Plan de gestion de la réserve nationale de faune Tintamarre : chapitre 5
5 Approches de gestion
Cette section et le tableau suivant présentent certaines des approches susceptibles d'être utilisées dans la gestion de la réserve nationale de faune (RNF) Tintamarre. Les activités de gestion particulières seront toutefois définies lors du processus de planification annuelle et mises en œuvre en fonction des ressources financières et humaines disponibles.
| Menaces et défis en matière de gestion | But et objectif(s) | Approches de gestion (y compris les activités et le niveau de priorité) Note du tableaue |
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| Les parcs éoliens prennent de l'expansion. | But no 7 : L'utilisation des terres et les facteurs stressants anthropiques d'origine extérieure à la RNF n'auront pas d'incidences négatives sur les populations d'espèces sauvages et leur habitat dans la RNF. Objectif 7.a : Fournir des informations sur la RNF pour les évaluations environnementales dans les aires adjacentes à la RNF. |
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| Les activités touristiques peuvent entraîner des effets environnementaux cumulatifs. | But no 6 : Les activités humaines dans la RNF n'auront pas d'incidences négatives sur les populations d'espèces sauvages ou sur leur habitat. Objectif 6.b : Favoriser la reconnaissance et la compréhension du public des « effets environnementaux cumulatifs », et de la façon dont des activités courantes répétées peuvent se révéler nuisibles aux espèces sauvages et à leur habitat. |
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| Les VHR, et plus particulièrement les véhicules tout-terrain, causent des dommages considérables et persistants aux habitats fragiles des terres humides dans la RNF. | But no 6 : Les activités humaines dans la RNF n'auront pas d'incidences négatives sur les populations d'espèces sauvages ou sur leur habitat. Objectif 6.a : Réduire ou éliminer l'utilisation des véhicules hors route et les dommages à la végétation associés à ces véhicules dans la RNF. |
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| Le camping et les feux à ciel ouvert causent de considérables dommages durables à la végétation. | But no 6 : Les activités humaines dans la RNF n'auront pas d'incidences négatives sur les populations d'espèces sauvages ou sur leur habitat. Objectif 6.a : Réduire ou éliminer le camping illégal et les feux à ciel ouvert, ainsi que les dommages connexes dans la RNF. |
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| Les changements climatiques prévus pourraient entraîner l'inondation des marais bas de la RNF Tintamarre. | But no 7 : L'utilisation des terres et les facteurs stressants anthropiques d'origine extérieure à la RNF n'auront pas d'incidences négatives sur les populations d'espèces sauvages et leur habitat dans la RNF. Objectif 7.b : Entreprendre des activités en vue d'atténuer les conséquences négatives des changements climatiques, comme la modification des régimes de gestion de l'eau et la mise en œuvre de programmes de lutte contre les espèces envahissantes. |
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| Espèces envahissantes | But no 5 : Contrôler les espèces végétales envahissantes et non indigènes afin que la taille et le nombre de parcelles d'habitat connues pour être dominées par ces espèces diminuent au fil du temps. Objectif 5.a : Une gestion active des végétaux et de leur habitat éliminera (dans la mesure du possible) ou réduira l'étendue et la densité des espèces végétales non indigènes et exotiques. |
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| Les passes à poissons ne sont pas efficaces. | But no 4 : Les passes à poissons seront entretenues et améliorées pour les poissons, particulièrement les espèces migratoires (diadromes), dans les cours d'eau de la RNF. Objectif 4.a : Remplacer, d'ici trois ans, la passe à poissons existante au lac Front par une passe qui permet le passage du gaspareau. |
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5.1 Gestion de l'habitat
5.1.1 Forêts
La gestion à grande échelle des forêts dans la RNF Tintamarre n'est ni souhaitable ni prévue. Toutefois, des zones choisies de peuplements forestiers plus matures à faible diversité d'essences, perdues par suite d'exploitations forestières passées, seront augmentées par la plantation d'essences indigènes de feuillus résistants.
5.1.2 Champs et fermes
Des manipulations de l'habitat seront réalisées afin de maintenir certains habitats de terres stériles (terres agricoles abandonnées) à différents stades de début de succession végétales. La végétation qui offre une grande valeur alimentaire aux espèces sauvages, comme les pommiers sauvages, les aubépines (Crataegus sp.) les rosiers de Virgine (Rosa virginiana) et les viornes obiers (Viburnum opulus), sera conservée et enrichie grâce à un élagage judicieux. Les matières ligneuses de cette activité seront empilées pour servir d'abri aux petits mammifères (Gullion, 1984; Gullion, s.d.; Sepik et al., 1981). Ce travail fournira et conservera une plus grande variété d'habitats dans la RNF Tintamarre. Ce paysage est également bénéfique en tant qu'aire de nidification et d'alimentation pour la chouette rayée, le grand-duc d'Amérique, l'autour des palombes, le busard Saint-Martin et le hibou des marais; cette dernière espèce est catégorisée comme préoccupante.
