Le sentiment d’appartenance : revue de la littérature


Table des matières

Liste des figures

Résumé

Le sentiment d’appartenance et ses indicateurs peuvent contribuer à surveiller la manière dont le mandat de CIC est rempli. Plus particulièrement, le sentiment d’appartenance présente un intérêt du point de vue du résultat stratégique 3 (RS 3) de CIC – les nouveaux arrivants et les citoyens participent pleinement à l’établissement d’une société intégrée – comprenant les secteurs de la politique et des programmes de l’intégration, de la citoyenneté et du multiculturalisme.

Le sentiment d’appartenance représente une dimension de concepts théoriques plus larges, ou un indicateur empirique de ces concepts. Par exemple, il est une importante dimension de la grande perspective de la théorie de la citoyenneté, laquelle englobe le statut juridique, les droits, l’engagement civique et le sentiment d’appartenance. Il s’agit aussi d’une dimension ou d’un indicateur des résultats au sens large souhaitables pour la société : inclusion sociale, bien-être, cohésion sociale, capital social et identité nationale.

Les grands concepts qui incluent le sentiment d’appartenance – cohésion sociale, capital social, bien-être, inclusion ou exclusion sociale, identité nationale – demeurent, dans une certaine mesure, malléables. Ils sont des véhicules qui mobilisent l’attention et les conversations sur les préoccupations sociales, et sont susceptibles de conduire vers un éventail varié d’applications spécialisées et localisées. La malléabilité des grands concepts et leurs diverses applications se dégagent pendant toute la revue.

Les indicateurs du sentiment d’appartenance dans les études empiriques consistent principalement en questions d’enquête. Ces questions ont été formulées directement en termes de sentiment d’appartenance (p. ex. : « quelle est la force de votre sentiment d’appartenance à l’égard de… »), et ce, plus particulièrement dans les traditions de recherche du Canada, de la Nouvelle-Zélande et de l’Australie. On trouve aussi d’autre formulations, notamment en Europe, où le sentiment d’appartenance est mesuré au moyen de questions d’enquête formulées principalement en termes de confiance, d’identification, d’identité, de fierté et de confiance dans les institutions.

Le RS 3 de CIC pourrait être vu comme un exemple de résultat social au sens large dont le sentiment d’appartenance serait une dimension. Les traditions d’enquête utilisent des indicateurs directement formulés en tant que sentiment d’appartenance. Ces indicateurs se concentrent principalement sur trois échelles géographiques : le Canada, la province et la communauté locale, ainsi que sur des entités non géographiques, comme la famille ou le groupe ethnique. Parfois, les chercheurs se concentrent uniquement sur une échelle géographique; et d’autres fois, sur toutes les échelles géographiques, qu’ils maintiennent séparées ou réunissent dans une mesure composite.

Voici les principales constatations sur le sentiment d’appartenance tirées de la revue de la littérature sur le Canada :

