Programme de rétablissement de la taupe de Townsend (Scapanus townsendii) au Canada - 2015 [Proposition]

Environnement Canada. 2015. Programme de rétablissement de la taupe de Townsend (Scapanus townsendii) au Canada [Proposition], Série de Programmes de rétablissement de la Loi sur les espèces en péril, Environnement Canada, Ottawa. 10 p. + annexe.

Pour télécharger le présent programme de rétablissement ou pour obtenir un complément d'information sur les espèces en péril, incluant les rapports de situation du COSEPAC, les descriptions de la résidence, les plans d'action et d'autres documents connexes sur le rétablissement, veuillez consulter le Registre public des espèces en péril.

Photographie de la couverture : Richard Forbes

Also available in English under the title:
“Recovery Strategy for the Townsend’s Mole (Scapanus townsendii) in Canada [Proposed]”

© Sa Majesté la Reine du chef du Canada, représentée par la ministre de l’Environnement, 2015. Tous droits réservés.
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Le contenu du présent document (à l'exception des illustrations) peut être utilisé sans permission, mais en prenant soin d'indiquer la source.

Les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux signataires de l’Accord pour la protection des espèces en péril (1996) ont convenu d’adopter des lois, des règlements, des programmes et des politiques complémentaires afin d’assurer la protection des espèces sauvages en péril partout au Canada.

Dans l’esprit de coopération de l’Accord, le gouvernement de la Colombie-Britannique a accordé au gouvernement du Canada la permission d’adopter le Plan de rétablissement de la taupe de Townsend (Scapanus townsendii) en Colombie-Britannique (partie 2 du présent document) en vertu de l’article 44 de la Loi sur les espèces en péril. Environnement Canada a ajouté une addition à ce programme de rétablissement, afin de satisfaire à toutes les exigences de la LEP.

Le programme de rétablissement fédéral visant la taupe de Townsend au Canada consiste en deux parties :

Partie 1 – Addition du gouvernement fédéral au Plan de rétablissement de la taupe de Townsend (Scapanus townsendii) en Colombie-Britannique, préparée par Environnement Canada.

Partie 2 - Plan de rétablissement de la taupe de Townsend (Scapanus townsendii) en Colombie-Britannique, préparé par le ministère de l’Environnement de la Colombie-Britannique.



En vertu de l'Accord pour la protection des espèces en péril (1996) , les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux signataires ont convenu d'établir une législation et des programmes complémentaires qui assureront la protection efficace des espèces en péril partout au Canada. En vertu de la Loi sur les espèces en péril (L.C. 2002, ch. 29) (LEP), les ministres fédéraux compétents sont responsables de l'élaboration des programmes de rétablissement pour les espèces inscrites comme étant disparues du pays, en voie de disparition ou menacées et sont tenus de rendre compte des progrès réalisés dans les cinq ans.

Le ministre de l’Environnement est le ministre compétent pour le rétablissement de la taupe de Townsend, et il a préparé la composante fédérale du présent programme de rétablissement (partie 1 du présent document) conformément à l’article 37 de la LEP. Le programme a été préparé en collaboration avec le gouvernement de la Colombie-Britannique. L’article 44 de la LEP autorise le Ministre à adopter un plan existant, dans son ensemble ou en partie, s’il estime que ce plan s’applique à l’égard d’une espèce sauvage et est conforme aux exigences des paragraphes 41(1) ou (2) de la LEP. Le gouvernement de la Colombie-Britannique a mené l’élaboration du plan de rétablissement de la taupe de Townsend (ci-joint; partie 2 du présent document), en collaboration avec Environnement Canada.

La réussite du rétablissement de l’espèce dépendra de l’engagement et de la collaboration d’un grand nombre de parties concernées qui participeront à la mise en œuvre des directives formulées dans le présent programme. Cette réussite ne pourra reposer seulement sur Environnement Canada, ou sur toute autre compétence. Tous les Canadiens et les Canadiennes sont invités à appuyer ce programme et à contribuer à sa mise en œuvre pour le bien de la taupe de Townsend et de l’ensemble de la société canadienne.

Le présent programme de rétablissement sera suivi d’un ou de plusieurs plans d’action qui présenteront de l’information sur les mesures de rétablissement qui doivent être prises par Environnement Canada et d’autres compétences et/ou organisations participant à la conservation de l’espèce. La mise en œuvre du présent programme est assujettie aux crédits, aux priorités et aux contraintes budgétaires des compétences et organisations participantes.

Les sections suivantes ont été ajoutées pour satisfaire aux exigences particulières de la LEP qui ne sont pas prises en compte dans le Plan de rétablissement de la taupe de Townsend (Scapanus townsendii) en Colombie-Britannique (partie 2 du présent document, désignée ci-après sous le nom de « plan de rétablissement provincial ») et pour fournir des renseignements à jour ou supplémentaires.

Aux termes de la LEP, il existe des exigences et des processus particuliers concernant la protection de l’habitat essentiel. Ainsi, les énoncés du plan de rétablissement provincial concernant la protection de l’habitat de survie et de rétablissement peuvent ne pas correspondre directement aux exigences fédérales et ne sont pas adoptés par Environnement Canada dans le cadre du programme de rétablissement fédéral.

À la suite de la publication du programme de rétablissement fédéral, on évaluera si des mesures ou des actions particulières entraîneront la protection de l’habitat essentiel en vertu de la LEP.

Environnement Canada accepte la description de l’habitat de survie et de rétablissement telle qu’elle figure dans le plan de rétablissement provincial, et l’utilise comme fondement de la désignation de l’habitat essentiel dans le programme de rétablissement fédéral. La présente section fournit des renseignements supplémentaires, et remplace donc la section 7.1 du plan de rétablissement provincial.

Aux termes de l’alinéa 41(1)c) de la LEP, les programmes de rétablissement doivent comprendre une désignation de l’habitat essentiel de l’espèce, dans la mesure du possible, et donner des exemples d’activités susceptibles d’en entraîner la destruction. Le plan de rétablissement provincial de 2014 visant la taupe de Townsend ne désigne pas d’habitat essentiel, mais présente cinq caractéristiques de l’habitat de survie de l’espèce. Le plan de rétablissement provincial recommande d’élaborer un modèle d’habitat pour délimiter et cartographier l’habitat de survie. Cette modélisation a été achevée dans le cadre de l’élaboration du présent programme de rétablissement fédéral, et les résultats sont présentés dans le présent document comme constituant la composante géographique de la désignation de l’habitat essentiel de la taupe de Townsend au Canada. Des limites plus précises pourraient être cartographiées et de l’habitat essentiel supplémentaire pourrait être désigné si les résultats de travaux de recherche en cours (travaux menés par la province et les groupes d’intendance et de rétablissement, projets universitaires, projets fédéraux connexes du Fonds interministériel pour le rétablissement, etc.) appuyaient l’inclusion d’autres zones d’habitat essentiel. Une importante considération dans la désignation de l’habitat essentiel est la quantité, la qualité et l’emplacement de l’habitat nécessaire pour atteindre les objectifs en matière de population et de répartition.

L’habitat essentiel est désigné comme étant la superficie occupée par les occurrences connues de la taupe de Townsend (incluant une marge d’erreur de localisation maximale de 100 m et un rayon de 800 m, correspondant au potentiel de dispersion des jeunes en surface (Giger, 1973) où les caractéristiques biophysiques nécessaires à l’espèce sont présentes. On estime que les zones établies renferment de l’habitat adéquat pour un ou plusieurs territoires abritant des taupes adultes et une quantité d’habitat suffisante pour permettre la dispersion des jeunes en surface depuis leur nid natal. À l’intérieur du rayon décrit (zone de fonctions essentiellesVoir note de bas de page 1 ), les caractéristiques biophysiques qui constituent l’habitat essentiel de la taupe de Townsend sont les suivantes :

  1. Des sols profonds de loam limoneux de texture moyenne, soit les sols de type Marble Hill et Ryder décrits et cartographiés par Luttermerding (1980). Il s’agit de sols bien drainés qui ne sont pas susceptibles d’être inondés et qui abritent une importante biomasse de vers de terre.
  2. Des terres agricoles non boisées ou des terrains gazonnés ou des pâturages peu perturbés.

Les zones géospatiales qui renferment de l’habitat essentiel ont été précisées de manière à exclure : 1) les parties de la zone de fonctions essentielles qui ne contiennent ni des sols de type Marble Hill ni des sols de type Ryder; 2) les parties de la zone de fonctions essentielles isolées de l’emplacement source de l’occurrence par d’importants obstacles à la dispersion (autoroutes, aménagements industriels, etc.), dans quel cas on peut supposer que l’espèce ne pourra vraisemblablement pas les franchir pour atteindre ces parties de zone. Les zones renfermant de l’habitat essentiel de la taupe de Townsend sont présentées à la figure 1; leur superficie totale est de 1 821,7 hectares. L’habitat essentiel de la taupe de Townsend au Canada se trouve à l’intérieur des polygones ombrés en jaune qui figurent sur chaque carte, là où les critères et la méthode de désignation de l’habitat essentiel énoncés dans la présente section sont respectés. Le quadrillage UTM de 1 km x 1 km montré dans ces figures est un système de quadrillage national de référence qui met en évidence l’emplacement géographique général renfermant de l’habitat essentiel, à des fins d’aménagement du territoire et/ou d’évaluation environnementale. Les méthodes et les processus décisionnels détaillés ayant mené à la désignation de l’habitat essentiel sont consignés dans un document à l’appui.

