Espèces sauvages 2010 : chapitre 10
Araignées
Araneae - Ordre des arachnides qui inclut des espèces de prédateurs ayant huit pattes, pas d’antenne, deux crochets à venin, et sont habituellement dotées de deux organes producteurs de soie situés à l’extrémité de leurs abdomens. Elles tissent la soie pour fabriquer des cocons afin de protéger leurs oeufs ou de fabriquer leurs toiles en vue d’attraper des proies.
En bref
- Il existe environ 40 000 espèces d’araignées connues dans le monde, dont 1379 ont été trouvées au Canada.
- En excluant les espèces classées comme étant Disparue, Disparue de la région, Indéterminée, Non évaluée, Exotique ou Occasionnelle, la majorité (86%) des araignées au Canada est en sécurité à l’échelle nationale (au niveau du Canada), alors que 7% sont sensibles et 7% sont possiblement en péril à l’échelle nationale. Cependant, il convient de noter que de nombreuses espèces d’araignées ont été classées dans la catégorie Indéterminée.
- Au total, 70 espèces d’araignées trouvées à l’état sauvage au Canada sont exotiques, c’est-à-dire qu’elles ont été introduites par des activités anthropiques.
- On trouve des araignées sur tous les continents du monde sauf en Antarctique.
- Contrairement à la plupart des arthropodes, les araignées n’ont pas de muscles extenseurs dans leurs membres. Elles procèdent à l’extension de leurs membres en utilisant la pression hydraulique.
Contexte
Les araignées (ordre Araneae) constituent le plus grand ordre d’arachnides. Sur l’ensemble des groupes d’organismes, les araignées sont classées en septième position en termes de diversité des espèces. Il existe environ 40 000 espèces confirmées d’araignées à travers le monde (sur un total estimé à 170 000) dont 1379 espèces ont été confirmées au Canada. Les araignées sont présentes sur tous les continents du monde sauf en Antarctique, et vivent dans presque tous les habitats terrestres et dans certains habitats aquatiques.
Les araignées appartiennent à un grand groupe d’organismes appelé les arthropodes. Les arthropodes sont pourvus d’une coque extérieure rigide appelée exosquelette qui protège la partie interne et molle de leurs corps. Le corps des arthropodes est divisé en deux parties. Contrairement à la plupart des arthropodes, les araignées n’ont pas de muscles extenseurs dans leurs membres. Elles procèdent à l’extension de leurs membres en utilisant la pression hydraulique. Dans leurs abdomens, toutes les araignées contiennent des filières qui servent à produire de la soie. La production de toiles d’araignée est l’utilisation la plus connue de la soie. Ces toiles d’araignée servent principalement à attraper des proies et à fournir un lieu de retranchement à leurs fabricants.
La plupart des araignées possèdent des crochets leur servant à éjecter du venin. Bien que quelques-unes soient végétariennes lorsqu’elles sont très jeunes, toutes les araignées sont des prédateurs. Elles se nourrissent principalement d’insectes (mouches, moustiques, sauterelles, coléoptères, et papillons) et d’autres araignées. Les plus grosses espèces d’araignées canadiennes sont celles de la famille Pisauridea; elles peuvent atteindre 15 cm incluant leurs pattes et sont capables de se nourrir de poissons et de salamandres! Les araignées capturent leurs proies en les piégeant dans leurs toiles ou en les chassant activement. Celles qui utilisent leurs toiles détectent leurs proies grâce aux mouvements de la toile. La plupart des araignées possède six ou huit yeux, mais certaines en ont moins ou en sont dépourvues.
La plupart des araignées vivent un à deux ans au maximum, mais l’on sait que les tarentules et d’autres araignées mygalomorphes peuvent vivre jusqu’à 25 ans en captivité. Chez la plupart des espèces, les araignées mâles ont une durée de vie inférieure à celle des femelles. Pendant la phase de reproduction, les femelles tissent des cocons de soie pour accueillir les oeufs, chaque cocon pouvant contenir des centaines d’oeufs. Chez certaines espèces, les femelles s’occupent de leurs petits en les transportant avec elles et en partageant la nourriture. Un petit nombre d’espèces sont sociales et construisent des toiles communes.
