Bécasseau maubèche (Calidris canutus) évaluation et rapport de situation du COSEPAC : chapitre 2

logo du COSEPAC

COSEPAC
Résumé

Bécasseau maubèche
Calidris canutus

sous-espèce rufa (Calidriscanutusrufa)
type roselaari (Calidris canutus roselaari type)
sous-espèce islandica (Calidris canutus islandica)

Information sur l’espèce

Le Bécasseau maubèche (Calidris canutus) est un oiseau de rivage de taille moyenne présentant les caractéristiques morphologiques typiques du genre Calidris : long bec et petite tête, ailes longues et effilées donnant au corps un profil allongé et fuselé, et longues pattes. Le plumage nuptial du Bécasseau maubèche est très caractéristique, la face, le cou, la poitrine et une bonne part des parties inférieures prenant une coloration cannelle roussâtre. Les plumes des parties supérieures sont brun foncé ou noires, avec du roux et du gris, ce qui donne au dos une apparence pailletée. En plumage d’hiver, le Bécasseau maubèche est terne, ses parties inférieures étant blanches et son dos, gris pâle. Les six sous-espèces actuellement reconnues dans le monde forment toutes des populations biogéographiques distinctes différant quant à leur répartition et au calendrier de leur cycle annuel. Les sous-espèces présentes au Canada sont le C. c. rufa, le C. c. roselaari et le C. c. islandica.

Répartition

Le C. c. rufa se reproduit dans le centre de l’Arctique canadien et hiverne dans la Terre de Feu, à la pointe sud de l’Amérique du Sud. Le C. c. roselaari est divisé en trois populations aux fins du présent rapport : la population du Pacifique, qui hiverne en Californie et dans le nord-ouest du Mexique et qui migre, en passant par l’ouest du Canada, pour aller se reproduire dans le nord de l’Alaska, et deux populations hivernant l’une en Floride et dans le sud-est des États-Unis et l’autre au Maranhão (Brésil) qui se reproduisent probablement dans le centre et dans l’ouest de l’Arctique canadien. Les populations de la Floride et du Maranhão sont biogéographiquement bien distinctes de la population de roselaari du Pacifique et de la population de rufa du sud de l’Amérique du Sud; leur statut taxinomique est en cours de révision. Le C. c. islandica se reproduit dans le nord-est de l’Arctique canadien (et au Groenland) et hiverne en divers endroits le long du littoral de l’Europe.

Habitat

Dans l’Arctique, les Bécasseaux maubèches nichent dans des habitats dénudés, notamment sur des crêtes, des pentes et des plateaux balayés par le vent, présentant souvent moins de 5 p. 100 de couverture végétale. Les haltes migratoires et les lieux d’hivernage sont des zones côtières présentant de vastes estrans, habituellement sableux (parfois des vasières), où les oiseaux s’alimentent de mollusques et crustacés et d’autres invertébrés. L’espèce fréquente aussi les bancs de tourbe, les marais salés, les lagunes saumâtres, les mangroves, les moulières, et, en Amérique du Sud, les restingas, plateformes intertidales rocheuses riches en invertébrés.

Biologie

Le Bécasseau maubèche est monogame. Les couples produisent habituellement une seule couvée de quatre œufs dans la deuxième moitié de juin, et les œufs éclosent vers la mi-juillet. Les femelles partent peu après, laissant les mâles accompagner les petits jusqu’à ce qu’ils prennent leur envol. Le taux de reproduction varie considérablement d’une année à l’autre, selon les conditions météorologiques et l’abondance de prédateurs, laquelle fluctue à son tour suivant un cycle de trois ou quatre ans selon l’abondance des lemmings.

Taille et tendances des populations

La taille actuelle de la population de C. c. rufa est de 13 500 à 15 000 adultes, selon les dénombrements effectués dans ses quartiers d’hiver de la Terre de Feu et de Patagonie. Les relevés réalisés à ces endroits laissent penser que la population a diminué de 70 p. 100 depuis 1982. Les effectifs observés dans les principaux lieux d’hivernage, dans la Terre de Feu, sont demeurés assez stables jusqu’en 2000, après quoi ils ont fortement chuté. Il reste peu de rufa aux sites « périphériques » qu’on trouve le long de la côte patagonienne, où des effectifs importants étaient observés dans les années 1980. Des déclins similaires ont été signalés dans l’ensemble de la voie de migration du rufa, ce qui confirme qu’on assiste à un déclin démographique réel plutôt qu’à une redistribution des oiseaux dans des endroits différents.

