Bar rayé (Morone saxatilis) : programme de rétablissement et plan d’action 2019 (proposition)

Titre officiel : Programme de rétablissement et plan d’action du bar rayé (Morone saxatilis), population du fleuve Saint-Laurent, au Canada 2019 (proposition)

Ce document décrit les moyens dont nous disposons pour favoriser le rétablissement de la population du bar rayé (fleuve Saint-Laurent) au Canada. Il présente également l’habitat essentiel de l’espèce.

Loi sur les espèces en péril
Série des programmes de rétablissement
Série des plans d’action

Bar rayé
Bar rayé (Espace pour la vie – Biodôme de Montréal)
Information sur le document

Référence recommandée : Pêches et Océans Canada. 2018. Programme de rétablissement et plan d’action du bar rayé (Morone saxatilis), population du fleuve Saint-Laurent, au Canada [version proposée]. Série de Programmes de rétablissement de la Loi sur les espèces en péril. Pêches et Océans Canada, Ottawa. v+ 61 p.

Pour obtenir des exemplaires supplémentaires du programme de rétablissement et plan d’action, ou pour obtenir un complément d’information sur les espèces en péril, incluant les rapports de situation du Comité sur la situation des espèces en péril au Canada (COSEPAC), les descriptions de la résidence, les plans d’action et d’autres documents connexes sur le rétablissement, veuillez consulter le Registre public des espèces en péril.

Illustration de la couverture : Espace pour la vie – Biodôme de Montréal

Also available in English under the title: « Recovery Strategy and Action Plan for the Striped Bass (Morone saxatilis), St. Lawrence River Population, Canada [proposed] »

© Sa Majesté la Reine du chef du Canada, représentée par le ministre des Pêches et des Océans du Canada, 2018. Tous droits réservés.

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No de catalogue. No de catalogue à venir

Le contenu du présent document (à l’exception des illustrations) peut être utilisé sans autorisation, sous réserve de mention de la source.

Préface

En vertu de l’Accord pour la protection des espèces en péril (1996), les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux signataires ont convenu d’établir une législation et des programmes complémentaires qui assureront la protection efficace des espèces en péril partout au Canada. En vertu de la Loi sur les espèces en péril (L. C. 2002, ch. 29) (LEP), les ministres fédéraux compétents sont responsables de l’élaboration d’un programme de rétablissement et d’un plan d’action pour l’espèce inscrite comme étant disparue du pays, en voie de disparition ou menacée et sont tenus de rendre compte des progrès réalisés cinq ans après la publication du document définitif dans le Registre public des espèces en péril.

Le ministre de Pêches et Océans est le ministre compétent en vertu de la LEP pour le bar rayé, du fleuve Saint-Laurent, et a élaboré ce programme et ce plan combinés, conformément aux articles 37 et 47 de la LEP. Pour l’élaboration de ce programme de rétablissement et plan d’action combinés, le ministre compétent a tenu compte, selon l’article 38 de la LEP, de l’engagement qu’a pris le gouvernement du Canada de conserver la diversité biologique et de respecter le principe selon lequel, s’il existe une menace d’atteinte grave ou irréversible à l’espèce inscrite, le manque de certitude scientifique ne doit pas être prétexte à retarder la prise de mesures efficientes pour prévenir sa disparition ou sa décroissance. Dans la mesure du possible, le programme de rétablissement et plan d’action a été préparé en collaboration avec l’Agence Parcs Canada, le gouvernement du Québec (le ministère des Forêts, de la Faune et des Parcs), les experts du milieu académique, des représentants des Premières Nations, et des représentants des pêches et des organisations non-gouvernementales, conformément aux paragraphes 39(1) et 48(1) de la LEP.

Conformément à ce qui est énoncé dans le préambule de la LEP, la réussite du rétablissement de cette espèce dépendra de l’engagement et de la collaboration d’un grand nombre de parties concernées qui participeront à la mise en œuvre des directives formulées dans le présent programme de rétablissement et plan d’action. Cette réussite ne pourra reposer uniquement sur Pêches et Océans Canada, ou sur toute autre compétence seule. Les coûts de conservation des espèces en péril sont partagés entre les différentes instances. Tous les Canadiens et toutes les Canadiennes sont invités à appuyer ce programme et ce plan et à contribuer à sa mise en œuvre pour le bien du bar rayé du fleuve Saint-Laurent et de l’ensemble de la société canadienne.

Le présent programme de rétablissement et plan d’action comporte de l’information sur les mesures de rétablissement qui doivent être prises par Pêches et Océans Canada et d’autres instances ou organisations participant à la conservation de l’espèce. La mise en œuvre du présent programme et plan d’action est assujettie aux crédits, aux priorités et aux contraintes budgétaires des autorités et organisations participantes.

Remerciements

Pêches et Océans Canada (MPO) souhaite remercier Marthe Bérubé (MPO), Myriam Bourgeois (MPO) et Alexandra Valentin (MPO), qui ont rédigé ce document avec la précieuse collaboration de l’équipe de rétablissement (voir l’annexe B), ainsi que celle de Brigitte Lévesque (MPO) pour la préparation des cartes, Florence Boucher-Boisclair (MPO) pour la section sur l’évaluation des répercussions socio-économiques et des avantages et Renée Langevin (Environnement et Changement climatique Canada) pour les informations relatives aux réserves nationales de faune et refuges d’oiseaux migrateurs. Dans la mesure du possible, le présent document a été préparé en collaboration avec l’Agence Parcs Canada, le ministère des Forêts de la Faune et des Parcs du Québec, les experts du milieu académique, des représentants des Premières Nations et des représentants des pêches et des organisations non-gouvernementales. Pêches et Océans Canada aimerait remercier toutes les personnes et organisations qui ont contribué au rétablissement de la population de bar rayé du fleuve Saint-Laurent.

Sommaire

La population de bar rayé (Morone saxatilis) du fleuve Saint-LaurentNote de bas de page 1 a été inscrite en tant qu’espèce disparue du pays en vertu de la Loi sur les espèces en péril (LEP) en 2011. Le présent programme de rétablissement et plan d’action est une mise à jour et une bonification du programme de rétablissement de 2011 (Robitaille et al. 2011). Il fait partie d’une série de documents interdépendants portant sur cette espèce. Ces documents forment un tout et comprennent notamment le rapport de situation du Comité sur la situation des espèces en péril au Canada (COSEPAC 2012).

Quatre autres populations indigènes de bar rayé ont été répertoriées au Canada. Le COSEPAC les a classées dans deux unités désignables, soit celles de la baie de Fundy et du sud du golfe du Saint-Laurent. En 2012, le COSEPAC a réévalué la situation du bar rayé au Canada et la population du fleuve Saint-Laurent a été reclassifiée en voie de disparition.

La population de bar rayé qui fait l’objet du présent programme de rétablissement et plan d’action a été réintroduite dans le fleuve Saint-Laurent à partir de 2002, avec des individus provenant de la rivière Miramichi. La population historique a été décimée dans les années 1960. Il a été déterminé que le rétablissement de la nouvelle population était faisable sur le plan biologique et technique.

Le bar rayé doit son nom à sept ou huit bandes horizontales foncées qui marquent ses flancs pâles. Le bar rayé est une espèce anadrome qui fraie en eau douce et se développe jusqu’à maturité en mer. Il est associé aux estuaires et aux habitats côtiers du nord-est américain. La fraie, l’incubation et le développement initial de l’alevin ont lieu en eau douce ou légèrement saumâtre. À partir du stade juvénile, le bar rayé tolère mieux les changements des conditions environnementales. Il peut combler ses besoins alimentaires en se déplaçant dans les milieux estuariens ou côtiers. Depuis la réintroduction du bar rayé dans le fleuve, il se reproduit naturellement et on a enregistré une certaine augmentation de l’abondance de sa population et de sa répartition (MPO 2017a). Sa répartition (sur la base d’une zone fréquentée par au moins 10 % des bars marqués suivis par télémétrie) s’étend, en amont, de Gentilly à, en aval, Rivière-Ouelle sur la rive sud et au fjord du Saguenay (incluant celui-ci) sur la rive nord. Néanmoins, plusieurs observations de bars rayés ont été signalées bien au-delà de cette zone et chevauchent, en aval, la population voisine du sud du golfe du Saint-Laurent.

Les menaces auxquelles fait face l’espèce sont décrites dans la section 5 et comprennent : le développement d’infrastructures; l’entretien de la voie maritime du Saint-Laurent; l’entretien des quais, marinas et chenaux d’accès; la modification locale du milieu riverain; le batillage; l’implantation d’obstacles temporaires ou permanents; les espèces envahissantes; les maladies et parasites; les captures accidentelles commerciales et sportives; les captures illégales; les fuites et déversements d’hydrocarbures lors de leur transport; les fuites qui pourraient survenir lors de l’exploration et l’exploitation gazières et pétrolières; la pollution agricole (charge en nutriments et sédiments, pesticides) et les effluents municipaux et industriels.

Le présent programme de rétablissement et plan d’action décrit les mesures qui offrent les meilleures chances d’atteindre les objectifs en matière de population et de répartition de l’espèce, y compris les mesures à prendre pour contrer les menaces pesant sur l’espèce et surveiller son rétablissement. Les objectifs quantitatifs en matière de population et de répartition fixés pour le bar rayé du fleuve Saint-Laurent sont de satisfaire aux critères du COSEPAC qui permettent à la population de passer du statut actuel d’espèce en voie de disparition (COSEPAC 2012) à celui d’espèce préoccupante.

La section 7 décrit les différentes mesures à prendre en termes d’ensemencements, d’inventaires et de suivis; de recherches; de gestion et de coordination; et d’intendance et de sensibilisation, qui fournissent les meilleures chances d’atteindre les objectifs.

L’habitat essentiel de la population du fleuve Saint-Laurent est composé d’un assemblage d’emplacements géographiques, où le bar rayé accomplit les fonctions essentielles à son cycle de vie. Ainsi, il a été possible de désigner un habitat essentiel pour :

  1. l’alimentation des adultes (mai à octobre; deux secteurs);
  2. l’hivernage des adultes (novembre à avril; deux secteurs);
  3. la reproduction (mai à juin ; deux secteurs); et
  4. la croissance et l’alimentation des larves et des juvéniles (juin à novembre).

Le tableau 6 et les figures 3 et 4 (section 8) décrivent et illustrent l’habitat essentiel. L’habitat essentiel est défini aussi précisément que possible, avec la meilleure information accessible. Les fonctions et les caractéristiques nécessaires pour appuyer les processus du cycle biologique de l’espèce sont également précisées. Le présent programme de rétablissement et plan d’action désigne l’habitat essentiel du bar rayé du fleuve Saint-Laurent comme étant un assemblage d’emplacements géographiques situés dans l’estuaire fluvial ou moyen du Saint-Laurent, tel que détaillé à la section 8. Faute d’information suffisante, certains habitats qui semblent importants ne peuvent pas être désignés dans le présent programme de rétablissement et plan d’action. Le calendrier des études décrit les recherches nécessaires pour éventuellement désigner d’autres habitats essentiels qui pourraient être requis pour atteindre les objectifs en matière de population et de répartition de l’espèce.

Il est prévu que la protection de l’habitat essentiel de l’espèce contre la destruction prendra la forme d’un arrêté visant la protection de l’habitat essentiel pris en vertu des paragraphes 58(4) et 58(5) de la LEP, qui invoquera l’interdiction, prévue au paragraphe 58(1), de la destruction de l’habitat essentiel désigné.

Résumé du caractère réalisable du rétablissement

Après analyse, il a été déterminé que le rétablissement de la population de bar rayé du fleuve Saint-Laurent est réalisable, tant au point de vue technique que biologique. Les conditions suivantes sont remplies :

  1. Des individus capables de se reproduire sont disponibles. Le suivi démontre que le bar rayé se reproduit naturellement dans le fleuve Saint-Laurent ; il révèle également des augmentations de l’abondance et de la répartition de la population (MPO 2017a). Il est encore difficile d’établir la contribution relative des ensemencements et de la reproduction naturelle aux augmentations observées. Compte tenu de la variabilité naturelle du recrutement, les ensemencements pourraient se poursuivre dans les prochaines années pour augmenter le nombre de reproducteurs, au besoin.
  2. Des habitats adéquats sont disponibles pour soutenir l’espèce. Les données biologiques recueillies démontrent que des habitats adéquats pour la croissance et la reproduction du bar rayé du Saint-Laurent sont disponibles (MPO 2017a).
  3. Il est possible d’atténuer ou d’éviter les principales menaces suivantes :
    1. Les captures accidentelles : Aucune pêche au bar rayé du fleuve n’est autorisée. Les spécimens capturés fortuitement doivent être remis à l’eau et les pêcheurs sportifs et commerciaux sont sensibilisés à la remise à l’eau obligatoire des bars rayés capturés accidentellement. De plus, toute pêche sportive peut être interdite dans certains secteurs importants de regroupement de bars rayés, à tout le moins pendant la période nécessaire à la reproduction.
    2. Les opérations de dragage : L’entretien des havres, ports, marinas et voies de navigation est encadré. Les sites de dépôts des sédiments de dragage sont choisis de manière à en minimiser les impacts. De plus, dans le cas où les sédiments dragués seraient contaminés, ils devraient plutôt être déposés dans des sites de dépôts terrestres.
    3. La perturbation et la destruction des habitats : Étant donné le cadre réglementaire existant, il est possible de modifier les activités et les pratiques de manière à éliminer ou réduire leurs incidences.
  4. Des techniques et des mesures efficaces existent pour rétablir l’espèce. Lorsque les conditions sont propices, l’établissement ou la restauration d’une population de bar rayé peut se faire rapidement (Field 1997). Les mesures de rétablissement nécessaires pour atteindre les objectifs en matière de population et de répartition applicables à cette espèce sont indiquées dans le présent programme de rétablissement et plan d’action.

1 Introduction

Le bar rayé (Morone saxatilis) a disparu du fleuve Saint-Laurent dans les années 1960. En 2002, il a été réintroduit dans le fleuve Saint-Laurent. En 2004, lors de sa première évaluation par le Comité sur la situation des espèces en péril au Canada (COSEPAC), la « population de l'estuaire du Saint-Laurent » a été désignée « disparue du pays ». En 2011, elle a été inscrite comme « disparue du pays » sur la liste des espèces en péril en vertu de la Loi sur les espèces en péril (LEP). En 2012, le COSEPAC a évalué la population réintroduite sous l’appellation de « population du fleuve Saint-Laurent » et l’a désignée « en voie de disparition », ce qui pourrait amener une modification de son statut à l’annexe 1 de la LEP. Le présent document utilise la nouvelle appellation de « population de bar rayé du fleuve Saint-Laurent ».

Le présent document combine un programme de rétablissement et un plan d’action pour la population de bar rayé du fleuve Saint-Laurent. Un programme de rétablissement est un document de planification qui établit les mesures à prendre pour mettre un terme au déclin d’une espèce ou le renverser. Il établit des objectifs et indique les principaux champs des activités à entreprendre. Quant au plan d’action, il expose en détail la planification du rétablissement à l’appui des orientations stratégiques énoncées dans le programme de rétablissement de l’espèce. Le présent programme de rétablissement et plan d’action fournit aussi des renseignements de base sur l’espèce, les menaces qui pèsent sur elle et des informations sur son habitat essentiel.

Le présent document fait partie d’une série de documents concernant le bar rayé du fleuve Saint-Laurent. Ces documents doivent être pris en compte ensemble et consultés, au besoin, pour obtenir de plus amples renseignements. En particulier, le présent programme de rétablissement et plan d’action intègre l’information du rapport de situation du Comité sur la situation des espèces en péril au Canada (COSEPAC 2012). Il utilise également les informations présentées dans un document de recherche sur les habitats de l’espèce (Valiquette et al. 2017) et un avis scientifique à l’appui de la désignation de l’habitat essentiel (MPO 2017a). Ces deux derniers documents sont le résultat d’un processus d’examen par les pairs sous l’égide du Secrétariat canadien de consultation scientifique (SCCS) de Pêches et Océans Canada. Ce processus vise à fournir l’information et les avis scientifiques requis pour mettre en œuvre la Loi sur les espèces en péril en s’appuyant sur les meilleures données scientifiques disponibles, sur l’analyse des données ainsi que sur les opinions d’experts.

2 Information sur l’évaluation de l’espèce par le Comité sur la situation des espèces en péril au Canada

Date de l’évaluation : novembre 2012

Nom commun de l’espèce (population) : bar rayé (population du fleuve Saint-Laurent)

Nom scientifique : Morone saxatilis

État : En voie de disparition

Justification de la désignation : Cette population a été évaluée comme étant « disparue du pays » en 2004 et fait l’objet d’un effort de réintroduction, par l’utilisation d’individus de la rivière Miramichi, ce qui a entraîné une reproduction naturelle, une certaine augmentation de l’abondance et une augmentation de la répartition. Il est toutefois difficile de déterminer si la population est autosuffisante sans l’apport supplémentaire continu. La population est vulnérable aux prises accessoires dans les pêches commerciales, et bien que la menace liée au dragage ait été réduite, elle est toujours présente.

Répartition : Québec, Océan Atlantique

Historique du statut : Espèce désignée « disparue du pays » en novembre 2004. Réexamen du statut : l'espèce a été désignée « en voie de disparition » en novembre 2012.

3 Information sur la situation de l’espèce

Tableau 1. Résumé de la protection actuelle et d’autres statuts attribués au bar rayé
Instance Administration/organisation Année(s) d’évaluation/d’inscription Situation/description Niveau de désignation
Canada COSEPAC 2012 En voie de disparition Population du fleuve Saint-Laurent
Canada NatureServe 2012 Vulnérable à en péril N2N3
Canada Loi sur les espèces en péril 2011 Disparue du pays Population du fleuve Saint-Laurent
Internationale NatureServe 1996 Non en péril G5

Le bar rayé de la population du fleuve Saint-Laurent bénéficie d’une protection conformément à l’article 32 de la LEP :

« Il est interdit de tuer un individu d’une espèce sauvage inscrite comme espèce disparue du pays, en voie de disparition ou menacée, de lui nuire, de le harceler, de le capturer ou de le prendre » (paragr. 32[1])
« Il est interdit de posséder, de collectionner, d’acheter, de vendre ou d’échanger un individu – notamment partie d’un individu ou produit qui en provient – d’une espèce sauvage inscrite comme espèce disparue du pays, en voie de disparition ou menacée.  » (paragr. 32[2])

En vertu de l’article 73 de la LEP, le ministre compétent peut conclure un accord autorisant une personne à exercer une activité touchant une espèce sauvage inscrite, tout élément de son habitat essentiel ou la résidence de ses individus, ou lui délivrer un permis à cet effet.

