Sclérophore givré (Sclerophora peronella) évaluation et rapport de situation du COSEPAC : chapitre 6

Biologie

Généralités

Le Sclerophora peronella pousse exclusivement sur le bois et l’écorce d’arbres âgés. Toutes les mentions canadiennes du S. peronella sont constituées par des spécimens dont les apothécies portent des spores mûres. D’après les descriptions disponibles de l’habitat de l’espèce, celle-ci semble privilégier les forêts anciennes à humidité stable et à faibles fluctuations de température.

Reproduction

Le thalle du S. peronella est enfoui dans le substrat, et on n’a jamais observé de propagules végétatives chez l’espèce. Dans les sites canadiens, tous les thalles étaient pourvus d’apothécies portant des spores mûres. Ainsi, ce sont des spores sexuelles logées dans la cupule d’apothécies pédicellées qui doivent être transportées vers de nouveaux milieux, et on croit que les agents de cette dispersion sont le vent, la pluie et, dans une moindre mesure, certains invertébrés. Les spores doivent atterrir et germer à proximité d’une algue verte compatible pour que la lichénisation ait lieu. Le spécialiste mondial des lichens et champignons calicioïdes, Leif Tibell, affirme (comm. pers.) que la longévité des thalles, leur âge de maturité sexuelle et la durée de génération sont encore inconnus chez le groupe d’espèces auquel appartient le S. peronella. Selon Canters et al. (1991), la répartition des lichens « est régie par des facteurs microclimatiques dont l’incidence sur les plantes supérieures est différente ou nulle ». Par conséquent, les facteurs microclimatiques liés au substrat ligneux, comme le pH, la capacité de rétention d’eau et la composition chimique, peuvent influer sur la longévité des thalles, leur âge de maturité sexuelle et la durée de génération.

 

Taux de survie

On présume généralement que l’établissement du S. peronelladoit dépendre, comme chez les autres lichens, de facteurs tels que l’âge, la texture, le pH, la capacité de rétention d’eau et la teneur en éléments nutritifs du substrat, le degré d’éclairement et d’humidité du micro-environnement, l’inclinaison et l’orientation des surfaces, la pollution atmosphérique ainsi que la continuité du peuplement (voir entre autres Barkman, 1958, Brodo, 1973, ainsi que James, Hawksworth et Rose, 1977). Cependant, les besoins microclimatiques et physiologiques propres au S. peronella restent à déterminer. D’après Mattson et Middelborg (2000), l’humidité du microclimat est peut-être le facteur écologique qui joue le plus grand rôle dans la répartition des espèces calicioïdes, et cette humidité dépend principalement de la topographie et de la végétation, et non des précipitations.

Dispersion

Il est difficile de déterminer si les populations de Colombie-Britannique, de Nouvelle-Écosse et de diverses localités isolées des États-Unis, d’Europe et de Russie sont les vestiges d’une grande population à répartition continue, ou si chaque population est le fruit d’un événement de dispersion à longue distance. Bien que les thalles poussant dans chacun de ces sites isolés soient très petits, ils sont en santé et capables de se reproduire. Compte tenu de l’apparente préférence de l’espèce pour les forêts anciennes, la destruction et/ou la non-disponibilité de cet habitat sont préoccupantes. Or, la dispersion au moyen de spores sexuelles exige que chaque spore du champignon atterrissent près d’une algue compatible et sur un substrat convenable pour que la lichénisation ait lieu. Si le lichen produisait des propagules végétatives contenant les deux symbiotes (algue et champignon), ces propagules n’auraient qu’à atterrir sur un substrat convenable pour propager l’espèce, les deux symbiotes étant déjà réunis. L’absence de propagules végétatives et la production exclusive de spores sexuelles constituent donc un obstacle additionnel pour la survie de l’espèce.

Alimentation et relations interspécifiques

En tant que champignon lichénisé, le Sclerophora peronella satisfait ses besoins en carbone par l’établissement d’une symbiose avec une algue photosynthétique. Il tire son eau et ses éléments nutritifs de l’atmosphère. Comme il est très efficace à absorber ces substances présentes dans l’atmosphère (comme la plupart des lichens et des bryophytes), il risque également d’absorber tout polluant dissous dans l’humidité atmosphérique. D’après les observations de Selva sur le terrain et ses recherches documentaires, l’espèce ne semble pas affectée par des interactions avec d’autres organismes.

Adaptabilité

Même s’ils constituent probablement les indicateurs biologiques les plus sensibles de la santé des écosystèmes forestiers, les lichens et champignons calicioïdes, y compris le S. peronella, demeurent parmi les habitants les plus discrets et méconnus de la forêt. Les données disponibles sur l’habitat indiquent que l’espèce privilégie l’environnement stable des forêts bien établies et notamment des peuplements anciens. Comme les autres lichens calicioïdes, l’espèce ne semble pas tolérer les perturbations. De plus, compte tenu du petit nombre de spécimens récoltés à ce jour, sa répartition mondiale restreinte pourrait résulter du déclin des forêts anciennes à l’échelle de la planète.

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