Notes d’allocution pour Ahmed Hussen, ministre de l’Immigration, des Réfugiés et de la Citoyenneté : Croissance économique et prospérité : L’immigration au profit de la classe moyenne
Discours
Canadian Club, Toronto
1er novembre 2018
L’allocution prononcée fait foi
Bonjour et merci d’être ici ce matin. C’est toujours un plaisir de m’adresser au Canadian Club, car je sais que bon nombre d’entre vous contribuent à l’immigration et à des questions plus vastes concernant l’intérêt public canadien.
Je crois que l’immigration est aussi importante pour l’avenir de notre pays qu’elle a été par le passé. C’est pourquoi nous avons déposé hier notre rapport annuel au Parlement sur l’immigration qui, pour la deuxième année consécutive, comprend un plan triennal continu pour l’immigration. Ce plan sur les niveaux d’immigration prévoit faire passer le nombre de résidents permanents admis au Canada de 330 000 cette année à 350 000 en 2021. Nous sommes ainsi juste un peu en deçà de l’augmentation de 1 % de la population dont le Conference Board of Canada et de nombreux autres organismes laissent entendre que le Canada a besoin pour son économie.
Mais nous sommes très près de ce 1 %. Donc je voulais revenir ici aujourd’hui pour pouvoir lancer cette nouvelle. Je veux également expliquer la façon dont nous procédons en vue de continuer à répondre aux besoins en main d’œuvre et de créer des emplois. L’ancien premier ministre du Royaume-Uni, Tony Blair, a déjà dit que si l’on veut évaluer un pays à l’échelle mondiale, il suffit d’examiner le nombre de personnes qui veulent y entrer et le nombre de personnes qui veulent en sortir.
Si nous appliquons cette mesure au Canada, vous vous doutez que nous nous en sortons plutôt bien. Nous vivons dans un monde où le mot « immigrant » résonne différemment d’une personne à l’autre. Nous faisons partie d’une famille mondiale qui fait face à un changement générationnel. Le monde connaît différents niveaux d’immigration rarement observés depuis la Deuxième Guerre mondiale, ce qui suscite un débat chez nous, en Europe, aux États-Unis et partout dans le monde.
Au Canada, nous avons eu la chance, pendant très longtemps, d’être à l’écart des pressions issues des tendances migratoires internationales et des tendances de migration irrégulière qui touchent d’autres pays, puisque nous sommes protégés par trois océans et notre frontière au sud.
Nous commençons à observer certaines difficultés rencontrées par d’autres pays, alors que nous constatons une hausse du nombre de demandeurs d’asile qui franchissent notre frontière avec les États-Unis de manière irrégulière entre les points d’entrée, bien que ces nombres paraissent dérisoires par rapport au nombre de demandeurs d’asile aux frontières européennes et du sud des États-Unis.
Nous avons débattu cette question au Canada, mais nous devons comprendre et prendre au sérieux les préoccupations et les angoisses que suscite cette question chez certaines personnes. Nous devons mieux comprendre les préoccupations légitimes quant à notre capacité d’assurer l’intégration de nouveaux arrivants. Certaines personnes se demandent, par exemple, comment les immigrants peuvent contribuer à notre économie tandis qu’elles-mêmes sont inquiètes de leurs propres perspectives à cet égard. Nous devons les écouter.
Nous devons constamment leur démontrer que l’immigration est un bienfait pour notre collectivité et notre économie. Pour atteindre ce but, j’ai besoin de votre aide. Nous devons faire de plus grands efforts pour rappeler à la population canadienne l’argument en faveur de l’immigration – à savoir pourquoi l’immigration est essentielle non seulement pour les collectivités locales, mais aussi pour notre prospérité collective.
Pour ce faire, nous pouvons emprunter deux voies, tout aussi importante l’une que l’autre. La première est celle des statistiques. En 1971, un Canadien à la retraite pouvait compter sur 6,6 travailleurs canadiens. Ce nombre est maintenant passé à un pour quatre travailleurs, et d’ici 2035, ce qui n’est pas si loin, il sera à un pour deux. Il n’y aura que deux travailleurs canadiens pour soutenir une personne retraitée. Avec un tel ratio, il devient très difficile de maintenir nos programmes sociaux généreux et auxquels nous tenons tant, sans parler de les bonifier ni d’en offrir de nouveaux comme l’assurance-médicaments.
Mieux que les statistiques, je crois que nous pouvons mieux raconter ce qui se passe à l’échelle locale. Peut-être en démontrant comment l’embauche de quelques immigrants permet à une entreprise de croître et d’embaucher d’autres Canadiens, et de prospérer; dans quelle mesure les immigrants acceptent d’occuper des emplois pour lesquels les entreprises ne parviennent pas à trouver des candidats parmi les Canadiens, ou comment les immigrants s’investissent dans leur collectivité, y améliorent leur vie et en font des milieux plus dynamiques.
