# 2012-074 Harcèlement
Sommaire de cas
Date de C & R : 2012–11–27
En septembre 2005, le plaignant, qui était en service à l’étranger, a été accusé sous le code de discipline militaire de ne pas avoir respecté les normes sur la tenue vestimentaire. Le 3 octobre 2005, le plaignant a déposé une plainte de harcèlement à l’encontre de son adjudant (Adj) qui comprenait 35 exemples de commentaires et de situations qui, selon lui, constituaient du harcèlement. La plainte comprenait des allégations d’abus de pouvoir, notamment en raison de la manière dont les accusations avaient été déposées contre lui et du fait que l’Adj lui rappelait constamment les piètres résultats qu’il avait obtenu dans son rapport d’appréciation du personnel (RAP), à l’occasion devant d’autres personnes.
Après une évaluation de la situation (ÉS) de la plainte, le commandant du plaignant a conclu que les allégations ne correspondaient pas à la définition de « harcèlement ». Le 15 novembre 2005, le plaignant a déposé un grief dans lequel il demandait qu’une enquête en matière de harcèlement soit entreprise par une autorité indépendante.
L’autorité initiale (AI) s’est dit d’accord, dans un premier temps, avec la conclusion de l’ÉS, mais après avoir obtenu des commentaires additionnels du plaignant, a ordonné la tenue d’une enquête en matière de harcèlement. En tant qu’officier responsable (OR), l’AI a conclu que les allégations n’avaient pas été démontrées. Toutefois, ayant noté l’existence d’un « schisme irréconciliable » entre le plaignant et sa chaîne de commandement, l’AI a ordonné que le plaignant soit rapatrié une année plus tôt. Il semblerait que le plaignant ait préparé un grief le 18 mai 2006, toutefois il n’y a aucun élément de preuve au dossier démontrant que le grief aurait été déposé. Le 30 juin 2006, le conseiller juridique du plaignant a demandé que les griefs du plaignant (le plaignant avait également déposé un grief concernant son RAP) soient suspendus jusqu’à la conclusion de la procédure disciplinaire.
Le 26 août 2008, le conseiller juridique du plaignant a écrit au directeur général Autorité des griefs des Forces canadiennes (DGAGFC) pour lui demander l’autorisation de continuer avec la procédure de grief, y compris la plainte de harcèlement, même si la date limite pour leur dépôt avait été dépassée. Le DGAGFC a répondu que l’autorité de dernière instance n’était pas en mesure d’examiner la question et de prendre une décision avant que le plaignant [TRADUCTION] « explique par écrit la nature particulière de tout grief additionnel […] » par l’entremise de son commandant. Le 16 décembre 2008, le plaignant a déposé un grief qui reprenait essentiellement les allégations et les demandes contenues dans le grief du 18 mai 2006 qui n’avait pas été signé.
Le 29 juin 2012, à la suite d’une demande d’information présentée par le bureau de l’Ombudsman des Forces canadiennes, le DGAGFC a demandé au plaignant s’il désirait toujours exercer son droit de grief. Le plaignant a répondu par l’affirmative et le dossier a été référé au Comité.
Le plaignant a contesté la décision de l’OR qui visait à exclure la question des accusations portées contre le plaignant de l’enquête. Il était d’avis que les circonstances ayant mené au dépôt d’accusations pouvaient équivaloir à de l’abus de pouvoir. Le plaignant a aussi fait valoir que certains faits concernant son RAP 2004/2005, y compris les commentaires incessants de l’Adj concernant ce RAP, auraient dû être examinés par les enquêteurs, car ils étaient pertinents aux allégations de harcèlement. Au sujet du rapatriement anticipé, le plaignant estimait que la décision était injustifiée et avait nui à sa carrière. Initialement, le plaignant a demandé qu’une décision soit rendue relativement à sa plainte; il a aussi demandé de recevoir le versement complet des avantages sociaux et des allocations qu’il n’avait pas reçus en raison de son rapatriement, d’obtenir une compensation financière pour les douleurs et les souffrances subies et de recevoir des excuses de l’Adj et de la chaîne de commandement. Toutefois, dans la dernière lettre envoyée au Comité, le plaignant a indiqué qu’il demandait seulement un examen de sa plainte de harcèlement.
Même si une AI a décidé, quant au grief initial, qu’une enquête en matière de harcèlement devait avoir lieu, aucune AI n’a été désignée pour examiner le grief du 16 décembre 2008 dans lequel le plaignant contestait la décision de l’OR prise à la suite de l’enquête.