L’habitat essentiel désigné a été évalué par rapport à l’objectif de maintien de la connectivité avec les populations des États-Unis. Le plus grand polygone d’habitat essentiel est situé dans l’aire de répartition historique principale de la taupe de Townsend, à l’ouest de Huntingdon, où les emplacements historiques et actuels sont situés dans des sols convenables et où les zones de fonctions essentielles contiennent de grandes superficies de ces sols convenables. Les sols situés le long de la frontière internationale dans ce polygone d’habitat essentiel sont presque entièrement constitués de sols de type Marble Hill, ce qui assure la connectivité de l’habitat avec les territoires de l’espèce dans l’État voisin de Washington. Il importe de noter que la protection de l’habitat essentiel désigné dans les zones frontalières est d’importance capitale pour la survie et le rétablissement de cette espèce au Canada.

L’habitat essentiel désigné est suffisant pour atteindre les objectifs en matière de population et de répartition. Par conséquent, aucun calendrier des études n’est nécessaire.

Carte représentant l’habitat essentiel de la taupe de Townsend.
Longue description pour figure 1

Figure 1. L’habitat essentiel de la taupe de Townsend est représenté par les polygones ombrés en jaune d’une superficie de 1 821,7 ha, là où les critères et la méthode énoncés à la section 1.1 sont respectés. Le quadrillage UTM de 1 km x 1 km montré dans cette figure est un système de quadrillage national de référence qui indique l’emplacement géographique général renfermant de l’habitat essentiel au Canada; le territoire des États-Unis (ombré en gris) est exclu.

La compréhension de ce qui constitue la destruction de l’habitat essentiel est nécessaire à la protection et à la gestion de l’habitat essentiel. La destruction est déterminée au cas par cas. On peut parler de destruction lorsqu’il y a dégradation [d’un élément] de l’habitat essentiel, soit de façon permanente ou temporaire, à un point tel que l’habitat essentiel n’est plus en mesure d’assurer ses fonctions lorsque exigé par l’espèce. La destruction peut découler d’une activité unique à un moment donné ou des effets cumulés d’une ou de plusieurs activités au fil du temps. Le plan de rétablissement provincial fournit une description détaillée des facteurs limitatifs et des menaces potentielles qui concernent la taupe de Townsend. Le tableau 1 donne des exemples d’activités susceptibles d’entraîner la destruction de l'habitat essentiel de l'espèce; il peut toutefois exister d’autres activités destructrices.

Tableau 1. Exemples d’activités susceptibles d’entraîner la destruction de l’habitat essentiel de la taupe de Townsend. Les numéros de menaces de l’UICN sont fondés sur le système unifié de classification des menaces proposé par l’IUCN–CMP (Partenariat pour les mesures de conservation de l’Union internationale pour la conservation de la nature; CMP, 2010).
Description de l’activité Description de l’effet Renseignements supplémentaires
Aménagement et conversion des terres agricoles à des fins résidentielles, commerciales ou industrielles. Perte de sols et de pâturages convenables nécessaires pour les territoires des adultes et la dispersion des jeunes.. Correspond aux catégories de menaces de l’UICN 1.1 et 1.2; doit avoir lieu à l’intérieur des limites de l’habitat essentiel pour entraîner une destruction; perte directe; effets potentiellement cumulatifs
Culture ou travail du sol dans les pâturages à des fins de production agricole. Perte de sols et de pâturages convenables nécessaires pour les territoires des adultes et la dispersion des jeunes; destruction des galeries et des nids. Correspond aux catégories de menaces de l’UICN 2.1 et 7.3; doit avoir lieu à l’intérieur des limites de l’habitat essentiel pour entraîner une destruction; perte directe; effets potentiellement cumulatifs.
Construction de serres à grande échelle sur les terres agricoles. Perte d’habitat convenable au creusage et à l’aménagement de galeries et de nids. Correspond à la catégorie de menaces de l’UICN 2.1; doit avoir lieu à l’intérieur des limites de l’habitat essentiel pour entraîner une destruction; perte directe; effets potentiellement cumulatifs.
Construction de nouvelles gravières. Élimination de l’horizon superficiel, essentiel pour le creusage et l’aménagement des galeries et des nids; perte directe d’habitat essentiel. Correspond à la catégorie de menaces de l’UICN 3.2; doit avoir lieu à l’intérieur des limites de l’habitat essentiel pour entraîner une destruction; perte directe; effets potentiellement cumulatifs
Construction de routes et d’autoroutes. Fragmentation de l’habitat et création d’obstacles à la dispersion (c.-à-d. au creusage et à l’aménagement de galeries), de telle manière que les populations se trouvent isolées. Correspond à la catégorie de menaces de l’UICN 4.1; doit avoir lieu à l’intérieur des limites de l’habitat essentiel pour entraîner une destruction; perte directe; effets potentiellement cumulatifs.
Utilisation de pesticides ou d’herbicides. Contamination des sols par les pesticides et les herbicides provoquent la mort de vers de terre (entraînant une réduction des populations de vers de terre), qui sont la principale source d’alimentation de la taupe de Townsend. Correspond à la catégorie de menaces de l’UICN 9.3; peut avoir lieu à l’intérieur ou à l’extérieur des limites de l’habitat essentiel pour entraîner une destruction (par l’application locale ou par la dérive des pesticides/herbicides); perte directe; effets potentiellement cumulatifs.
Longue description pour le tableau 1 - Partie 2

Les activités qui peuvent détruire de l’habitat essentiel de la taupe de Townsend sont liées à l’aménagement des terres et aux pratiques agricoles. La conversion des terres agricoles à des fins résidentielles, commerciales et industrielles a été définie comme une menace imminente majeure dans le plan de rétablissement provincial. Un seul grand projet d’aménagement dans l’aire de répartition principale de l’espèce pourrait détruire une partie considérable de l’habitat essentiel désigné pour la taupe de Townsend. Parmi les pratiques agricoles susceptibles de détruire de l’habitat essentiel de l’espèce, la mise en culture ou le travail du sol dans les pâturages constitue la principale menace pour l’habitat essentiel, ainsi que pour les galeries et les nids existants. Il s’agit d’une menace actuelle, surtout à cause de la tendance à convertir les pâturages utilisés pour la production fourragère et l’élevage laitier en culture de petits fruits. Des activités semblables pratiquées à l’extérieur des limites de l’habitat essentiel désigné (par exemple, dans l’habitat de connexion adjacent aux États-Unis) peuvent avoir un impact sur la survie et le rétablissement de la taupe de Townsend au Canada et sur la capacité de l’habitat essentiel désigné à soutenir l’espèce. De même, les activités destructrices qui ont lieu dans les environs de la frontière canadienne et qui entraînent la fragmentation de zones continues d’habitat connectif entre les populations canadiennes et américaines auraient des conséquences particulièrement négatives.

Un ou plusieurs plans d’action seront publiés dans le Registre public des espèces en péril d’ici 2019.

Une évaluation environnementale stratégique (EES) est effectuée pour tous les documents de planification du rétablissement en vertu de la LEP, conformément à La directive du Cabinet sur l’évaluation environnementale des projets de politiques, de plans et de programmes. L’objet de l’EES est d’incorporer les considérations environnementales à l’élaboration des projets de politiques, de plans et de programmes publics pour appuyer une prise de décisions éclairée du point de vue du l'environnement et d’évaluer si les résultats d’un document de planification de rétablissement peuvent affecter un élément de l’environnement ou tout objectif ou cible de la Stratégie fédérale de développement durable (SFDD).

La planification du rétablissement vise à favoriser les espèces en péril et la biodiversité en général. Il est cependant reconnu que des programmes peuvent, par inadvertance, produire des effets environnementaux qui dépassent les avantages prévus. Le processus de planification fondé sur des lignes directrices nationales tient directement compte de tous les effets environnementaux, notamment des incidences possibles sur des espèces ou des habitats non ciblés. Les résultats de l’EES sont directement inclus dans le programme luimême, mais également résumés dans le présent énoncé, cidessous.

Le plan de rétablissement provincial visant la taupe de Townsend renferme une section décrivant les effets des activités de rétablissement sur les espèces non ciblées (section 9). Environnement Canada adopte cette section du plan de rétablissement provincial à titre d’énoncé sur les effets des activités de rétablissement sur l’environnement et les espèces non ciblées.



Scapanus townsendii
BC fip

Ces programmes sont rédigés à titre de documents consultatifs pour le gouvernement de la Colombie-Britannique et décrivent l’approche générale à adopter pour le rétablissement des espèces en péril. La Province prépare de tels plans ou programmes afin de coordonner les mesures de conservation et de respecter ses engagements en matière de rétablissement des espèces en péril aux termes de l’Accord pancanadien pour la protection des espèces en péril et de l’Accord sur les espèces en péril conclu entre le Canada et la Colombie-Britannique.

Le rétablissement d’une espèce en péril est le processus selon lequel le déclin d’une espèce en voie de disparition, menacée ou disparue du territoire est freiné ou renversé, et les menaces sont éliminées ou atténuées afin d’améliorer les chances de persistance de l’espèce à l’état sauvage.

