# 2011-067 Paye et avantages sociaux, Paye, Payé en trop, Remise, Transfert de catégorie de service (TCS)
Sommaire de cas
Date de C & R : 2011–12–21
La plaignante qui était caporal-chef (cplc) dans la Force de réserve, a été muté dans la Force régulière et est devenue officier. Sa solde a été établie au taux de solde correspondant à l’échelon de solde de niveau 10 du grade d’élève officier. Trois ans plus tard, il a été décidé que le taux de solde établi au moment de la mutation équivalait à l’échelon de solde de niveau 4 du grade de sergent (sgt) plutôt qu’au niveau 4 du grade de cplc. La directive d’affectation – Enrôlement ou mutation (la directive) de la plaignante a donc été modifiée en conséquence, ce qui a entraîné un trop-payé de 9 929,08 $. On a informé la plaignante qu’il s’agissait d’une créance contre la Couronne qu’elle devait rembourser.
La plaignante n’a pas contesté qu’elle avait été payée à un taux auquel elle n’avait pas droit. Toutefois, elle a soutenu que les paiements en trop qu’elle avait reçus provenaient d’une [TRADUCTION] « erreur systémique » et qu’elle ne devrait pas être obligée de rembourser ces montants. Elle a contesté la décision qui a été prise de réduire sa solde et de recouvrer tous les paiements versés en trop. La plaignante a souligné que, bien qu’elle ait fait des démarches pour vérifier si elle était payée au bon taux, elle n’a jamais obtenu d’explication claire à ce sujet. Selon elle, les conditions de service initiales constituaient une offre qu’elle avait acceptée de bonne foi et qui devait être respectée par les Forces canadiennes (FC). Elle a ajouté qu’elle a pris des engagements financiers en se fondant sur ce qu’elle croyait être le bon taux de solde et toute tentative visant à recouvrer des montants versés en trop lui causerait des difficultés financières. Elle a demandé que la dette en question soit radiée ou fasse l’objet d’une renonciation.
Selon le sommaire préparé par l’autorité initiale (AI), la directive et les offres de mutation entre éléments ne sont pas des contrats et les règles en matière de droit des contrats et de droit du travail ne s’appliquent pas à la relation qui existait entre un membre des FC et l’État. Il y était également indiqué que, conformément à la politique actuelle des FC, s’il y a eu une erreur lors de la fixation du taux de solde d’un membre, celle-ci doit être corrigée, car les membres doivent être payés selon le taux auquel ils ont droit. Le sommaire indiquait aussi que les FC ne peuvent renoncer aux dettes ou les radier lorsqu’elles ont trait à la solde, car celles-ci peuvent être « recouvrées » des membres des FC.
Dans sa décision, l’AI a expliqué qu’au moment de sa mutation, la plaignante avait reçu une solde selon le taux de solde du grade de sgt et non pas celui d’un cplc, et a conclu que la plaignante aurait dû recevoir une solde correspondant à l’échelon de solde au niveau 4 du grade de cplc.
En ce qui concerne la question du contrat, le Comité a reconnu que la relation entre les membres des FC et l’État n’est pas de nature contractuelle; toutefois, le Comité a indiqué que, bien que l’affaire Gallant, maintes fois citée, protège la Couronne contre un recours civil pour rupture de contrat, cela ne veut pas dire que la Couronne ne doit pas respecter ses engagements ou qu’elle doit refuser d’accorder une mesure de réparation dans le cadre de la procédure de règlement des griefs.
Selon le Comité, ce dossier était le dernier d’une liste trop longue d’exemples de graves erreurs commises par des « experts » des FC qui donnent lieu au versement de trop-payés aux membres des FC. Souvent, comme en l’espèce, ces erreurs ne sont pas décelées pendant une longue période, les sommes payées en trop s’accumulent (parfois pour atteindre des montants très élevés) et les autorités des FC exigent tardivement leur remboursement. Le Comité a reconnu que la procédure de règlement des griefs ne prévoit pas de mesure de réparation s’il y a eu des déclarations faites par négligence ou une erreur administrative, et qu’il ne lui restait, eu égard aux faits convaincants en l’espèce, qu’à examiner la possibilité de la remise de dettes.
À l’instar de la plaignante, le Comité a reconnu qu’il y avait eu une erreur quant au taux de solde; toutefois, il a procédé à un examen minutieux des dispositions législatives et réglementaires concernant la remise des dettes lorsque des sommes sont dues à la Couronne, ainsi que des récents dossiers des FC ayant porté sur la remise de dettes. Le Comité a indiqué qu’il est saisi d’un nombre considérable de griefs portant sur des trop-payés et que, bien que dans certains cas la dette puisse donner droit à une remise ou en justifier une, cette mesure de réparation ne semble pas exister pour les membres des FC. Selon le Comité, la position des FC à ce sujet est incorrecte, incompatible avec les dispositions de la Loi sur la gestion des finances publiques, fondée sur une mauvaise interprétation des directives du Conseil du Trésor (CT), et elle cause préjudice aux membres des FC.
