Rapport coût-efficacité des 100 médicaments représentant les plus grandes dépenses des régimes publics au Canada, 2015-2021 : une étude transversale répétée
Présentation à la conférence ISPOR 2024, du 5 au 8 mai 2024 et à la conférence de l’ACRSPS, du 14 au 16 mai 2024
Étienne Gaudette, Shirin Rizzardo, Yvonne Zhang, Mina Tadrous et Kevin R. Pothier
Introduction
Objectif : Évaluer la distribution et les dépenses selon la catégorie de rapport coût-efficacité parmi les médicaments dont les niveaux de dépenses des régimes publics sont les plus élevés au Canada.
Approche : La part des dépenses en produits pharmaceutiques des régimes publics allouée aux médicaments avec ou sans un bon rapport coût-efficacité a été estimée à l’aide des évaluations de l’Agence canadienne des médicaments et des technologies de la santé (ACMTS) du rapport coût-efficacité et des données sur les dépenses des régimes publics canadiens de six provinces.
Data
Données des régimes publics d’assurances-médicaments : Les données sur les dépenses proviennent du Système national d’information sur l’utilisation des médicaments prescrits (SNIUMP) de l’Institut canadien d’information sur la santé. L’analyse concerne les régimes publics d’assurance-médicaments provinciaux du Manitoba, de l’Ontario, du Nouveau-Brunswick, de la Nouvelle-Écosse, de l’Île-du-Prince-Édouard et Terre-Neuve-et-Labrador, car ces provinces financent les médicaments pour le cancer à emporter à domicile.
Principaux résultats et mesures : Les résultats clés sont les évaluations du rapport coût-efficacité des 100 médicaments de marque pour patients externes selon les dépenses brutes des régimes publics dans tout exercice financier (soit d’avril à mars) entre 2015 et 2021, et les dépenses brutes des régimes publics selon la catégorie de rapport coût-efficacité. Le rapport coût-efficacité des médicaments a été établi en fonction du type d’examen de l’ACMTS et des résultats obtenus dans les trois catégories suivantes :
Type d’examen et résultats | Catégorisation du rapport coût/efficacité |
---|---|
Analyse de minimisation des coûts |
|
Coûts décroissants |
Bon rapport |
Coûts croissants |
Mauvais rapport |
Coûts décroissants par rapport à certains comparateurs et coûts croissants par rapport à d’autres |
Mitigé ou imprécis |
Peu concluant |
Mitigé ou imprécis |
Rapport coût/utilité différentiel |
|
Dominant |
Bon rapport |
RCUD < 50 000 $ CA 2021 |
Bon rapport |
RCUD > 50 000 $ CA 2021 |
Mauvais rapport |
Dominé |
Mauvais rapport |
Peu concluant |
Mitigé ou imprécis |
Autre |
Mitigé ou imprécis |
Aucun examen défini |
s. o. |
RCUD : rapport coût/utilité différentiel.
Résultats
Il y a une augmentation marquée d’évaluations indiquant un mauvais rapport coût-efficacité parmi les 100 médicaments représentant les plus grandes dépenses
- Le nombre de médicaments avec un bon rapport coût-efficacité parmi les 100 médicaments aux dépenses les plus élevées a augmenté de 18 en 2015 à 24 en 2021, avec un sommet de 28 en 2019. Les médicaments avec un bon rapport coût-efficacité qui ont été retirés du classement comprenaient quatre médicaments indiqués pour le traitement de l’hépatite C et les virus de l’immunodéficience humaine.
- Le nombre de médicaments avec un mauvais rapport coût-efficacité est passé de 29 en 2015 à 42 en 2021 et comprend de nouvelles thérapies pour différentes indications (p. ex. : fibrose kystique et psoriasis).
- Ces augmentations sont accompagnées d’un déclin, principalement des médicaments étant depuis plus longtemps sur le marché sans évaluation ou avec une évaluation imprécise parmi les 100 médicaments.
Figure 1. Distribution des 100 médicaments de marque représentant les plus grandes dépenses selon la catégorie de rapport coût-efficacité, de 2015 à 2021
Figure - version texte
2015 | 2016 | 2017 | 2018 | 2019 | 2020 | 2021 | |
---|---|---|---|---|---|---|---|
Non évalué | 31 | 27 | 25 | 22 | 19 | 19 | 19 |
Résultats mitigés ou imprécis | 22 | 22 | 21 | 18 | 18 | 17 | 16 |
Mauvais rapport | 29 | 31 | 31 | 33 | 35 | 39 | 41 |
Bon rapport | 18 | 20 | 23 | 27 | 28 | 25 | 24 |
Sources : Données de l’Institut canadien d’information sur la santé (ICIS) et examens en vue du remboursement faits par l’Agence canadienne des médicaments et des technologies de la santé (ACMTS).