Les documents entourant le rétablissement doivent résumer les meilleures données scientifiques et connaissances traditionnelles existant sur une espèce ou un écosystème pour être en mesure d’identifier les buts, les objectifs et les méthodes de rétablissement qui assurent une orientation coordonnée du rétablissement. Ces documents décrivent ce qu’on sait et ce qu’on ignore à propos d’une espèce ou d’un écosystème; ils établissent les menaces pour l’espèce ou l’écosystème et expliquent ce qui devrait être fait pour atténuer ces menaces. Ils fournissent en outre de l’information sur l’habitat nécessaire à la survie et au rétablissement de l’espèce. Cette information peut être résumée dans une stratégie de rétablissement suivie par un ou plusieurs plans d’action. Les plans d’action visent à offrir de l’information détaillée additionnelle pour orienter la mise en œuvre du rétablissement d’une espèce ou d’un écosystème. Lorsque des renseignements suffisants permettant d’orienter la mise en œuvre pour l’espèce peuvent être intégrés dès le départ, tous les renseignements sont présentés ensemble dans un plan de rétablissement.

Les renseignements fournis dans les documents provinciaux relatifs au rétablissement pourraient être choisis par Environnement Canada pour être inclus dans les documents fédéraux sur le rétablissement que les organismes fédéraux préparent pour répondre à leurs engagements à l’égard du rétablissement des espèces en péril aux termes de la Loi sur les espèces en péril.

La province de la Colombie-Britannique accepte l’information contenue dans ces documents en tant qu’avis pour étayer la mise en œuvre des mesures de rétablissement, y compris les décisions concernant les mesures à prendre pour protéger l’habitat de l’espèce.

Le succès du rétablissement d’une espèce dépend de l’engagement et de la coopération des nombreuses parties qui seront appelées à participer à sa mise en œuvre. Tous les habitants de la Colombie-Britannique sont invités à participer à ces activités.

Pour en apprendre davantage sur le rétablissement des espèces en péril en Colombie-Britannique, veuillez consulter la page Web du ministère de l’Environnement portant sur la planification du rétablissement à l’adresse suivante (en anglais seulement) : http://www.env.gov.bc.ca/wld/recoveryplans/rcvry1.htm

B.C. Ministry of Environment. 2014. Recovery plan for the Townsend’s Mole (Scapanus townsendii) in British Columbia. Prepared for the B.C. Ministry of Environment, Victoria, BC. 23 pp.

Richard Forbes

On peut télécharger la version anglaise du présent document à partir de la page Web du ministère de l’Environnement de la Colombie-Britannique portant sur la planification du rétablissement, à l’adresse :

http://www.env.gov.bc.ca/wld/recoveryplans/rcvry1.htm

ISBN 978-0-7726-6810-3

Le présent plan de rétablissement a été préparé par le ministère de l’Environnement de la Colombie-Britannique. Il vise à conseiller les compétences responsables et les organisations susceptibles de participer au rétablissement de l’espèce. Le ministère de l’Environnement de la Colombie-Britannique a reçu ces recommandations dans le cadre des engagements pris aux termes de l’Accord pancanadien pour la protection des espèces en péril et de l’Accord sur les espèces en péril conclu entre le Canada et la Colombie-Britannique.

Le présent document énonce les stratégies de rétablissement jugées nécessaires, d’après les meilleures connaissances scientifiques et traditionnelles disponibles, pour rétablir les populations de taupes de Townsend en Colombie-Britannique. Les mesures de rétablissement à adopter pour atteindre les buts et les objectifs exposés dans le plan sont soumises aux priorités et aux contraintes budgétaires des organismes participants. Les buts, objectifs et méthodes de rétablissement pourraient être modifiés compte tenu de nouvelles connaissances ou en fonction de nouvelles orientations.

Les compétences responsables ont eu l’occasion d’examiner le présent document. Cependant, ce document ne représente pas nécessairement la position officielle de ces organismes, ni l’opinion personnelle de tous les membres de l’équipe de rétablissement.

Le succès du rétablissement de cette espèce dépend de l’engagement et de la coopération des nombreuses parties qui pourraient être appelées à participer à la mise en œuvre. Le ministère de l’Environnement de la Colombie-Britannique encourage tous les habitants de la province à participer au rétablissement de la taupe de Townsend.

  • Figure 1. Taupe de Townsend. (Photo reproduite avec l’autorisation de Richard Forbes)
  • Figure 2. Répartition de la taupe de Townsend en Amérique du Nord (COSEWIC, 2003)
  • Figure 3. Occurrences de la taupe de Townsend en Colombie-Britannique (2010)

Dave Nagorsen (Mammalia Biological Consulting) a mis à jour le présent plan de gestion grâce au financement du Service canadien de la faune d’Environnement Canada. La version antérieure du plan (2005) a été financée par l’Habitat Conservation Trust Fund, par l’intermédiaire de l’Abbotsford Land Trust. La version précédente a été dirigée et appuyée par l’ancienne équipe de rétablissement de la taupe de Townsend (Caroline Astley, Langley Environmental Partners Society; Lisa Fox, Abbotsford Land Trust Society; Sylvia Letay, ministère des Forêts du Territoire et des Opération des Ressources naturelles de la Colombie-Britannique; Dave Nagorsen; Valentin Schaefer, consultant; et Département des études environnementales, Université de Victoria [University of Victoria]; Tim Sheehan, consultant) et par l’ancien ministère de la Protection de l’eau, des terres et de l’air de la Colombie-Britannique. Ian McTaggart-Cowan (professeur à la retraite de l’Université de Colombie-Britannique [UBC], aujourd’hui décédé) a fourni de l’information historique sur la taupe de Townsend dans le site de l’ancienne ferme Racey, à Huntingdon, en Colombie-Britannique. Le Musée canadien de la nature a fourni des copies des notes de terrain prises par Hamilton Mack Laing lors de son relevé de 1927 portant sur les mammifères de Huntingdon. Susan Jessop (BC Conservation Foundation) a préparé la carte de la figure 3. Joe Materi (Ursus Environmental), Chris Lee (AquaTerra Environmental Ltd.) et Ken Summers (KS Biological Services) ont fourni des observations et indiqué des emplacements d’excavations de taupes de Townsend.

La taupe de Townsend (Scapanus townsendii) a été désignée « espèce en voie de disparition » par le Comité sur la situation des espèces en péril au Canada (COSEPAC). Il n’existe qu’environ 450 individus matures dans une seule population de la Colombie-Britannique ayant une aire de répartition de 13 km2, adjacente à une petite zone d’habitat occupée aux États-Unis. La population est menacée par le piégeage effectué par les entreprises de lutte contre les espèces nuisibles et par les propriétaires fonciers. L’habitat continue de se dégrader en raison de la fragmentation et de l’urbanisation. Aucun relevé n’a été réalisé depuis le rapport de situation du COSEPAC de 2003; on ignore donc si l’effectif de la population a également connu un déclin depuis ce temps. On ignore si l’immigration d’individus depuis les États-Unis pourrait aider à rétablir la population de Colombie-Britannique. La taupe de Townsend est inscrite comme espèce en voie de disparition au Canada à l’annexe 1 de la Loi sur les espèces en péril (LEP). En Colombie-Britannique, le Conservation Data Centre lui attribue la cote S1 (gravement en péril), et l’espèce figure sur la Liste rouge provinciale. Le cadre de conservation de la Colombie-Britannique (B.C. Conservation Framework) classe la taupe de Townsend comme une priorité 1 sous le but 3 (maintenir la diversité des espèces et des écosystèmes indigènes). La Wildlife Act de la Colombie-Britannique protège l’espèce en interdisant de la capturer et de la tuer.Le rétablissement de la taupe de Townsend est considéré comme étant réalisable sur le plan technique et biologique.

Les buts du rétablissement (population et répartition) sont les suivants : 1) maintenir l’abondance de la taupe de Townsend à toutes les occurrences existantes connues, et dans tout nouvel emplacement à l’intérieur de son aire de répartition en Colombie-Britannique, 2) empêcher l’isolement de la population de la Colombie-Britannique en maintenant la connectivité avec les populations sources des États-Unis.

Les objectifs du rétablissement sont les suivants :

  1. Protéger la taupe de Townsend de la persécution directe en Colombie-Britnannique.

  2. Prévenir la perteVoir note de bas de page 2 d’habitat de la taupe de Townsend en Colombie-Britannique.

  3. Déterminer et maintenir la connectivité entre les habitats et les populations d’un côté à l’autre de la frontière entre le Canada et les États-Unis.

  4. Combler les lacunes dans les connaissances concernant la compétition interspécifique entre la taupe du Pacifique et la taupe de Townsend et les effets, sur la taupe de Townsend, de la densité réduite de vers de terre attribuable au labourage et à l’utilisation de pesticides.

Le rétablissement de la taupe de Townsend en Colombie-Britannique est jugé biologiquement et techniquement réalisable selon les quatre critères suivants énoncés par le gouvernement du Canada (2009).

  1. Des individus de l’espèce sauvage qui peuvent se reproduire sont présents maintenant ou le seront dans un avenir prévisible pour maintenir la population ou augmenter son effectif.

    • Oui. En Colombie-Britannique, il n’existe qu’une seule population de taupes de Townsend dont l’effectif a été estimé en 2003 à 420 à 490 individus matures capables de se reproduire. La durée d’une génération d’un an devrait produire un groupe d’animaux adéquat pour maintenir ou accroître l’effectif de la population. Bien qu’elle soit probablement limitée, une immigration de source externe pourrait être possible dans une certaine mesure depuis des populations vivant dans le comté de Whatcom, qui borde la frontière, dans l’État de Washington.