Les morsures d’araignées peuvent être douloureuses, mais seules quelques espèces d’araignées sont connues pour être dangereuses pour l’être humain. Aujourd’hui, les scientifiques mènent des études pour savoir si l’on pourrait utiliser certains venins d’araignée comme médicaments et comme pesticides non toxiques.
État des connaissances
De par la variété intéressante de leurs comportements en termes de chasse et de reproduction, et de par la morphologie complexe de diverses parties de leurs corps qui y est associée, les araignées suscitent l’intérêt de nombreux scientifiques. En fait, plusieurs journaux scientifiques internationaux sont consacrés principalement à l’étude des araignées. Cependant, en dépit de l’intérêt que suscitent les araignées, elles restent généralement mal connues; moins d’un quart des espèces d’araignées présentes dans le monde auraient été décrites et dénommées. On dispose d’informations détaillées sur le cycle vital de quelques-unes d’entre elles seulement. Au Canada, seuls quelques habitats ont été correctement échantillonnés pour les araignées et la liste des espèces canadiennes connues va certainement s’allonger.
Heureusement, il existe une littérature taxonomique de qualité concernant la plupart des araignées susceptibles d’être présentes au Canada. Pour cette raison et parce qu’elles sont d’importants prédateurs où qu’elles se trouvent et qu’elles ont généralement de fortes associations avec des habitats particuliers, les araignées font partie des sujets d’études environnementales de prédilection en Amérique du Nord, notamment en tant qu’indicateurs de la biodiversité. Les scientifiques, les défenseurs de l’environnement et les gestionnaires canadiens et étrangers accordent de plus en plus d’importance aux araignées.
Richesse et diversité au Canada
Les trois provinces où l’on recense la plus grande diversité d’espèces d’araignées sont l’Ontario (751 espèces), la Colombie-Britannique (701 espèces) et le Québec (679 espèces). À l’inverse, on observe généralement une plus faible diversité d’espèces au Yukon, dans les Territoires du Nord-Ouest et au Nunavut que dans les autres provinces canadiennes (figure 10). Cependant, c’est sur l’Île-du-Prince-Édouard que l’on recense la plus faible diversité d’espèces d’araignées (38 espèces).
Pleins feux sur la Malmignate de l’Ouest
La Malmignate de l’Ouest (Latrodectus hesperus) est une espèce d’araignée sans poils pourvue d’un corps noir luisant d’environ 6 mm de long. Sous son abdomen très rond, on trouve habituellement, mais pas toujours, un motif rouge distinctif qui a souvent la forme d’un sablier. Les individus immatures sont généralement dotés de motifs blancs ou roses sur l’abdomen, qui demeurent parfois à l’âge adulte. Les malmignates sont des araignées à toiles irrégulières, dont les fils s’entrecroisent sans ordre apparent.
L’aire de répartition de la Malmignate de l’Ouest s’étend du sud de la Saskatchewan, de l’Alberta et de la Colombie-Britannique au Canada et se prolonge vers le sud jusqu’au Mexique. Il arrive que des araignées atteignent d’autres zones du Canada lors du transport du raisin en provenance de Californie.
Les malmignates se reproduisent pendant l’été. Parfois, après l’accouplement, la femelle malmignate mange le mâle! Généralement, les femelles produisent quatre à neuf grappes d’oeufs à la fois et chaque grappe peut contenir de 100 à 400 oeufs (dont environ 30 survivront). Les bébés araignées mettront en moyenne six à neuf mois pour devenir des adultes à part entière. Les femelles malmignates peuvent vivre plusieurs années, mais les mâles ont généralement une durée de vie inférieure. La malmignate se nourrit habituellement d’insectes mais également d’autres araignées. La plupart des proies sont attrapées dans les toiles des malmignates; les araignées soumettent leurs proies en les enroulant dans des fils de soie puis en les mordant afin d’injecter leur venin. La malmignate commence à manger sa proie une fois que le venin a fait effet.
Les malmignates ont tendance à préférer les habitats sombres et ombragés : dans les galeries d’écureuils abandonnées, dans les tas de bois et sous les roches dans les zones extérieures ensoleillées. Les araignées restent actives jusqu’à la première gelée blanche, hibernent pendant l’hiver, et réapparaissent au printemps lorsque les températures se réchauffent. Une araignée en hibernation diminue son activité métabolique, elle rétracte ses pattes et reste blottie dans un abri pendant les mois les plus froids de l’année.