Selon le Comité, il est assez significatif que dans deux dossiers de grief, en 2004, le chef d’état-major de la Défense (CEMD) de l’époque a conclu que la remise de la dette est la mesure de réparation appropriée. Toutefois, bien que le CEMD ait ordonné qu’une présentation soit faite au gouverneur en conseil (GC) contenant la recommandation que le CT permette la remise de la dette, le personnel du CT était en désaccord avec la demande car les plaignants en question ne répondaient pas au « critère strict » en matière de remise et, par conséquent, aucune demande formelle n’a été faite aux ministres du CT ou au GC.
Le Comité a reconnu que, malheureusement, il n’existe aucune politique des FC concernant la remise de dettes. Le Comité a cependant indiqué que certains ministères fédéraux ont des politiques bien établies sur la remise de dettes qui précisent le genre d’éléments de preuve à fournir afin de recommander au ministre concerné que le dossier soit envoyé aux ministres du CT pour leur examen. Le Comité a fait état de la politique sur la remise de dettes utilisée par l’Agence du revenu du Canada et a proposé d’en appliquer les critères énoncés dans les lignes directrices (difficultés excessives, mesure ou conseil erroné, difficultés financières assorties de circonstances atténuantes et résultats imprévus résultat de la législation) à la présente affaire. Le Comité a souligné qu’il ne serait pas nécessaire de répondre à tous ces critères; le fait de répondre à un seul serait suffisant pour conclure qu’il devrait y avoir remise de dettes.
Le Comité a conclu qu’il était déraisonnable et injuste, dans les circonstances, de recouvrer cette dette de la plaignante ou d’autres membres des FC à qui l’on a attribué un taux de solde inexact lors de leur mutation entre éléments.
Le Comité a recommandé au CEMD d’accueillir le grief.
Le Comité a recommandé au CEMD d’ordonner aux autorités ministérielles de préparer une présentation au CT dans laquelle on recommanderait la remise de la dette de la plaignante et la réouverture des dossiers de tous les autres membres des FC qui sont dans une situation semblable à celle de la plaignante. Le Comité a, en sus, recommandé que l’action en recouvrement soit suspendue jusqu’à ce que le GC rende une décision.
Sommaire de la décision du CEMD
Date de la décision du CEMD : 2013–02–28
Le CEMD a souscrit en partie à la recommandation du Comité d'accueillir le grief puisque des mécanismes internes relevant de lui permettaient de réparer des erreurs commises dans la gestion générale du présent dossier. Le CEMD n'a donc pas ordonné qu'une présentation soit envoyée au CT en vue d'une remise de la dette de la plaignante.
Le CEMD a conclu que la directive initiale d'affectation-Enrôlement ou mutation avait établi, de façon adéquate, le taux de solde de la plaignante lors de la mutation entre éléments et de l'enrôlement dans le Programme de formation des officiers de la Force régulière en juin 2006, conformément au niveau D du tableau A de l'alinéa 204.211 (10) b) des DRAS. Même si ce tableau a été abrogé avec effet rétroactif au mois d'avril 2006, le CEMD a appliqué la Loi d'interprétation et la présomption selon laquelle il n'est pas permis de modifier des droits acquis. Il a conclu que la plaignante avait le droit de bénéficier du taux de solde indiqué dans le tableau qui était en vigueur à la date de l'enrôlement. Cependant, le CEMD a indiqué qu'il n'avait pas le pouvoir de rétablir le tableau en question. Selon le CEMD, la plaignante n'a pas bénéficié du bon taux de solde, car le système informatique centralisé de rémunération n'était pas ajusté correctement.
Afin de compenser la contrainte excessive subie par la plaignante, le CEMD a notamment ordonné au Chef-Personnel militaire (CPM) de faire en sorte que la plaignante soit enrôlée dans le Programme de formation universitaire – Militaires du rang (PFUMR) à partir de juin 2006 (une option qui convient mieux afin de reconnaître le service antérieur de la plaignante), qu'elle soit nommée officier au grade de sous-lieutenant et bénéficie d'une promotion immédiate au grade de lieutenant (Lt), conformément à l'annexe 6 de l'OAFC 11-6, qu'elle soit rémunérée selon le niveau D du tableau C de l'alinéa 204.211(4)b) des DRAS et l'alinéa 204.04(3)b) des DRAS, et qu'elle reçoive deux catégories de prime de rendement additionnelles correspondant au grade de Lt, le lendemain de sa nomination comme officier.
Le CEMD a souscrit à la recommandation systémique du Comité et a demandé, sous pli séparé, que le sous-ministre délégué (Finance et Services du Ministère) examine le rapport du Comité et donne son avis sur le processus ministériel à suivre afin que l'autorité de dernière instance puisse avoir recours à la disposition sur la remise de dette, prévue dans la Loi sur la gestion des finances publiques, à titre de mesure de réparation dans le cadre de la procédure de règlements des griefs des FC. Le CEMD a aussi ordonné au CPM de prendre des mesures proactives pour examiner et régler, sur le plan administratif, les dossiers de plusieurs autres membres des FC qui ont été traités de la même façon que la plaignante lors de leur mutation entre éléments du 1er avril 2006 au 30 novembre 2006.
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