  2. Un habitat convenable suffisant est disponible pour soutenir l’espèce, ou pourrait être rendu disponible par des activités de gestion ou de remise en état de l’habitat.

    • Oui, un habitat approprié suffisant est actuellement disponible pour l’espèce. La superficie de l’aire de répartition en Colombie-Britannique est d’environ 20 km2, et la zone d’occupation est d’environ 13 km2. La majeure partie de l’habitat occupé est constitué de terres agricoles situées à l’intérieur de la réserve de terres agricoles (RTA), et est à l’abri du développement résidentiel ou industriel, dans l’immédiat

  3. Les principales menaces pesant sur l’espèce ou son habitat (y compris les menaces à l’extérieur du Canada) peuvent être évitées ou atténuées.

    • Oui. Les principales menaces qui pèsent sur l’espèce comprennent l’abattage direct par les propriétaires de terres et par les entreprises de lutte antiparasitaire, et les pratiques agricoles qui nuisent aux conditions du sol ou détruisent les galeries et les nids occupés. Ces menaces peuvent être atténuées à l’aide de programmes de sensibilisation afin d’encourager l’intendance des terres privées. La menace potentielle que représente le rezonage des terres de la RTA afin de permettre l’aménagement résidentiel ou commercial pourrait être atténuée à l’aide d’un programme de sensibilisation s’adressant aux politiciens de la région et ainsi qu’à la population.

  4. Des techniques de rétablissement existent pour atteindre les objectifs en matière de population et de répartition, ou leur élaboration peut être prévue dans un délai raisonnable.

    • Oui. Des programmes de suivi et d’intendance, de même que des études de translocation pourraient être élaborés et mis en œuvre à partir des connaissances actuelles.

Taupe de TownsendNote de bas de pagea

La plus grosse taupe d’Amérique du Nord, la taupe de Townsend possède un museau long, presque glabre, et des yeux minuscules. Ses oreilles ne sont pas visibles et sa queue est courte et presque glabre (figure 1). Ses pattes de devant sont larges (les paumes sont plus larges que longues) et en forme de pelle, avec de longues griffes plates; ses pattes postérieures ne sont pas larges et sont dotées de griffes courtes et faibles. Le poil de son pelage est court, doux et soyeux, et sa coloration va de brun noirâtre à gris, et semble plus pâle en été. La longueur totale des adultes avec la queue est d’environ 205 mm. Les mâles adultes pèsent en moyenne 138 g; les femelles adultes pèsent en moyenne environ 114 g.

La taupe de Townsend est restreinte à la région de Huntingdon, dans le sud-ouest de la Colombie-Britannique. Deux autres espèces de taupes sont présentes dans cette région : la taupe naine (Neurotrichus gibbsii) et la taupe du Pacifique (Scapanus orarius). La taupe naine se distingue facilement de la taupe de Townsend, car elle ressemble à une musaraigne. Sa queue est longue et comporte des écailles. Les paumes de ses pattes de devant sont plus longues que larges, et elle est beaucoup plus petite (longueur totale moyenne de 112 mm, poids moyen de 11 g). La taupe du Pacifique est similaire à la taupe de Townsend dans son apparence physique, mais les adultes peuvent être différenciés à leur plus petite taille (longueur totale < 175 mm, longueur de la queue < 24 mm, poids < 90 g). Bien qu’elles soient encore immatures, les taupes de Townsend, au moment de leur dispersion, à 30 jours, se trouvent dans la fourchette de tailles des taupes du Pacifique adultes, les taupes de Townsend peuvent être différenciées à leurs grosses pattes de devant et à leurs griffes. Les clés d’identification des trois taupes présentes en Colombie-Britannique sont illustrées dans Nagorsen (1996, 2002).

Contrairement à la taupe de Townsend et à la taupe du Pacifique, la taupe naine ne construit pas de taupinières. Les taupinières et les galeries de la taupe du Pacifique et de la taupe de Townsend sont également différentes. D’après Sheehan et Galindo-Leal (1997), les taupinières de plus de 15 cm de hauteur et de 40 cm de largeur, et présentant des galeries peu profondes de diamètre de plus de 4,5 cm appartiennent habituellement à des taupes de Townsend.

(Photo reproduite avec l’autorisation de Richard Forbes)
Photographie rapprochée d’une taupe de Townsend.
Longue description pour figure 1

Photographie rapprochée d’une taupe de Townsend.

La taupe de Townsend habite des zones de la côte pacifique aux États-Unis (nord de la Californie, Oregon, État de Washington) et au Canada, uniquement dans le sud-ouest de la Colombie-Britannique (figure 2). En Colombie-Britannique, où l’espèce se trouve à la limite septentrionale de son aire de répartition, la taupe de Townsend est répartie de façon très limitée et est confinée à une zone localisée autour de Huntingdon et d’Abbotsford, adjacente à la frontière internationale, et est de toute évidence absente des autres terres agricoles se trouvant au nord et au sud du fleuve Fraser (figure 3). La superficie de la zone d’occurrence en Colombie-Britannique est d’environ 20 km2, et celle de la zone d’occupation n’est que de 13 km2 (COSEWIC, 2003). La plupart des occurrences connues se trouvent au sud de l’autoroute 1 depuis la route Short vers l’est jusqu’à la route Sumas et à Huntingdon (figure 3). La première observation connue de taupe de Townsend au nord de l’autoroute 1 a été faite en 1986 alors que deux taupes ont été piégées dans le terrain de golf Ledgeview (Sheehan et Galindo-Leal, 1996a). Il existe aujourd’hui plusieurs mentions dans cette région. Ces observations pourraient représenter une population récente ou possiblement signifier que des relevés antérieurs, comme celui de Glendenning (1959), avaient simplement omis les recherches dans cette zone. Il est également possible que les taupes mentionnées aient été des taupes de passage. Néanmoins, l’emplacement d’origine le plus près dans la population de Huntingdon se trouve à environ 3 km, soit bien au-delà de la distance de dispersion de la taupe de Townsend, et est séparé par une autoroute majeure et des ensembles résidentiels. On ne sait rien au sujet de l’aire de répartition historique d’origine de l’espèce (c.-à-d. avant la première mention, en 1927), et il n’existe pas de données sur les changements à long terme en matière de répartition en Colombie-Britannique. L’aire de répartition de l’espèce en Colombie-Britannique représente moins de 5 % de son aire de répartition mondiale.

Figure 2. Répartition de la taupe de Townsend en Amérique du Nord (COSEWIC, 2003).
La figure 2 est une carte de la répartition de l’espèce en Amérique du Nord.
Longue description pour figure 2

La figure 2 est une carte de la répartition de l’espèce en Amérique du Nord; on la trouve principalement sur la côte nord ouest des États Unis, de la Californie au sud de la Colombie-Britannique.

Figure 3. Occurrences de la taupe de Townsend en Colombie-Britannique (2010).
La figure 3 est une carte des occurrences de l’espèce au Canada, à Abbotsford (Colombie-Britannique).
Longue description pour figure 3

La figure 3 est une carte des occurrences de l’espèce au Canada, à Abbotsford (Colombie-Britannique).

Avec le déboisement, au milieu des années 1800 (Boyle et coll.,1997) et l’introduction de vers de terre (Schaefer, 1978; Nagorsen, 1996), il est possible que cette taupe n’ait étendu que récemment son aire de répartition en Colombie-Britannique. Toutefois, l’information historique sur les mammifères dans la vallée du bas Fraser est limitée. La seule étude publiée sur la situation des petits mammifères de la région dans une période historique ancienne est l’étude réalisée par Allan Brooks (Brooks, 1902), un artiste naturaliste de renom qui a prélevé une quantité importante de petits mammifères dans la région de Chilliwack à la fin des années 1880 (Laing, 1979). Brooks (1902) a mentionné que la taupe de Townsend était commune dans des parties de la vallée non touchées par les crues du Fraser. Comme aucune mention n’a été faite de la taupe du Pacifique, plus commune, il est probable que Brooks (1902) ait mal identifié ses spécimens de taupes et qu’il ait en fait prélevé des taupes du Pacifique. Une série de spécimens de musée prélevés à la fin des années 1890 par Brooks à « Sumas » (probablement dans la prairie Sumas) sont aujourd’hui identifiés comme étant des taupes du Pacifique.

La première preuve documentée de la présence de la taupe de Townsend en Colombie-Britannique était constituée de cinq spécimens de musée (déposés au Musée canadien de la nature, à Ottawa) prélevés en 1927 par Hamilton Mack Laing (Laing, 1927) sur la ferme Racey, à l’ouest de la route Sumas, à Huntingdon. À ce jour, la taupe de Townsend occupe cette propriété. Ken Racey a ensuite prélevé 12 taupes de Townsend (déposées au Musée royal de l’Ontario et au Beaty Biodiversity Museum de l’Université de Colombie-Britannique [University of British Columbia]) autour de Huntingdon au cours des années 1930 et 1940. D’après Ian McTaggart-Cowan (comm. pers., 2005), même dans les années 1930 et 1940 la taupe de Townsend dans la région de Huntingdon n’était commune dans aucune aire de répartition localisée. Dans son étude majeure de la taupe du Pacifique en Colombie-Britannique, Glendenning (1959) a décrit l’aire de répartition canadienne de la taupe de Townsend comme ayant une superficie de 13 km2 à Sumas, près de la frontière entre le Canada et les États-Unis, une aire de répartition qui correspond de près à l’aire de répartition actuelle. Cowan et Guiguet (1965) ont décrit une aire de répartition similaire pour cette taupe. Sheehan et Galindo-Leal (1996b), qui ont recensé divers emplacements à Agassiz, Aldergrove, Abbotsford, Chilliwack et Mission n’ont trouvé aucune taupe de Townsend à l’extérieur de la région de Huntingdon-Abbotsford.