Ces histoires doivent aussi être honnêtes. Nous devons aussi être francs à l’égard des difficultés que rencontrent les nouveaux arrivants au début de leur nouvelle vie au Canada. En tant que gouvernement, nous avons pris cette question très au sérieux. Nous avons veillé à investir de façon adéquate dans leur établissement et leur intégration. Depuis le début de notre mandat, ce volet de notre budget a augmenté de plus de 30 %, parce que nous comprenons que plus rapidement un nouvel arrivant peut réussir au Canada, plus rapidement il peut contribuer à notre collectivité, et c’est le Canada qui en sort gagnant.
Nous avons, par conséquent, besoin de récits pour montrer que, dans la vaste majorité des cas, les nouveaux arrivants réussissent, ainsi que leurs enfants. Pour montrer comment les nouveaux arrivants adoptent nos valeurs et célèbrent nos libertés, parce que c’est l’une des raisons pour lesquelles ils ont choisi de venir s’installer au Canada. C’est pourquoi, en plus d’annoncer notre plan des niveaux d’immigration, je lance aujourd’hui une initiative intitulée « Pourquoi l’immigration, ça compte ».
Notre site Web L’immigration, Ça Compte présentera des personnes telles qu’Ulrike Bahr-Gedalia, une entrepreneure prospère de la Nouvelle-Écosse qui aide les femmes de sa province à s’engager et à réussir dans le secteur de la haute technologie. Ou vous découvrirez des récits comme celui de Rhose Harris-Ghalia, qui est arrivée ici des Philippines, il y a 20 ans, pensant avoir accepté un emploi à Banff avant de comprendre que la dame, au téléphone, avait en fait dit « Baffin Island ». Elle ne savait pas la différence, mais elle est tombée sous le charme du Nord, où elle demeure encore aujourd’hui, apportant sa contribution à la collectivité locale en exerçant la profession d’infirmière à l’hôpital régional de Baffin.
N’oublions pas non plus Gina Cody. Certains d’entre vous ont peut-être entendu récemment parler d’elle dans les médias. Elle est venue d’Iran en 1979, et elle est devenue la première femme de l’Université Concordia à obtenir un doctorat en génie du bâtiment. Elle a été accueillie par le Canada. Cette femme, qui a bénéficié de l’appui de l’Université Concordia et de sa collectivité locale, a tout récemment fait un don de 15 millions de dollars à la faculté de génie et d’informatique de l’Université Concordia.
Ce qui est incroyable et extraordinaire, Mesdames et Messieurs, ce n’est pas tant l’existence de ces récits, mais leur nombre. Ils sont, en effet, très courants. Partout au Canada, vous entendrez des récits comme ceux-ci de la bouche de nombreux nouveaux arrivants. C’est là que vous intervenez aujourd’hui. J’espère que vous vous servirez de vos réseaux pour faire connaître les récits que nous recueillons dans tout le pays et pour raconter vos propres récits en utilisant le mot‑clic #ImmigrationÇaCompte.
Il est particulièrement important pour moi que notre système d’immigration soutienne la croissance de notre économie. Je peux vous dire par expérience, ayant voyagé partout au pays au cours de cette année et rencontré des dirigeants d’entreprises locales dans les communautés et les municipalités, qu’ils souhaitent véritablement l’arrivée d’un plus grand nombre de gens. Ils disent que, dans certaines communautés du pays, la croissance et même la survie des entreprises locales ne seront pas possibles sans de nouveaux arrivants.
Certaines collectivités, plus petites, sont constituées d’une petite municipalité, d’une petite collectivité prospère et d’un seul employeur important. Si cet employeur n’arrive pas à trouver suffisamment de travailleurs, il fermera ses portes et ira s’installer ailleurs, et ce sera la fin de la collectivité. Aujourd’hui, un grand nombre de dirigeants municipaux du Canada, de manière proactive, prennent ce défi très au sérieux et investissent pour rendre leur collectivité plus accueillante, afin de pouvoir survivre et d’attirer des travailleurs vers cet unique employeur qui contribue à l’essor de la collectivité.
Au Yukon, le besoin de nouveaux arrivants est évident. À la table d’honneur, je racontais l’histoire d’un établissement de soins de longue durée qui compte 150 lits, a coûté 150 millions de dollars, c’est-à-dire un million de dollars par lit, et ne peut pas ouvrir ses portes en raison d’une pénurie de personnel infirmier et de préposés aux services de soutien de la personne. J’ai rencontré des maires partout dans le Nord de l’Ontario, notamment à Sault Ste. Marie et à Sudbury. Ils ont besoin de gens parce que les travailleurs prennent leur retraite et que les entreprises continuent de croître.
