination rapide, un développement rapide du système racinaire principal et une grande vigueur des semis sont caractéristiques des annuelles. Le taux de germination est généralement élevé. La croissance des plantes désertiques est en rapport direct avec la quantité d’eau disponible, et l’époque où l’eau survient est d’une importance capitale pour l’accomplissement du cycle vital de la plante (Evans et Thames, 1981).

Comparativement aux vivaces, les annuelles ont besoin de très peu de carbone pour le maintien de leurs structures : tiges, feuilles, racines, etc. Les organes des annuelles remplissent leur fonction une seule fois dans la vie de la plante, après quoi celle-ci meurt et se désintègre. Comme elles accomplissent entièrement leur croissance et leur reproduction pendant la saison la plus favorable, les annuelles ont moins besoin que les vivaces de structures de protection contre la chaleur et la sécheresse (Evans et Thames, 1981)

Déplacements et dispersion

Comme il s’agit d’une annuelle, il est peu probable qu’on retrouve l’abronie à petites fleurs exactement au même endroit d’année en année. Le fruit, un akène, est enveloppé par le calice persistant qui forme une structure à trois ailes minces favorisant la dispersion. Le fruit, la graine et l’organe de dispersion sont tous de parfaites adaptations à la vie en milieu aride. Le fruit ailé peut rouler au sol ou flotter sur l’eau. Il est dépourvu de poils, dont la présence ne ferait que ralentir sa course lorsque le vent le fait rouler ou glisser sur le sable (Danin, 1996). Les ailes donnent prise aux rafales qui balaient les champs de dunes et favorisent le transport à distance (Alberta Native Plant Council, 2001). La dispersion étant assurée par le vent ou l’eau, il est raisonnable de s’attendre à voir des semis en aval d’une population reproductrice. Cette observation a déjà conduit à la découverte de populations de l’espèce (Hudson, 1982; Johnson et Hallworth, 1975).

Plusieurs hypothèses ont guidé Hudson (1982) dans la recherche qui l’a mené à la découverte de la population de Saskatchewan. Hudson a en effet posé que l’abronie à petites fleurs se trouverait sur un sol sablonneux, au cœur d’un microclimat chaud et du côté convexe (versant de glissement), constitué de sables alluvionnaires, d’un méandre de cours d’eau. Le site de Saskatchewan présente bien toutes ces caractéristiques.

Nutrition et relations interspécifiques

Peu de données ont été publiées sur la nutrition de l’abronie à petites fleurs et sur ses interactions avec d’autres espèces.

Une dense couverture d’annuelles inhibe la germination des graines de l’abronie à petites fleurs. Des expériences ont montré que les graines pouvaient cependant germer dans le sol prélevé sous la couverture végétale, ce qui donne à penser que le facteur d’inhibition serait un trop faible rapport entre les radiations du domaine rouge et du domaine rouge lointain (Evans et Thames, 1981).

Comportement et capacité d’adaptation

L’abronie à petites fleurs semble incapable de vivre en l’absence de dépôts de sable. Elle serait donc restreinte aux milieux comportant des étendues de sable mobile.

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