5.1.3 Bassins de retenue d'eau douce
L'histoire humaine du marais de Tantramar a entraîné des manipulations considérables de l'habitat (Hustved,t 1987; MacKinnon, 2000). Les hautes terres ont jadis été déboisées pour le commerce du bois d'œuvre, et les terres humides ont été coupées de la mer par des digues, puis drainées par des fossés à des fins agricoles. À la suite d'une série d'études, il a été décidé que ces terres agricoles endiguées, depuis longtemps abandonnées, devraient être inondées par la construction de bassins de retenue en collaboration avec Canards illimités Canada (Whitman, 1974; Kerekes, 1975; Whitman, 1976; Beauchamp, 1976; Beauchamp et Kerekes 1980; Wein et Krusi, 1982; MacKinnon et al., 1995; Gloutney et MacKinnon, 2009). Une série de terres humides d'eau douce peu profonde ont été aménagées afin de fournir un habitat à une variété d'espèces. L'entretien des digues et des barrières de contrôle incombe à Canards illimités Canada en vertu d'une entente avec Environnement et Changement climatique Canada; cependant, la gestion biologique est réalisée de façon concertée à la suite d'évaluations annuelles des niveaux d'eau et des modifications de l'habitat, qui se fondent sur des inspections des lieux et des photographies aériennes. Les activités de gestion peuvent inclure la manipulation des niveaux d'eau pour réprimer la végétation dans les zones qu'elle a envahies (tableau 5). En de rares occasions, il est possible aussi de retirer la couverture végétale émergente de façon mécanique si la manipulation des niveaux d'eau à elle seule ne suffit pas (l'envahissement par les quenouilles ou les phragmites est particulièrement préoccupant). La gestion de ces bassins de retenue s'efforce de créer ou de maintenir un marais semi-émergent, c'est-à-dire un mélange égal de végétation et d'eau libre dans lequel il y a une grande diversité de plantes et un haut degré d'entremêlement (Sojda et Solberg, 1993).
5.1.4 Tourbières ombrotrophes et minérotrophes
Ces habitats seront conservés dans leur état actuel. Les lacs Grassy Hole qui se déversent dans le lac Jolicure Large sont depuis longtemps reconnus comme jouissant d'un habitat intact unique (Spicer et al., 1995). Pour cette raison, ces petits lacs et les tourbières ombrotrophes et minérotrophes adjacentes ont été proposés au titre de réserve écologique au Nouveau-Brunswick (Wein et Jones, 1975). C'est là un des rares endroits où l'on peut observer la présence du bronzé d'Amérique (Lycaena hyllus) et il sert aussi d'aire de nidification au troglodyte à bec court (Cistothorus platensis) [Dionne et al., 1988].
5.2 Gestion de la faune
5.2.1 Espèces en péril
Les terres stériles seront maintenues au stade de début de succession afin de fournir un habitat d'alimentation et de nidification pour le hibou des marais, le goglu des prés et la sturnelle des prés. Cet habitat sera également bénéfique aux prédateurs des prairies comme le busard Saint-Martin, la buse à queue rousse (Buteo jamaicensis) et, durant l'hiver, à la buse pattue (Buteo lagopus).
La gestion des marais de quenouilles et des tourbières minérotrophes fera l'objet d'une attention particulière, vu leur importance comme habitat pour le petit blongios et le râle jaune respectivement. Aucune gestion particulière de l'habitat n'est requise pour les insectivores aériens (l'hirondelle rustique, le martinet ramoneur et l'engoulevent d'Amérique).
5.3 Surveillance
Les activités de surveillance ont pour la plupart consisté en des évaluations périodiques des habitats au moyen d'inventaires et de cartographie de la flore, et une grande partie des activités se concentraient sur les bassins de retenue dont le niveau de l'eau est régulé. D'autres activités de surveillance sont effectuées annuellement par l'évaluation et l'examen de photographies aériennes à haute résolution, dans le cadre d'une rencontre annuelle avec les gestionnaires des milieux humides de Canards illimités Canada et du Service canadien de la faune. La surveillance de nombreuses espèces, comme la sauvagine, est réalisée dans le cadre d'un programme national plus vaste; des études spécifiques ont toutefois été menées (Milton, 1977; Hanson, 1993, Maillet et al., 1999). D'autres études sont réalisées au besoin, soit par le Service canadien de la faune soit en collaboration avec des chercheurs universitaires.