4 Information sur l’espèce

4.1 Description

Le bar rayé (Morone saxatilis) est un poisson au corps allongé, comprimé latéralement, et à la tête triangulaire (figure 1). Il possède deux nageoires dorsales séparées, dont la première est épineuse. Sa nageoire caudale est fourchue. Les trois premiers rayons de la nageoire anale sont épineux. Les nageoires pelviennes se trouvent en position thoracique. Des écailles recouvrent les joues et les opercules. La coloration du dos varie de vert olive foncé à noir et le ventre est blanc. Les flancs, pâles ou argentés, sont marqués de sept ou huit bandes horizontales foncées, épousant le contour des rangées d’écailles. Aucune de ces bandes ne se prolonge sur la tête.

Ilustration de bar rayé
Figure 1. Bar rayé (Morone saxatilis). Source : Fédération québécoise des chasseurs et pêcheurs (FédéCP).
Description longue

La figure 1 s’intitule Bar rayé (Morone saxatilis). C’est une photo de bar rayé adulte. La source de la photo est la Fédération québécoise des chasseurs pêcheurs (FédéCP).

Ce poisson anadrome est étroitement associé aux estuaires et aux eaux côtières. Il s’y déplace en bancs compacts d’individus de même taille, s’alimentant d’invertébrés et de poissons (voir la section 4.3 Besoins du bar rayé). Dans le Saint-Laurent, le bar rayé peut vivre une vingtaine d’années et atteindre 90 cm de longueur totale (Vladykov 1953).

4.2 Abondance et répartition de la population

Le bar rayé est réparti dans des cours d’eau de l’est de l’Amérique du Nord, du fleuve Saint-Laurent jusqu’au nord de la Floride. Il a disparu de plusieurs endroits au Mexique et aux États-Unis et a été introduit en d’autres endroits, en Afrique, en Europe et aux États-Unis. Au Canada, cinq populations indigènes de bar rayé ont existé dans trois secteurs distincts qui correspondent aux trois unités désignables identifiées par le COSEPAC (2012), soit la baie de Fundy, le sud du golfe du Saint-Laurent et le fleuve Saint-Laurent. Historiquement, le bar rayé du fleuve Saint-Laurent se trouvait principalement depuis le lac Saint-Pierre jusqu’à Baie-Saint-Paul sur la rive nord, et à L’Isle-Verte sur la rive sud (COSEPAC 2004). Aujourd’hui, l’aire de répartition (figure 2) s’étend au-delà de ces limites (MPO 2017a).

En 2002, à la suite de l’avis favorable quant à la faisabilité de rétablir une population de bar rayé dans le fleuve (Comité aviseur sur la réintroduction du bar rayé 2001), un programme de réintroduction a été mis en œuvre. Entre 2002 et 2016, 2 995 géniteurs, plus de 34 500 000 de larves et au-delà de 18 000 bars rayés juvéniles, produits à partir de géniteurs de la population du sud du golfe, ont été ensemencés dans le fleuve Saint-Laurent. Plusieurs méthodes de suivi (par exemple; captures accidentelles, télémétrie, relevé standardisé du recrutement) ont été mises en place afin d’évaluer les paramètres de la population réintroduite, de documenter la survie et l’établissement de l’espèce, de caractériser ses déplacements et de déterminer les habitats de fraie et d’élevage. Depuis, il a été mis en évidence que les bars rayés adultes se reproduisaient naturellement dans l’estuaire. Des signes de reproduction naturelle ont été observés en 2008 (Bourget et al. 2008; Pelletier 2009) et la première frayère a été désignée en 2011 dans le premier programme de rétablissement. Il s’agit de la frayère située dans l’embouchure de la rivière du Sud à Montmagny.

Carte. Voir description ci-dessous.
Figure 2. Aire de répartition du bar rayé du fleuve Saint-Laurent
Description longue

La figure 2 s’intitule Aire de répartition du bar rayé du fleuve Saint-Laurent. C’est une carte délimitant l’aire de répartition du bar rayé du fleuve Saint-Laurent. La carte montre l’aire de répartition du bar rayé, de Trois-Rivières à Matane avec la limite ouest de son aire de répartition historique, c’est-à-dire Sorel. Elle indique également l’aire de chevauchement avec la population du sud du golfe du Saint-Laurent.

Bien que presque toutes les observations (99,6 %) de bar rayé du fleuve Saint-Laurent soient rapportées entre les villes de Québec et Rivière-du-Loup (Dussureault et al. 2014), le bar rayé a été observé jusqu’aux environs de Montréal, de même que dans le Saguenay et aussi loin que Sheldrake (Moyenne-Côte-Nord). En aval, il y a une zone de chevauchement avec la population voisine du sud du golfe du Saint-Laurent (figure 2). Quelques bars rayés de la population du sud du golfe du Saint-Laurent utilisent aussi le fleuve Saint-Laurent (Dussureault et al. 2014). L’aire de répartition de la nouvelle population de bar rayé a été définie comme étant la zone fréquentée par au moins 10 % des bars rayés marqués dans le cadre d’un suivi télémétrique (MPO 2017a). En fonction de ce critère, l’aire de répartition s’étend de l’amont vers l’aval, de Gentilly à Rivière-Ouelle sur la rive sud, et jusqu’au Fjord du Saguenay (incluant celui-ci), sur la rive nord (figure 2). Sa répartition en aval de l’embouchure du Saguenay demeure pour l’instant imprécise faute de récepteurs pour y relever des données. Comme les efforts de réintroduction de bars rayés sont relativement récents, un suivi devra être fait au cours des prochaines années afin de confirmer si les habitats utilisés actuellement par la population demeureront les mêmes à l’avenir (MPO 2017a). La zone de chevauchement entre Sainte-Luce et Cap Gaspé au Québec n’a pas été attribuée à une unité désignable dans le rapport du COSEPAC.

La recherche a montré que les saisons jouent un rôle majeur dans la répartition spatio-temporelle des bars rayés. Au printemps et en été, les bars se dispersent sur de grandes aires (probablement des aires d’alimentation) en amont et en aval, qui s’étendent non seulement dans l’estuaire moyen, mais aussi vers l’amont dans l’estuaire fluvial et dans le tronçon fluvial. Nombre d’entre eux se déplacent également vers l’estuaire maritime et la rivière Saguenay. Avec l’arrivée de l’automne, commence un mouvement de retour vers les sites d’hivernage (MPO 2017a). En hiver, les bars rayés se concentrent pour hiverner dans deux secteurs restreints, situés près de la ville de Québec et au sud de l’Île aux Grues (voir les détails dans la section 8.1.3 sur l’habitat essentiel). Entre les deux secteurs, le chenal des Grands Voiliers serait minimalement utilisé comme une voie hivernale de déplacement (MPO 2017a). Pendant le mois de mai, qui coïncide en partie avec la période de reproduction, on assiste à la dispersion des individus. La dispersion est encore plus marquée dans l'ensemble du système après la période de fraie, en juin.

La population du fleuve Saint-Laurent serait composée minimalement de deux groupes utilisant le territoire de façon différente, soit un groupe à déplacements plus restreints et un groupe à déplacements plus extensifs. Des analyses devront être menées pour définir et documenter davantage ces contingents migratoires (MPO 2017a).

4.3 Besoins de l’espèce

L’espèce est caractérisée par un recrutement irrégulier qui dépend des conditions rencontrées par les jeunes stades de vie. La variabilité du recrutement pourrait être amplifiée dans les populations canadiennes, puisqu’elles se trouvent à la limite septentrionale de l’aire de répartition de l’espèce. Les conditions climatiques plus rudes auxquelles sont exposées ces populations pourraient entraîner la mortalité des jeunes de l’année qui n’auraient pas atteint une taille suffisante (estimée à 10 cm) pour survivre au jeûne de leur premier hiver (COSEPAC 2012 et références incluses). Par ailleurs, les conditions de croissance dans les eaux canadiennes feraient en sorte que la taille maximale des bars rayés plafonne à moins de 1 m, bien que très peu d’individus survivent assez longtemps pour parvenir à cette taille. Le plus gros spécimen connu, capturé en Caroline du Nord en 1891, pesait 56,8 kg et mesurait 1,82 m (Raney 1952).

De tous les habitats fréquentés par le bar rayé au cours de son cycle vital, les plus importants pour le maintien d’une population semblent être ceux dans lesquels se déroulent la fraie et ceux dévolus aux premiers stades de développement (Albrecht 1964 ; Auld et Schubel 1978 ; Dudley et Black 1978 ; Kernehan et al. 1981 ; Jessop 1990, 1991 ; Melvin 1991 ; Van den Avyle et Maynard 1994). La fraie commence lorsque la température de l’eau dépasse 10 °C et peut continuer jusqu’à ce que l’eau atteigne une température de 19 °C, en mai et juin. Les femelles, extrêmement fécondes, produisent en moyenne 50 000 ovules par kilogramme de poids corporel. Les œufs de bars rayés sont lâchés directement dans le courant et demeurent en suspension dans la colonne d’eau. L’éclosion des œufs a généralement lieu dans les trois jours après leur fécondation. Pendant l’incubation, la survie des œufs dépend étroitement des paramètres abiotiques du milieu, particulièrement de la température, de la salinité, de l’oxygène dissous et de la présence d’un courant modéré occasionnant un peu de turbulence et permettant de maintenir les œufs en suspension dans la colonne d’eau pendant l’incubation (Cooper et Polgar 1981; Greene et al. 2009; MPO 2011). Les caractéristiques des œufs semblent spécifiques à la population de chaque cours d’eau. Par exemple,les œufs pondus dans les bassins à haute énergie physique sont plus gros et plus lourds, ont un rapport surface-volume plus faible et renferment davantage d’acides gras saturés et monoinsaturés que les œufs pondus dans des bassins hydrographiques à plus faible énergie (Bergey et al. 2003).

La survie des larves dépend aussi de variables physiques, telles que la température, la salinité et l’oxygène dissous. À ces exigences s’ajoute celle d’une nourriture suffisamment abondante lors de la résorption de la vésicule vitelline au début de l’alimentation (Cooper et Polgar 1981). Cette période clé a lieu quand la larve a environ huit jours et mesure de 6 à 7 mm. En milieu naturel, le taux de survie des larves qui ont épuisé leurs réserves endogènes dépend directement de l’abondance de zooplancton dans le milieu (Kernehan et al. 1981; Martin et al. 1985). Dans la baie de Chesapeake, il a été démontré que la densité de bars rayés aux premiers stades de développement variait, entre autres, en fonction de la distance par rapport à la zone de turbidité maximale (North et Houde 2003). Les caractéristiques de ces zones et le comportement des larves auraient pour effet de retenir celles-ci dans des eaux où l’abondance des proies est élevée. Le Saint-Laurent comporte aussi une zone de turbidité maximale entre l’Île d’Orléans et l’Île aux Coudres. Cette zone soutient de fortes densités de zooplancton, dont le copépode Eurytemora affinis, et elle est connue comme aire d’alevinage de l’éperlan arc-en-ciel et de plusieurs autres espèces de poissons (Sirois et Dodson 2000). Elle pourrait aussi accueillir les premiers stades de développement du bar rayé du Saint-Laurent qui, au terme d’une vie larvaire d’environ 35 à 50 jours, mesurent approximativement 20 mm et acquièrent la forme typique du bar rayé, qu’ils conserveront jusqu’à l’âge adulte.

À partir du stade juvénile, le bar rayé tolère mieux les changements des conditions environnementales. Il peut combler ses besoins alimentaires en se déplaçant dans les milieux estuariens ou côtiers, souvent en bancs d’individus de même taille. Malgré une tolérance aux changements de température et de salinité plus élevée chez les juvéniles que chez les œufs ou les larves, la variabilité spatiale des conditions environnementales qui existent à l’intérieur d’un bassin hydrographique peut faire partie des facteurs déterminants de la croissance et de la survie du bar rayé durant sa première année de développement (Greene et al. 2009 ; COSEPAC 2012; Cook et al. 2010).

Le bar rayé subadulte et adulte fréquente les habitats côtiers et les milieux estuariens (Bain et Bain 1982). Au cours des deux premières années, il s’alimente surtout d’invertébrés; il devient ensuite progressivement piscivore, recherchant principalement les bancs de poissons à rayons mous, en particulier les clupéidés (p. ex. alose savoureuse, gaspareau, etc.) (Trent et Hasler 1966 ; Manooch 1973 ; Austin 1980 ; Gardinier et Hoff 1982 ; Dew 1988). Dans le fleuve Saint-Laurent, les principales proies sont l’éperlan et les clupéidés. Pendant l’été, les déplacements des bars rayés semblent surtout associés à ceux de leurs proies. Les bars rayés adultes sont tolérants et peuvent supporter des variations de salinité, de température, de pH ou de turbidité (Talbot 1966; Auld et Schubel 1978; Setzler et al. 1980). En automne, le bar rayé remonte hiverner en eau douce ou saumâtre afin de se soustraire aux basses températures de l’eau de mer. Le confinement des bars rayés dans des sites d’hivernage pourrait accroître les risques de mortalité due à des accidents environnementaux ou à des modifications défavorables de l’habitat.

5 Menaces

5.1 Évaluation des menaces

Les principales menaces qui pèsent sur le rétablissement du bar rayé du fleuve Saint-Laurent sont caractérisées dans le tableau 2. Leur description plus précise est donnée à la section 5.2.

Tableau 2. Évaluation des menaces pour la population du fleuve Saint-Laurent. Les critères sont définis à la fin du tableau et caractérisés à l’annexe C.
Catégorie Menace Probabilité d’occurrencea Niveau d’incidenceb Certitude causalec Risque de menaced
Perte ou dégradation de l’habitat Développement et modifications d’infrastructures Menace connue ou très susceptible de se réaliser Élevé Élevée Élevé
Perte ou dégradation de l’habitat Entretien et développement de la voie maritime du Saint-Laurent Menace connue ou très susceptible de se réaliser Moyen Moyenne Moyen
Perte ou dégradation de l’habitat Entretien des quais, marinas et chenaux d’accès Menace connue ou très susceptible de se réaliser Moyen Élevée Moyen
Perte ou dégradation de l’habitat Modification locale du milieu riverain Menace connue ou très susceptible de se réaliser Faible Élevée Faible
Perte ou dégradation de l’habitat Batillage Menace susceptible de se réaliser Inconnu Très faible Inconnu
Perte ou dégradation de l’habitat Implantation d’obstacles temporaires ou permanents Faible Inconnu Très faible Inconnu
Menaces biologiques Espèces envahissantes Menace susceptible de se réaliser Moyen Faible Moyen
Menaces biologiques Maladies et parasites Faible Faible Faible Faible
Utilisation des ressources biologiques Captures accidentelles commerciales Menace connue ou très susceptible de se réaliser Faible Très élevée Faible
Utilisation des ressources biologiques Captures accidentelles sportives Menace connue ou très susceptible de se réaliser Faible Très élevée Faible
Utilisation des ressources biologiques Captures illégales Menace connue ou très susceptible de se réaliser Inconnu Très élevée Inconnu
Pollution Fuites et déversements par le transport d’hydrocarbures Menace connue ou très susceptible de se réaliser Moyen Très élevée Moyen
Pollution Fuites et déversements par l’exploration et l’exploitation gazières et pétrolières Faible Moyen Très élevée Faible
Pollution Pollution agricole : charge en nutriments et sédiments Menace connue ou très susceptible de se réaliser Faible Très faible Faible
Pollution Pollution agricole : pesticides Menace connue ou très susceptible de se réaliser Inconnu Très faible Inconnu
Pollution Effluents municipaux, effluents industriels et déversement de polluants par les navires Menace connue ou très susceptible de se réaliser Inconnu Très faible Inconnu

a Probabilité d’occurrence : « Probabilité » s’entend ici de la mesure dans laquelle une menace précise est susceptible de se réaliser pour une population donnée sur une période de dix ans ou de trois générations, selon la période la plus courte.

b Niveau d’incidence : L’ampleur de l’impact d’une menace donnée et mesure dans laquelle elle a des conséquences sur la survie ou le rétablissement de la population.

c Certitude causale : Solidité des données probantes établissant un lien entre la menace et la survie et le rétablissement de la population.

d Risque de menace au niveau de la population : Produit de la probabilité et du niveau d’incidence de la menace, calculé à l’aide d’une approche de matrice des risques.

5.2 Description des menaces

Développement et modifications d’infrastructures

Le développement d’infrastructures portuaires et routières (y compris le dragage de capitalisation et le remblayage/délestage de déblais de dragage) peut avoir d’importants impacts sur les habitats, surtout considérant leur caractère permanent. Par exemple, entre les ponts de Québec et de l’Île d’Orléans, les habitats riverains et aquatiques ont déjà subi des pertes considérables sur plus d’une vingtaine de kilomètres à cause du développement routier et portuaire. Ces infrastructures ont fait disparaître plusieurs centaines d’hectares d’habitat qui étaient utilisés par le bar rayé avant sa disparition (Robitaille et al. 2011; MPO 2011). Un exemple d’impact lié au dragage est celui découlant du délestage de déblais à proximité de plusieurs îles en aval de la ville de Québec, modifiant d’importantes aires de croissance des bars immatures, ce qui pourrait avoir contribué à la disparition du bar rayé dans les années 1960 (COSEPAC 2012).

Le risque associé au développement des infrastructures peut varier en fonction de leur emplacement et de leur envergure. Les travaux de construction peuvent, ou non, poser des risques variables selon le moment choisi. Ce sont les risques associés aux travaux et aux infrastructures susceptibles de toucher l’habitat essentiel, en particulier lorsque l’habitat essentiel est de dimension restreinte, qui suscitent la plus grande préoccupation. Par exemple, puisque seulement deux frayères semblent soutenir l’ensemble de la population, si des habitats aussi importants que ceux-ci sont visés par des projets d’infrastructures, l’impact peut être déterminant. En effet, les conditions d’écoulement, de profondeur, de salinité et de température – qui sont intimement liées à la fraie et à la dispersion des œufs et des larves – pourraient être modifiées par exemple, à la suite de l’érection de murs et murets, de l’empiètement ou du dragage de capitalisation et d’entretien. Ceci est d’autant plus vrai pour les œufs du bar rayé qui nécessitent des conditions hydrodynamiques particulières (voir les besoins de l’espèce à la section 4.3).

