Isoète de Bolander (Isoetes bolanderi) évaluation et rapport de situation du COSEPAC : chapitre 8

Biologie

Généralités

Chez l’Isoetes bolanderi, la plante se développe lentement au fond du lac, à partir de l’union d’une microspore et d’une mégaspore. Les microspores et mégaspores arrivent à maturité vers la fin de l’été et sont libérées dans le milieu avec la décomposition des feuilles de la plante, au fond du lac, vers la fin de l’été ou le début de l’automne. Les feuilles ne semblent pas persister en hiver, car la plante dépérit chaque automne jusqu’au sommet de la corme. L’espèce forme de grands peuplements, parfois assez denses.


Cycle vital et reproduction

L’Isoetes bolanderi est une plante diploïde qui se reproduit par voie sexuelle et qui produit des spores viables. L’apogamie n’a pas été observée chez les isoètes d’Amérique du Nord (Brunton et Taylor, 1990; Brunton et Britton, 1999), et aucune forme de multiplication végétative n’a jamais été signalée chez les espèces aquatiques de ce genre présentes sur le continent (Kott et Britton, 1983; Taylor et al., 1993). L’I. bolanderi a sans doute besoin de 3 à 5 années avant d’atteindre une maturité suffisante pour pouvoir produire des microspores ou mégaspores viables. La longévité des sujets adultes est inconnue, mais d’autres espèces nord-américaines d’isoètes ont été maintenues en culture pendant 10 à 15 années (W.C. Taylor, comm. pers.). La durée de viabilité des spores flottantes des isoètes est inconnue, mais elle doit être considérable. En effet, D. Brunton (obs. pers.) a observé chez des spécimens d’isoètes récoltés à la fin du 19e siècle des mégaspores dont le contenu était apparemment encore liquide et intact.

La population du lac Summit produit actuellement de nouveaux individus, puisqu’on y a observé un nombre important d’individus très petits qui ne comportaient qu’entre 2 à 4 feuilles et dont les sporanges (s’ils étaient présents) étaient immatures.


Prédateurs

Au lac Summit, il arrive que des sujets de l’espèce soient arrachés par des orignaux (Alces alces) en train de se nourrir (Brunton, 1994; C. Smith, comm. pers., 2003), mais cela ne semble pas avoir une incidence importante sur l’espèce. En effet, ce facteur semble avoir une incidence localisée, et il se peut que les feuilles entières transportées le long des rives du lac contribuent à y redistribuer l’espèce.

Le Garrot d’Islande (Bucephala islandica) a été observé en train de s’alimenter au lac Summit. Comme cette espèce de canard s’alimente au fond de l’eau, il est possible qu’elle contribue à arracher des isoètes (Brunton, 1994).


Physiologie

Aucune information n’est disponible sur cet aspect de la biologie de l’espèce.


Dispersion

Les spores sont dispersées vers la fin de l’été et en automne avec la rupture du sporange par incidence physique ou décomposition. Comme les peuplements denses sont fréquents, il semble que les spores ne sont normalement dispersées qu’à une faible distance.

Il se peut que les oiseaux de rivage puissent involontairement transporter des spores d’isoètes sur leurs pattes. Le Chevalier grivelé (Tringa macularia) a déjà été observé au lac Summit (obs. pers.), mais il est peu probable que les oiseaux de rivage migrateurs utilisent le secteur régulièrement. Les grands animaux barboteurs, comme l’orignal, pourraient transporter des spores en se déplaçant ou en s’alimentant. Il est également possible que des plantes entières puissent être transportées par certains anatidés, comme le Garrot d’Islande (Bucephala islandica).

Des plantes entières d’isoètes peuvent facilement être transportées par les courants, et de nombreux sujets d’Isoetes bolanderi ont été aperçus en train de flotter le long des rives du lac Summit (Brunton, 1994) et de son ruisseau de décharge (C. Bradley, comm. pers.).

Comme l’aire de répartition de l’Isoetes bolanderi comporte de grandes disjonctions, on peut supposer que ses spores peuvent être transportées à grande distance. Cependant, on ne sait pas exactement comment s’effectue ce transport, et on n’en connaît ni les agents ni la fréquence. Par conséquent, en cas de disparition de la seule population canadienne, il semble très improbable que l’espèce puisse se rétablir au Canada par « effet d’une immigration de source externe », c’est-à-dire par dispersion naturelle à partir de populations situées aux États-Unis.


Relations interspécifiques

Toute une gamme d’autres plantes aquatiques peut être associée à l’Isoetes bolanderi et partager plusieurs de ses caractéristiques biologiques. Comme les isoètes tendent à être des compétiteurs médiocres, ils sont rapidement remplacés par les espèces plus compétitives (Potamogeton spp., Ceratophyllum spp., etc.) lorsque la quantité de matière organique et d’éléments nutritifs augmente. Cependant, la population d’I. bolanderidu lac Summit est associée à peu d’autres espèces végétales (Brunton, 1994; Smith et Bradley, 2003).


Adaptabilité

L’Isoetes bolanderi est associé à une eau de qualité excellente et subit peu de compétition d’autres espèces aquatiques. D’autres espèces d’isoètes aquatiques ont été éliminées de vastes secteurs de leur aire de répartition antérieure dans l’est de l’Amérique du Nord à cause de leur incapacité de réagir à de tels changements (Brunton, 2000), et on peut s’attendre à une vulnérabilité semblable chez l’I. bolanderi.

Les espèces émergentes du genre Isoetes peuvent être maintenues en culture pendant longtemps (plus de 9 ans), mais les espèces aquatiques sont plus difficiles à cultiver, sans doute à cause des eaux froides qu’elles requièrent. Des Isoetes bolanderi du Wyoming ont pu être maintenus en culture pendant moins de 2 ans (D. Brunton, obs. pers.).

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