Au Québec, j’ai rencontré des chefs d’entreprise à Shawinigan, à Trois-Rivières et à Drummondville qui refusent carrément des contrats parce qu’ils n’ont pas les travailleurs pour les mener à terme. Les chiffres qui figurent dans notre plan permettront à notre gouvernement de répondre à ce défi. Près de 60 % des immigrants qui composent les niveaux d’immigration feront partie de la catégorie économique.
Une bonne partie de la croissance dans le plan actuel viendra de programmes des candidats de province, ce qui contribuera à faire en sorte que nous répondions aux besoins régionaux particuliers que les avantages du programme d’immigration soit répartis à l’échelle du pays. Les programmes d’immigration fédéraux mettent largement à profit notre système Entrée express, le système de gestion des demandes d’immigration.
Il n’y a pas si longtemps, nous avions l’habitude d’accepter toutes les demandes et de les traiter par ordre d’arrivée. Il en résultait une longue file d’attente et peu de souplesse, voire aucune, pour répondre aux besoins du marché. Nous essayons maintenant d’innover notre système d’immigration.
Une des innovations que nous avons apportées au système Entrée express consiste à accorder plus de points aux étudiants, car dans le passé, il y avait un nombre disproportionné de points accordés à ceux qui avaient une offre d’emploi, sans tenir compte de ceux qui pouvaient apporter un plus grand capital humain au Canada.
Nous accordons plus de points à ceux dont des membres de leur famille sont déjà au Canada, car nous savons que leur intégration et leur établissement seront plus faciles. Nous accordons plus de points aux immigrants francophones, car nous voulons assurer la vitalité et la croissance des communautés francophones à l’extérieur du Québec. Les autres programmes que nous avons mis sur pied proviennent directement des Canadiens, des intervenants et de groupements d’entreprises qui nous ont dit que l’arrivée de ressources temporaires au Canada prenait beaucoup trop de temps.
Cela prenait sept mois. Ils nous ont demandé ce que nous pouvions faire pour accélérer le processus. Nous avons donc mis en place la Stratégie en matière de compétences mondiales, qui a réduit le délai de traitement de sept mois à deux semaines pour les personnes hautement qualifiées qui viennent au pays pour de courtes périodes, afin d’aider à la création d’emploi et à la formation sur le leadership pour certaines entreprises.
Pour le gouvernement, passer de sept mois à deux semaines, c’est révolutionnaire. Je peux vous affirmer que ce n’est pas une mince affaire. J’ai voyagé partout au pays et chaque fois que je rends visite à une entreprise qui a recours à la Stratégie en matière de compétences mondiales, je prends le propriétaire à part pour lui demander : « Est-ce vraiment deux semaines? » Ils répondent toujours par l’affirmative et personne ne m’a encore dit que le délai avait dépassé deux semaines. C’est une réalisation majeure pour le Canada.
Cela se traduit par de vrais emplois sur le terrain, de vrais emplois de qualité à long terme, des emplois à temps plein pour la classe moyenne. Depuis que nous avons lancé la Stratégie en matière de compétences mondiales en juin dernier, 10 000 personnes hautement qualifiées ont pu recourir à cette stratégie pour venir au Canada. Les études ont démontré que chacun de ces cas s’est traduit par de nombreux emplois créés au Canada.
La Stratégie en matière de compétences mondiales comprend une section qui autorise les chercheurs internationaux à venir au Canada. S’ils souhaitent mener des recherches dans un établissement public ou une université du Canada, en collaboration avec un chercheur canadien, ils peuvent venir au pays pendant 120 jours sans permis de travail. Autrefois, ils étaient obligés de demander un permis de travail. Désormais, ils n’ont plus à le faire.
Le Programme de visa pour démarrage d’entreprise présente un autre avantage pour le Canada. Si vous êtes un entrepreneur prometteur et que vous souhaitez faire croître votre entreprise, le Danemark vous offrira un visa, tout comme les États-Unis. Le Canada, pour sa part, ne fera pas que vous accueillir; il offrira la résidence permanente au propriétaire, aux partenaires, aux membres de leur famille et aux travailleurs, afin que cette nouvelle entreprise de 5 millions de dollars se transforme en une société de 100 millions de dollars. Voilà où se trouvent les emplois.
Il y a quelques mois, à Vancouver, j’ai visité les locaux de Virtro Entertainment, une entreprise de réalité virtuelle. J’y ai rencontré les cofondateurs, Lee et Jordan Brighton. Ils sont venus au Canada dans le cadre du Programme de visa pour démarrage d’entreprise. Depuis son lancement, Virtro est passé à 14 employés et travaille actuellement au développement d’un programme de réalité virtuelle visant à aider les gens à conserver et à assimiler de nouvelles langues au moyen de l’intelligence artificielle. Il s’agit d’un programme révolutionnaire qui garantira la croissance soutenue de Virtro.