La possible immigration de source externe de taupes de Townsend depuis la région de Sumas, dans l’État de Washington, constitue un important facteur à prendre en considération en ce qui concerne la conservation de la taupe de Townsend en Colombie-Britannique (et au Canada). D’après le COSEPAC (2003), on trouve dans cette région un habitat convenable dans les basses terres associées au ruisseau Johnson et aux rivières Sumas et Nooksack, dans l’État de Washington. Toutefois, Sheehan et Galindo-Leal (1996b), qui ont recensé 50 sites présentant des taupinières dans le comté de Whatcom, près de la frontière internationale, n’ont trouvé des taupes de Townsend que dans un site. Ce site se trouvait près de la frontière, environ 2 km à l’ouest de Sumas. Par contre, la taupe du Pacifique était présente dans plusieurs sites du comté de Whatcom. En mai 2002, les relevés n’ont pas permis d’observer des taupinières de taupes de Townsend à Sumas, mais trois territoires ont été trouvés le long de l’autoroute 546, environ 3 km au sud de Huntingdon, en Colombie-Britannique (COSEPAC, 2003). Vu les déplacements limités de la taupe de Townsend, ces données laissent croire que la population de la Colombie-Britannique pourrait être isolée, et que le potentiel d’immigration de source externe depuis des populations voisines des États-Unis est limité (bien qu’il soit inconnu).

Dans l’État de l’Oregon, les estimations concernant la densité de la population vont de 0,42 à 12,4 taupes par hectare, selon le milieu (Kuhn et coll., 1966; Giger, 1973). Sheehan et Galindo-Leal (1996b) ont estimé la densité des populations à 5,2 et 3,2 taupes de Townsend par hectare dans deux terrains à proximité de Huntingdon, en Colombie-Britannique. En utilisant une densité conservatrice de 0,5 taupe par hectare, Sheehan et Galindo-Leal (1996a) ont estimé que la population canadienne totale comptait moins de 700 individus. Le nombre total estimatif d’individus matures (c.-à-d. capables de se reproduire) présents en Colombie-Britannique est de 420 à 490 (COSEWIC, 2003). On ne sait rien sur les tendances de la population en Colombie-Britannique.

La taupe de Townsend est un mammifère fouisseur spécialisé qui passe la majeure partie de sa vie sous la terre dans des galeries et des terriers. La forme de son corps (p. ex. pattes larges, absence d’oreilles externes, yeux minuscules) est hautement adaptée pour vivre sous la terre. Elle se nourrit principalement de vers de terre qu’elle capture dans les galeries. Sur le plan social, les taupes de Townsend adultes semblent être solitaires et hautement territoriales, bien qu’il existe un certain chevauchement dans leurs réseaux de galeries.

Habitat

Aux États-Unis, l’espèce occupe des milieux naturels tels que des prairies, des plaines d’inondation, des prairies humides de basses terres, et des taillis d’arbustes (Carraway et coll., 1993; Verts et Carraway, 1998). Toutefois, les pâturages agricoles et les terrains herbeux constituent probablement les milieux idéaux. Pedersen (1963) a observé que le déboisement des forêts et l’assèchement des milieux humides à des fins agricoles, en Oregon, au cours d’une période historique relativement récente pourraient avoir accru la quantité d’habitat de prédilection de la taupe de Townsend. De manière générale, la taupe de Townsend est absente des milieux forestiers, mais, dans l’État de Washington, une sous-espèce isolée de taupe de Townsend vivant dans les monts Olympiques occupe des prairies subalpines (Johnson et Yates, 1980). Dalquest (1948) a mentionné que l’espèce était commune dans les forêts de sapins, mais qu’elle était absente des forêts de feuillus dans l’État de Washington.

En Colombie-Britannique, la taupe de Townsend occupe les terres agricoles, les parterres gazonnés et les terrains de golf de la vallée du Fraser (Nagorsen, 1996; COSEWIC, 2003). Sheehan et Galindo-Leal (1996a, 1996b) ont observé que toutes les captures en Colombie-Britannique étaient associées aux sols de loam limoneux de Lynden ou d’Alderwood; ils n’ont observé aucune taupe de Townsend dans les sols de type loam limono-graveleux de Lynden ou argileux de Munroe. Les sols de loam limoneux de Lynden et d’Alderwood sont équivalents aux sols de Marble Hill et de Ryder décrits par Luttermerding (1980). Ils n’ont trouvé aucune occurrence dans les sites de basse altitude sujets aux inondations ou dont la nappe phréatique était élevée. Sheehan et Galindo-Leal (1996a) ont également noté que la plupart des sites où des taupes de Townsend ont été observées étaient des pâturages au couvert herbacé. Toutefois, sur le terrain de golf Ledgeview, où les taupes ont été piégées pendant 10 ans, les taupes de Townsend ont apparemment envahi de nouveau les terrains gazonnés des milieux de bordure composés de buissons denses dominés par des aulnes, d’après Sheehan et Galindo-Leal (1996b).

Il est important de noter que ces milieux anthropiques ont été créés après l’établissement des Européens dans le bassin du Fraser de la moitié à la fin des années 1800 (Boyle et coll., 1997), avec le déboisement forestier et l’introduction de vers de terre.

Galeries et nids

La taupe de Townsend construit plusieurs types de galeries (Pedersen, 1963; Kuhn et coll.,1966). Les galeries de surface peu profondes (de 5 à 15 cm sous la surface) sont utilisées pour trouver de la nourriture, et probablement des partenaires pendant la saison de reproduction. Les galeries plus profondes, habituellement de 10 à 20 cm sous la surface, mais allant parfois jusqu’à 1 à 3 m de profondeur, pourraient être construits sous des routes, des édifices et des clôtures. La terre issue de l’excavation est déposée en monticules coniques au-dessus de ces réseaux. Pendant la saison de reproduction, les femelles construisent des nids sphériques dans des cavités souterraines, dans lesquels elles donnent naissance et élèvent leurs petits (Pedersen, 1966; Kuhn et coll.,1966). Les chambres de nidification se trouvent de 15 à 20 cm sous la surface du sol et mesurent en moyenne 23 cm de diamètre, et 15 cm de profondeur. La terre issue de l’excavation de ces chambres est habituellement déposée à la surface pour former un gros monticule de 70 à 130 cm de diamètre, et de 30 à 45 cm de hauteur. Certains nids ne sont utilisés qu’une seule année, d’autres peuvent être réutilisés pendant plusieurs saisons de reproduction. Jusqu’à ce qu’elles donnent naissance, les femelles abandonnent volontiers leur nid si ce dernier est perturbé (Pedersen, 1966).

Déplacements

Les captures de taupes de Townsend marquées (Giger, 1973) donnent à penser que les déplacements souterrains des adultes dont les réseaux de terriers sont établis sont limités, les distances entre les sites de capture allant de 3 à 116 m, et la distance moyenne entre les captures étant d’environ 40 m. Des déplacements sur de longues distances (de plus de 100 m) pourraient être entrepris durant les mois secs d’été dans les milieux de piètre condition où les vers de terre sont rares. Les jeunes taupes de Townsend de l’année se dispersent à la surface du sol depuis leur nid natal. Les distances de dispersion sont généralement courtes (165 m) et les déplacements sur de longues distances peuvent atteindre 800 m (Giger, 1973). Des taupes de Townsend déplacées artificiellement sont retournées avec succès à leur emplacement d’origine à des distances allant jusqu’à 450 m (Giger, 1973).

Régime alimentaire

L’espèce se nourrit principalement de vers de terre. Plusieurs études portant sur les populations de l’État de l’Oregon (Wight, 1928; Pedersen, 1963; Whitaker et coll.,1979) ont révélé que de 70 % à 90 % des proies sont des vers de terre, d’après l’examen des contenus stomacaux. De petites quantités d’autres invertébrés (p. ex. centipèdes, millipèdes, escargots, limaces, insectes) et quelques petits mammifères (musaraignes ou souris) ont aussi été identifiés. L’espèce se nourrit également de végétaux (p. ex. bulbes, racines, herbes, carottes, panais, avoine, fèves).

Reproduction

En Oregon, la saison de reproduction commence au début de l’hiver (Moore, 1939; Pedersen, 1963; Verts et Carraway, 1998). Des mâles aux testicules hypertrophiés ont été observés dès le début du mois de novembre. À la mi-mars, les mâles ne sont plus en état de se reproduire. Des femelles pleines ont d’abord été observées à la mi-mars; aucune femelle pleine n’a été observée après la mi-avril. Les taupes de Townsend femelles ne produisent qu’une seule portée par année, et la portée comprend de un à quatre petits (le plus souvent trois). La période de gestation n’a pas été déterminée pour cette espèce, mais on suppose qu’elle est de quatre à six semaines. Les taupes de Townsend nouvellement nées sont glabres, et ne possèdent ni dents ni yeux distincts; le poids des nouveau-nés est d’environ 5 g (Kuhn et coll., 1966). Au bout d’un mois de sevrage, à environ 30 jours, les petits commencent à quitter le nid de la mère et à se disperser. En Oregon, la dispersion des petits a lieu en mai et en juin. Les taupes de Townsend se reproduisent le premier hiver suivant leur naissance.