Le Comité a indiqué que les documents au dossier semblaient démontrer que le grief du mois de mai 2006 n’avait pas été présenté en bonne et due forme. Le Comité n’a pas jugé utile d’examiner davantage cette question étant donné que le DGAGFC avait, par la suite, autorisé le plaignant à présenter de nouveau son grief dans lequel il contestait le fait que certains éléments de preuve n’avaient pas été étudiés dans le cadre de l’enquête en matière de harcèlement, ainsi que la décision de l’OR. Le Comité s’est donc penché sur le grief du 16 décembre 2008
Selon le Comité, il était regrettable que le dossier soit resté inactif jusqu’au mois de juin 2012, sans aucune raison apparente. Le Comité a également noté que, même si le plaignant contestait le mandat de l’enquête et l’enquête comme telle, le dossier ne contenait aucune copie du rapport d’enquête, ni du mandat. Les tentatives du Comité afin de trouver et d’obtenir ces documents importants n’ont pas porté ses fruits. De plus, selon le Comité, même si ces documents devenaient disponibles et qu’on concluait qu’ils étaient incomplets, il ne serait pas utile d’ordonner la tenue d’une nouvelle enquête à propos d’une situation qui a eu lieu il y a sept ans, étant donné que la plupart des parties visées, y compris le plaignant, ont déjà été libérées.
Selon le Comité, peu importe que l’OR ait conclu à la présence ou non de harcèlement, des documents au dossier révélaient la présence de conflits en milieu de travail et les allégations du plaignant suscitaient des inquiétudes quant au traitement de ces plaintes. En l’absence d’un dossier complet, le Comité ne pouvait pas décider si la conclusion de l’OR était raisonnable. Néanmoins, il se sentait obligé de formuler des commentaires étant donné que les allégations du plaignant méritent d’être examinées dans la mesure de ce qui est possible dans les circonstances. Selon le Comité, il était clair des commentaires de l’OR que le commandant et l’OR étaient d’avis que les allégations du plaignant concernant les accusations d’infraction disciplinaire et le RAP ne constituaient pas du harcèlement. Par conséquent, ces deux questions n’ont pas été étudiées dans le cadre de l’enquête en matière de harcèlement. Comme l’a soutenu le plaignant, en dépit de la question des accusations et du contenu du RAP, les circonstances qui ont mené au dépôt d’accusations et la manière dont le plaignant a été traité relativement à la question des normes de tenue vestimentaire, peuvent avoir constituées un abus de pouvoir. Selon le Comité, l’exclusion de ces allégations, en particulier celle concernant le fait que l’Adj a rappelé à plusieurs reprises au plaignant, parfois devant d’autres personnes, qu’il avait reçu un RAP considéré comme inférieur, a peut-être dénaturé le contenu de la plainte et les effets sur les conclusions formulées à la suite de l’enquête. Selon le Comité, le fait que le plaignant avait déposé un grief séparé concernant le contenu du RAP n’était pas pertinent à la question du harcèlement.
De plus, le Comité a constaté qu’on avait fait peu de cas de la perception du plaignant quant à l’attitude de son Adj envers lui et a indiqué que des recherches pour établir si d’autres membres de l’unité s’étaient sentis offensés par l’Adj auraient pu être appropriées, bien qu’il faut garder à l’esprit, bien sûr, qu’une personne puisse se sentir offensée par une remarque alors qu’une autre ne le sera pas. De plus, selon le Comité, la prétention du plaignant selon laquelle certaines des allégations n’avaient pas été examinées par les enquêteurs parce qu’il y avait « absence d’intention malveillante », était également problématique en ce qui a trait aux conclusions de l’enquête. Toutefois, ne pouvant examiner l’ensemble des documents pertinents, le Comité n’était pas en mesure d’établir si la norme de preuve appropriée avait été utilisée, ni si la décision rendue était justifiée et raisonnable.
Le Comité a indiqué que, même si le plaignant initialement n’était pas à l’aise avec la décision du rapatriement, plus tard il est venu à la conclusion que cette décision avait été prise dans son intérêt. Concernant l’indemnité de services à l’étranger, le Comité a indiqué qu’elles sont accordées pour compenser le coût de la vie à l’étranger et il n’existe aucun droit autrement. Enfin, le Comité a ajouté que si le plaignant désirait obtenir des dommages intérêts, il devait présenter une réclamation à l’encontre de la Couronne par l’entremise du directeur Réclamations et contentieux des affaires civiles étant donné que la procédure de règlements des griefs ne permet pas de trancher de telles réclamations.
Le Comité a recommandé que le Chef d’état-major de la Défense (CEMD) accueille en partie le grief.
Le Comité a recommandé que le CEMD informe le plaignant qu’il déplorait la façon dont le dossier avait été traité.
Sommaire de la décision du CEMD
Date de la décision du CEMD : 2013–07–10
Le CEMD n'a pas souscrit aux recommandations du Comité selon lesquelles le grief devrait être accueilli en partie et le CEMD devrait informer le plaignant qu'il déplore la façon dont le dossier a été traité. Le CEMD a estimé que la plainte de harcèlement du plaignant avait été traitée en conformité avec les principes d'équité procédurale et que la décision de l'officier responsable était raisonnable dans les circonstances.
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