Une surveillance efficace et efficiente nécessite une planification soignée et une approche coordonnée. La surveillance sera exercée de manière à contribuer à l'atteinte des objectifs du programme de rétablissement et du plan d'action des espèces en péril. Les besoins en matière de surveillance continue sont les suivants :
- la répartition et l'abondance des oiseaux des marais, comme le grèbe à bec bigarré, la foulque d'Amérique, la marouette de Caroline, le petit blongios et le râle de Virginie, dans l'entourage des bassins de retenue dont le niveau de l'eau est régulé;
- la surveillance périodique de l'abondance et de la répartition des oiseaux chanteurs dans l'intérieur boisé de la RNF et dans les habitats des prairies (en soutien à une évaluation de la qualité des habitats des terres stériles);
- la surveillance de la répartition et de la densité des espèces végétales non indigènes envahissantes dans la RNF;
- la surveillance des modifications du macrohabitat des terres humides au moyen d'une analyse annuelle de photographies aériennes à haute résolution;
- la surveillance décennale des modifications du macrohabitat de la végétation des hautes terres au moyen de photographies aériennes à haute résolution;
- la surveillance des activités interdites des VHR dans la RNF;
- la surveillance des conditions limnologiques et des populations de poissons tous les 10 ans.
5.4 Recherche
Les activités de recherche seront envisagées pour la délivrance des permis quand les résultats de ces recherches présentent un potentiel dans les domaines suivants :
- l'amélioration de notre compréhension de l'utilisation de l'habitat ainsi que de la répartition et de l'abondance de la sauvagine, des oiseaux de rivage et des oiseaux migrateurs;
- l'amélioration de notre compréhension des besoins des espèces sauvages en matière d'habitat;
- l'amélioration de notre compréhension des besoins des espèces en péril en matière d'habitat;
- l'amélioration de notre compréhension de l'efficacité des techniques de restauration des habitats;
- l'amélioration de notre compréhension des effets possibles des changements climatiques et de la variabilité de la gestion du niveau de l'eau;
- l'amélioration de notre compréhension des effets des espèces envahissantes et des mesures pour leur contrôle et leur éradication.
Pour obtenir un permis de recherche dans la RNF Tintamarre ainsi que des renseignements à propos des lignes directrices pour présenter une proposition de recherche, veuillez communiquer avec :
Réserve nationale de faune - Demandes de permisEnvironnement et Changement climatique Canada, Service canadien de la faune
17, allée Waterfowl, C. P. 6227
Sackville (Nouveau-Brunswick) E4L 1G6
Les demandes de permis doivent être adressées à : Permi.Atl@ec.gc.ca.
5.5 Information et sensibilisation du public
Située à tout juste neuf km au nord-est de Sackville et à proximité immédiate de l'autoroute Transcanadienne, la RNF Tintamarre est bien en mesure d'attirer encore plus de visiteurs qu'à l'heure actuelle. Cette RNF n'est pas activement présentée comme destination touristique. Bien que l'accès au public soit autorisé, les services publics se limitent toutefois aux routes d'accès et aux aires de stationnement. La région est fréquentée par des ornithologues et des photographes amateurs, ainsi que par des adeptes du canotage. La chasse, la pêche et le piégeage peuvent également être pratiqués, mais ces activités sont assujetties aux règlements fédéraux et provinciaux applicables. Ces activités de plein air soutiennent l'économie locale et fournissent des bienfaits pour la santé des utilisateurs de la RNF grâce à l'exercice aux fins de loisirs et au plaisir que ceux-ci en retirent.
L'accès du public dans la RNF Tintamarre à des fins récréatives est assujetti au Règlement sur les réserves d'espèces sauvages de la Loi sur les espèces sauvages du Canada. Des activités comme le camping et les feux à ciel ouvert sont interdites. Certaines activités traditionnelles sont autorisées, comme la chasse, la pêche et le piégeage, de même que le canotage et l'observation des oiseaux aux termes d'un avis public affiché à tous les principaux accès à l'aire protégée. La chasse, la pêche et le piégeage sont des activités qui exigent l'obtention des permis provinciaux et fédéraux applicables. La RNF est ouverte au public, et ses lacs sont fréquemment utilisés durant les mois d'été par des adeptes de canotage récréatif.
Le caractère unique de la RNF Tintamarre et son importance en tant que complexe de terres humides a été souligné dans la série nationale d'affiches sur le « patrimoine à protéger ». Un nombre limité de ces affiches est disponible, sur demande, pour les enseignants, les élèves et le grand public.