La part des dépenses en médicaments ayant un mauvais rapport coût-efficacité a augmenté de 50 % entre 2015 et 2021
- Globalement, les dépenses ont augmenté 68 % plus rapidement pour les médicaments avec un mauvais rapport coût-efficacité comparativement à celles pour les médicaments avec un bon rapport (taux de croissance annuel composé de 15,8 % par rapport à 9,4 % au cours de la période).
- Par conséquent, la part des dépenses en médicaments ayant un mauvais rapport coût-efficacité est passée de 30 % en 2015 à 45 % en 2021, alors que celle des dépenses en médicaments avec un bon rapport est restée majoritairement stable, entre 40 % et 46 % (Figure 2).
- Ces tendances sont accompagnées d’un déclin dans la proportion des dépenses allouées aux médicaments avec une évaluation dont les résultats sont mitigés ou imprécis, de 27 % à 15 %.
Figure 2. Dépenses sur les 100 médicaments de marque représentant les plus grandes dépenses selon la catégorie de rapport coût-efficacité, de 2015 à 2021
Figure - version texte
2015 | 2016 | 2017 | 2018 | 2019 | 2020 | 2021 | |
---|---|---|---|---|---|---|---|
Bon rapport | 42 % | 41 % | 45 % | 46 % | 46 % | 42 % | 40 % |
Mauvais rapport | 30 % | 36 % | 35 % | 36 % | 37 % | 42 % | 45 % |
Résultats mitigés ou imprécis | 27 % | 24 % | 20 % | 19 % | 18 % | 16 % | 15 % |
Sources : Données de l’Institut canadien d’information sur la santé (ICIS) et examens en vue du remboursement faits par l’Agence canadienne des médicaments et des technologies de la santé (ACMTS).
Remarque : Cette figure ne comprend pas les médicaments qui n’ont pas été évalués par l’ACMTS.
Conclusions
Une part importante et croissante des dépenses en médicaments du secteur public au Canada a été allouée aux médicaments avec un mauvais rapport coût efficacité, soit qui augmentaient les coûts relativement à des traitements équivalents existants, soit qui offraient de faibles avantages par rapport à leur coût différentiel. Bien que certains médicaments à mauvais rapport coût-efficacité offrent aux patients des options de traitement cliniquement souhaitables, l’allocation de budgets importants à ces traitements empêche les dépenses qui ont de meilleures incidences ailleurs dans le système de soins de santé et peut limiter la capacité à financer des innovations pharmaceutiques véritablement révolutionnaires à l’avenir.
Limites
Comme pour toutes les analyses des dépenses publiques en produits pharmaceutiques, l’analyse tient compte des prix courants des médicaments, et les rabais confidentiels n’étaient pas accessibles. Les tendances documentées peuvent avoir été influencées par les changements et les améliorations dans les processus de l’ACMTS au fil du temps, notamment l’utilisation accrue de l’analyse de coût-utilité et la baisse du nombre d’évaluations dont les résultats sont mitigés ou imprécis (Figure 3). L’ACMTS ne reconnaît pas de seuil officiel de rapport coût-efficacité pour ses analyses. Des consultations publiques et l’adoption d’une valeur officielle pour le Canada aideraient à préciser le degré d’acceptabilité des tendances relatives aux dépenses.
Figure 3. Dépenses sur les 100 médicaments de marque représentant les plus grandes dépenses selon le type d’évaluation par l’ACMTS, de 2015 à 2021
Figure - version texte
2015 | 2021 | |
---|---|---|
Coût/utilité différentiel | 26 | 48 |
Minimisation des coûts | 36 | 30 |
Autre type | 7 | 3 |
Non évalué | 31 | 19 |
Publication récente
Une version plus approfondie de la présente recherche, en anglais seulement, a été récemment publiée dans une revue évaluée par les pairs :
Gaudette É, Rizzardo S, Zhang Y, Pothier KR, Tadrous M. Cost-effectiveness of the top 100 drugs by public spending in Canada, 2015–2021: a repeated cross-sectional study. BMJ open. 2024 Mar 1;14(3):e082568.
Avis de non-responsabilité
Même s’ils sont fondés en partie par les données fournies par l’Institut canadien sur la santé (ICIS), les énoncés, les résultats, les conclusions, les points de vue et les opinions indiqués dans le présent rapport sont exclusivement ceux du CEPMB.