Considérant le caractère permanent des infrastructures, le risque que génère cette menace est élevé, particulièrement si le développement concerne un habitat essentiel.

Entretien et développement de la voie maritime du Saint-Laurent

Dans le passé, le dragage de capitalisation a été très préoccupant puisqu’il pourrait avoir contribué à la disparition du bar rayé dans les années 1960 (COSEPAC 2012; MPO 2011). En effet, les aires de croissance estivale des bars immatures, situées en périphérie de plusieurs îles du Saint-Laurent, ont été modifiées par le délestage des déblais de dragage (Robitaille 2001). Ce changement a eu pour effet de reléguer les bars rayés de la population disparue à quelques endroits le long de la rive sud, qui sont vite devenus des secteurs de pêche très fréquentés (Robitaille et Girard 2002). Depuis 1854, plus de 200 000 000 m3 de sédiments ont été retirés du lit du fleuve, surtout en amont de la ville de Québec (Villeneuve 2001), pour dégager la voie maritime. Cependant, depuis 1998, il est surtout question de travaux d’entretien pour maintenir le chenal de navigation.

Actuellement, le dragage d’entretien a cours surtout dans le tronçon fluvial et l’estuaire moyen. Il s’agit des aires de mouillage de Batiscan, de Portneuf, de la courbe de Bécancour et de la traverse Cap-Santé. Les travaux les plus importants ont lieu dans la Traverse du Nord, entre l’île d’Orléans et la pointe nord de l’Île aux Grues, où sont dragués quelque 50 000 m3 par an sur une trentaine de kilomètres et 300 mètres de largeur. Le dépôt des sédiments dragués se faisait historiquement au sud de l’Île Madame, au sud-est de l’Île d’Orléans. Depuis 2009, un ou deux sites alternatifs se trouvent au large de Sault-au-Cochon, sites dont l’impact sur l’ensemble de la faune ichtyologique pourrait ne pas avoir été évalué (Dubé 2013). Toutefois, les activités de dragage sont généralement couplées à des mesures d’atténuation, comme le choix du moment et de sites non dispersifs.

Ce sont les bars rayés juvéniles et immatures qui seraient le plus touchés par les activités de dragage dans la voie maritime (MPO 2011), d’autant qu’ils sont bien présents dans les habitats riverains du tronçon fluvial et de l’estuaire moyen. Le dragage d’entretien n’est toutefois pas d’ampleur comparable avec le dragage de capitalisation. Les principaux impacts encourus suite aux travaux de dragage sont la moindre disponibilité des proies; la barrière physique à la dispersion des poissons à cause du courant qui augmente dans le chenal ; l’augmentation de la turbidité, particulièrement en amont de la ville de Québec où la qualité de l’eau est affectée (MPO 2011; MDDEFP 2013); le relargage de contaminants ; et la modification des substrats et des habitats (plus d’érosion et de plantes submergées hors du chenal tel que rapporté dans Allard 2015).

Le risque posé par cette menace est moyen étant donné qu’aujourd’hui, il est surtout question de travaux d’entretien. En revanche, des travaux de dragage de capitalisation pourraient être envisagés, notamment pour augmenter la capacité des navires, dans un contexte de baisse des niveaux d’eau dans le tronçon fluvial ou pour creuser l’estuaire fluvial, auquel cas, le niveau de risque augmenterait.

Entretien des quais, marinas et chenaux d’accès

Les plus faibles volumes de dragage généralement appliqués pour l’entretien des quais, marinas et chenaux de même que les mesures d’atténuation (tel le dépôt terrestre de sédiments contaminés) diminuent le risque associé aux activités de dragage. Dans l’estuaire moyen, le dépôt des sédiments du quai de l’Îsle-aux-Grues et du quai de Berthier-sur-Mer se fait au sud de Grosse-Île (Service hydrographique du Canada 2012). Toutefois, le risque le plus important de ces travaux d’entretien réside dans leur emplacement. Par exemple, des lieux de fraie pourraient être sérieusement affectés. En effet, les conditions d’écoulement, de salinité et de température sont intimement liées à la fraie et à la dispersion des larves. À ce titre, l’entretien au quai de Montmagny est davantage préoccupant compte tenu de la présence d’une frayère directement dans le havre, à l’embouchure de la rivière du Sud.

Le risque associé à cette menace demeure donc moyen.

Modification locale du milieu riverain

L’assèchement, le remblayage, la dévégétalisation, l’enrochement et la construction de murets contribuent à dégrader le milieu riverain qui comporte des habitats importants, particulièrement pour les plus jeunes stades comme les juvéniles qui utilisent les herbiers pour s'abriter et s'alimenter.

Les effets cumulatifs de ces activités doivent être pris en compte, mais la préoccupation et le risque liés à cette menace sont faibles à l'échelle de la population. D’ailleurs, une part importante de l‘aire de répartition pour les jeunes stades n’est pas fortement urbanisée.

Batillage

Le batillage est un remous provoqué par le passage des bateaux qui cause la dégradation des berges. Il réduit la qualité et la diversité des habitats en milieu côtier. En effet, contrairement à l’impact des crues printanières, ce type d’érosion constante (en saison estivale) inhibe l’établissement de la végétation aquatique. Le phénomène est observé de Cornwall à Montmagny, où 15 % des berges sont exposées à l’érosion et où cette érosion est expliquée à 85 % par le batillage (Dauphin 2000). Dans une partie de ce tronçon plus sensible se trouvent des juvéniles qui s’alimentent dans les habitats riverains, soit au sud de l’Île d’Orléans jusqu’à Montmagny.

Le niveau d’incidence et le risque associés à cette menace restent inconnus.

Implantation d’obstacles temporaires ou permanents

Cette menace est représentée par exemple par des barrages, des digues temporaires ou des hydroliennes. Des projets de pont et d’hydrolienne ont été proposés ces dernières années dans l’aire de répartition du bar rayé. Des enjeux quant au lien connectif entre les habitats de reproduction, les aires d’alimentation et les lieux d’hivernage ont été soulevés (Valiquette et al. 2016). Néanmoins, il n’existe pas actuellement de projets de barrages ou d’implantation d’hydroliennes dans les secteurs du Saint-Laurent où se trouve le bar rayé.

La technologie hydrolienne est relativement récente et continue de se développer. Selon le type d’hydrolienne et le site choisi, certains impacts sont possibles, dont des comportements d’évitement de même que des blessures et mortalités de poissons ou de larves, par exemple à cause des contacts mécaniques avec les turbines, des changements de pression et de la cavitationNote de bas de page 2.

Le niveau d’incidence et le risque associés à cette menace demeurent inconnus.

Espèces envahissantes

Pour la première fois en 2016, la carpe de roseau (une carpe asiatique) a été pêchée dans le Saint-Laurent. L’espèce pourrait éventuellement s’établir dans le tronçon entre Montréal et l’Île d’Orléans. Principalement planctonivore, elle pourrait entrer en compétition avec les jeunes stades du bar rayé susceptibles de se nourrir de plancton et altérer gravement les habitats d’herbier où ils s’alimentent et s’abritent. Les carpes asiatiques sont aussi porteuses de parasites et de maladies, ce qui constitue un risque supplémentaire (MFFP 2016).

Principalement à cause de la menace que représentent les carpes asiatiques, le risque associé à cette menace est jugé moyen, malgré que la découverte de la carpe de roseau dans le fleuve Saint-Laurent en 2016 accroisse les inquiétudes.

Maladies et parasites

La septicémie hémorragique virale est une maladie infectieuse associée à des mortalités massives de poissons. Elle est présente dans le bassin des Grands Lacs et dans les Maritimes, et a été observée dans la rivière Miramichi chez des bars rayés de la population du sud du golfe (Robitaille et al. 2011). Les bars qui ont été utilisés pour les ensemencements dans le fleuve Saint-Laurent en étaient toutefois exempts. D’autres maladies peuvent avoir des effets sur les populations de bar rayé (Gervasi 2015), mais aucune n’est observée chez le bar rayé de la population du fleuve.

Dans le sud du golfe du Saint-Laurent, le bar rayé est souvent porteur du nématode Philometra sp., mais sans que sa condition semble en être affectée (S. Douglas, MPO, comm. pers.). La population du fleuve Saint-Laurent en était probablement porteuse historiquement (Séguin et al. 2007).

Pour le moment, le niveau de préoccupation associé aux maladies et aux parasites est faible.

Captures accidentelles commerciales

Les captures accidentelles de bars rayés se font principalement dans les tentures à anguilles en septembre et octobre. Toutefois, le risque encouru actuellement est jugé faible et moindre qu’à l’époque de l’ancienne population de bar. En effet, les mailles des tentures à anguilles ont été ajustées pour éviter de capturer l’éperlan arc-en-ciel, ce dont profitent aussi les jeunes bars rayés. De plus, un programme de rachat de permis de pêche à l’anguille a été déployé en 2009 et seulement 21 des 190 permis d’origine demeurent en activité (MPO 2017a). Un projet pilote est en cours pour tester une nouvelle mesure permettant d’atténuer davantage les risques en améliorant la survie des poissons remis à l’eau. Cette mesure consiste à recueillir et conserver les poissons capturés accidentellement dans des bassins à fond plat pendant la marée basse pour leur permettre de s’échapper à marée haute. Les bassins de rétention sont efficaces pour augmenter le taux de survie des bars rayés capturés accidentellement (Guy Verreault, MFFP, comm. pers.). Les captures accidentelles dans les verveux et les filets à alose savoureuse seraient négligeables selon le suivi réalisé auprès des pêcheurs commerciaux (MPO 2010).

Le risque associé à cette menace est jugé faible.

Captures accidentelles sportives

Puisque l’abondance du bar rayé a augmenté de manière significative et que cette espèce a un comportement grégaire, les prises accidentelles sont observées beaucoup plus fréquemment et sur un territoire plus étendu que lors de la dernière évaluation scientifique de cette menace (MPO 2010). En effet, des captures sont désormais rapportées de Montréal jusqu’à Sheldrake (Moyenne-Côte-Nord) et le long de la rivière Saguenay. Les captures accidentelles suscitent une certaine préoccupation, toutefois cette menace est jugée de faible risque, considérant la remise à l’eau obligatoire et l’importante campagne de sensibilisation qui a accompagné cette mesure (MPO 2010). De plus, le gouvernement du Québec a récemment procédé à la fermeture de zones de pêche, dans des cas particuliers de regroupement d’individus dans un site de reproduction, lorsque la concentration des poissons était susceptible d’occasionner d’importantes prises accidentelles.

Le risque lié à cette menace est donc faible.

Captures illégales

Toute pêche au bar rayé est interdite dans le fleuve Saint-Laurent, jusqu’à la hauteur de Forestville (sur la rive nord) et Rimouski (sur la rive sud). Même si aucune donnée ne permet de mesurer l’importance réelle et le risque lié aux captures illégales de bars rayés, la menace est présente et elle suscite des préoccupations. Plusieurs facteurs pourraient influencer la capture illégale de bars. Parmi ceux-ci, notons l’attrait et l’engouement suscités par la pêche sportive, qui porte sur la population de bar rayé du sud du golfe du Saint-Laurent. Le territoire visé par cette pêche a été agrandi à l’été 2018 pour inclure le nord du golfe du Saint-Laurent et une partie de l’estuaire du Saint-Laurent, jusqu’à une ligne reliant Rimouski à Forestville. Également, le comportement grégaire de l’espèce alors que les poissons se concentrent en certains sites fait qu’ils sont vite repérés et amène les gens à croire qu’ils sont très abondants. De plus, présent en milieu riverain, le bar est facile d’accès, ce qui amplifie le risque. Les médias de masse alimentent aussi la perception selon laquelle l’espèce est abondante ou même nuisible à d’autres espèces pêchées, comme la truite de mer ou le saumon atlantique.

Aucune information fiable n’est disponible pour l’instant. Le niveau d’incidence et le risque associés à cette menace demeurent donc inconnus.

Fuites et déversements par le transport d’hydrocarbures

Les déversements accidentels par les navires peuvent survenir à l’occasion d’une collision, d’un échouage, d’un incendie ou d’une explosion. Les conditions de navigation sont particulièrement difficiles entre la ville de Québec et la sortie de la Traverse du Nord à cause des marées, des tempêtes fréquentes, de la brume et des courants. Malgré des mesures d’atténuation (p. ex. pilotes du Saint-Laurent, double-coques), cette menace suscite une importante préoccupation, surtout que ce secteur est très fréquenté par les bars rayés. Le transport d’hydrocarbures par pipelines est aussi préoccupant, notamment dans le contexte où un projet à l’étude traverserait le Québec vers le Nouveau-Brunswick en longeant le Saint-Laurent.

L’exposition des poissons aux hydrocarbures peut causer des mortalités dans les heures qui suivent un déversement, ou plus tard. L’exposition à de l’eau ou à des sédiments contaminés peut aussi entraîner des effets sublétaux pouvant mener à des probabilités de survie et de reproduction limitées et à une réponse subséquente dans le recrutement de la population (Dupuis et Ucan-Marin 2015). Les habitats riverains, où s’alimentent les juvéniles, sont les plus à risque pour les poissons, puisque ces habitats sont plus confinés et que l’hydrodynamisme y est plus faible. De plus, lorsque des déversements surviennent, la dérive des hydrocarbures vers des milieux côtiers moins salés pourrait les rendre progressivement plus solubles et biodisponibles (Dupuis et Ucan-Marin 2015). Les premiers stades de vie, surtout les œufs et les larves, sont considérés comme beaucoup plus sensibles que les adultes (National Research Council 2005), d’autant plus que les œufs et les larves pélagiques (qui se trouvent dans la colonne d’eau) sont susceptibles de suivre la même trajectoire qu’une nappe de pétrole (Fodrie et Heck 2011). Le confinement des bars rayés dans des sites d’hivernage pourrait accroître les risques de mortalité due à des accidents environnementaux ou à des modifications défavorables de l’habitat.

La probabilité d’occurrence de cette menace est importante et les impacts sont documentés. Le risque lié à cette menace est jugé moyen.

Fuites et déversements par l’exploration et l’exploitation gazières et pétrolières

Depuis 1997, le gouvernement du Québec maintient un moratoire permanent sur l’allocation de permis pour des activités d’exploration et d’exploitation pétrolières et gazières dans les eaux du fleuve et de l’estuaire du Saint-Laurent.

La population de bar rayé du fleuve Saint-Laurent étant moins présente dans le golfe du Saint-Laurent, cette menace est peu préoccupante tant que ce moratoire est en place.

Pollution agricole

Les mauvaises pratiques agricoles et la surcharge de nutriments favorisent l’érosion et l’écoulement des sédiments, des nutriments et des pesticides vers les cours d’eau. Les impacts les plus importants de ces pratiques sont visibles dans le lac Saint-Pierre, où la qualité de l’eau est altérée par les pesticides (Hudon et Carignan 2008) et où les herbiers reculent au profit d’algues filamenteuses qui prolifèrent, stimulées par les nutriments (de la Chenelière et al. 2014). Cette menace est toutefois moins présente dans le secteur le plus fréquenté par le bar rayé, en aval de Portneuf.

Quant au risque encouru par le bar rayé, il est jugé faible en ce qui concerne la charge en nutriments et en sédiments. Pour ce qui est des pesticides, le risque est inconnu, mais il suscite une certaine préoccupation. En effet, le bar rayé adulte est un prédateur de niveau trophique supérieur, donc très vulnérable aux contaminants accumulés dans les sédiments et dans la chaîne alimentaire (COSEPAC 2012).

Effluents industriels et municipaux et déversements de polluants par les navires

L’espèce demeure sensible à la contamination comme mentionné plus haut. La navigation marchande procède ponctuellement à des rejets (p. ex. des eaux huileuses) en plus de représenter un risque de déversement accidentel d’hydrocarbures (Innovation maritime 2014). Transports Canada a constaté des déversements de polluants pour 1 % des navires surveillés dans les eaux canadiennes en 2013 à 2014; la majorité des volumes déversés était de moins de 10 litres, quelques-uns étaient plus importants (Environnement et Changement climatique Canada 2016). De tels déversements sont aussi rapportés pour le fleuve Saint-Laurent. Ils sont plus susceptibles de se produire à l’intérieur d’un port ou d’une installation de manutention d’hydrocarbures et pendant le chargement et le déchargement des navires (Innovation maritime 2014). Ces déversements et leurs effets cumulatifs pourraient représenter une menace, particulièrement à des endroits plus sensibles, par exemple dans le bassinNote de bas de page 3 de la rivière du Sud où se situe une frayère.

Le risque que constituent les sources locales de contamination que sont les effluents industriels et municipaux n’a pas pu être caractérisé. Dans l’ensemble, le risque associé à cette menace est inconnu.

6 Objectifs en matière de population et de répartition

L’évaluation du potentiel de rétablissement réalisée en 2005 (MPO 2006) n’a pas défini de cible de rétablissement quantitative pour la population de bar rayé du fleuve Saint-Laurent. Toutefois, une cible qualitative a été fixée : une population autoperpétuatrice possédant des zones d’occupation et d’occurrence semblables à celles de la population disparue.

Il n’y a pas d’estimation d’abondance pour l’ancienne population qui puisse servir de point de référence pour celle en cours de rétablissement. Les données quantitatives, historiques et récentes, sur l’abondance, la répartition et le cycle biologique sont insuffisantes.

En référence aux critères de désignation utilisés par le COSEPAC lors de son évaluation de 2012, l’objectif général du présent document de rétablissement pour le bar rayé de la population du fleuve Saint-Laurent est le suivant :

D’ici cinq ans, satisfaire aux critères qui permettent à la population de passer du statut actuel d’espèce en voie de disparition (COSEPAC 2012), à celui d’espèce préoccupante, scénario qui s’avère possible au point de vue biologique.

Les objectifs en matière de population et de répartition établissent, dans la mesure du possible, le nombre d’individus ou de populations (leur répartition géographique étant précisée) qui est nécessaire au rétablissement de l’espèce. Les objectifs en matière de population et de répartition pour le bar rayé du fleuve Saint-Laurent sont les suivants :

Objectif en matière de population : une population en croissance de plus de 10 000 individus matures. Les données actuelles confirment l’augmentation de l’abondance et de la répartition. La tendance dans les suivis pour le recrutement nous indique déjà une augmentation progressive de la population.