Les données concernant la reproduction en Colombie-Britannique sont anecdotiques et portent sur quelques spécimens de musée. D’après Nagorsen (1996), un mâle présentant des testicules hypertrophiés a été prélevé le 24 mars, et une femelle avec un fœtus à environ 20 % de son développement a été capturée le 27 avril. Ces données laissent croire que la saison de reproduction en Colombie-Britannique pourrait avoir lieu près d’un mois plus tard qu’en Oregon, les petits se dispersant depuis leur nid natal quelque part en juillet.

Vu sa dépendance aux vers de terre et ses exigences d’excavation, la taupe de Townsend est très limitée par certains types de sols. Comme la majeure partie de ses activités ont lieu sous la terre et que la forme de son corps limite sa capacité de se déplacer à la surface, la taupe de Townsend possède des capacités de dispersion très limitées et est très vulnérable à la fragmentation de l’habitat. Comme elle ne produit qu’une seule portée par année et que la reproduction n’a lieu que l’hiver suivant la naissance, la taupe de Townsend présente un faible potentiel de reproduction par rapport à la plupart des petits mammifères.

Les menaces découlent des activités ou des processus immédiats qui ont entraîné, entraînent ou pourraient entraîner la destruction, la dégradation et/ou la détérioration de l’entité évaluée (population, espèce, communauté ou écosystème) dans la zone d’intérêt (mondiale, nationale ou infranationale) (Salafsky et coll., 2008). Aux fins d’évaluation des menaces, seules les menaces actuelles et futures sont prises en considération Voir note de bas de page 3 . Les menaces présentées ici ne comprennent ni les caractéristiques biologiques de l’espèce ou de la population (p. ex. la dépression de consanguinité, la petite taille de la population, l’isolement génétique) ni la probabilité de régénération ou de recolonisation des écosystèmes, qui sont considérées comme des facteurs limitatifs.Voir note de bas de page 4

La plupart des menaces sont liées aux activités humaines, mais peuvent aussi être d’origine naturelle. L’incidence des activités humaines peut être directe (p. ex. la destruction de l’habitat) ou indirecte (p. ex. l’introduction d’espèces envahissantes). Les effets des phénomènes naturels (p. ex. les incendies, les ouragans, les inondations) peuvent être particulièrement importants lorsque l’espèce ou l’écosystème est concentré en un lieu et que les occurrences sont peu nombreuses, parfois à cause des activités humaines (Master et coll.2009). En conséquence, la définition d’une menace comprend les phénomènes naturels, mais il faut l’appliquer avec prudence. Les événements stochastiques doivent seulement être considérés comme une menace si une espèce ou un habitat est atteint par d’autres menaces, a perdu sa résilience et, par conséquent, est devenu vulnérable à la perturbation (Salafsky et coll., 2008). L’incidence d’un tel événement sur la population ou l’écosystème doit être beaucoup plus grande que l’incidence qu’il aurait eue dans le passé.

La classification des menaces présentée ci-dessous est fondée sur le système unifié de classification des menaces de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN; acronyme anglais : IUCN) et du Partenariat pour les mesures de conservation (Conservation Measures Partnership, ou CMP) et elle est compatible avec les méthodes utilisées par le Conservation Data Centre de la Colombie-Britannique et le cadre de conservation de la province. Pour une description détaillée du système de classification des menaces, consulter le site Web du Partenariat pour les mesures de conservation (CMP, 2010; en anglais seulement). Les menaces peuvent être observées, inférées ou prévues à court terme. Dans le présent plan, les menaces sont caractérisées en fonction de leur portée, de leur gravité et de leur immédiateté. L’« impact » de la menace est calculé selon la portée et la gravité. Pour de plus amples informations sur les modalités d’assignation des valeurs, voir Master et coll. (2009) et les notes de bas de tableau. Les menaces qui pèsent sur la taupe de Townsend ont été évaluées pour l’ensemble de la province (tableau 1).

Tableau 1. Tableau de classification des menaces pour la taupe de Townsend.
Menace Description de la menace Impact Voir note de bas de page a Portée Voir note de bas de page b Gravité Voir note de bas de page c Immédiateté Voir note de bas de page d

Note de bas de page

Note de bas de page a

Impact – Mesure dans laquelle on observe, infère ou soupçonne que l’espèce est directement ou indirectement menacée dans la zone d’intérêt. Le calcul de l’impact de chaque menace est fondé sur sa gravité et sa portée et prend uniquement en compte les menaces présentes et futures. L’impact d’une menace est établi en fonction de la réduction de la population de l’espèce, ou de la diminution ou de la dégradation de la superficie d’un écosystème. Le taux médian de réduction de la population ou de la superficie pour chaque combinaison de portée et de gravité correspond aux catégories d’impact suivantes : très élevé (déclin de 75 %), élevé (40 %), moyen (15 %) et faible (3 %). Inconnu : catégorie utilisée quand l’impact ne peut être déterminé (p. ex. lorsque les valeurs de la portée ou de la gravité sont inconnues); non calculé : l’impact n’est pas calculé lorsque la menace se situe en dehors de la période d’évaluation (p. ex. l’immédiateté est insignifiante/négligeable ou faible puisque la menace n’existait que dans le passé); négligeable : lorsque la valeur de la portée ou de la gravité est négligeable; n’est pas une menace : lorsque la valeur de la gravité est neutre ou qu’il y a un avantage possible.

Note de bas de page b

Portée – Proportion de l’espèce qui, selon toute vraisemblance, devrait être touchée par la menace d’ici 10 ans. Correspond habituellement à la proportion de la population de l’espèce dans la zone d’intérêt (généralisée = 71-100 %; grande = 31-70 %; restreinte = 11-30 %; petite = 1-10 %; négligeable = &lt; 1 %).

Note de bas de page c

Gravité – Compte tenu de la portée, niveau de dommage que causera vraisemblablement la menace sur l’espèce d’ici une période de dix ans ou de trois générations (extrême = 71-100 %; élevée = 31 70 %; modérée = 11-30 %; légère = 1-10 %; négligeable = &lt; 1 %; neutre ou avantage possible = > 0 %).

Note de bas de page d

Immédiateté – Élevée = menace toujours présente; modérée = menace pouvant se manifester uniquement dans le futur (à court terme [&lt; 10 ans ou 3 générations]) ou pour l’instant absente (mais susceptible de se manifester de nouveau à court terme); faible = menace pouvant se manifester uniquement dans le futur (à long terme) ou pour l’instant absente (mais susceptible de se manifester de nouveau à long terme); négligeable = menace qui s’est manifestée dans le passé et qui est peu susceptible de se manifester de nouveau, ou menace qui n’aurait aucun effet direct mais qui pourrait être limitative.

1 Développement résidentiel et commercial Moyen Restreinte Élevée Modérée
1.1 Zones résidentielles et urbaines Moyen Restreinte Élevée Modérée
1.2 Zones commerciales et industrielles Faible Petite Élevée Modérée
1.3 Zones touristiques et récréatives Non calculé Non calculée Non calculée Faible
2 Agriculture et aquaculture Élevé-moyen Généralisée Élevée-modérée Élevée
2.1 Cultures annuelles et pérennes de produits autres que le bois Élevé-moyen Généralisée Élevée-modérée Élevée
2.3 Élevage de bétail Faible Petite Légère Élevée
3 Production d’énergie et exploitation minière Faible Petite Extrême Élevée
3.2 Exploitation de mines et de carrières Faible Petite Extrême Élevée
4 Corridors de transport et de service Faible Restreinte Légère Élevée
4.1 Routes et voies ferrées Faible Restreinte Légère Élevée
5 Utilisation des ressources biologiques Élevé-moyen Généralisée Élevée-modérée Élevée
5.1 Chasse et capture d’animaux terrestres Élevé-moyen Généralisée Élevée-modérée Élevée
7 Modifications des systèmes naturels Inconnu Inconnue Inconnue Élevée
7.3 Autres modifications de l’écosystème Inconnu Inconnue Inconnue Élevée
8 Espèces et gènes envahissants ou autrement problématiques Faible Généralisée Légère Élevée
8.1 Espèces exotiques (non indigènes) envahissantes Faible Généralisée Légère Élevée
8.2 Espèces indigènes problématiques Inconnu Généralisée Inconnue Élevée

De manière générale, l’impact des menaces pesant sur l’espèce à l’échelle de la province est très élevé à élevé.Voir note de bas de page 5 Les principales menaces comprennent l’agriculture, l’utilisation des ressources biologiques et le développement résidentiel (tableau 1). L’information détaillée est exposée ci dessous, par catégorie de menace de niveau 1.

