Tortue molle à épines (Apalone spinifera) évaluation et mise à jour du rapport de situation du COSEPAC : chapitre 2

COSEPAC Résumé

Tortue-molle à épines
Apalone spinifera

Description

La tortue-molle à épines est une tortue d’eau douce de taille moyenne à grande. Chez les mâles, la dossière peut atteindre 21,6 cm de longueur, tandis qu’elle peut mesurer jusqu’à 54,0 cm chez les femelles, lesquelles sont en moyenne plus de 1,6 fois plus grosses que les mâles et peuvent peser jusqu’à 11,7 kg. De couleur variant de vert olive à brun pâle, la dossière non carénée, plate et ronde est recouverte d’une peau ressemblant à du cuir au lieu d’écailles et est garnie de projections épineuses peu apparentes sur son bord antérieur; sa surface est parfois légèrement rugueuse, un peu comme le papier sablé, en particulier chez les jeunes. Les mâles adultes conservent les ocelles, les taches et les lignes caractéristiques des jeunes, tandis que les femelles prennent une apparence tachetée ou marbrée dont le motif est légèrement perceptible dès l’éclosion.

Répartition

L’aire de répartition de l’Apalone spinifera spinifera s’étend de l’État de New York jusqu’au Wisconsin, le long de la rivière Tennessee et du fleuve Mississippi et, vers le nord, jusque dans le Sud de l’Ontario et du Québec. La région où cette espèce est la plus abondante et est répartie de façon continue comprend le réseau hydrographique du fleuve Mississippi et de la rivière Ohio et les Grands Lacs inférieurs.

Au Canada, l’A. s. spinifera était auparavant présent partout dans le bassin des Grands Lacs inférieurs et du Saint-Laurent depuis le secteur inférieur du lac Huron jusque dans le cours supérieur du Saint-Laurent, à l’exclusion de certains tributaires. Aujourd’hui, toutefois, il n’est présent qu’à certains endroits isolés répartis dans cette aire historique. La population canadienne peut être divisée en deux sous-populations. On retrouve la première dans la rivière des Outaouais, le fleuve Saint-Laurent et le réseau hydrographique de la rivière Richelieu et du lac Champlain, la majorité des individus se trouvant au lac Champlain. La deuxième sous-population, beaucoup plus abondante, occupe le lac Sainte-Claire, le lac Érié (avec certains de ses affluents importants, comme les rivières Thames et Sydenham) et l’ouest du lac Ontario, la majorité des individus se trouvant dans les rivières Thames et Sydenham ainsi qu’à deux endroits du lac Érié (Rondeau et Long Point).

Habitat

L’A. s. spinifera fréquente une grande variété de milieux aquatiques, notamment des rivières, des ruisseaux marécageux, des bayous, des bras morts, des lacs et des réservoirs de retenue. Ces habitats se caractérisent souvent par leur fond mou, une végétation aquatique clairsemée et la présence de barres de sable ou de vasières. Cinq composantes semblent essentielles : des aires de nidification sablonneuses ou graveleuses situées à proximité de l’eau et relativement exemptes de végétation, des aires sablonneuses ou vaseuses peu profondément immergées dans lesquelles les tortues peuvent s’enfouir, des fosses profondes pour l’hibernation, des aires d’exposition au soleil et des habitats propices aux écrevisses et autres proies de l’espèce.

Taille et tendances des populations

Selon les recherches effectuées depuis la publication en 1985 du premier rapport de situation, la sous-population du Sud-Ouest de l’Ontario compterait approximativement entre 800 et 1 000 individus. Dans le cas du Québec, on ne possède aucune estimation de la taille actuelle de la sous-population mais, si l’on se fie aux observations faisant état d’au plus 100 individus dénombrés au cours d’une même saison, les effectifs dépasseraient à peine la centaine. Il semble que les segments de la sous-population de l’Ontario ayant fait l’objet d’une observation continue au cours des cinq dernières années soient stables, mais il est difficile d’estimer la tendance globale pour l’ensemble du Canada. En effet, peu d’estimations historiques de la densité des populations ont été publiées, et les relevés et observations antérieurs à 1994 sont peu nombreux. On peut toutefois soupçonner que la population a fortement diminué lorsqu’on compare une observation faite en 1792 suivant laquelle des centaines de tortues à carapace molle de rivière ont été capturées sur des billots qui flottaient sur la Thames dans la région de Chatham, à la grande joie des personnes qui ont pu les déguster, à un relevé de 1997 faisant état de moins de 10 individus dans la même région.