La taille actuelle de la population de C. c. roselaari hivernant en Floride et dans le sud-est des États-Unis est d’environ 3 375 adultes. Ce groupe a diminué d’environ 70 p. 100 au cours des 15 dernières années. On dispose de moins d’information sur la population du Maranhão, qui pourrait être tombée d’environ 7 p. 100 au cours des 20 dernières années, à environ 5 700 adultes. Les données existantes laissent croire que la population de roselaari du Pacifique aurait diminué d’environ 60 p. 100 au cours des 15 à 20 dernières années, son effectif actuel étant d’environ 1 500 à 3 000 adultes. Dans l’ensemble, le déclin  se solde par une diminution globale de la population de roselaari de 47 p. 100.

Les populations de C. c. islandicadénombrées durant leur hivernage en Europe comptent actuellement au total environ 202 500 adultes, ce qui représente un déclin d’environ 17 p. 100 depuis la fin des années 1990.

Facteurs limitatifs et menaces

La principale menace pesant sur les Bécasseaux maubèches de la sous-espèce rufa et sur ceux de la sous-espèce roselaari hivernant en Floride et dans le sud-est des États-Unis ou au Maranhão (Brésil) découle de la surpêche du limule (Limulus polyphemus) qui a été pratiquée dans la baie du Delaware et qui a conduit à la décimation des œufs de cet invertébré, lesquels constituent pour les oiseaux l’aliment le plus important durant leur dernière halte migratoire printanière. Par ailleurs, la dégradation des habitats dans des régions comme celles de Grays Harbor (État de Washington) et de la baie de San Francisco a probablement touché les populations de roselaari de la côte du Pacifique, tandis que la surpêche des mollusques et crustacés dans des lieux d’hivernage importants de la mer des Wadden aux Pays-Bas a touché les C. c. islandica durant leur hivernage en Europe.

Au nombre des autres menaces possibles, on compte la diminution de la quantité d’habitat disponible durant la migration dans l’est de l’Amérique du Nord (laissant peu de sites de remplacement utilisables par les oiseaux), la perturbation des oiseaux, l’accroissement des épisodes de temps violent (p. ex. des ouragans) durant la migration, la pollution par les hydrocarbures et d’autres produits chimiques en Amérique du Nord et en Amérique du Sud, les effets des changements climatiques, dont l’élévation du niveau de la mer et l’altération des conditions existant dans les lieux de reproduction de l’Arctique ainsi que l’accroissement de la prédation associée à un regain des populations de prédateurs (p. ex. des faucons).

Importance de l’espèce

Le Bécasseau maubèche est depuis longtemps une espèce emblématique de la conservation des oiseaux de rivage en raison de ses immenses migrations intercontinentales et de sa vulnérabilité découlant de ses rassemblements considérables (regroupant des proportions importantes de la population) dans un nombre limité de sites clés. Le fait que cet oiseau sauvage franchisse nombre de frontières internationales et qu’il est partagé par moult pays a valeur d’exemple en ceci que la collaboration internationale est indispensable pour assurer la conservation de l’espèce. La conservation des sites fréquentés par l’espèce profitera aussi à de nombreux autres oiseaux de rivage.

Protection actuelle ou autres désignations de statut

Le Bécasseau maubèche est protégé en vertu de la Loi de 1994 sur la convention concernant les oiseaux migrateurs (1917, mise à jour en 1994). Une évaluation officielle effectuée aux États-Unis a conduit à son inscription comme « espèce candidate », ce qui le rend apte à être désigné espèce en voie de disparition (endangered) aux États-Unis. Le Bécasseau maubèche est désigné espèce menacée (threatened) au New Jersey et espèce préoccupante (special concern) en Géorgie. Il a été inscrit à l’annexe 1 de la Convention sur la conservation des espèces migratrices appartenant à la faune sauvage (Convention de Bonn), laquelle est la liste des espèces migratrices menacées de disparition. NatureServe donne à la sous-espèce rufa la cote mondiale G4T1, c’est-à-dire sous-espèce gravement en péril à l’échelle mondiale; les cotes nationales sont N1N pour les États-Unis, c’est-à-dire population non nicheuse gravement en péril, et N1B et N1N pour le Canada, c’est-à-dire populations nicheuse et non nicheuse gravement en péril.

 

Détails de la page

Date de modification :