Objectif en matière de répartition : des populations viables avec une aire de répartition en augmentation par rapport à 2012Note de bas de page 4 et qui couvre une aire se rapprochant de l’airehistorique (principalement depuis le lac Saint-Pierre jusqu’à Baie-Saint-Paul sur la rive nord, et L’Isle-Verte sur la rive sud) et une zone d’occupation qui comprend des habitats de qualité. Déjà, les données récentes indiquent que l’espèce semble plus largement répartie qu’historiquement. Elles confirment la présence d’au moins un deuxième lieu de reproduction et des habitats adéquats pour toutes les fonctions du cycle vital. Ces éléments nous permettent de croire que cette population est moins vulnérable.

Il est difficile à l’heure actuelle d’établir des objectifs quantitatifs plus précis en matière de population et des objectifs en matière de répartition pour la population de bar rayé du fleuve Saint-Laurent. Cependant, des travaux en cours permettront de définir une telle cible quantitative d’ici quelques années. Les cibles d’abondance et de répartition proposées pourront être réévaluées lorsque les projets de recherche sur la dynamique de la population et la capacité de support du fleuve Saint-Laurent pour le bar rayé auront été finalisés.

7 Approches et mesures à prendre pour l’atteinte des objectifs

La réussite du rétablissement de l’espèce dépend des mesures prises par diverses organisations et administrations, dont Pêches et Océans Canada. Elle nécessite l’engagement et la coopération d’un grand nombre d’intervenants qui prendront part à la mise en œuvre des stratégies et des mesures établies dans le programme de rétablissement et plan d’action.

Stratégie générale 1: ensemencements, inventaires et suivis

Stratégie générale 2: recherche

Stratégie générale 3: gestion et coordination

Stratégie générale 4: intendance et sensibilisation

7.1 Mesures déjà achevées

Le précédent programme de rétablissement (Robitaille et al 2011) divisait les efforts de rétablissement en fonction de cinq objectifs de rétablissement :

  1. accroître les effectifs de bar rayé,
  2. déterminer les habitats utilisés par la population de bar rayé,
  3. suivre l’état de la population de bar rayé,
  4. suivre l’état de certaines composantes de la communauté ichtyologique (proies, prédateurs ou compétiteurs) parallèlement au bar rayé et
  5. protéger la population de bar rayé et ses habitats les plus importants.

Pour atteindre ces objectifs, le précédent programme avait recommandé une série de mesures de rétablissement et établi un calendrier d’études nécessaires pour la désignation de l’habitat essentiel. Le MPO a fait rapport des progrès observés pour la période 2011 à 2016 relativement à la mise en œuvre de ces mesures de rétablissement et à la réalisation de ces études (MPO 2017 b). Les points ci-après résument les progrès observés.

7.2 Orientation stratégique pour le rétablissement 

Le présent programme de rétablissement et plan d’action comprend une description des mesures qui fournissent les meilleures chances d’atteindre les objectifs en matière de population et de répartition pour le bar rayé du fleuve Saint-Laurent. Ce document comprend les mesures à prendre pour s’attaquer aux menaces pesant sur l’espèce et surveiller le rétablissement de celle-ci. Les mesures proposées visent à orienter non seulement les activités que doit entreprendre Pêches et Océans Canada, mais également celles pour lesquelles d’autres instances, organisations et personnes peuvent jouer un rôle. À mesure que de nouveaux renseignements sont obtenus, ces mesures et leur priorité peuvent changer. Pêches et Océans Canada encourage fortement tous les Canadiens et Canadiennes à participer à la conservation du bar rayé du fleuve Saint-Laurent par la mise en œuvre des mesures indiquées dans ce programme de rétablissement et plan d’action.

Les tableaux 3 et 4 décrivent les mesures à prendre pour soutenir le rétablissement du bar rayé du fleuve Saint-Laurent. La mise en œuvre de ces mesures dépendra de l’implication de Pêches et Océans Canada et des autres partenaires dans les efforts de rétablissement. Si votre organisation souhaite participer à l’une de ces mesures, veuillez communiquer avec Pêches et Océans Canada, Division de la Gestion des Espèces en péril du Québec (lep-sara-qc@dfo-mpo.gc.ca).

La mise en œuvre de ce programme de rétablissement et plan d’action est assujettie aux crédits, aux priorités et aux restrictions budgétaires des administrations et des organismes participants.

Tableau 3. Mesures collaboratives à prendre par Pêches et Océans Canada et ses partenaires. La liste des acronymes utilisés apparaît à l’annexe D.
# Mesures de rétablissement Approche Priorité e Menaces ou objectifs visés Partenaires suggérées Échéancier
1 Délimiter l’aire de répartition à l’ouest du lac Saint-Pierre et sur la rive nord, à l’est de la rivière Saguenay, jusqu’à Baie-Comeau 1-1 Élevé (à l’ouest), Faible (rive nord) Objectif : Atteindre les objectifs de répartition MFFP
Milieu académique
MPO
PN
3 ans
2 Poursuivre le suivi de l’abondance et de l’état de la population, sur la base d’indicateurs et de protocoles standardisés, notamment le suivi du recrutement pour estimer l’abondance des jeunes de l’année. 1-1 Élevé Objectif : Atteindre les objectifs d’abondance MFFP
Milieu académique MPO
PN
continu
3 Déterminer des indicateurs d’abondance des adultes et établir les protocoles pour en faire le suivi. 1-1 Élevé Objectif : Atteindre les objectifs d’abondance MFFP
Milieu académique MPO
3 ans
4 Déterminer l’importance relative de la zone de chevauchement des bars rayés de la population du fleuve et de la population du golfe du Saint-Laurent et évaluer la contribution de chacune. 1-1 Élevé Objectif : Atteindre les objectifs de répartition MFFP
Milieu académique MPO
5 ans (3 ans si basé sur la télémétrie)
5 Évaluer la capacité de support du fleuve Saint-Laurent pour les juvéniles de bar rayé et déterminer une cible quantitative pour le rétablissement qui tiendra compte de la dynamique de la population. 1-1 Élevé Objectif : Atteindre les objectifs d’abondance et de répartition MFFP
Milieu académique MPO
PN
5 ans
6 Suivre les agents pathogènes et les parasites et au besoin évaluer la situation des espèces envahissantes en lien avec le bar rayé. 1-1 Faible Menace : Espèces envahissantes et agents pathogènes MFFP
Milieu académique MPO
PN
continu
7 Suivre l’état des habitats importants, notamment les habitats de reproduction. 1-1 Élevé Objectif : Atteindre les objectifs de répartition MFFP
Milieu académique MPO
PN
5 ans
8 Déterminer les facteurs qui pourraient limiter la croissance chez certains juvéniles de l’année (0+) et les empêcher d’atteindre la taille suffisante pour passer l’hiver (p. ex. fraie différée dans le temps, habitats de croissance de mauvaise qualité, parasite qui limite la croissance). 2-1 Moyen Objectif : Atteindre les objectifs d’abondance et de répartition Milieu académique
MFFP
MPO
3 ans
9 Caractériser la structure particulière de l’assemblage des bars qui fréquentent la rivière Ouelle, documenter la fidélité au site et si possible la raison de l’utilisation du site. 2-2 Moyen Objectif : Atteindre les objectifs d’abondance et de répartition MFFP
Milieu académique
MPO
5 ans
10 Déterminer les contingents ainsi que leur importance et leur contribution au rétablissement de la population. 2-2 Faible Objectif : Atteindre les objectifs d’abondance et de répartition MFFP
Milieu académique
MPO
PN
10 ans
11 Procéder à une nouvelle évaluation de l’impact des différentes pêches sur le rétablissement, soit les pêches commerciales, récréatives, autochtones et illégales. 3-1 Élevé Menaces : Captures accidentelles MFFP
MPO
PN
2 ans
12 Avec la collaboration des pêcheurs commerciaux, poursuivre les activités du Réseau de suivi des captures accidentelles mis en place en 2003 et, par la même occasion, recueillir des données permettant d’évaluer les paramètres démographiques. 3-1 Élevé Menace : Captures accidentelles commerciales MFFP
Pêche commerciale
MPO
continu
13 Avec la collaboration des pêcheurs, faire le suivi des prises accidentelles dans les pêches sportives et commerciales. 3-1 Élevé Menace : Captures accidentelles commerciales MFFP
Pêche commerciale
MPO
continu
14 Diffuser de l’information pertinente et assurer la surveillance et le suivi sur le terrain par les agents de protection. 3-1 Élevé Menace : Captures illégales MFFP
MPO
continu
15 Incorporer l’information sur les besoins du bar rayé dans l’analyse des projets proposés dans ou à proximité d’un plan d’eau. 3-2 Élevé Menace : Perte ou dégradation de l’habitat Industrie
MFFP
MPO
continu
16 Encourager les pêcheurs sportifs à adopter les comportements qui favorisent la conservation du bar rayé (p. ex. information et sensibilisation à la remise à l’eau). 4-1 Élevé Menace : Captures accidentelles MFFP
MPO
ONG
PN
continu
17 Encourager les pêcheurs commerciaux à mettre en place des mesures qui favorisent la survie des bars lorsqu’ils sont capturés accidentellement dans les engins fixes. 4-1 Élevé Menace : Captures accidentelles MFFP
MPO
ONG
PN
continu
18 Encourager les pêcheurs commerciaux à faire un suivi des captures accidentelles dans les engins de pêche. 4-1 Élevé Menace : Captures accidentelles MFFP
MPO
ONG
continu
19 Encourager les municipalités, les MRC et autres instances gouvernementales et administratives à s’assurer que les besoins du bar rayé sont inclus dans les pratiques de gestion qui ont des impacts sur les milieux aquatiques et à apporter les correctifs appropriés sur le terrain (p. ex. intégrer les préoccupations aux plans directeurs de l’eau, aux plans d’action et de réhabilitation écologique et aux plans de gestion intégrée régionaux). 4-1 Moyen Menace : Perte ou dégradation de l’habitat MFFP
MDDELCC
MPO
Milieu agricole Municipalités
ONG
PN
continu
20 Encourager les bonnes pratiques agroenvironnementales et apporter les correctifs appropriés sur le terrain. 4-1 Faible Menace : Perte ou dégradation de l’habitat MFFP
MDDELCC
Milieu agricole
MPO
ONG
PN
continu
21 Appuyer, encourager et informer les organisations intéressées par le milieu aquatique et le public en général, de manière à favoriser les mesures visant la protection du bar rayé et de ses habitats. 4-1 Élevé Toutes les menaces MFFP
MPO
ONG
PN
3 ans
22 Développer une campagne pour faire connaître le bar rayé au grand public et établir l’importance de son rôle de même que la différence entre la population du fleuve et celle du golfe (marketing social, image de marque). 4-1 Élevé Toutes les menaces MFFP
MPO
ONG
PN
3 ans
Tableau 4. Mesures qui représentent des occasions de participation pour d’autres instances, organisations et personnes. La liste des acronymes utilisés apparaît à l’annexe D.
# Mesures de rétablissement Approche Priorité e Menaces ou objectifs visés Instances ou organisations suggérées Échéancier
23 Ensemencer dans le fleuve jusqu’à 10 000 individus par an. Il serait souhaitable de marquer les individus de manière à pouvoir les retracer et à évaluer la contribution des ensemencements par rapport à la reproduction naturelle. 1-2 Faible Objectif : Atteindre les objectifs d’abondance MFFP 5 ans
24 Mettre en œuvre, par règlement, des mesures de gestion pour la protection du bar rayé dans les périodes ou des sites critiques (p. ex. fermetures de pêche.) 3-1 Élevé Menaces : Captures accidentelles et captures illégales MFFP continu

e « Priorité » reflète le degré auquel l'approche contribue directement au rétablissement de l’espèce ou est un précurseur essentiel à une approche qui contribue au rétablissement de l'espèce.

7.3 Commentaires à l’appui des tableaux 3 et 4 sur les mesures à prendre pour le rétablissement

Certaines des mesures du tableau de planification du rétablissement se justifient de la manière suivante :

En ce qui concerne le suivi et l’état de la population :

En ce qui concerne la recherche :

En ce qui concerne la gestion et la coordination :

En ce qui concerne les mesures d’intendance et de sensibilisation :

8 Habitat essentiel

8.1 Désignation de l’habitat essentiel de l’espèce

8.1.1 Description générale de l’habitat essentiel de l’espèce

En vertu de la Loi sur les espèces en péril, l’habitat essentiel est défini comme suit :

« l’habitat nécessaire à la survie ou au rétablissement d’une espèce sauvage inscrite, qui est désigné comme tel dans un programme de rétablissement ou un plan d’action élaboré à l’égard de l’espèce ». [paragr. 2(1)]

En outre, la LEP définit ainsi l’habitat d’une espèce aquatique :

« [...] les frayères, aires d’alevinage, de croissance et d’alimentation et routes migratoires dont sa survie dépend, directement ou indirectement, ou aires où elle s’est déjà trouvée et où il est possible de la réintroduire ». [paragr. 2(1)]

L’habitat essentiel du bar rayé, population du fleuve Saint-Laurent), est défini aussi précisément que possible, avec la meilleure information accessible; les fonctions et les caractéristiques nécessaires pour appuyer les processus du cycle biologique de l’espèce sont également précisées.

En résumé, l’habitat essentiel désigné de la population de bar rayé du fleuve Saint-Laurent se compose d’un assemblage d’emplacements géographiques, situés dans l’estuaire fluvial ou moyen du Saint-Laurent, où le bar rayé accomplit les fonctions essentielles à son cycle de vie (reproduction, croissance, alimentation et hivernage).

On ne sait pas si l’habitat essentiel désigné dans ce programme de rétablissement et plan d’action est suffisant pour atteindre les objectifs en matière de population et de répartition de l’espèce. Le calendrier des études présente les recherches nécessaires pour désigner d’autres aires d’habitat essentiel au besoin et pour obtenir plus de renseignements et de détails au sujet de l’habitat essentiel désigné afin d’atteindre les objectifs en matière de population et de répartition fixés pour l’espèce.

8.1.2 Information et méthodes utilisées pour désigner l’habitat essentiel

Pour le bar rayé de la population du fleuve Saint-Laurent, l’habitat essentiel a été désigné dans la mesure du possible, en se fondant sur la meilleure information accessible. Cette information a été, pour la plupart, générée au cours de projets de recherche identifiés dans le calendrier des études du programme de rétablissement précédent (Robitaille et al. 2011). Les résultats de ces projets ont été publiés dans un document de recherche du Secrétariat canadien de consultation scientifique (Valiquette et al. 2017). Ils ont servi de base à la formulation d’un avis scientifique, à la suite d’un examen par les pairs réunissant des experts du MFFP, de l’Université du Québec à Chicoutimi (UQAC) et du MPO, en mars 2016 (MPO 2017a).

Dans l’ensemble, les informations et les projets présentés dans l’avis scientifique ont permis de déterminer et de caractériser (de manière non exhaustive) les habitats utilisés par le bar rayé aux différentes étapes de son cycle de vie (larves, juvéniles 0+, adultes) et à différents moments de l’année (période de reproduction [mai à juin], période d’eau libre [mai à octobre] et période d’hivernage [novembre à avril]). Cette approche a permis de désigner un habitat essentiel constitué d’un assemblage d’habitats, où le bar rayé accomplit des fonctions essentielles à son cycle de vie (reproduction, croissance, alimentation et hivernage).

Habitat d’alimentation des adultes

L’habitat utilisé pour l’alimentation des adultes a été caractérisé à l’aide d’une étude télémétrique. Entre 2011 et 2015, un réseau de récepteurs a été déployé le long des rives sud et nord du Saint-Laurent, c’est-à-dire entre Montréal et, respectivement, Sainte-Luce et le fjord du Saguenay (incluant celui-ci). Le réseau était actif pendant la période d’eau libre, entre mai et octobre. Cette période est associée à une température de l’eau supérieure à 10 °C, considérée comme propice à l’alimentation. Le réseau de récepteurs a permis de suivre le déplacement de bars rayés équipés d’émetteurs acoustiques. Les résultats ont montré que les bars se dispersent sur un grand territoire pour s’alimenter. L’habitat essentiel pour la fonction d’alimentation des adultes a été désigné comme la zone utilisée, entre mai et octobre, par au moins 50 % des individus marqués. Cette approche a permis de définir deux zones d’habitat d’alimentation.

Habitat d’hivernage des adultes

Les aires d’hivernage des adultes ont également été caractérisées par télémétrie. Un réseau de récepteurs a été déployé pendant l’hiver, entre novembre 2014 et avril 2015. Cette période est associée à une température de l’eau inférieure à 10 °C, seuil au-dessous duquel le bar cesse de s’alimenter. Contraint par la présence de glace, le réseau hivernal offre une couverture et une résolution spatiales restreintes, comparativement à celles du réseau d’eau libre, avec un nombre limité de récepteurs, déployés dans le fleuve entre Portneuf et Rivière-du-Loup. Néanmoins, le réseau hivernal permet de documenter les secteurs de l’estuaire fluvial et moyen vers lesquels les bars initient un retour depuis les secteurs les plus en aval, dès le mois de septembre (selon l’information du réseau d’eau libre). L’habitat essentiel pour l’hivernage des adultes a été désigné comme les zones où les bars marqués sont les plus concentrés, entre novembre et avril. Cette approche a permis de définir deux zones d’hivernage. Des déplacements ont été observés entre ces secteurs, mais les données ont été considérées comme trop fragmentaires pour statuer sur la présence d’un corridor migratoire au sens d’habitat essentiel.

Habitats de reproduction

Les mois de mai et juin sont considérés comme la période propice à la reproduction du bar rayé. L’espèce est connue pour utiliser des aires de rassemblement avant la fraie qui, à l’instar des frayères, jouent un rôle essentiel pour la reproduction. Les individus s’y rassemblent pour profiter de conditions environnementales favorables à la maturation des gonades. Les zones de rassemblement avant la fraie ne correspondent pas nécessairement à des frayères, celles-ci pouvant être distantes de plusieurs kilomètres. Les sites de fraie sont caractérisés par des paramètres abiotiques (température, salinité, oxygène, courant) propices à l’incubation des œufs et un hydrodynamisme favorable à leur transport vers des zones d’alevinage.

