# 2012-111 - Absence de critères encadrant l'exercice du pouvoir de recouvrement, Congé annuel, Préclusion...

Absence de critères encadrant l'exercice du pouvoir de recouvrement, Congé annuel, Préclusion promissoire, Recouvrement paiement en trop/Remise d’une dette

Sommaire de cas

Date de C & R : 2012–11–30

Le plaignant avait été avisé lors de son transfert de la Force de réserve (F rés) à la Force régulière (F rég) en 2009 qu'il avait droit à 30 jours de congé sur une base annuelle en raison de ses états de service totalisant plus de 28 ans de service : le plaignant ayant servi dans la F rég de 1982 à 2002 et la F rés de 2002 à 2009. Lors de sa libération subséquente en 2012, le plaignant a été informé qu'une erreur avait été commise lors de son transfert concernant le montant de de congé auquel il avait droit, résultant en l'octroi de 16 jours de congé de plus ayant été crédités au-delà de ce qu’il avait droit au cours de sa plus récente période de service. Les Forces canadiennes (FC) ont soustrait les quatre jours de congé restant au dossier de congé du plaignant et le plaignant a remboursé les 12 autres jours de congé utilisés totalisant une somme de 2 092,26 $.

Le plaignant a indiqué s'être fié aux spécialistes en la matière qui lui avaient affirmé avoir obtenu une confirmation de l'échelon supérieur qu'il était admissible à 30 jours de congé annuel. Comme il ne s'agissait pas d'une erreur de sa part, le plaignant a demandé le remboursement de la somme en question.

Le dossier a été renvoyé au Comité sans décision de la part d'une autorité initiale.

Le Comité a d'abord déterminé si les politiques en matière d'attribution de congé annuel ont été correctement appliquées. L'article 16.14 des Ordonnances et règlements royaux applicables aux Forces canadiennes (ORFC) prévoit qu'un militaire comptant au moins 28 années de service au sein de la F rég a droit à 30 jours de congé annuel; or, les années de service du plaignant ont été complétées au sein de la F rég et de la F rés. Le sous-alinéa 16.14(4.1)(b) prévoit que le calcul des années de service doit s'effectuer à partir du "lendemain du jour où la présente période de service continu et la précédente période de service du militaire totalisent 28 années". Lors de son transfert vers la F rég, le plaignant comptait une période de service continu de 20 ans au sein de la F rég; le Comité a donc déterminé que le plaignant avait droit à 25 jours de congé annuel et non pas 30 jours.

En ce qui a trait au recouvrement des congés, le Comité était d'avis que les FC appuient leur pratique actuelle sur l'article 208.315 des ORFC qui indique que tout officier désigné par le chef d'état-major de la Défense (CEMD) à cette fin peut ordonner qu'un officier ou militaire du rang soit privé de sa solde et de ses indemnités. Selon le Comité, il s'agit d'un pouvoir discrétionnaire qui peut être exercé ou non dans des circonstances données. Tel qu'expliqué par le Comité précédemment dans un autre cas, afin d'assurer une application juste et équitable, l'exercice d'un pouvoir discrétionnaire doit se faire à l'intérieur de balises prédéterminées; selon le Comité, il ne suffit pas pour une autorité compétente de soutenir qu'elle a appliqué les politiques et exercé sa discrétion, elle doit énumérer les motifs ayant mené à sa conclusion. Le Comité a noté que cela n'avait pas été fait dans le cas présent.

A la lecture de l'article 208.315 des ORFC, le Comité était d'avis que le législateur a permis au CEMD de prévoir les situations où il serait juste et raisonnable de ne pas recouvrer les congés versés en trop. Le Comité a précisé qu'il ne semble exister aucune balise prédéterminée à l'intérieur desquelles les autorités compétentes pourraient équitablement distinguer des cas où l'exercice de cette décision serait ou ne serait pas approprié. Selon le Comité, la détermination et la publication de critères en ce sens seraient d'une grande utilité pour les autorités concernées.

De plus, le Comité a souligné que ce genre de situations se présentait également au sein de la Fonction publique fédérale et la Commission des relations de travail dans la Fonction publique, la "Commission", a dû se pencher sur la question à la lumière du principe de la préclusion promissoire qui, tel qu'expliqué par la Commission, prévoit deux critères afin de déterminer si une créance doit être recouvrée ou non. D'abord, la preuve doit être faite qu'il y a eu une représentation claire et sans équivoque de la part de l'employeur sur laquelle l'employé s'est raisonnablement appuyé et, en second lieu, l'employé doit démontrer que sa confiance envers cette information lui a été préjudiciable.

Dans le cas présent, le Comité était d'avis que la situation du plaignant rencontrait les deux critères de la préclusion promissoire; en effet, le calcul des crédits de congé a été effectué par des experts en la matière. Cette erreur a été entérinée durant trois années consécutives lors desquelles le plaignant a demandé et obtenu les autorisations appropriées afin d'utiliser la totalité de ses crédits de congé. Pour ces raisons, le Comité a conclu qu'il n'était pas raisonnable pour les FC d'exiger le remboursement des 16 jours de congé annuel accordés en trop au plaignant. En vertu du principe de la préclusion promissoire, les FC pouvaient ne pas réclamer le montant en argent et les crédits de congé au plaignant.

Le Comité a recommandé au CEMD d'accorder le grief.

Le Comité a recommandé au CEMD de créditer 16 jours de congé annuel au plaignant afin que ceux-ci lui soient remboursés.

Le Comité a aussi recommandé au CEMD d'ordonner le développement et la publication de balises aux fins d'application de l'article 208.315 des ORFC et d'ordonner la publication d'un CANFORGEN à l'intention des autorités investies d'un pouvoir discrétionnaire afin de leur rappeler leurs obligations lors de l'exercice de ce pouvoir.

Sommaire de la décision du CEMD

Date de la décision du CEMD : 2014–01–17

Le CEMD est partiellement d'accord avec la recommandation du Comité d'accueillir le grief, car il n'est pas d'accord de rembourser systématiquement les 16 jours de congés pris en trop.Le CEMD cite les deux critères de la préclusion promissoire tels qu'expliqués par le Comité: qu'il y a eu une représentation claire et sans équivoque de la part des FAC sur laquelle le plaignant s'est raisonnablement fié et que cette information lui a été préjudiciable, car il a agi en fonction de celle-ci en utilisant les congés auxquels il n'avait pas droit. Le CEMD a utilisé l'analyse du Comité et a conclu qu'effectivement, l'article 208.315 des ORFC prévoit des situations où il serait juste et raisonnable de ne pas recouvrir les congés versés en trop. Par conséquent, le CEMD a déterminé qu'il était injuste de demander le remboursement de 12 jours de congé annuel accordés en trop, pour une erreur qui ne provenait pas du plaignant. Toutefois, le CEMD a déterminé qu'il était raisonnable d'avoir débité les quatre jours de congé annuels restant au compte lors de la vérification des congés au moment de la libération. Le CEMD a conclu qu'en l'absence d'un problème récurrent, il n'est pas d'accord avec la recommandation systémique du Comité d'ordonner le développement et la publication de critères encadrant l'exercice du pouvoir de recouvrement de l'article 208.315 des ORFC.

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