Contrairement aux idées reçues, les morsures des malmignates sont rares. Dans les rares cas où une personne est effectivement mordue, elle souffre rarement d’effets graves. Dans de très rares cas, les morsures peuvent entraîner des troubles médicaux, voire la mort. La Malmignate de l’Ouest est classée en sécurité à l’échelle nationale.
Pleins feux sur la Gnaphose de Snohomish
La famille des gnaphosidés est un groupe relativement bien connu qui compte environ 2000 espèces reconnues dans le monde entier. La Gnaphose de Snohomish (Gnaphosa snohomish) est une araignée très rare de la famille des gnaphosidés, que l’on a observée uniquement dans quelques sites dans la zone du Puget Sound / bassin de Georgia au nord-ouest de l’État de Washington et au sud-ouest de la Colombie-Britannique. Actuellement, on sait que la Gnaphose de Snohomish choisit presque toujours des zones de tourbières comme habitat. Les araignées suivent un cycle biologique d’un an, elles hivernent avant l’âge adulte et arrivent à maturité à la fin du printemps.
En Colombie-Britannique, à Burnaby, à l’extérieur de Vancouver, des chercheurs ont trouvé ce que l’on considère être la plus importante population de Gnaphoses de Snohomish. Elles ont été trouvées dans une ancienne tourbière à canneberges commerciale, à proximité du fleuve Fraser. Le lieu est couvert de sphaignes et autres mousses et recouvert d’arbrisseaux à canneberges et de divers types d’herbes. À partir de juillet 2007, le site de Burnaby fut réaménagé en tant que tourbière à canneberges à des fins commerciales. Étant donné la faible surface d’habitats propices restante (le site est entouré d’aménagements agricoles, commerciaux et industriels), nul ne sait s’il reste des Gnaphoses de Snohomish à Burnaby.
En raison de ces menaces confirmées qui mettent en péril cette araignée très rare, le Comité sur la situation des espèces en péril au Canada (COSEPAC) a accepté d’évaluer cette espèce. Le COSEPAC prépare un rapport décrivant la situation des Gnaphoses de Snohomish qui devrait être achevé en avril 2012. À l’échelle nationale, cette espèce est classée possiblement en péril.
Résultats de l’évaluation de la situation générale
Il s’agit de la première évaluation sur les araignées effectuée par le Groupe de travail national sur la situation générale. La plupart des 1379 espèces d’araignées du Canada sont en sécurité (714 espèces, 52%, figure 10 et tableau 14). Cependant, de nombreuses espèces d’araignées sont classées dans la catégorie Indéterminée (477 espèces, 35%). Au total, 62 espèces (4%) sont possiblement en péril et 56 espèces (4%) sont sensibles. Enfin, on recense 70 espèces d’araignées (5%) exotiques au Canada.
Classification nationale (Canada) |
Nombre et pourcentage d’espèces dans chaque catégorie de rang |
---|---|
0.2 Disparue | 0 (0%) |
0.1 Disparue de la région | 0 (0%) |
1 En péril | 0 (0%) |
2 Possiblement en péril | 62 (4%) |
3 Sensible | 56 (4%) |
4 En sécurité | 714 (52%) |
5 Indéterminée | 477 (35%) |
6 Non évaluée | 0 (0%) |
7 Exotique | 70 (5%) |
8 Occasionnelle | 0 (0%) |
Total | 1379 (100%) |
Menace envers les araignées canadiennes
De nombreuses espèces d’araignées montrent une préférence pour des habitats spécifiques. Ces araignées sont vulnérables à la perte d’habitat et aux perturbations attribuables à la succession naturelle, à des modifications du drainage, au contrôle de l’érosion et à d’autres formes de transformations d’habitats, ainsi qu’aux changements climatiques. Les araignées sont également très vulnérables à de nombreux pesticides.
Conclusion
Bien que les araignées aient attiré l’attention des chercheurs et du grand public, la plupart des espèces ne sont pas très bien étudiées. L’écologie et la répartition de ces espèces doivent être davantage étudiées. Il en reste beaucoup à apprendre concernant leur aire de répartition et leur situation au Canada.
Pour en savoir plus
Bennett, R. G. 1999. Canadian spider diversity and systematics. Newsletter of the Biological Survey of Canada (Terrestrial Arthropods) 18: 16-27.