Deux approches ont été utilisées pour définir les habitats de reproduction, à savoir la recherche de rassemblements d’adultes en état de frayer et la recherche d’œufs et de larves.

Entre 2011 et 2015, 14 sites se trouvant dans des embouchures de rivière ou des secteurs du fleuve ont été échantillonnés pendant cette période, principalement au filet, pendant un total de 1 389 heures. Les 14 sites ont été choisis pour leurs caractéristiques abiotiques propices à la reproduction du bar ou parce que des concentrations de bars matures y avaient été rapportées par des pêcheurs (Pelletier et al. 2010). L’effort d’échantillonnage était variable entre les sites. Deux sites, associés à des concentrations élevées de bars rayés en état de frayer, ont été échantillonnés plus intensivement et de manière récurrente (au moins deux ans), soit l’embouchure de la rivière du Sud à Montmagny (à l’échelle du « bassin ») et le secteur de Beauport dans la ville de Québec (ce qui inclut la baie de Beauport, l’embouchure de la rivière Saint-Charles et l’extrémité portuaire du secteur Beauport). De plus, pendant les mois de mai et juin 2015, le réseau fixe de télémétrie d’eau libre a permis de documenter l’utilisation de ces deux sites par les individus adultes équipés d’émetteurs acoustiques. En 2011, un échantillonnage d’ichtyoplancton couplé à des analyses génétiques a révélé la présence d’œufs de bar rayé à l’embouchure de la rivière du Sud à Montmagny (Côté et al. 2012). En 2014, une concentration élevée de larves de bar rayé a été observée en aval de la ville de Québec, notamment dans le chenal de l’île d’Orléans. Les patrons de circulation sont cohérents avec l’hypothèse que ces larves proviennent du secteur de Beauport, à Québec (Pascal Sirois, UQAC, comm. pers.).

Sur la base de ces diverses études, le secteur portuaire de la ville de Québec (à Beauport) et le bassin de la rivière du Sud (à Montmagny) ressortent comme des aires d’importants rassemblements d’adultes pour la reproduction. Le bassin de la rivière du Sud à Montmagny a été reconnu comme une frayère en 2011. Le secteur de l’extrémité portuaire de la ville de Québec (à Beauport) est également reconnu comme étant un site de fraie, à la suite de la récente confirmation de la présence d’œufs et de larves de bar rayé dans ce secteur, en 2016 (Eliane Valiquette, MFFP, comm. pers.). Dans ces deux secteurs, on observe des rassemblements prédictibles d’individus adultes réunissant toutes les conditions propices à la reproduction (gonades pleines et coulantes, estomac vide, rapport des sexes débalancé en faveur des mâles et température de l’eau entre 13 et 18 °C). De plus, ces rassemblements sont observés uniquement en mai et juin, aux températures propices à la reproduction, et se situent dans des secteurs où l’hydrodynamisme est favorable à l’exportation des œufs vers des zones d’alevinage observées en aval. Il faut mentionner que malgré la présence de concentrations d’adultes matures en mai-juin dans la portion aval de la rivière Ouelle, cette rivière présentait plusieurs caractéristiques atypiques pour un habitat de reproduction (rapport des sexes grandement débalancé en faveur des femelles, quasi absence de mâles en état de frayer, estomac plein et présence sur le site pendant toute la période d’eau libre). Récemment, il a été suggéré que les femelles rassemblées dans la rivière Ouelle pourraient profiter de conditions favorables à la maturation des gonades (Anne-Marie Pelletier, MFFP, comm. pers.). Cependant, aucune étude n’a été menée pour vérifier cette hypothèse. C’est pourquoi le secteur de la rivière Ouelle n’a pas été retenu comme habitat essentiel pour la reproduction. Mentionnons toutefois que ce secteur est inclus dans l’habitat essentiel d’alimentation des adultes qui se déroule principalement de mai à octobre (voir la description plus haut).

À Montmagny, l’ensemble du bassin de la rivière du Sud a été désigné comme habitat essentiel. Cette désignation inclut tous les sites où des bars rayés ont été capturés en période de reproduction. Cette désignation reconnait l’importance, pour la reproduction, des conditions hydrodynamiques à l’échelle du bassin. À Québec (secteur de Beauport), l’habitat essentiel a été défini de façon à englober les sites montrant des concentrations d’adultes en état de frayer. L’ensemble de ces sites se trouvent le long de la rive de l’extrémité portuaire, dans la zone intertidale. Il est évident que, à marée basse, les adultes quittent la zone désignée pour se réfugier vers des sites situés plus au large. Cependant, l’information disponible n’a pas permis de localiser ces sites; par conséquent, ils ne sont pas inclus dans l’habitat essentiel désigné (mais leur localisation est inscrite au calendrier des études).

Habitat de croissance des larves et des juvéniles de l’année

L’information sur les habitats utilisés par les larves et les juvéniles de la population du fleuve Saint-Laurent est encore fragmentaire, puisque plusieurs études sont encore en cours de réalisation. On a considéré que l’information disponible était suffisante pour désigner un habitat essentiel, mais insuffisante pour le faire séparément pour les larves et les juvéniles. Ainsi, l’habitat essentiel est désigné en considérant toute la période de croissance des larves et des juvéniles, qui se déroule principalement de juin à novembre. La première moitié de la période est considérée comme critique pour la survie et la croissance des larves, qui sont particulièrement sensibles aux variations des conditions abiotiques comme la température, la salinité et la concentration en oxygène, ainsi qu’à la disponibilité des proies. La deuxième moitié de la période est considérée comme particulièrement critique pour la croissance des juvéniles de l’année, qui doivent atteindre une taille minimale de 10 cm à la fin de la saison de croissance pour pouvoir survivre au premier hiver (COSEPAC 2012 et références incluses).

Il a été considéré comme acceptable de désigner un habitat essentiel commun pour les deux stades, puisque l’habitat des larves semble inclus dans celui des juvéniles de l’année. En effet, l’information disponible indique que les larves se trouvent principalement dans deux secteurs de l’estuaire du Saint-Laurent, c’est-à-dire entre Montmagny et L’Islet-sur-Mer, le long de la rive sud (Côté et al.2012), et en aval de l’île d’Orléans (Pascal Sirois, UQAC, comm. pers.). Ces deux secteurs sont inclus dans les zones où se trouvent de fortes concentrations de juvéniles de l’année, telles que déterminées sur la base du suivi annuel du recrutement du MFFP, pour la période 2013 à 2015 (Valiquette et al. 2017, MPO 2017a).

L’habitat essentiel a été défini en combinant deux types d’information présentés dans l’avis scientifique, c’est-à-dire les habitats potentiels définis pour les larves et les jeunes de l’année, ainsi que le suivi annuel du recrutement (MPO 2017a). Plus précisément, en se fondant sur les connaissances acquises au sujet des besoins du bar rayé et de son utilisation de l’habitat pendant sa première année de vie, l’avis scientifique (MPO 2017a) a localisé des habitats potentiels; ces habitats correspondent à la zone intertidale et à la zone riveraine d’une profondeur comprise entre 0 et 5 mètres, à l’intérieur d’une vaste zone délimitée géographiquement. L’habitat essentiel a été désigné comme la zone, à l’intérieur de cette zone d’habitats potentiels, où des juvéniles de l’année ont été capturés pendant le suivi du recrutement pour la période 2013 à 2015 (en excluant les sites géographiques les plus extrêmes en amont et en aval). L’habitat essentiel désigné englobe l’anse Saint-Anne (La Pocatière); cette zone avait été désignée comme essentielle, pour les juvéniles, entre septembre et octobre, dans le précédent programme de rétablissement (Robitaille et al. 2010). Les connaissances acquises depuis le précédent programme confirment l’importance de l’anse Saint-Anne comme habitat essentiel.

La méthode de désignation a les limites suivantes. Le relevé annuel pour le suivi du recrutement a été élaboré de manière à fournir un indice d’abondance standardisé pour les juvéniles de l’année. Comme il a lieu en septembre, le relevé ne donne pas forcément une image exhaustive de l’utilisation de l’habitat pour l’ensemble de la saison de croissance (juin-novembre). De plus, le relevé ne permet pas de définir les caractéristiques précises de l’habitat que recherchent les juvéniles pour assurer leur alimentation et leur croissance, puisque les sites ont été choisis pour assurer une capturabilité homogène des individus entre les sites. Des projets en cours à l’UQAC devraient permettre de répondre à ces questions (Pascal Sirois, UQAC, comm. pers.).

8.1.3 Désignation de l’habitat essentiel

Information géographique

Pour le bar rayé, l’habitat essentiel se compose d’un assemblage d’emplacements géographiques où le bar rayé accomplit les fonctions essentielles à son cycle de vie (reproduction, croissance, alimentation et hivernage). Il a été possible de désigner un habitat essentiel pour (i) l’alimentation des adultes (deux secteurs), (ii) l’hivernage des adultes (deux secteurs), (iii) la reproduction (deux secteurs) et (iv) la croissance des larves et des juvéniles (la zone intertidale d’une profondeur comprise entre 0 et 5 m dans une aire géographique étendue), tel que décrit dans le tableau 6 et illustré sur les figures 3 et 4. Il faut mentionner que, faute d’information disponible, il n’a pas été possible de désigner un habitat essentiel pour les subadultes (individus de 1 à 3 ans).

  1. Alimentation des adultes : secteur (122 km2) longeant la rive nord du Saint-Laurent sur environ 45 km, à la hauteur de l’île aux Coudres, entre Sault-au-Cochon et Cap-aux-Oies; secteur (560 km2) d’environ 115 km de long partant de la ville de Québec, suivant le chenal des Grands Voiliers au sud de l’île d’Orléans, englobant les alentours de l’île aux Grues et se terminant à l’embouchure de la rivière Ouelle (figure 3 et tableau 5).
  2. Hivernage des adultes : secteur de 113 km2 bordé par la rive sud de l’île aux Grues et la côte; secteur de 12 km2 entre la ville de Québec, Lévis et la pointe sud-ouest de l’île d’Orléans (figure 3 et tableau 5).
  3. Reproduction : secteur du bassin de la rivière du Sud (0,24 km2) qui inclut la zone délimitée par le barrage (points 3 et 4) et une ligne reliant le quai du traversier (point 1) et la Pointe aux Oies (point 2) (figure 3, zone B; tableau 5); secteur de l’extrémité portuaire de la ville de Québec à Beauport (0,036 km2) délimité par l’isobathe du 0 m des cartes marines du point 2 au point 3 et fermé à la côte aux points 1 et 4 (figure 3, zone A; tableau 5).
  4. Croissance des larves et des juvéniles : zone riveraine intertidale (290 km2) et d’une profondeur à marée basse comprise entre 0 et 5 mètres (482 km2) incluse à l’intérieure de la zone de délimitation comprise entre Lévis (en amont de l’embouchure de la rivière Chaudière) et, respectivement, Rivière-du-Loup sur la rive sud et Petite-Rivière-Saint-François sur la rive nord; la zone de délimitation inclut les îles et hauts-fonds entre la ville de Québec et l’île aux Grues (figure 4).

Pour les habitats d’alimentation et d’hivernage des adultes et pour les habitats de reproduction, les emplacements des fonctions, caractéristiques et paramètres de l’habitat essentiel ont été déterminés à l’aide de la méthode basée sur une parcelle d’habitat essentiel. En revanche, dans le cas des habitats de croissance des larves et des juvéniles de l’année, les emplacements des fonctions, caractéristiques et paramètres de l’habitat essentiel ont été déterminés à l’aide de la méthode basée sur la zone de délimitation. La méthode basée sur une parcelle d’habitat essentiel implique que l’habitat essentiel correspond exactement à la zone comprise dans les limites déterminées et que l’on sait que cette zone fournit les fonctions et les caractéristiques nécessaires à la survie ou au rétablissement de l’espèce, comme le montre le tableau 6. Par contraste, la méthode basée sur la zone de délimitation implique que l’habitat essentiel ne correspond pas à toute la zone comprise dans les limites déterminées, mais plutôt seulement aux zones situées à l’intérieur des limites géographiques déterminées dans lesquelles la caractéristique biophysique décrite et la fonction qu’elle soutient sont présentes, comme le montre le tableau 6.

Cartes. Voir description ci-dessous.
Figure 3. En haut : Carte montrant l’habitat essentiel désigné pour la fonction d’alimentation des adultes (mai à octobre) et pour la fonction d’hivernage des adultes (novembre à avril). En bas : Cartes détaillées illustrant l‘habitat essentiel désigné pour la fonction de reproduction (mai à juin) dans le secteur à l’extrémité portuaire de la ville de Québec à Beauport (Zone A) et dans le bassin de la rivière du Sud à Montmagny (Zone B). Les coordonnées géographiques détaillées sont données dans le tableau 5. Dans la zone A, l’isobathe du zéro correspond à celui des cartes marines du Service hydrographique du Canada, défini comme la basse mer inférieure, grande marée.
Description longue

La figure 3 est composée de 3 cartes délimitant l’habitat essentiel du bar rayé. La première présente l’aire d’alimentation des adultes qui s’étend de Québec à Rivière-Ouelle sur la rive-sud du Saint-Laurent et de Sault-au-Cochon à Cap-aux-Oies sur la rive-nord. Les aires d’hivernage des adultes sont également affichées sur la carte. L’une est située entre Québec, Lévis et la pointe ouest de l’Île d’Orléans et la seconde se retrouve entre l’Île aux Grues et la rive sud. Sur cette carte, deux carrés sont délimitées l’un étant à l’extrémité portuaire de la ville de Québec à Beauport (carré identifié comme étant la Zone A), le second carré se retrouve à Montmagny dans le bassin de la rivière du Sud (identifié comme étant la Zone B). Ces deux zones illustrent l’habitat essentiel désigné pour la fonction de reproduction (mai à juin). Les deux autres cartes de cette figure sont des agrandissements des zones A et B.

Tableau 5. Coordonnées géographiques des points délimitant les habitats essentiels désignés pour l’alimentation des adultes, l’hivernage des adultes et la reproduction, tels qu’illustrés sur la figure 3.
Alimentation des adultes
Point Latitude Longitude
1 46° 49' 19" N 71° 10' 48" O
2 46° 49' 21" N 71° 12' 55" O
3 46° 50' 19" N 71° 11' 41" O
4 46° 51' 03" N 71° 08' 30" O
5 46° 55' 02" N 70° 53' 40" O
6 46° 58' 04" N 70° 47' 03" O
7 47° 01' 54" N 70° 40' 41" O
8 47° 08' 03" N 70° 32' 41" O
9 47° 07' 59" N 70° 29' 58" O
10 47° 09' 55" N 70° 25' 38" O
11 47° 25' 29" N 70° 03' 29" O
12 47° 25' 54" N 70° 01' 07" O
13 47° 25' 52" N 70° 01' 05" O
14 47° 13' 09" N 70° 37' 24" O
15 47° 12' 49" N 70° 36' 26" O
16 47° 15' 01" N 70° 34' 21" O
17 47° 16' 47" N 70° 32' 56" O
18 47° 20' 28" N 70° 30' 29" O
19 47° 23' 25" N 70° 26' 09" O
20 47° 25' 38" N 70° 18' 57" O
21 47° 27' 24" N 70° 15' 38" O
22 47° 28' 41" N 70° 13' 39" O
23 47° 29' 32" N 70° 12' 39" O
24 47° 30' 19" N 70° 12' 07" O
25 47° 30' 32" N 70° 12' 41" O
Hivernage des adultes
Point Latitude Longitude
A 46° 49' 27" N 71° 10' 36" O
B 46° 49' 56" N 71° 11' 36" O
C 46° 51' 38" N 71° 09' 58" O
D 46° 51' 03" N 71° 08' 30" O
E 46° 50' 44" N 71° 08' 06" O
F 46° 49' 58" N 71° 09' 23" O
G 46° 59' 41" N 70° 32' 57" O
H 47° 02' 31" N 70° 34' 27" O
I 47° 09' 55" N 70° 25' 38" O
J 47° 08' 05" N 70° 22' 04" O
Reproduction (secteur de la ville de Québec, zone A)
Point Latitude Longitude
1 46° 50' 13" N 71° 11' 34" O
2 46° 50' 14" N 71° 11' 32" O
3 46° 49' 59" N 71° 11' 33" O
4 46° 49' 59" N 71° 11' 36" O
Reproduction (secteur de Montmagny, zone B)
Point Latitude Longitude
1 46° 59' 24" N 70° 33' 12" O
2 46° 59' 36" N 70° 33' 01" O
3 46° 59' 13" N 70° 32' 57" O
4 46° 59' 11" N 70° 33' 03" O
Carte. Voir description ci-dessous.
Figure 4. Zone de délimitation (en rouge) à l’intérieur de laquelle l’habitat essentiel désigné pour la fonction de croissance des larves et des juvéniles (juin à novembre) correspond à la zone intertidale (en vert) et à la zone d’une profondeur à marée basse comprise entre 0 et 5 m (en bleu). Le zéro de référence est celui des cartes marines du Service hydrographique du Canada, défini comme la basse mer inférieure, grande marée. ROM : refuge d’oiseaux migrateurs.
Description longue

La figure 4 est une carte délimitant l’habitat essentiel désigné pour la fonction de croissance des larves et des juvéniles (de juin à novembre). Cet habitat correspond à la zone intertidale et la zone d’une profondeur à marée basse comprise entre 0 et 5 m. Cette zone est délimitée par l’embouchure de la rivière Chaudière, elle englobe l’Île d’Orléans rejoint l’embouchure de la Petite-Rivière-Saint-François sur la rive nord. Sur la rive sud, la délimitation s’étend de l’Île aux Grues jusqu’à Rivière-du-Loup.

Fonctions, caractéristiques et paramètres biophysiques

Le tableau 6 présente un résumé de la meilleure information disponible sur les fonctions, les caractéristiques et les paramètres associés à chacune des étapes du cycle de vie et à chaque emplacement géographique du bar rayé (voir les références complètes à la section 4.3 « Besoins de l’espèce »). Veuillez prendre note qu’il n’est pas nécessaire que tous les paramètres d’une caractéristique apparaissent dans le tableau 6 pour que celle-ci soit désignée comme habitat essentiel. Si une caractéristique, telle qu’elle est décrite dans le tableau 6, est présente et capable de soutenir la ou les fonction(s) connexe(s), elle est considérée comme un habitat essentiel pour l’espèce, même si certains de ses paramètres se situent hors des limites indiquées dans le tableau.