Menace 1 (IUCN-CMP). Développement résidentiel et commercial
1.1 Zones résidentielles et urbaines
1.2 Zones commerciales et industrielles
1.3 Zones touristiques et récréatives
2.1 Cultures annuelles et pérennes de produits autres que le bois
2.3 Élevage de bétail
3.2 Exploitation de mines et de carrières
4.1 Routes et voies ferrées
5.1 Chasse et capture d’animaux terrestres
7.3 Autres modifications de l’écosystème
8.1 Espèces exotiques (non indigènes)
8.2 Espèces indigènes problématiques

Les buts du rétablissement (population et répartition) sont les suivants : 1) maintenir l’abondance de la taupe de Townsend à toutes les occurrences existantes connues, et dans tout nouvel emplacement à l’intérieur de son aire de répartition en Colombie-Britannique, 2) empêcher l’isolement de la population de la Colombie-Britannique en maintenant la connectivité avec les populations sources des États-Unis.

Rien ne laisse croire que la taupe de Townsend a déjà été plus abondante ou répandue en Colombie-Britannique. En effet, les données disponibles indiquent que cette espèce pourrait n’avoir colonisé la Colombie-Britannique/le Canada que depuis les années 1800, avec l’aménagement de terres agricoles et l’introduction de vers de terre. Par conséquent, il ne serait pas approprié d’établir des cibles démographiques pour accroître l’effectif d’une population qui pourrait avoir colonisé un territoire en raison de modifications humaines du paysage.

L’habitat de la taupe de Townsend continue de se dégrader en raison de sa fragmentation et de l’urbanisation (COSEWIC, 2003); il sera donc important d’empêcher la perte d’habitat dans le cadre du but visant le maintien des occurrences connues. Comme aucun relevé ciblant précisément la taupe de Townsend n’a été réalisé depuis le rapport de situation (COSEWIC, 2003), on ignore si l’effectif de la population a également connu un déclin depuis ce temps. Sans preuve indiquant que la population est en déclin, le maintien de la population actuelle et la prévention de son déclin en luttant contre les menaces sont un but approprié.

De plus, vu la petite taille de la population et de l’aire de répartition de l’espèce, il n’est pas probable que le statut de la taupe de Townsend soit un jour rétrogradé à celui d’« espèce menacée », car cela exigerait une hausse substantielle de son abondance (> 2 500 individus matures). Une telle augmentation exigerait une importante immigration de source externe depuis des populations des États-Unis. On ignore si une immigration de source externe a lieu; au mieux, elle est très limitée. Il n’existe pas de grandes étendues d’habitat convenable inoccupé par la taupe de Townsend en Colombie-Britannique qui pourraient permettre à l’espèce d’étendre son aire de répartition. Toutefois, le maintien de la connectivité de l’habitat avec les zones adjacentes de l’État de Washington pour encourager les déplacements d’un côté à l’autre de la frontière pourrait se révéler important pour maintenir la population de la Colombie-Britannique; il est donc inclus dans le but.

Les objectifs immédiats du rétablissement devraient mettre l’accent sur la prévention de la perte d’habitat et du déclin démographique à l’intérieur de la petite aire de répartition connue de l’espèce en Colombie-Britannique.

  1. Protéger la taupe de Townsend de la persécution directe en Colombie-Britannique.
  2. Prévenir la perteVoir note de bas de page 8 d’habitat de la taupe de Townsend en Colombie-Britannique.
  3. Déterminer et maintenir la connectivité entre les habitats et les populations d’un côté à l’autre de la frontière entre le Canada et les États-Unis.
  4. Combler les lacunes dans les connaissances concernant la compétition interspécifique entre la taupe du Pacifique et la taupe de Townsend et les effets, sur la taupe de Townsend, de la densité réduite de vers de terre attribuable au labourage et à l’utilisation de pesticides.

Les mesures suivantes ont été classées d’après les groupes de mesures du cadre de conservation de la Colombie-Britannique (B.C. Ministry of Environment, 2010). Leur état d’avancement pour l’espèce est indiqué entre parenthèses.

Table 2. Tableau de planification du rétablissement de la taupe de Townsend.
Objectif Groupe de mesures du cadre de conservation Mesures pour atteindre les objectifs Mesure du rendement Menace Voir note a ou préoccupation abordée Priorité Voir note b

Notes du tableau 2

Note a

Les numéros des menaces sont ceux des catégories de l’UICN-CMP (voir le tableau 1).

Note b

Essentielle = urgente et importante; la mesure doit être prise immédiatement; nécessaire = importante, mais non urgente; la mesure peut être prise dans les 2 à 5 prochaines années; bénéfique = la mesure est bénéfique et pourrait être prise quand cela sera possible.

1 Gestion de l’espèce et de la population

Élaborer un programme de sensibilisation visant les entreprises de lutte antiparasitaire qui piègent les taupes, de même que les propriétaires fonciers dans l’aire de répartition connue de la taupe de Townsend :

  • Communiquer avec les entreprises
  • Évaluer les pratiques existantes
  • Sensibiliser, et élaborer et mettre en œuvre des mesures visant à éviter la mortalité des taupes de Townsend
Les entreprises de lutte antiparasitaire connaissent la taupe de Townsend et prennent les mesures nécessaires pour réduire leur taux de mortalité d’ici 2016 5,1, 7,3 Essentielle
1, 2 Protection de l’habitat;
intendance des terres;
gestion de l’espèce et de la population

Élaborer un programme de sensibilisation visant tous les propriétaires fonciers/agriculteurs dont les terres comprennent un territoire occupé par la taupe de Townsend :

  • Élaborer une stratégie de communication afin d’entrer en contact avec les propriétaires fonciers/agriculteurs (p. ex. documents de vulgarisation, traduction, interprètes pour communiquer l’information, etc.) incluant un dialogue avec les associations de producteurs agricoles appropriées
  • Communiquer avec les propriétaires fonciers/gestionnaires des terres
  • Recenser les propriétés afin de déterminer l’emplacement des territoires activement utilisés par la taupe de Townsend
  • Évaluer les pratiques d’utilisation du territoire sur chaque propriété fréquentée par des taupes de Townsend
  • Prioriser les sites en fonction des risques pour la taupe de Townsend
  • Élaborer des pratiques de gestion exemplaires (PGE) propres au site qui ne comprennent pas le piégeage ou l’empoisonnement des taupes de Townsend

Tous les propriétaires de terres/agriculteurs sont contactés d’ici 2015

Sites connus répertoriés d’ici 2016

PGE mises en œuvre d’ici 2017

1.1, 1.2, 2.1, 2.3, 3.2, 5.1, 7.3, 8.1 Essentielle
2 Protection de l’habitat En mettant l’accent sur l’intendance, mettre en place des mécanismes de protection de l’habitat au besoin. Envisager l’utilisation de programmes incitatifs. Mécanismes de protection de l’habitat mis en place d’ici 2017 1.1, 1.2, 2.1, 2.3, 3.2, 4.1 Nécessaire
3 Protection de l’habitat; restauration de l’habitat

Préciser la répartition de la taupe de Townsend et l’habitat potentiel à proximité et au sud de la frontière canadienne :

  • Élabrer un modèle d’habitat pour la taupe de Townsend utilisant les caractéristiques du sol, les utilisations des terres agricoles ainsi que d’autres facteurs visant à déterminer l’habitat potentiel, en particulier dans l’État de Washington, près de la frontière.
  • À l’aide du modèle d’habitat, répertorier les taupes dans le comté de Whatcom, dans l’État de Washington, afin de recenser les milieux potentiellement fréquentés par l’espèce à proximité des la frontière internationale.

Modèle d’habitat élaboré d’ici 2016

Recensement des taupes près de la frontière internationale terminé d’ici 2017

Degré de connectivité entre les habitats et les populations d’un côté à l’autre de la frontière entre le Canada et les États-Unis déterminé d’ici 2018

Lacunes dans les connaissances Nécessaire
4 Gestion de l’espèce et de la population Élaborer un programme de suivi de la population visant à recenser les territoires connus occupés par la taupe de Townsend et par la taupe du Pacifique à l’intérieur de l’aire de répartition connue de la taupe de Townsend en Colombie-Britannique. Programme de suivi mis en place d’ici 2014. Lacunes dans les connaissances Nécessaire
4 Gestion de l’espèce et de la population Encourager un programme de recherche qui s’intéressera à la compétition interspécifique entre la taupe du Pacifique et la taupe de Townsend. Étude sur la compétition avec la taupe du Pacifique commencée d’ici 2015 Lacune dans les connaissances; 8.2 Nécessaire
4 Gestion de l’espèce et de la population Encourager un programme de recherche qui s’intéressera aux effets indirects de la densité réduite des vers de terre attribuable à l’utilisation de pesticides et d’herbicides et au travail du sol et au labourage sur l’effectif de la population de taupes de Townsend. Recherche sur les effets de l’utilisation de pesticides/herbicides commencée dès que possible Lacune dans les connaissances; 7.3 Bénéfique

En Colombie-Britannique, la majeure partie de l’aire de répartition de l’espèce se trouve sur des terres privées (figure 3). À l’intérieur de son aire de répartition connue, il n’existe que quelques petites parcelles de terres de la Couronne fédérale ou provinciale et de terres municipales. En 2009, des monticules appartenant à des taupes de Townsend ont été trouvés sur le site de la sous-station de recherches de Clearbrook d’Agriculture et Agroalimentaire Canada, sur le chemin Clearbrook, une parcelle de 7,5 ha de terres fédérales. L’établissement correctionnel de Matsqui (figure 3), qui comprend environ 115 ha de terres fédérales, se trouve juste à l’extérieur de l’aire de répartition connue de l’espèce. Tim Sheehan (comm. pers., 2005) n’a observé que des taupes du Pacifique sur cette propriété en 1996, mais cette dernière pourrait présenter un habitat convenable pour la taupe de Townsend. Comme la plupart des occurrences se trouvent sur des propriétés privées de grande valeur, il sera difficile d’acquérir des terres pour en faire des aires protégées. De plus, la taupe de Townsend est considérée comme une espèce nuisible ou parasite par la plupart des gens. Les activités de conservation et de rétablissement devront s’appuyer sur l’intendance et sur l’appui de la population. Il s’agit d’une approche réaliste, car l’aire de répartition de l’espèce est si petite (~ 20 km2) que cela devrait être réalisable. L’élaboration d’un plan de communication établissant un dialogue passant par les associations de producteurs de la RTA permettra d’entrer en contact et d’interagir avec les propriétaires fonciers dont une partie des terrains est occupée par des taupes de Townsend.