Je devrais mentionner que beaucoup de personnes qui viennent au pays par l’entremise de la Stratégie en matière de compétences mondiales peuvent, si elles aiment le Canada, rester ici et présenter une demande, dans le cadre du système Entrée express, pour s’assurer d’obtenir la résidence permanente en moins de six mois. Nous continuons d’écouter les entreprises. Nous continuons d’écouter les employeurs, les municipalités et les partenaires locaux en matière d’immigration.
C’est grâce à de telles initiatives et à la constante remise en question du statu quo, et c’est en nous assurant de toujours percevoir l’immigration comme un outil efficace de croissance économique que nous montrons au monde entier l’ouverture du Canada. Nous cherchons à attirer des investissements et des entrepreneurs. Nous formons une société accueillante qui permettra à toute personne de prendre l’avion et de venir au Canada pour devenir Canadien.
Nous ne pouvons en dire autant d’autres pays. En dernier lieu, permettez-moi de vous parler d’un autre grand avantage à maintenir des niveaux d’immigration élevés. Ils nous permettent de gérer le retard accumulé dans le système et de réduire les délais de traitement. Car plus vous haussez les niveaux d’immigration, plus vous pouvez traiter le retard accumulé dont vous avez hérité lorsque les niveaux d’immigration étaient plus bas.
Chaque fois que vous parvenez à réduire ou à éliminer le retard accumulé, vous accélérez invariablement le délai de traitement des demandes. Des niveaux plus élevés nous permettent d’accroître la participation à nos programmes économiques, mais également de libérer des places pour la réunification des familles ainsi que pour la réinstallation des réfugiés, car c’est ce que nous sommes comme pays.
Même si grâce à l’immigration économique nous pouvons assurer la croissance de notre pays, nous devons nous rappeler qu’il importe de maintenir le cap et de respecter nos engagements humanitaires et obligations internationales. Nous avons de la chance de vivre dans un pays où l’appui à l’immigration est largement répandu.
Cependant le gouvernement à lui [seul] ne peut maintenir cet appui. C’est pourquoi j’encourage chacun de participer à l’initiative l’Immigration, Ça Compte et à contribuer à solidifier notre vision commune d’un pays qui embrasse l’immigration et la diversité.
Je peux vous promettre qu’en tant que gouvernement, nous allons être à l’écoute, nous adapter et innover pour nous assurer que notre système d’immigration réponde aux besoins et au potentiel du Canada, tout en renforçant notre leadership et nos engagements à l’échelle internationale, lorsqu’il est question d’obligations humanitaires. Je suis fier de ce que nous avons accompli. Je suis impatient de continuer d’introduire de nouveaux programmes pour relever nos défis communs.
Nous avons entendu très clairement à l’échelle du pays cette année que les collectivités rurales, éloignées et nordiques doivent pouvoir profiter davantage de l’immigration et nous en avons tenu compte dans notre planification pour l’avenir. Le Programme des candidats des provinces réussit bien à voir à ce que nous répartissions les avantages de l’immigration à la grandeur du pays.
Par exemple, en 1997, seulement 11 % des nouveaux arrivants se sont installés dans des collectivités autres que Toronto, Vancouver ou Montréal. En 2017, ce pourcentage a grimpé à 36 %. C’est parce que nous avons augmenté le nombre de places attribuées au Programme des candidats de provinces. Ce plan prévoit une croissance de 33 %, mais cela ne suffit pas. Les collectivités du Nord de l’Ontario, du Manitoba et du Yukon, ainsi que plusieurs autres nous disent : « Nous avons besoin de plus de gens pour notre économie locale ».
J’ai écouté ces commentaires et j’ai parlé avec mes collègues de la possibilité d’envisager un programme pilote ciblé semblable au Programme pilote d’immigration au Canada atlantique pour les collectivités rurales et éloignées, afin qu’elles puissent, elles aussi, profiter de l’immigration. Comme je l’ai mentionné, je suis fier de ce que nous avons accompli. Je vais continuer d’écouter les Canadiens.
Nous en sommes là où nous sommes grâce, non pas aux solutions que nous avons proposées, mais bien parce que nous avons écouté les Canadiens, les employeurs, les partenariats locaux en matière d’immigration, les organismes d’établissement qui, chaque jour, nous indiquent comment mieux planifier l’établissement et l’intégration. Nous continuerons d’avoir des entretiens avec nos partenaires, même à l’échelle internationale, pour apprendre d’eux autant qu’ils apprennent de nous.
Je vous remercie de vous être joints à moi aujourd’hui. Je serai ravi de répondre à toutes vos questions. Merci beaucoup.