Tableau 6. Résumé général des fonctions, caractéristiques et paramètres biophysiques, et emplacement de l'habitat essentiel nécessaire à la survie ou au rétablissement de la population de bar rayé du fleuve Saint-Laurent.
Emplacement géographique Stade biologique Fonctionf Caractéristique(s) g Paramètre(s) h
Secteur situé sur la rive nord de l’estuaire moyen, à la hauteur de l’Île aux Coudres; et
secteur partant de Québec, suivant le chenal des Grands Voiliers au sud de l’Île d’Orléans, englobant les alentours de l’Île aux Grues et se terminant un peu en aval de Rivière-Ouelle
(figure 3, carte du haut)
Adultes Alimentation et migration des adultes en lien avec l’alimentation
(mai à octobre)
  • Eaux estuariennes
  • Disponibilité d’une qualité et d’une quantité adéquates de proies
  • Température de l’eau supérieure à 10 °C
Secteur de Québec et secteur au sud de l’Île aux Grues
(figure 3, carte du haut)
Adultes Hivernage des adultes
(novembre à avril)
  • Eaux estuariennes
  • Température suffisante pour la survie (d’après la littérature, on parle de ≥ -1,5 °C)
  • Concentration en oxygène dissous supérieure à 5 mg/L
Secteur à l’extrémité portuaire de la ville de Québec à Beauport (estuaire fluvial du Saint-Laurent)
(figure 3, zone A)
Adultes et œufs Reproduction
(mai à juin)
  • Zone de confluence à l’embouchure d’une rivière, sous l’influence de la marée
  • Hydrodynamisme : courants complexes
  • Température de l’eau entre 13 et 18 °C; au-delà, les poissons quittent la zone.
  • Courants changeant de direction et de force (de nulles à fortes) selon les marées
  • Zone de cisaillement (entre les courants forts et la zone d’eau plus calme) qui crée un courant giratoire
  • Courant modéré, suffisant pour garder les œufs en suspension
  • Hydrodynamisme suffisant pour assurer l’oxygénation des œufs (concentration seuil en oxygène dissous de 5 mg/L d’après la littérature)
Bassin de la rivière du Sud
(estuaire moyen du Saint-Laurent)
(figure 3, zone B)
Adultes et
œufs
Reproduction
(mai à juin)
  • Embouchure d’une rivière sous l’influence de la marée
  • Bassin composé de chenaux et d’îlots
  • Hydrodynamisme : au pied d’une chute rehaussée d’un seuil bétonné; canal de rejet d’eau d’une centrale hydroélectrique
  • Chenaux d’une profondeur minimum de 1,5 m et d’îlots (exondés à marée basse)
  • Température de l’eau entre 13 et 18 °C pour la fraie; les œufs tolèrent des températures jusqu’à 23 °C.
  • Salinité < 0,2 ‰ à marée basse et de 0,2 à 2,5 ‰ à marée haute (car influence de fortes décharges d’eau douce par la crue printanière de la rivière)
  • Courant modéré, suffisant pour garder les œufs en suspension
  • Hydrodynamisme suffisant pour assurer l’oxygénation des œufs (concentration seuil en oxygène dissous de 5 mg/L d’après la littérature)
Zone riveraine intertidale et d’une profondeur à marée basse comprise entre 0 et 5 mètres incluse à l’intérieur de la zone de délimitation comprise entre Lévis (en amont de l’embouchure de la rivière Chaudière) et, respectivement, Rivière-du-Loup sur la rive sud et Petite-Rivière-Saint-François sur la rive nord; la zone de délimitation inclut les îles et hauts-fonds entre Québec et l’Île aux Grues. (Cette désignation inclut l’anse Saint-Anne, l’habitat essentiel désigné en 2011.)
(figure 4)
Larves et juvéniles de l’année Alevinage (croissance et alimentation)
(juin à novembre)
  • Habitat riverain et de hauts-fonds en zone estuarienne
  • Zone intertidale et d’une profondeur à marée basse comprise entre 0 et 5 m
  • Milieu hétérogène
  • Fort gradient de salinité (préférence des larves pour des salinités inférieures à 0,1 ‰)
  • Zone de front thermique
  • Patron de circulation unique qui contribuerait à l’augmentation de la turbidité locale et à la concentration des proies
  • Disponibilité d’une qualité et d’une quantité adéquates de proies

pour les larves : zooplancton-copépodes et cladocères;
pour les juvéniles : mysidacés, crevettes de sable, poulamons, éperlans, clupéidés

  • Souvent associés à la présence d’herbiers

f Fonction : Processus du cycle de vie des espèces inscrites ayant lieu dans l’habitat essentiel (p. ex., fraie, croissance, alevinage, alimentation et migration). Les dates indiquent la période pendant laquelle la fonction a généralement lieu dans l’habitat essentiel.

g Caractéristique : Les caractéristiques décrivent en quoi l’habitat est essentiel. Ce sont les composantes structurelles essentielles qui permettent les fonctions requises pour répondre aux besoins de l’espèce. Les caractéristiques peuvent changer au fil du temps et sont généralement composées d’un ou de plusieurs paramètres. Une modification ou une perturbation de la caractéristique ou de l’un de ses paramètres peut avoir une incidence sur la fonction et sa capacité de répondre aux besoins biologiques de l’espèce.

h Paramètre : Les paramètres sont les propriétés ou les attributs mesurables de la caractéristique. Les paramètres décrivent comment les caractéristiques déterminées soutiennent les fonctions indiquées comme nécessaires aux processus du cycle biologique de l’espèce.

La fonction d’alimentation des adultes et de migration associée à la quête de nourriture est soutenue, de mai à octobre, par la présence d’eaux estuariennes d’une température supérieure à 10 °C et par une quantité et une qualité adéquates de proies. Selon la littérature, le bar rayé cesse de s’alimenter sous le seuil de température de 10 °C (COSEPAC 2012). Le bar rayé adulte est un prédateur opportuniste de haut niveau trophique; il privilégie le poisson, en particulier l’éperlan et les clupéidés (ibid.).

La fonction d’hivernage des adultes est associée à la période de novembre à avril. Elle est soutenue par la présence d’eaux estuariennes, caractérisées par une température et un taux d’oxygène dissous considérés comme nécessaires à la survie. Selon la littérature, les valeurs seuils pour la température et le taux d’oxygène sont, respectivement, -1,5 °C et 5 mg/L (MPO 2014). Les données sur la température recueillies au cours du relevé télémétrique du MFFP indiquent des valeurs minimales oscillant autour de 0 °C pour les deux sites (Eliane Valiquette, MFFP, comm. pers.).

La fonction de reproduction couvre la période de mai à juin. La reproduction se déroule à l’embouchure de deux rivières, dans la zone de confluence avec le Saint-Laurent et sous l’influence des marées. L’hydrodynamisme est considéré comme une caractéristique clé pour la fonction de reproduction; les courants jouent le double rôle de maintenir les œufs en suspension et d’assurer leur bonne oxygénation (au moins 5 mg/L d’oxygène dissous; MPO 2014, Greene et al. 2009). Les reproducteurs arrivent pour se rassembler et frayer, dès que la température atteint 13 °C; ils quittent le secteur quand la température dépasse 18 °C (MPO 2017a, Valiquette et al. 2017). Selon la littérature, les œufs tolèrent une gamme de température entre 14 °C et 23 °C (Greene et al. 2009). La reproduction a lieu en eaux douces ou légèrement saumâtres.

Les valeurs de salinité mesurées dans le bassin de la rivière du sud à Montmagny varient entre 0,2 ‰ et 2,5 ‰. Dans ce secteur, la forte décharge printanière d’eau douce par la rivière contribue à maintenir une faible salinité dans le bassin, malgré les marées en provenance de l’estuaire moyen du Saint-Laurent. L’hydrodynamisme est influencé par la marée et par la présence du barrage et du canal de rejet de la centrale hydroélectrique. L’hydrodynamisme qui prévaut dans le bassin se traduit par la présence de chenaux et d’îlots (exondés à marée basse), dont la localisation peut légèrement varier selon les années. Les individus utilisent les chenaux pour entrer dans le bassin à marée haute. Peu d’individus sont observés à marée basse, mais les chenaux, d’une profondeur minimum de 1,5 m, offrent les conditions propices pour maintenir les œufs en suspension (Pelletier et al. 2010; MPO 2017a).

Dans le secteur de l’extrémité portuaire de la ville de Québec à Beauport, l’hydrodynamisme est caractérisé par une gyre et une zone de clapotis. Ces caractéristiques sont associées à la présence d’une zone de cisaillement entre, d’une part, les courants présents à la confluence de la rivière Saint-Charles et du Saint-Laurent et, d’autre part, les eaux plus calmes de la baie de Beauport, le tout modulé par la marée.

La fonction de croissance des larves et des juvéniles de l’année est soutenue, de juin à novembre, par la présence d’habitats riverains et de hauts-fonds, en zone intertidale et d’une profondeur comprise entre 0 et 5 m (MPO 2017a, Valiquette et al. 2017). Ces habitats sont situés en eaux estuariennes; ils se trouvent en grande partie dans la zone de transition estuarienne (ZTE) de l’estuaire moyen du Saint-Laurent (Gagnon et al. 1993). La ZTE offre un milieu très hétérogène; elle est caractérisée par une forte turbidité et d’importants gradients de salinité et de température, causés par la rencontre entre les eaux douces du fleuve et les eaux salées de l’Atlantique. La ZTE est une zone très dynamique, où les effets combinés des courants du fleuve et des marées contribuent à mélanger les masses d’eau et à remettre les sédiments marins et côtiers en suspension. Le mélange des masses d’eau s’accompagne également d’un phénomène de précipitation des nutriments et de la matière organique. Les eaux de la ZTE sont par conséquent saumâtres et turbides; elles soutiennent une forte productivité planctonique qui est retenue dans la ZTE par le patron estuarien de circulation des eaux. Cette situation prévaut également localement dans les zones côtières de la ZTE, avec la contribution additionnelle des affluents aux processus locaux.

Selon North et Houde (2003 et 2006), la répartition des larves correspond de près aux fronts salins des estuaires, lesquels régissent la répartition et l’abondance des proies du bar aux stades précoces de son cycle vital. Cette prédiction semble respectée pour le bar rayé de la population du fleuve Saint-Laurent. En effet, la zone d’alevinage des larves originaires de la frayère de Montmagny correspond à la limite du front salin à 0,1 ‰ (Côté 2012). La présence d’un front salin est également caractéristique de la zone de concentration larvaire située en aval de l’Île d’Orléans (Morissette et al. 2016). La répartition des juvéniles est plus étendue que celle des larves; ceux-ci se retrouvent dans différents secteurs de la zone riveraine de l’estuaire du Saint-Laurent (MPO 2017a et références incluses). Cette répartition est cohérente avec le fait que le bar rayé juvénile tolère mieux les variations des conditions abiotiques que la larve et que son régime alimentaire se diversifie.

Les herbiers constituent un habitat recherché par les juvéniles; ils jouent le double rôle d’abri et de garde-manger (Côté 2012; COSEPAC 2012). La zone désignée comme habitat essentiel pour les larves et les juvéniles de l’année est caractérisée par la présence des principaux milieux humides répertoriés pour l’estuaire moyen du Saint-Laurent (Environnement et Changement climatique Canada 2013).

L’habitat essentiel désigné pour les larves et les juvéniles est associé à la disponibilité d’une qualité et d’une quantité adéquates de proies. Environ huit jours après l’éclosion, la larve a épuisé ses réserves vitellines et commence à s’alimenter. La littérature mentionne que le taux de survie des larves dépend directement de l’abondance de zooplancton disponible (Kernehan et al. 1981) et que la condition des larves est corrélée avec la densité de copépodes et de cladocères (Miller 1977; Martin et al. 1985). Ces deux groupes d’espèces dominent dans la communauté zooplanctonique de la ZTE (Cusson 2011 et références incluses). Après la métamorphose de la larve en juvénile, l’alimentation du bar rayé se diversifie et intègre des mysidacés, crevettes de sable, poulamons, éperlans et clupéidés (Robitaille 2010; COSEPAC 2012).

Des travaux sont en cours pour définir les caractéristiques précises de l’habitat qui assurent une alimentation et une croissance optimales des larves et juvéniles de bar rayé de la population du Saint-Laurent (Pascal Sirois, UQAC comm. pers.). Avec cette information, il sera éventuellement possible de préciser les caractéristiques de l’habitat essentiel pour ces stades de vie.

Les caractéristiques anthropiques suivantes sont exclues de l’habitat essentiel : les structures artificielles permanentes déjà en place dans les zones délimitées (p. ex. marinas, quais, pontons). Il est reconnu que des travaux d’entretien de ces structures peuvent être requis, tout comme leur remplacement.

Résumé des objectifs en matière de population et de répartition pour l’habitat essentiel

À l’heure actuelle, on sait que la population est capable de se reproduire naturellement, que son abondance augmente et que son aire de répartition s’étend, dans certains secteurs, au-delà de l’aire connue de la population historique. En absence d’indicateurs quantitatifs mesurant la taille et la répartition de la population ainsi que la capacité de support du milieu, il est pour l’instant impossible de quantifier la contribution de l’habitat essentiel désigné au rétablissement de l’espèce. Cependant, on considère que cet habitat essentiel devrait contribuer à son rétablissement, puisqu’il inclut les deux sites de reproduction connus et un assemblage d’habitats permettant au bar rayé de réaliser son cycle de vie.

Ainsi, l’habitat essentiel désigné correspond à des zones que le ministre des Pêches et des Océans, d’après la meilleure information disponible à l’heure actuelle, considère comme nécessaires pour atteindre en partie les objectifs en matière de population et de répartition de l’espèce requis pour sa survie ou son rétablissement. Des aires d’habitat essentiel supplémentaires pourront être désignées dans les mises à jour du présent document.

8.2 Calendrier des études visant à désigner l’habitat essentiel

Des études plus approfondies sont nécessaires pour désigner d’autres habitats essentiels, préciser les limites de l’habitat essentiel actuellement désigné et élargir les connaissances sur les fonctions, les caractéristiques et les paramètres de l’habitat actuellement désigné nécessaires afin d’atteindre les objectifs en matière de population et de répartition fixés pour l’espèce ainsi que de protéger l’habitat essentiel de la destruction. Voici un tableau décrivant ces études; bon nombre d’entre elles sont déjà amorcées ou bien avancées.

Tableau 7. Calendrier des études visant à désigner/préciser l’habitat essentiel
Description de l’étude Justification Échéancier
Terminer la caractérisation du secteur portuaire de la ville de Québec (à Beauport) comme zone de reproduction

Toutes les informations disponibles (concentration d’individus matures en état de frayer, rapport des sexes, température de l’eau, temps de résidence dans le secteur, hydrodynamisme) indiquent que le secteur portuaire de Québec (à Beauport) correspond à une aire de rassemblement essentielle à la reproduction et à une frayère.

L’identification formelle d’œufs et de larves de bar rayé est nécessaire pour valider la fonction de frayère. Des résultats génétiques préliminaires confirment la présence d’œufs et de larves de bar rayé dans le secteur de Québec en 2016. Il reste à finaliser ces analyses.

2018 à 2021
Préciser l’étendue de la zone utilisée par les bars adultes pendant la période de reproduction (mai-juin) dans le secteur de Beauport, à Québec Les échantillonnages scientifiques réalisés par le MFFP entre 2013 et 2016 à l’embouchure de la rivière Saint-Charles, dans la baie de Beauport et à l’extrémité portuaire indiquent que le bar est concentré dans un secteur riverain de l’extrémité portuaire en période de reproduction (mai-juin). Comme cet échantillonnage est limité aux secteurs riverains de faible profondeur (zone intertidale et zone des  à  m) sous l’influence des marées, il est vraisemblable que le bar utilise également la zone plus profonde située plus au large. L’analyse de données de télémétrie acoustique, recueillies en 2015 et disponibles au MFFP, devrait offrir un premier élément de réponse pour mieux définir l’habitat essentiel. 2018 à 2021
Caractériser l’hydrodynamisme dans les habitats utilisés intensément en période de reproduction

L’hydrodynamisme est reconnu dans la littérature comme une caractéristique clé pour la reproduction du bar rayé.

La frayère de la rivière du Sud à Montmagny montre un hydrodynamisme favorable à la dispersion des œufs et des larves vers des milieux propices à leur survie et leur développement. Des informations fragmentaires suggèrent une situation similaire dans le secteur portuaire de Québec (à Beauport), avec un régime hydrodynamique favorable à l’exportation des larves vers des zones propices situées en aval, dans la zone de turbidité maximale. Il reste à bonifier cette information par la modélisation; une expertise en modélisation est disponible auprès d’Environnement et Changement climatique Canada.

2020 à 2021
Localiser et caractériser d’autres habitats importants en période de reproduction

Depuis 2011, le MFFP a réalisé des échantillonnages à l’embouchure de 14 rivières ou secteurs potentiellement capables de soutenir des activités de reproduction du bar rayé. Le bassin de la rivière du Sud (à Montmagny) est confirmé comme une frayère. es analyses génétiques d’œufs et de larves confirment la présence d’une frayère dans le secteur de Beauport (à Québec). La rivière Ouelle n’est pas ressortie comme un site de fraie, mais davantage comme un site de rassemblement avant la fraie probablement propice à la maturation des gonades.

Considérant que la population de bar est en croissance, il faudrait continuer l’inventaire des sites potentiels de fraie en intégrant les informations les plus à jour quant à l’observation, sur le terrain, de bars rayés en période de reproduction. Dans ce contexte, l’équipe a déterminé des secteurs à prioriser pour l’inventaire, notamment la rivière du Loup, la Côte-de-Beaupré, la rivière Etchemin et le secteur compris entre Trois-Rivières et la ville de Québec.

De plus, une étude récente (UQAC) suggère que la composition chimique du noyau de l’otolithei est un bon candidat pour localiser des sites de fraie. Pour l’instant, les données disponibles suggèrent la présence d’une frayère en milieu oligohalinj, dont la localisation reste à préciser.