6.3.1 Protection de l’habitat et intendance des terres privées

Un inventaire à jour est nécessaire pour déterminer la répartition et l’emplacement actuels de tous les territoires actifs de l’espèce en Colombie-Britannique. Touts les sites connus abritant des taupes de Townsend dont il est question dans le rapport de situation du COSEPAC (2003) et dans Sheehan et Galindo-Leal (1996b), de même que les nouveaux territoires découverts de 2007 à 2010 dans le cadre d’évaluations environnementales et une occurrence rapportée dans une zone résidentielle, en 2010, devraient être réévalués (S. Letay, comm. pers., 2014). Cet inventaire devrait recenser tous les territoires actifs de la taupe de Townsend, de même que les propriétaires terriens ou fonciers dont les terrains abritent des taupes de Townsend. L’identification des habitats potentiels est une stratégie à plus long terme. Un modèle d’habitat fondé sur toutes les occurrences existantes connues devrait être élaboré pour déterminer les habitats potentiels et pour évaluer la fragmentation de l’habitat et les besoins en matière de protection. Le recensement des habitats potentiels dans l’État de Washington visant à déterminer s’il existe des territoires inconnus abritant l’espèce ainsi que des zones d’habitat potentiellement inoccupées près de la frontière canadienne aiderait à déterminer s’il existe une connectivité possible avec les populations de l’État de Washington.

À l’aide des résultats de l’inventaire, toutes les propriétés en Colombie-Britannique abritant des taupes de Townsend devraient être évaluées afin d’en établir l’utilisation actuelle des terres. Cette étude permettra de mieux classifier les menaces observées pour chaque occurrence de taupe de Townsend. Elle aidera à identifier les fermes menant des activités posant de hauts risques et à établir des priorités en matière de programmes de sensibilisation à l’intention des agriculteurs ou des propriétaires de terres.

Le groupe le plus important à rejoindre est celui des propriétaires de terres (agriculteurs/propriétaires fonciers dans l’aire de répartition près de Huntingdon) dont on sait que les terrains abritent des taupes Townsend. Comme la taupe de Townsend est considérée comme étant une espèce nuisible, les interactions avec les propriétaires de terres demanderont de la sensibilité, et devront mettre l’accent sur la coopération et promouvoir des mesures volontaires d’intendance des terres. Le programme de sensibilisation devrait se concentrer sur le fait d’amener les propriétaires de terres à prendre conscience de l’existence d’une espèce en voie de disparition sur leur terrain et encourager des pratiques de gestion exemplaires. Compte tenu de l’objectif à long terme visant à accroître la connectivité avec les populations de taupes de Townsend de l’État de Washington, on recommande que le programme de sensibilisation/d’éducation du public s’étende aux propriétaires de terres du comté de Whatcom, dans l’État de Washington, près de la frontière canadienne, dont on sait que les terrains abritent des taupes de Townsend.

Les autres groupes qui doivent être rejoints par les programmes de sensibilisation sont les entreprises de lutte antiparasitaire participant à l’éradication des taupes, la population générale de la région d’Abbotsford (y compris les dirigeants municipaux) et les propriétaires/gestionnaires de terrains de golf. À l’heure actuelle, la taupe de Townsend est essentiellement inconnue de la majeure partie de la population générale. Avec son habitat vulnérable aux décisions relatives à l’utilisation des terres ayant des incidences sur les terres agricoles (aménagement urbain ou commercial, carrières de gravier, terrains de golf), il est essentiel qu’un programme de sensibilisation soit élaboré pour améliorer la situation de ce petit mammifère. Comme la présence de la taupe de Townsend n’est connue que dans un seul terrain de golf à l’intérieur de son aire de répartition connue, des efforts ciblés pourraient être déployés pour promouvoir la sensibilisation sur la situation de l’espèce à cet égard.

6.3.2 Gestion de l’espèce et de la population

On devrait encourager un projet de recherche visant à évaluer la compétition interspécifique avec la taupe du Pacifique là où les deux espèces sont présentes. La recherche devrait évaluer l'utilisation de microhabitats par les deux espèces, y compris la possible exclusion par compétition de la taupe de Townsend par la taupe du Pacifique, de même que les effets des activités de rétablissement sur la compétition entre les deux espèces.

Les menaces pesant sur l’habitat de la taupe de Townsend ont été recensées. Pour atteindre les buts du rétablissement (population et répartition) pour cette espèce, on recommande que des caractéristiques précises de l’habitat soient déterminées pour la taupe de Townsend. De plus, on recommande que les emplacements de l’habitat de survie/de rétablissement soient décrits dans le paysage pour atténuer les menaces pesant sur l’habitat et pour faciliter la prise de mesures visant à atteindre les buts du rétablissement (population et répartition).

L’habitat utilisé par l’espèce est bien documenté. D’après les descriptions de Glendenning (1959), de Sheehan et Galindo-Leal (1996a, 1996b), du COSEPAC (2003) et d’observations récentes tirées d’évaluations environnementales, les caractéristiques biophysiques de l’habitat de survie de la taupe de Townsend en Colombie-Britannique sont les suivantes :

  1. Sols profonds de loam limoneux à texture moyenne (c.-à-d. sols de Marble Hill et de Ryder décrits et cartographiés par Luttermerding [1980]). Ces sols bien drainés ne sont pas sujets aux inondations et abritent une importante biomasse de vers de terre.
  2. Terres agricoles non boisées, terrains gazonnés ou pâturages peu perturbés.

L’habitat de survie/de rétablissement est décrit comme étant la zone occupée par les occurrences connues de la taupe de Townsend (avec une marge d’erreur de 100 m), plus un rayon de 800 m (c.-à-d. la distance potentielle de dispersion des jeunes taupes à la surface; Giger, 1973), où des caractéristiques biophysiques sont présentes pour soutenir l’espèce. On estime que les zones établies renferment de l’habitat adéquat pour soutenir un ou plusieurs territoires abritant des taupes adultes et une quantité d’habitat suffisante pour la dispersion des jeunes à la surface du sol depuis leur nid natal. À l’intérieur du rayon décrit, seuls les emplacements situés dans des types de sols convenables (p. ex. sols de type Marble Hill ou Ryder) ou présentant des sols convenables accessibles par dispersion sont désignés comme habitat de survie/de rétablissement. Les obstacles majeurs à la dispersion (autoroutes, zones industrielles et résidentielles) sont exclus.

Les indicateurs de rendement permettront d’évaluer les progrès accomplis vers l’atteinte des buts et des objectifs de rétablissement (population et répartition). Ces indicateurs sont présentés au tableau 2 dans la colonne portant sur les mesures recommandées.

Le mammifère le plus susceptible d’être touché par les activités de rétablissement est la taupe du Pacifique. Les effets des activités de rétablissement sur la taupe du Pacifique sont inconnus. Toutefois, le fait d’atténuer la dégradation de l’habitat et de réduire le taux de mortalité direct des taupes de Townsend pourrait entraîner une hausse de l’abondance des populations de taupes du Pacifique. Si cette espèce est avantagée par rapport à la taupe de Townsend, la hausse de sa densité démographique pourrait favoriser le déplacement de la taupe de Townsend. D’autres études sur les relations de compétition interspécifique entre la taupe du Pacifique et la taupe de Townsend sont nécessaires pour déterminer les effets qui y sont liés.

L’aire de répartition de plusieurs autres espèces en péril chevauche celle de la taupe de Townsend. L’aire de répartition de l’Effraie des clochers (Tyto alba) – population de l’Ouest chevauche l’aire de répartition de la taupe de Townsend, et cette espèce dépend du même habitat de terrains agricoles et de prairies dont la taupe de Townsend a besoin pour sa survie. La musaraigne de Bendire (Sorex bendirii), l’escargot forestier de Townsend (Allogona townsendiana) et le céphalantère d’Austin (Cephalanthera austiniae) sont également présents à l’intérieur de l’aire de répartition de la taupe de Townsend en Colombie-Britannique. Les activités de planification du rétablissement de la taupe de Townsend seront mises en œuvre en prenant en considération toutes les autres espèces en péril associées, de manière à ne causer aucun effet négatif sur ces espèces ou leur habitat.

M. Ian McTaggart-Cowan, à la retraite (aujourd’hui décédé)
Dave Nagorsen, Mammalia Biological Consulting
Tim Sheehan, consultant et ancien membre de l’équipe de rétablissement

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