Facteurs limitatifs et menaces

Alors que la perte d’habitat pourrait avoir été la principale cause du déclin historique de cette espèce, la dégradation de l’habitat constitue à l’heure actuelle le problème le plus préoccupant. Plusieurs des plus importants sites de nidification encore existants sont également des sites fort prisés pour les activités récréatives, lesquelles s’y intensifieraient. Comme cette espèce est facilement perturbée durant la nidification, il est probable qu’une intensification des activités récréatives à ces sites entraîne une baisse du succès de la nidification. La contamination de l’environnement est un autre facteur susceptible de nuire au succès de la nidification. Avec la découverte en Ontario d’un nombre élevé d’œufs inféconds à certains endroits, il s’est avéré nécessaire d’analyser les concentrations de contaminants dans les œufs. Des échantillons d’œufs prélevés de 1997 à 1999 sont actuellement analysés en vue de déterminer les concentrations de contaminants qu’ils renferment.

Protection actuelle

La tortue-molle à épines figure actuellement sur la liste des espèces menacées du COSEPAC. En Ontario, cette espèce est protégée en vertu de la Loi sur la protection du poisson et de la faune (1999), et son habitat fait également l’objet d’une certaine protection grâce aux politiques sur le patrimoine naturel d’une Déclaration de principes provinciale en vertu de la Loi sur l’aménagement du territoire de l’Ontario, laquelle protège des portions importantes de l’habitat de toutes les espèces menacées. Plusieurs sites de nidification de la tortue-molle à épines sont également protégés, à différents degrés, du fait qu’ils se trouvent sur des terres provinciales ou fédérales. Enfin, une nouvelle loi actuellement à l’étude au Québec interdira la capture, la garde en captivité, le transport et la vente de toute sous-espèce de l’Apalone spinifera.

Mandat du COSEPAC

Le Comité sur la situation des espèces en péril au Canada (COSEPAC) détermine le statut, au niveau national, des espèces, des sous-espèces, des variétés et des populations sauvages  canadiennes importantes qui sont considérées comme étant en péril au Canada. Les désignations peuvent être attribuées à toutes les espèces indigènes des groupes taxinomiques suivants : mammifères, oiseaux, reptiles, amphibiens, poissons, lépidoptères, mollusques, plantes vasculaires, mousses et lichens.

Composition du COSEPAC

Le COSEPAC est composé de membres de chacun des organismes fauniques des gouvernements provinciaux et territoriaux, de quatre organismes fédéraux (Service canadien de la faune, Agence Parcs Canada, ministère des Pêches et des Océans, et le Partenariat fédéral sur la biosystématique, présidé par le Musée canadien de la nature), de trois membres ne relevant pas de compétence, ainsi que des coprésident(e)s des sous-comités de spécialistes des espèces et des connaissances traditionnelles autochtones. Le Comité se réunit pour étudier les rapports de situation des espèces candidates.

Définitions

Espèce
Toute espèce, sous-espèce, variété ou population indigène de faune ou de flore sauvage géographiquement définie.

Espèce disparue (D)
Toute espèce qui n’existe plus.

Espèce disparue du Canada (DC)
Toute espèce qui n’est plus présente au Canada à l'état sauvage, mais qui est présente ailleurs.

Espèce en voie de disparition (VD) *
Toute espèce exposée à une disparition ou à une extinction imminente.

Espèce menacée (M)
Toute espèce susceptible de devenir en voie de disparition si les facteurs limitatifs auxquels elle est exposée ne sont pas renversés.

Espèce préoccupante (P)**
Toute espèce qui est préoccupante à cause de caractéristiques qui la rendent particulièrement sensible aux activités humaines ou à certains phénomènes naturels.

Espèce non en péril (NEP)***
Toute espèce qui, après évaluation, est jugée non en péril.

Données insuffisantes (DI)****
Toute espèce dont le statut ne peut être précisé à cause d’un manque de données scientifiques.

* Appelée « espèce en danger de disparition » jusqu’en 2000.
** Appelée « espèce rare » jusqu’en 1990, puis « espèce vulnérable » de 1990 à 1999.
*** Autrefois « aucune catégorie » ou « aucune désignation nécessaire ».
**** Catégorie « DSIDD » (données insuffisantes pour donner une désignation) jusqu’en 1994, puis « indéterminé » de 1994 à 1999.

Le Comité sur la situation des espèces en péril au Canada (COSEPAC) a été créé en 1977, à la suite d’une recommandation faite en 1976 lors de la Conférence fédérale-provinciale sur la faune. Le comité avait pour mandat de réunir les espèces sauvages en péril sur une seule liste nationale officielle, selon des critères scientifiques. En 1978, le COSEPAC (alors appelé CSEMDC) désignait ses premières espèces et produisait sa première liste des espèces en péril au Canada. Les espèces qui se voient attribuer une désignation lors des réunions du comité plénier sont ajoutées à la liste.

Le Service canadien de la faune d’Environnement Canada assure un appui administratif et financier complet au Secrétariat du COSEPAC.

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