2018 à 2023
Terminer La détermination et la caractérisation des aires d’hivernage

Les données de télémétrie du réseau hivernal (une seule année disponible : novembre 2014 à avril 2015) suggèrent que le bar rayé se concentre principalement au sud de l’Île aux Grues et, dans une moindre mesure, dans le secteur de la ville de Québec.
Dans les deux secteurs, la température diminue graduellement durant l’automne, pour se stabiliser autour de 0 °C entre début janvier et fin mars.

Le nombre de bars rayés détectés dans le secteur de Québec demeure stable durant toute la saison hivernale. Cependant, au sud de l’Île aux Grues, la quantité de bars détectés diminue significativement, passant de 43 en décembre à 15 en janvier, puis à 6 en mars. La destination des bars qui semblent quitter le secteur est inconnue.

2019 à 2024
Préciser le rôle du chenal des Grands Voiliers pendant la période d’hivernage Sur la base d’études télémétriques, on sait que, pendant la période d’octobre à avril, le bar se concentre principalement au sud de l’Île aux Grues et, dans une moindre mesure, dans le secteur de la ville de Québec. Des déplacements d’individus entre ces secteurs ont été observés entre novembre et avril (données limitées à une seule année). Il a été suggéré que le chenal des Grands Voiliers qui relie ces deux secteurs est utilisé comme voie hivernale de déplacement. Il reste à définir si ce chenal correspond à un corridor migratoire essentiel à la fonction d’hivernage. 2019 à 2024
Localiser et caractériser l’habitat des jeunes de l’année pendant leur premier hiver

Le relevé standardisé du recrutement de septembre indique que les jeunes de l’année (0+) sont répartis sur une grande aire géographique au début de l’automne. Cet échantillonnage a lieu à une profondeur de  à  m. On ignore où se réfugient les juvéniles pendant l’hiver. En particulier, on ignore si leur répartition se contracte comme celle des adultes. Les données disponibles sur la composition chimique des otolithes de juvéniles (1+) suggèrent qu’une fraction des jeunes de l’année hiverne dans les sections oligohaline et mésohalinej de l’estuaire du Saint-Laurent. Ces observations sont toutefois de portée limitée, car les faibles taux de croissance hivernale pourraient masquer la signature chimique associée au retour des individus en eau douce.

Un échantillonnage hivernal n’est pas envisageable (avec les moyens actuellement disponibles en raison des dangers liés aux conditions hivernales). L’étude de l’habitat hivernal des jeunes de l’année va donc nécessiter l’élaboration de nouvelles approches et méthodologies.

2018 à 2028
Caractériser les paramètres d’habitat importants pour la croissance des jeunes de l’année et, ultimement, déterminer les habitats associés aux meilleurs taux de croissance

Le relevé standardisé du recrutement du MFFP montre une bimodalité dans la fréquence des classes de taille des jeunes de l’année capturés en septembre. Il est proposé que cette bimodalité reflète une reproduction différée dans le temps ou des habitats plus ou moins productifs.

Considérant que les jeunes de l’année doivent atteindre une certaine taille pour survivre à leur premier hiver, il est important de déterminer et de caractériser les habitats associés à des taux de croissance favorables. Des travaux sont en cours (UQAC) pour caractériser l’utilisation, par les jeunes de l’année, des habitats en zone riveraine, le long de l’estuaire fluvial et de l’estuaire moyen. Il reste à terminer ces travaux.

2018 à 2021
Déterminer l’importance des herbiers comme habitat pour les juvéniles en période d’alimentation Dans la littérature, les herbiers sont reconnus comme un habitat important, en termes physique et trophique, pour le bar rayé. Par le passé, la perte de ces habitats a été mise en cause dans la disparition du bar. L’importance des herbiers pour le succès du recrutement des juvéniles n’a pas encore été évaluée pour la population actuelle. 2018 à 2023
Caractériser l’utilisation, par les larves, de la zone désignée comme habitat essentiel pour les larves et les juvéniles de l’année (0+)

En 2012, le MFFP a publié un rapport documentant la présence d’œufs et de larves le long de la rive sud de l’estuaire moyen, indiquant qu’ils provenaient du bassin de la rivière du Sud (Montmagny).

Des travaux en cours (UQAC) documentent une zone de concentration larvaire à la pointe aval de l’Île d’Orléans. Au cours de l’examen régional par les pairs de l’évaluation de l’habitat nécessaire à la survie et au rétablissement du bar rayé, les experts ont émis l’hypothèse que ces concentrations de larves proviendraient du secteur de Beauport dans la ville de Québec. Il reste à terminer ces travaux.

2018 à 2021
Localiser et caractériser l’habitat des subadultes Les données disponibles se rapportent principalement aux juvéniles de l’année (relevé standardisé du recrutement du MFFP) et aux adultes (télémétrie, échantillonnage au filet). Pour cette raison, l’habitat des subadultes (1 à 3 ans) est très peu documenté. 2018 à 2028
Caractériser l’utilisation par le bar de la section amont du fleuve (entre Montréal et Québec)

Pour la population disparue, la section fluviale du Saint-Laurent entre l’amont du lac Saint-Pierre et l’amont de la ville de Québec était une zone importante pour les bars de 3 ans et plus de novembre à juin. Pour la population actuelle, les données de télémétrie indiquent que des bars adultes remontent, en mai, vers la portion fluviale située entre le lac Saint-Pierre et Québec; ces individus semblent repartir vers l’aval en juin.

Par ailleurs, la télémétrie ne détecte pas d’individus en amont du lac Saint-Pierre. Cependant, il existe des mentions de bars adultes capturés dans le secteur de Montréal, par des pêcheurs récréatifs.

Comme aucun bar n’a été marqué en amont du lac Saint-Pierre et que la majorité des bars marqués l’ont été en aval de la ville de Québec, les résultats de télémétrie disponibles donnent peu d’information sur la portion du fleuve en amont de la ville de Québec. Une étude complémentaire est donc requise.

2018 à 2023

i Structure calcaire qui se trouve dans l'oreille interne des vertébrés.

j Une aire oligohaline est légèrement salée et une aire mésohaline est moyennement salée.

8.3 Exemples d’activités susceptibles d’entraîner la destruction de l’habitat essentiel

Les exemples suivants d’activités qui peuvent entraîner la destructionNote de bas de page 7 de l’habitat essentiel (tableau 8) sont fondés sur des activités anthropiques connues susceptibles de se produire dans l’habitat essentiel et autour de ce dernier, et qui entraîneraient la destruction de l’habitat essentiel si aucune mesure d’atténuation n’était prise. La liste des activités n’est ni exhaustive ni exclusive; elle a été dressée en fonction des menaces décrites dans la section 5. L’absence d’une activité humaine donnée dans le présent tableau n’altère en rien la capacité du Ministère à la réglementer en vertu de la LEP. De plus, le fait d’inscrire une activité susceptible de détruire l’habitat essentiel ne signifie pas qu’elle sera systématiquement interdite ni qu’elle conduira inévitablement à une destruction de l’habitat essentiel. Chaque activité proposée doit être évaluée au cas par cas, et des mesures d’atténuation propres à chaque site seront appliquées lorsqu’elles sont possibles et éprouvées. Dans tous les cas, lorsqu’ils sont possibles, des seuils et des limites ont été associés aux caractéristiques de l’habitat essentiel afin de mieux orienter la prise de décisions en matière de gestion et de réglementation. Cependant, il arrive dans bien des cas que l’on connaisse mal une espèce et son habitat essentiel, notamment les données relatives aux seuils de tolérance de cette espèce ou de cet habitat aux perturbations causées par l’activité humaine, d’où l’importance de combler cette lacune.

Tableau 8. Exemple d’activités susceptibles d’entraîner la destruction de l’habitat essentiel
Menace Activité Séquence des effets Fonction touchée Caractéristique touchée Paramètre touché
Pollution Rejet d’effluents (eaux usées) des secteurs municipaux, industriels et agricoles Augmentation de la turbidité
Augmentation de la charge en nutriments
Eutrophisation
Augmentation de contaminants
Destruction des herbiers
Mortalité des proies et baisse de la qualité des proies par bioaccumulation dans la chaîne alimentaire
Toutes (survie et fécondité) Embouchure de rivière
Habitat riverain en zone estuarienne
Eaux estuariennes
Disponibilité des proies
Herbiers
Pollution Fuites et déversements accidentels d’hydrocarbures lors des transports par bateau et pipeline Augmentation de contaminants
Destruction des herbiers
Mortalité des proies
Toutes (survie et fécondité) Embouchure de rivière
Habitat riverain en zone estuarienne
Eaux estuariennes
Disponibilité des proies
Herbiers
Perte ou dégradation de l’habitat Dragage Destruction physique de l’habitat
Modification des régimes d’écoulement
Augmentation de la turbidité
Relargage de contaminants
Diminution de la qualité de l’eau
Reproduction
Croissance des larves et juvéniles
Embouchure de rivière et hydrodynamisme (site de fraie)
Habitat riverain en zone estuarienne
Courants (intensité et patrons de circulation)
Concentration en oxygène
Disponibilité de proies de qualité
Perte ou dégradation de l’habitat Remblayage
Délestage de déblais de dragage
Destruction physique de l’habitat
Modification du substrat
Modification des régimes d’écoulement
Augmentation de la turbidité
Reproduction
Croissance des larves et juvéniles
Embouchure de rivière et hydrodynamisme (site de fraie)
Habitat riverain en zone estuarienne
+
Hauts-fonds
Courants (intensité et patrons de circulation)
Concentration en oxygène
Disponibilité de proies de qualité
Perte ou dégradation de l’habitat Construction de barrage ou de digue
Manipulation du niveau d’eau
Modification des régimes d’écoulement
Diminution de l’hydrodynamisme sous le seuil nécessaire pour maintenir les œufs en suspension
Reproduction Embouchure de rivière en aval de barrage et hydrodynamisme (site de fraie) Courants (intensité et patrons de circulation)
Concentration en oxygène
Perte ou dégradation de l’habitat Aménagement côtier (p. ex. assèchement, empiètement, aboiteau, muret, enrochement) Destruction physique de l’habitat
Modification des régimes d’écoulement
Perte de végétation riveraine et de milieux humides (perte d’abri et de source alimentaire)
Reproduction
Croissance des larves et des juvéniles
Embouchure de rivière et hydrodynamisme (site de fraie)
Habitat riverain en zone estuarienne
Courants (intensité et patrons de circulation)
Concentration en oxygène
Herbiers
Disponibilité des proies
Perte ou dégradation de l’habitat Aménagement d’infrastruc-tures (p. ex.ports, routes, quais) Destruction physique de l’habitat
Modification des régimes d’écoulement
Perte de végétation riveraine et de milieux humides (perte d’abri et de source alimentaire)
Reproduction
Croissance des larves et des juvéniles
Embouchure de rivière et hydrodynamisme (site de fraie)
Habitat riverain en zone estuarienne
Courants (intensité et patrons de circulation)
Concentration en oxygène
Herbiers
Disponibilité des proies

8.4 Mesures proposées pour protéger l’habitat essentiel

En vertu de la LEP, la protection de l’habitat essentiel contre la destruction doit être assurée conformément à la loi dans un délai de 180 jours suivant la désignation de cet habitat dans un programme de rétablissement ou un plan d’action. En ce qui concerne l’habitat essentiel pour le bar rayé, on prévoit que cette protection prendra la forme d’un arrêté visant la protection de l’habitat essentiel en vertu des paragraphes 58(4) et 58(5) de la LEP, qui invoquera l’interdiction, prévue au paragraphe 58(1), de la destruction de l’habitat essentiel désigné.

Pour les zones de l’habitat essentiel situées dans la réserve nationale de faune de Cap-Tourmente et les refuges d’oiseaux migrateurs de (Saint-Vallier, Montmagny, Cap-Saint-Ignace, L’Islet et Trois-Saumons) (figure 4), une description de l’habitat essentiel sera publiée dans la Gazette du Canada, conformément au paragraphe 58(2). L’interdiction du paragraphe 58(1) de détruire l’habitat essentiel s’appliquera quatre-vingt-dix jours après la publication dans la Gazette du Canada.

9 Évaluation des répercussions socioéconomiques et des avantages

La Loi sur les espèces en péril exige une évaluation des répercussions socioéconomiques du plan d’action. L’évaluation comprend les coûts du plan d’action et les avantages découlant de sa mise en œuvre [LEP 49(1)e), 2003]. Cette évaluation aborde seulement les répercussions socioéconomiques marginales de la mise en œuvre du présent plan d’action dans une perspective nationale ainsi que les avantages sociaux et environnementaux qui seraient générés si le plan d’action était mis en œuvre dans son intégralité, en reconnaissant que certains aspects de sa mise en œuvre ne relèvent pas tous de la compétence du gouvernement fédéral. L’évaluation n’aborde pas les répercussions cumulatives du rétablissement des espèces en général ni ne tente de réaliser une analyse coûts-avantages. Elle a pour but d’informer le public et d’éclairer la prise de décisions relatives à la mise en œuvre du plan d’action par les intervenants.

De plus, la conservation des espèces en péril est un élément important de l’engagement du gouvernement du Canada à conserver la diversité biologique en vertu de la Convention internationale sur la diversité biologique. Le gouvernement du Canada s’est également engagé à protéger et à rétablir les espèces en péril par l’intermédiaire de l’Accord pour la protection des espèces en péril. Les répercussions et les avantages associés au présent plan d’action sont décrits ci-dessous.

Dans un premier temps, cette évaluation identifie les principaux intervenants (section 9.1) qui pourraient être touchés ou impliqués par la mise en œuvre des mesures de rétablissement énoncées aux tableaux 3 et 4 du présent document. La section 9.2 examine si la réalisation de ces mesures pourrait comporter des coûts supplémentaires pour les intervenants. Ensuite, la section 9.3 aborde les avantages de la mise en œuvre du plan. Finalement, la section 9.4 évalue les effets distributifs de la mise en œuvre des mesures de rétablissement du bar rayé du fleuve Saint-Laurent.

9.1 Profil des intervenants

Les mesures de rétablissement pour le bar rayé contenues dans les tableaux 3 et 4 sont regroupées selon quatre stratégies :

  1. les ensemencements, inventaires et suivis;
  2. la recherche;
  3. la gestion et la coordination; et
  4. l’intendance et la sensibilisation. Les types d’intervenants qui prendraient part à la réalisation du plan d’action sont également identifiés dans ces mêmes tableaux.

Mesures d’ensemencements, inventaires et suivis

Les principaux partenaires du MPO pour la mise en œuvre des mesures d’ensemencements, d’inventaires et de suivis seraient le gouvernement du Québec (Ministère des Forêts, de la Faune et des Parcs du Québec [MFFP]), le milieu universitaire (Université du Québec à Chicoutimi [UQAC]) et les Premières Nations

Mesures de recherche

La recherche impliquerait la collaboration du milieu universitaire (UQAC) et des gouvernements fédéral et provincial ainsi que les Premières Nations.

Mesures de gestion et coordination

Les mesures de gestion et de coordination seraient assurées par les gouvernements fédéral et provincial en collaboration avec l’industrie de la pêche commerciale (p. ex. les pêcheurs d’anguille). Les pêcheurs commerciaux et récréatifs pourraient être appelés à contribuer à travers le réseau de suivi des prises accidentelles dans la pêche commerciale et dans la pêche sportive (mesure 12 du Tableau 3). Les Premières Nations et les municipalités pourraient aussi participer, à certains niveaux, à la gestion de l’habitat.

Mesures d’intendance et de sensibilisation

Les activités d’intendance et de sensibilisation seraient réalisées en partie par des organisations non gouvernementales avec la collaboration des gouvernements fédéral et provincial. Les Premières Nations, les pêcheurs, les municipalités et le milieu agricole pourraient aussi s’impliquer.

9.2 Répercussions socio-économiques de la mise en œuvre du plan d’action

Plusieurs des actions énoncées dans ce plan sont des initiatives en cours au sein du gouvernement fédéral et par ses partenaires qui se poursuivraient même en l’absence du plan d’action. Bien que ces mesures puissent toucher certains des intervenants identifiés ci-dessus, leur réalisation n’entraînerait pas systématiquement des coûts socioéconomiques supplémentaires pour ces intervenants.

Pour le moment, l’information disponible n’est pas suffisante pour évaluer quantitativement les coûts socio-économiques supplémentaires qui découleraient de la mise en œuvre du plan d’action pour le bar rayé. Par conséquent, les coûts sont évalués en termes qualitatifs puisque la plus grande partie de l’information dont le MPO dispose est de ce type.

Mesures d’ensemencements, inventaires et suivis

La moitié des mesures de rétablissement définies dans le plan d’action du bar rayé sont des mesures d’ensemencements, d’inventaires et de suivis. Les activités d’ensemencement font suite à des projets déjà en cours au MFFP. Quant aux activités d’inventaire et de suivi, elles constituent aussi la poursuite d’initiatives déjà entreprises par le MPO et ses partenaires. Certaines mesures dépassent le cadre du rétablissement du bar rayé et concernent l’acquisition de connaissances sur l’espèce. Il est donc réaliste de penser qu’un bon nombre des activités d’inventaire et de suivi figurant dans les tableaux 3 et 4 seraient réalisées par le MPO et ses partenaires, même en l’absence de plan d’action.

Les mesures d’inventaire et de suivi, dont Pêches et des Océans Canada devrait être responsable, seraient financées à même les programmes réguliers et n’entraîneraient pas de coûts supplémentaires. Quant aux autres mesures qui seraient entreprises par le ministère provincial, le milieu universitaire ou encore les Premières Nations, elles pourraient aussi être financées en partie par des programmes existants du gouvernement fédéral.

Il est donc estimé que la réalisation des mesures d’ensemencement, d’inventaire et de suivi n’engendrerait pas de coûts supplémentaires pour les intervenants concernés.

Mesures de recherche

Le plan d’action énonce trois mesures de recherche visant à acquérir de meilleures connaissances sur le bar rayé et qui pourraient dépasser le cadre du rétablissement de l’espèce. Il est réaliste de penser que les activités de recherche figurant dans les tableaux 3 et 4 seraient réalisées par le MPO et ses partenaires, même en l’absence de plan d’action, et donc n’engendreraient pas de coûts supplémentaires.

