Tête carmin (Notropis percobromus) programme de rétablissement : chapitre 1

Résumé

En 2001, le COSEPAC a évalué la situation de l’espèce qu’il considérait alors comme des têtes roses (Notropis rubellus) et a désigné la population vivant au Manitoba comme étant menacée, en raison de son isolement par rapport aux autres populations de l’espèce, de son aire de répartition restreinte et de sa vulnérabilité aux changements de température et de qualité de l’eau. Une nouvelle évaluation de l’espèce a révélé que les poissons trouvés au Manitoba sont des têtes carmin (N. percobromus), une espèce qui a été recensée nulle part ailleurs au Canada. On estime toujours que cette population est disjointe des populations de têtes carmin de nord-ouest du Minnesota, mais son aire de répartition connue s’est élargie pour englober, outre le bassin hydrographique de la rivière Whitemouth, la rivière Bird et le chenal Pinawa du bassin de la rivière Winnipeg. En 2006, le COSEPAC a réévalué la situation de la tête carmin et confirmé que l’espèce était menacée, d’après un rapport de situation mis à jour (COSEPAC, 2006).

La tête carmin est un méné au corps mince et allongé. Ce consommateur omnivore du fond de l’eau et des couches intermédiaires fraye au début de l’été. En été, les populations de têtes carmin qui vivent au Manitoba se rencontrent à mi-profondeur, dans des ruisseaux et de petites rivières au débit rapide. Elles affectionnent surtout les eaux limpides de couleur brune, généralement à l’intérieur ou à proximité de seuils, et préfèrent les substrats propres constitués de gravier ou de moellons. Autrement, on connaît peu leur biologie, leur cycle biologique, leur répartition et ou leur abondance. L’information disponible sur la physiologie de l’espèce ou sa capacité d’adaptation à différentes conditions est insuffisante pour cerner les facteurs qui pourraient en limiter le rétablissement.

En 2003, la population de têtes carmin du Manitoba a été légalement désignée comme étant menacée en vertu de la Loi sur les espèces en péril(LEP). La LEP confère une protection à la population du Manitoba en interdisant de tuer un individu de l’espèce, de lui nuire, de le harceler ou de le capturer ou, encore, d’avoir en sa possession, de collectionner ou d’échanger des ménés appartenant à cette espèce. En outre, les interdictions générales de la Loi sur les pêches, y compris les dispositions relatives à l’habitat, continuent de s’appliquer à l’espèce. L’espèce n’a aucune valeur économique directe et revêt une importance limitée comme poisson proie. Malgré tout, elle est importante sur le plan biologique et présente un intérêt scientifique.

Plusieurs facteurs menacent la tête carmin, à savoir la surexploitation, l’introduction d’espèces, la perte ou la dégradation de l’habitat ainsi que la pollution. La surexploitation ne constitue probablement pas une menace importante, parce que les pêcheurs de poissons-appâts ne s’intéressent pas à cette espèce et que la pêche aux poissons-appâts se pratique rarement dans les eaux fréquentées par la tête carmin. Si ces pêches devenaient préoccupantes dans l’avenir, leurs répercussions pourraient être atténuées par la réglementation et l’éducation. L’introduction d’espèces représente une menace d’une importance qui est vraisemblablement modérée dans la rivière Whitemouth et qui demeure inconnue ailleurs. Les possibilités d’atténuation de la menace que représente l’introduction d’espèces sont faibles. Une perte et/ou une dégradation de l’habitat résultant de la régulation du débit, de l’aménagement des berges, de la modification du paysage et du changement climatique peuvent survenir dans certains tronçons des rivières que fréquente la tête carmin, ce qui représente sans doute une menace importante pour l’espèce à certains endroits. Les possibilités d’atténuation de la menace que représente la perte ou la dégradation de l’habitat varient selon la source de la menace et le cours d’eau affecté. La pollution, qu’elle provienne de sources ponctuelles ou diffuses, est une menace pour la tête carmin dont l’importance reste à vérifier. Parmi les polluants qui pourraient nuire à l’espèce, il faut citer les engrais agricoles, les herbicides et les pesticides. Les possibilités d’atténuation de la menace que représente la pollution vont de modérées à élevées, tout comme les possibilités de rétablissement de l’espèce lorsqu’elle a été exposée à cette menace, sauf dans les cas où le transport de substances sur de longues distances est la principale source de pollution, vu l’ubiquité de ces substances. Un échantillonnage scientifique peut aussi nuire à la tête carmin, mais cette menace est vraisemblablement de faible importance et peut être facilement atténuée.

Il n’y a aucune preuve voulant que la population de Manitoba ait diminué au fil du temps mais, comme son aire de répartition et son abondance sont apparemment restreintes, l’espèce pourrait être sensible à de futures perturbations anthropiques. En conséquence, le programme de rétablissement se concentre sur le maintien ou la conservation des populations actuelles et de leurs habitats. Le but du programme de rétablissement est le suivant : maintenir des populations durables de têtes carmin en réduisant ou en éliminant les menaces potentielles pour l’espèce et son habitat.

Le programme de rétablissement global a quatre objectifs principaux :

  1. maintenir la répartition et l’abondance actuelles des populations de têtes carmin;
  2. confirmer l’identité des têtes carmin au Canada;
  3. augmenter la connaissance de la biologie, du cycle biologique, des exigences en matière d’habitat, de la répartition et de l’abondance de l’espèce;
  4. identifier les menaces potentielles pesant sur l’espèce que représentent les activités humaines et les processus écologiques, puis élaborer des plans pour éviter, éliminer ou atténuer ces menaces.

On propose trois approches générales pour favoriser l’atteinte du but et des objectifs de rétablissement :

  1. recherche et surveillance,
  2. gestion et mesures réglementaires;
  3. éducation et vulgarisation. Pour chacune de ces approches, un certain nombre de stratégies différentes sont décrites dans le programme de rétablissement.

Il nous est impossible de délimiter l’habitat essentiel de la tête carmin pour le moment. Un calendrier d’études préalables est donc présenté. Les études génétiques (ADNmt) et morphologiques en cours devraient confirmer l’identité des têtes carmin du Manitoba et contribuer à l’élaboration de clés d’identification. Un plan d’action sur cet aspect du programme de rétablissement sera proposé d’ici deux ans.

L’incidence du programme de rétablissement sur des espèces non ciblées devrait être positive, en particulier dans le bassin de la rivière Whitemouth, où le programme pourrait conférer une protection à d’autres espèces peu communes, incluant la lamproie brune (Ichthyomyzon castaneus) et la lamproie du Nord (I. fossor), deux espèces désignées par le COSEPAC au titre d’« espèces préoccupantes ».

Détails de la page

Date de modification :