Bristowe, W. S. 1971. The world of spiders. HarperCollins, London.
Foelix, R. F. 1996. Biology of spiders, second edition. Oxford University Press, New York.
Gertsch, W. J. 1979. American spiders. Van Nostrand Reinhold, New York.
Levi, H. W. et Levi, L. R. 1996. Spiders and their kin. St. Martin’s Press, New York.
Références
Agence canadienne d’inspection des aliments. 2010. Conseils de sécurité sur la présence d’araignées dans des raisins. (Consulté le 13 janvier 2010).
Bennett, R., Blades, D., Buckle, D., Dondale, C. et West, R. C. 2006. The spiders of British Columbia. In E-Fauna BC: Electronic atlas of the fauna of British Columbia (B. Klinkenberg, éditeur). Lab for Advanced Spatial Analysis, Department of Geography, University of British Columbia, Vancouver. (Consulté le 10 avril 2010). [en anglais seulement]
Bennett, R., Fitzpatrick, S. M. et Troubridge, J. T. 2006. Redescription of the rare ground spider Gnaphosa snohomish (Araneae: Gnaphosidae), an apparent bog specialist endemic to the Puget Sound / Georgia Basin area. Journal of the Entomological Society of Ontario 137: 13-23.
Buckle, D. J., Carroll, D., Crawford, R. L. et Roth, V. D. 2001. Linyphiidae and Pimoidae of America north of Mexico: checklist, synonymy, and literature. Fabreries Supplement 10: 89-191.
Coddington, J. A. et Levi, H. W. 1991. Systematics and evolution of spiders (Araneae). Annual Review of Ecology and Systematics 22: 565-592.
Dondale, C. D., Redner, J. H., Paquin, P. et Levi, H. W. 2003. The insects and arachnids of Canada. Part 23. The orb-weaving spiders of Canada and Alaska (Araneae: Uloboridae, Tetragnathidae, Araneidae, Theridiosomatidae). NRC Research Press, Ottawa.
Dondale, C. D. 1979. Araneae. In Canada and Its Insect Fauna (H. V. Danks, éditeur). Memoirs of the Entomological Society of Canada 108: 247-250.
Dondale, C. D., et Redner, J. H. 1978. The insects and arachnids of Canada. Part 5. The crab spiders of Canada and Alaska (Araneae: Philodromidae and Thomisidae). Agriculture Canada Publication 1663: 255 pp.
Dondale, C. D. et Redner, J. H. 1982. The insects and arachnids of Canada. Part 9. The sac spiders of Canada and Alaska (Araneae: Clubionidae and Anyphaenidae). Agriculture Canada Publication 1724: 194 pp.
Dondale, C. D. et Redner, J. H. 1990. The insects and arachnids of Canada. Part 17. The wolf spiders, nurseryweb spiders, and lynx spiders of Canada and Alaska (Araneae: Lycosidae, Pisauridae, and Oxyopidae). Agriculture Canada Publication 1856: 383 pp.
Dondale, C. D., Redner, J. H. et Marusik, Y. M. 1997. Spiders (Araneae) of the Yukon. In Insects of the Yukon (H. V. Danks et J. A. Downes, éditeurs). Biological Survey of Canada (Terrestrial Arthropods), Ottawa: 1034 pp.
Paquin, P. et Dupérré, N. Guide d’identification des araignées du Québec. Fabreries Supplement 11: 1-251.
Platnick, N. I. 2010. The world spider catalog, version 10.5. American Museum of Natural History. (Consulté le 10 avril 2010). [en anglais seulement]
Platnick, N. I. et Dondale, C. D. 1992. The insects and arachnids of Canada. Part 19. The ground spiders of Canada and Alaska (Araneae: Gnaphosidae). Agriculture Canada Publication 1875: 297 pp.
Royal Alberta Museum. 2010. Bug Facts: Western Black Widow. (Consulté le 13 janvier 2010).
Shear, W. A. (éditeur). 1986. Spiders: webs, behavior and evolution. Stanford University Press, Stanford: 492 pp.
Ubick, D., Paquin, P., Cushing, P. E. et Roth V. D (éditeurs). 2005. Spiders of North America: an identification manual. American Arachnological Society.
Détails de la page
- Date de modification :