Mesures de gestion et coordination

Cinq mesures de gestion et de coordination sont définies dans le plan d’action du bar rayé qui concerneraient le MPO, le MFFP et l’industrie. La gestion et la coordination qui relèveraient de Pêches et Océans Canada seraient financées à même les programmes réguliers et donc n’engendreraient pas de coûts supplémentaires. Les mesures concernant le gouvernement provincial, l’industrie et les pêcheurs commerciaux et récréatifs pourraient être financées en partie par des programmes existants du gouvernement fédéral.

Mesures d’intendance et de de sensibilisation

Les activités de sensibilisation et d’intendance énoncées dans le plan d’action du bar rayé sont pour la plupart actuellement en cours et visent principalement à informer les utilisateurs du Saint-Laurent et le public en général (pêcheurs sportifs, pêcheurs commerciaux, Premières Nations, résidents riverains, municipalités, etc.) de l’importance de la protection du bar rayé pour son rétablissement. Toutefois, pour certains intervenants qui choisiraient de prendre part au rétablissement du bar rayé, la mise en œuvre de ces mesures pourrait occasionner des coûts supplémentaires. Le MPO ne dispose pas de suffisamment de renseignements à ce stade pour quantifier ces coûts, mais ils varieraient selon l’ampleur des activités de sensibilisation entreprises. Ces mesures pourraient engendrer des coûts supplémentaires et, dans certains cas, être financées par des programmes existants du gouvernement fédéral.

9.3 Avantages de la mise en œuvre du plan d’action

La mise en œuvre des mesures énoncées dans le plan d’action contribuera de manière positive à l’atteinte de l’objectif à long terme de rétablissement du bar rayé du fleuve Saint-Laurent de manière à rencontrer les critères qui permettraient à la population de passer de son statut actuel, en voie de disparition (COSEPAC, 2012), à celui de préoccupant.

Les avantages découlant du rétablissement du bar rayé du fleuve Saint-Laurent sont difficilement quantifiables. La protection et le rétablissement des espèces en péril peuvent entraîner des avantages et des répercussions. Cependant, la Loi sur les espèces en péril reconnait « que les espèces sauvages, sous toutes leurs formes, ont leur valeur intrinsèque et sont appréciées des Canadiens pour des raisons esthétiques, culturelles, spirituelles, récréatives, éducatives, historiques, économiques, médicales, écologiques et scientifiques » (LEP 2003). Les écosystèmes sains et autosuffisants, qui comprennent une diversité spécifique, dont les espèces en péril, apportent une contribution positive aux moyens de subsistance et à la qualité de vie de l’ensemble de la population canadienne. Un examen de la littérature confirme que la population canadienne tient à la préservation et à la conservation des espèces en soi. Les actions prises pour préserver une espèce, comme la protection et la remise en état de l’habitat, sont aussi importantes. En outre, plus une action contribue au rétablissement d’une espèce, plus le public accorde une valeur élevée à de telles actions (Loomis et White, 1996; Pêches et Océans Canada, 2008).

La population québécoise accorde une très grande importance à la pêche sportive. Notamment, le retour du bar rayé dans la baie des Chaleurs, en Gaspésie, fait l’objet d’une activité récréotouristique qui attire un nombre important de pêcheurs sportifs dans la région. La présence d’une nouvelle espèce sportive vedette telle le bar rayé représente une opportunité extraordinaire de développer et valoriser une pêcherie pour l’Est-du-Québec, en complément à l’offre de pêche au saumon atlantique. Une enquête sur la pêche sportive au bar rayé en Gaspésie effectuée en 2015 a permis d'évaluer que dès la deuxième année d'existence de cette nouvelle pêcherie, plus de 7 300 jours de pêche ont été consacrés au bar rayé, ce qui représente des retombées économiques d'au moins 1 million de dollars. Si le rétablissement du bar rayé permet le retour d'une pêche sportive dans l'estuaire du Saint-Laurent, on estime que certaines régions pourraient bénéficier de retombées socio-économiques appréciables.

9.4 Effets distributifs

Un grand nombre de parties concernées participeront à la mise en œuvre des actions formulées dans ce plan et engageront des coûts qui varieront en fonction de leur implication. Considérant que la majorité des mesures énoncées au plan d’action sont reliées au programme de rétablissement du bar rayé du fleuve Saint-Laurent existant et constituent la continuation d’activités déjà en cours, les coûts supplémentaires pour le MPO et ses partenaires devraient être faibles.

Par ailleurs, les avantages de l’adoption du plan d’action pour le bar rayé seraient répartis sur l’ensemble de la population canadienne étant donné la valeur économique que cette dernière attribue au rétablissement du bar rayé et à la protection de son habitat.

10 Mesure des progrès

Un rapport sur la mise en œuvre du programme de rétablissement et plan d’action (en vertu de l’article 46 et 55 de la LEP) sera produit par l’évaluation des progrès réalisés relativement à la mise en œuvre des grandes stratégies et des mesures proposées à la section 7.2 (tableaux 3 et 4).

Un rapport sur les répercussions écologiques et socioéconomiques du plan d'action (en vertu de l'article 55 de la LEP) sera produit par l'évaluation des résultats du suivi du rétablissement de l'espèce et de sa viabilité à long terme et par l'évaluation de la mise en œuvre du plan d'action.

11 Activités autorisées par le programme de rétablissement

La LEP stipule ce qui suit : « Les paragraphes 32(1) et (2), l’article 33 et les paragraphes 36(1), 58(1), 60(1) et 61(1) ne s’appliquent pas à une personne qui s’engage dans une activité autorisée par un programme de rétablissement, un plan d’action ou un plan de gestion et qui est également autorisée, en vertu d’une loi du Parlement (y compris en vertu des articles 53, 59 ou 71), à s’engager dans une telle activité.  » [paragr. 83(4)]

Les activités plus bas sont autorisées par le présent programme de rétablissement :

11.1 Activités de pêche

Bien que la pêche du bar rayé ne soit pas permise dans le fleuve Saint-Laurent, en amont d’une ligne reliant Forestville (île Patte de lièvre) à Rimouski (pointe à Santerre), des individus sont capturés accidentellement lors de certaines activités de pêches commerciales, sportives et autochtones. La remise à l’eau de ces poissons est cependant obligatoire selon le Règlement de pêche du Québec (1990), DORS/90-214, pris en vertu de la Loi sur les pêches, L.R.C., 1985, ch. F-14. En 2010, un avis scientifique a été rédigé afin d’évaluer l’impact des captures accidentelles de bar rayé par les pêches commerciales et sportives sur la survie et le rétablissement de la population. En dépit des lacunes dans les connaissances sur la biologie de cette population et sa vulnérabilité à la capture accidentelle, l’avis scientifique de ce comité a conclu que les activités de pêche en eau douce et en milieu marin, telles qu’elles sont pratiquées, étaient peu susceptibles d’avoir, dans l’ensemble, un effet sur la survie et le rétablissement de la population de bar rayé (MPO 2010). Cinq recommandations ont été formulées dans cet avis afin d’atténuer l’impact des pêches, sur le taux de mortalité du bar rayé et d’assurer un suivi de cette population :

  1. Mettre en œuvre des mesures d’atténuation (c.-à-d. la remise à l’eau obligatoire) pour réduire l’impact possible des pêches commerciales et sportives sur la population de bar rayé.
  2. Prendre des mesures pour que les captures accidentelles de bars rayés soient déclarées. 
  3. Favoriser les activités de sensibilisation auprès des pêcheurs.
  4. Maintenir un réseau de suivi basé en partie sur les prises accidentelles de bars rayés par les pêcheurs commerciaux et permettant la récolte de spécimens.
  5. Réévaluer l’impact des captures accidentelles dans un délai maximal de cinq ans, ou avant, en cas de modifications qui toucheraient la vulnérabilité du bar rayé aux captures accidentelles par les pêches commerciales et sportives.

L’équipe de rétablissement considère que l’avis – selon lequel les activités de pêche en eau douce et en milieu marin, telles qu’elles sont pratiquées, sont peu susceptibles d’avoir un effet sur la survie et le rétablissement du bar rayé du fleuve Saint-Laurent – est toujours pertinent et que ses conclusions demeurent valides. Toutefois, une réévaluation de l’impact des captures accidentelles de bar rayé par les pêches commerciales et sportives sur la survie et le rétablissement de la population doit être effectuée prochainement.

En vertu du paragraphe 83(4) de la LEP, le présent programme de rétablissement autorise les pêcheurs à exercer des activités de pêche au titre d’un permis de pêche communautaire des Autochtones, de pêche sportive ou de pêche commerciale, sous réserve des conditions suivantes :

De plus, un réseau de suivi a été mis en place dans le but de documenter l’établissement des bars rayés, d’évaluer les paramètres de la population, de localiser leurs déplacements et de vérifier la présence de reproduction naturelle. Les pêcheurs commerciaux qui y participent doivent avoir un permis à des fins scientifiques, éducatives ou de gestion de la faune (permis SEG) du MFFP afin de conserver les bars rayés capturés accidentellement pour les remettre aux biologistes du MFFP responsables du bar rayé.

En vertu du paragraphe 83(4) de la LEP, le présent programme de rétablissement autorise les pêcheurs qui exercent des activités de pêche commerciale ainsi que des activités de pêche à des fins scientifiques, éducatives ou de gestion de la faune, à conserver des bars rayés sous réserve des conditions suivantes :

Pour les activités qui ne sont pas mentionnées ci-dessus et qui sont susceptibles d’interagir avec la population de bar rayé du fleuve Saint-Laurent d’une manière non conforme à la LEP, des permis délivrés en vertu de l’article 73 peuvent être obtenus en communiquant avec Pêches et Océans Canada à l’adresse suivante : Permis de la Loi sur les espèces en péril.

12 Références

Annexe A : effets sur l’environnement et les autres espèces (EES)

Conformément à la Directive du Cabinet sur l’évaluation environnementale des projets de politiques, de plans et de programmes, les documents de planification du rétablissement en vertu de la LEP intègrent des considérations en matière d’évaluation environnementale dans l’ensemble du document. Ce type d’évaluation vise à intégrer des considérations environnementales dans l’élaboration de politiques publiques, de plans et de propositions de programme pour appuyer une prise de décision éclairée en matière d’environnement et évaluer si les résultats d’un document de planification du rétablissement peuvent avoir des répercussions sur certains éléments de l’environnement ou sur l’atteinte des objectifs et des cibles de la Stratégie fédérale de développement durable.

La planification du rétablissement vise à favoriser les espèces en péril et la biodiversité en général. Il est cependant reconnu que des programmes peuvent, par inadvertance, produire des effets environnementaux qui dépassent les avantages prévus. Le processus de planification fondé sur des lignes directrices nationales tient compte directement de tous les effets environnementaux, en s’attachant particulièrement aux impacts possibles sur les espèces ou les habitats non ciblés. Les résultats de l’évaluation environnementale stratégique sont directement intégrés au programme de rétablissement et plan d'action lui-même, mais sont également résumés ci-après dans le présent énoncé.

L’ÉES a permis de conclure que le programme de rétablissement et plan d’action favorisera clairement l’environnement en encourageant le rétablissement du bar rayé de la population du fleuve Saint-Laurent et n’entraînera pas d’effets négatifs significatifs. De plus, la réintroduction et le rétablissement du bar rayé dans le fleuve Saint-Laurent contribuent à la restauration de la biodiversité de cet écosystème. La possibilité que le rétablissement du bar rayé produise par inadvertance des effets négatifs sur d’autres espèces, notamment sur des espèces proies ou compétitrices, a été évaluée par une analyse de risques (Robitaille 2000) préalable à la réintroduction. L’analyse conclut que le bar rayé ne devrait pas réduire de façon marquée l’abondance des espèces dont il se nourrirait. Quelques études préliminaires spécifiques sur le régime alimentaire menées par le MFFP et le MPO démontrent le comportement opportuniste du bar rayé dans son alimentation et n’indiquent pas d’impact significatif sur les proies que pourraient constituer les espèces mentionnées plus haut. Cependant, il est attendu qu’il se produira une réallocation des ressources trophiques entre ce poisson et les autres prédateurs. Malgré tout, des préoccupations surgissent pour certaines espèces précaires comme le saumon ou la truite de mer.

Annexe B : registre des initiatives de collaboration et de consultation

Des programmes de rétablissement et des plans d’action doivent être préparés en collaboration avec d’autres instances, organisations, parties ou personnes touchées, comme il est décrit dans les articles 39 et 48 de la Loi sur les espèces en péril. Pêches et Océans Canada a utilisé un processus de concertation pour solliciter la participation à l’élaboration du programme de rétablissement et plan d’action. Le Ministère a fait appel à une équipe de rétablissement où siègent des experts des gouvernements provincial et fédéral de même que du milieu académique, des Premières Nations, des ONG et des pêcheurs sportifs et commerciaux. L’information sur la participation est présentée ci-après.

Annexe B : Registre des initiatives de collaboration et de consultation
Membre de l’équipe de rétablissement Organisme d’appartenance
Marthe Bérubé MPO, Division de la gestion des espèces en péril
Myriam Bourgeois MPO, Division de la gestion des espèces en péril
Alexandra Valentin MPO, Division de la gestion des espèces en péril
Jean-Louis Provencher Agence Parcs Canada, Direction de la Conservation des Ressources naturelles
Valérie Bujold MFFP, Direction de la gestion de la faune de la Gaspésie
Marc-Antoine Couillard MFFP, Direction de l’expertise sur la faune aquatique
Karine Gagnon MFFP, Direction de la gestion de la faune du Saguenay
Catherine Gaudreau MFFP, Direction de l’expertise sur la faune aquatique
Valérie Harvey MFFP, Direction de la gestion de la faune de la Capitale-Nationale-Chaudière-Appalaches
Michel Legault MFFP, Direction de l’expertise sur la faune aquatique
Léon L’Italien MFFP, Direction de la gestion de la faune de la Capitale-Nationale-Chaudière-Appalaches
Geneviève Ouellet-Cauchon MFFP, Direction de l’expertise sur la faune aquatique
Julien Mainguy MFFP, Direction de l’expertise sur la faune aquatique
Simona Motnikar MFFP, Direction de la gestion de la faune de la Capitale-Nationale-Chaudière-Appalaches
Anne-Marie Pelletier MFFP, Direction de la gestion de la faune du Bas-Saint-Laurent
Frédéric Sheehy MFFP, Protection de la faune, Saguenay-Lac-Saint-Jean
Éliane Valiquette MFFP, Direction de l’expertise sur la faune aquatique
Guy Verreault MFFP, Direction de la gestion de la faune du Bas-Saint-Laurent
Amélie D’Astous Bureau du Nionwentsïo des Hurons-Wendat
Hugo Mailhot Couture Grand Conseil de la Nation Waban-Aki
Pascal Sirois Université du Québec à Chicoutimi
Michel Baril Fédération québécoise des Chasseurs et Pêcheurs
Guillaume Bourget Regroupement des organismes de bassins versants du Québec
Bruno Ouellet Pêcheries Ouellet
Jean-Éric Turcotte Stratégies Saint-Laurent

En outre, l’ébauche du programme de rétablissement et plan d’action a été soumis pour consultation au gouvernement du Québec et aux Premières Nations concernées. La participation du public, d’organisations autochtones et d’intervenants supplémentaires sera sollicitée par l'intermédiaire de sa publication dans le Registre public des espèces en péril pendant une période de commentaires publics de 60 jours. Les commentaires reçus aideront à mettre au point le document définitif.

Annexe C : catégories d’évaluation des menaces

Probabilité d’occurrence
Probabilité d’occurrence Définition
Menace connue ou menace très susceptible de se concrétiser Cette menace a été observée dans 91 % à 100 % des cas.
Probable La probabilité que cette menace se réalise va de 51 % à 90 %.
Peu probable La probabilité que cette menace se réalise va de 11 % à 50 %.
Très peu probable La probabilité que cette menace se réalise va de 1 % à 10 % ou moins.
Inconnue Il n’y a pas de données ni de connaissances préalables sur la manifestation de cette menace maintenant ou dans l’avenir.
Niveau d’incidence
Niveau d’incidence Définition
Extrême Déclin important de la population (de 71 à 100 %) et possibilité de disparition.
Élevé Perte de population importante (de 31 % à 70 %) ou menace compromettant la survie ou le rétablissement de la population.
Moyen Perte modérée de population (de 11 % à 30 %) menace susceptible de compromettre la survie ou le rétablissement de la population.
Faible Peu de changements dans la population (de 1 % à 10 %) ou menace peu susceptible de compromettre la survie ou le rétablissement de la population.
Inconnue Aucune connaissance, documentation ou donnée antérieure pour orienter l’évaluation de la gravité de la menace sur la population.
Certitude causale
Certitude causale Définition
Très élevée Des preuves irréfutables indiquent que la menace va se produire et que l’ampleur des effets sur la population peut être quantifiée.
Élevé Des preuves concluantes établissent un lien de cause à effet entre la menace et le déclin de la population ou le danger pour sa survie ou le rétablissement.
Moyen Des preuves établissent un lien de cause à effet entre la menace et le déclin de la population ou le danger pour sa survie ou son rétablissement.
Faible Il y a des preuves limitées soutenant un lien théorique entre la menace et le déclin de la population ou le danger pour sa survie ou son rétablissement.
Très faible Il y a un lien plausible non prouvé indiquant que la menace entraîne un déclin de la population ou met en danger sa survie ou son rétablissement.

Annexe D : acronymes

Annexe D : acronymes
Acronyme Description
COSEPAC Comité sur la situation des espèces en péril au Canada
FédéCP  Fédération québécoise des chasseurs et pêcheurs
LEP Loi sur les espèces en péril
MDDELCC Ministère du Développement durable, de l'Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques
MFFP Ministère des Forêts, de la Faune et des Parcs
MPO Ministère des Pêches et des Océans
MRC Municipalités régionales de comté
MTMDET Ministère des Transports, mobilité durable et Électrification des transports
ONG Organisation non gouvernementale
PN  Premières Nations
ROM Refuge d’oiseaux migrateurs
SCCS Secrétariat canadien de consultation scientifique
UQAC Université du Québec à Chicoutimi
ZTE Zone de transition estuarienne

En outre, l’ébauche du programme de rétablissement et plan d’action a été soumis pour consultation au gouvernement du Québec et aux Premières Nations concernées. La participation du public, d’organisations autochtones et d’intervenants supplémentaires sera sollicitée par l'intermédiaire de sa publication dans le Registre public des espèces en péril pendant une période de commentaires publics de 60 jours. Les commentaires reçus aideront à mettre au point le document définitif.

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