  • Des indicateurs économiques et de capital humain, tels que le revenu ajusté du ménage individuel et le niveau d’instruction, de même que des indicateurs démographiques comme les catégories d’âge et le sexe sont inclus dans toutes les études cherchant à comprendre les déterminants du sentiment d’appartenance. Les constatations révèlent que :
    • L’avancement en âge révèle constamment une incidence forte et positive sur le sentiment d’appartenance (dans toutes les échelles géographiques, mais après un recul entre la jeunesse et le début de la trentaine pour ce qui est de l’appartenance communautaire).
    • Les femmes affichent un sentiment d’appartenance légèrement plus élevé que les hommes, et encore davantage dans les échelles géographiques plus petites.
    • Selon les constatations, le revenu et le niveau d’instruction n’exercent qu’une très faible incidence nette, et les constatations sont contradictoires (elles changent de direction selon la source de données).
    • Une étude qualitative récente a montré que les personnes qui affichent un revenu élevé se voient appartenir à de nombreuses communautés, par l’entremise de nombreux liens institutionnels et organisationnels, et qu’elles utilisent leurs moyens économiques pour participer à leur vaste communauté et pour y investir. Comparativement, les personnes à faible revenu se définissent elles-mêmes comme appartenant à un nombre limité de réseaux d’amis et de voisins.
  • Les études qui portent sur les différences régionales caractéristiques du Canada et sur l’immigration montrent régulièrement que :
    • Au Québec, et plus particulièrement chez les francophones de la troisième génération ou plus (c.-à-d. les francophones qui ne sont ni des immigrants ni les enfants d’immigrants), le sentiment d’appartenance au Canada est plus faible que partout ailleurs. Comparativement, les différences entre les régions tendent à être assez minimes lorsque l’on considère le sentiment d’appartenance des immigrants envers une province et une communauté locale, de même qu’à l’égard du Canada.
    • Au Québec, le sentiment d’appartenance au Canada des immigrants grandit avec la durée du séjour, et demeure plus élevé que chez les Canadiens de naissance dans l’ensemble.
    • À l’extérieur du Québec, le sentiment d’appartenance au Canada des immigrants est plus faible que chez les Canadiens de naissance à court terme, mais ce sentiment grandit avec la durée du séjour au Canada, allant jusqu’à égaler celui des non-immigrants.
  • Les études qui portent sur l’immigration, l’attachement ethnique et la discrimination montrent que :
    • La discrimination exerce une influence négative sur le sentiment d’appartenance au Canada ainsi que sur le sentiment d’appartenance global, notamment aux trois échelles géographiques, tandis que diverses formes d’attachement ethnique ont tendance à contredire partiellement cet effet.
  • Une étude axée sur la diversité du voisinage montre que, en excluant le choix volontaire du quartier :
    • Les personne n’appartenant pas à une minorité visible qui résident dans des quartiers diversifiés affichent un sentiment d’appartenance au Canada plus élevé, et un sentiment d’appartenance au groupe ethnique moins élevé que leurs pairs qui résident dans des quartiers à faible diversité.
    • Les minorités visibles affichent le même niveau de sentiment d’appartenance au Canada et de sentiment d’appartenance au groupe ethnique, peu importe si elles résident dans un quartier diversifié ou non.
    • Les personnes appartenant à une minorité visible affichent un sentiment d’appartenance plus fort à leur groupe ethnique que celles n’appartenant pas à une minorité visible.
  • La littérature axée sur l’échelle géographique de la communauté locale montre que :
    • Le sentiment d’appartenance à la communauté locale a une incidence positive sur les indicateurs de santé.
    • Les rapports sociaux de collaboration dans le quartier influent positivement sur le sentiment d’appartenance à la communauté locale.
    • Les immigrants affichent un plus faible sentiment d’appartenance à la communauté locale que les Canadiens de naissance, mais cette différence diminue avec la durée du séjour au Canada.
    • Les jeunes immigrants (de 12 à 17 ans), et plus particulièrement les filles, affichent un plus faible sentiment d’appartenance à la communauté locale que leurs pairs canadiens.

Les leçons et les recommandations visant à améliorer la méthodologie à la suite de la revue suggèrent :

  • D’étudier des indicateurs du sentiment d’appartenance utilisés à l’échelon international en vue d’améliorer la compréhension de la manière dont les résultats dépendent du type d’indicateur, et la comparabilité d’un pays à l’autre.
  • De comparer les indicateurs de confiance et de sentiment d’appartenance en accordant une attention particulière à la manière dont ils correspondent à l’expérience actuelle, en vue de clarifier comment ces deux indicateurs différents utilisent les « normes de réciprocité » dans la tradition de la recherche sur le capital social.
  • D’utiliser des données économiques exactes en se servant du couplage des données fiscales en vue de clarifier le rapport entre le revenu (et d’autres résultats économiques) et le sentiment d’appartenance.
  • D’étudier qualitativement la compréhension individuelle de l’appartenance à la communauté locale en vue d’ouvrir des horizons sur la question de savoir s’il existe des modèles de compréhension fondés sur le statut socioéconomique et la géographie.
  • De tenir compte de manière explicite des variations territoriales connues, telles que le faible sentiment d’appartenance au Canada au Québec.
  • Au moment de créer des mesures composites de l’appartenance, de donner une description claire de toutes les composantes, et de leur répartition dans les segments de population qui présentent un intérêt.
  • De garder à l’esprit le potentiel des recherches qualitatives complémentaires lorsque les généralisations statistiques sont insuffisantes.

Une recommandation clé : afin de permettre la réalisation de recherches futures qui permettront de mettre à jour les connaissances actuelles et de combler les lacunes, il faudrait élaborer et mettre à jour régulièrement une source de données qui respecte les exigences de base, notamment : plusieurs questions sur le sentiment d’appartenance, un large échantillon qui permet de faire l’analyse de sous-populations, l’éventail complet des variables d’intérêt associées au sentiment d’appartenance, et des identificateurs des segments de population qui présentent un intérêt pour CIC.

Les thèmes de recherche qui ont été déterminés comme susceptibles de présenter un intérêt pour CIC en vue de développements futurs sont :

  • Comparer les résultats obtenus sur le sentiment d’appartenance avec : les diverses échelles géographiques, les origines ethnoculturelles, et le pays d’origine, en prenant en considération la durée du séjour, le statut de génération, ainsi que les indicateurs d’origines ethnoraciales.
  • Étudier le sentiment d’appartenance au Canada en rapport avec l’acquisition de la citoyenneté.
  • Étudier le sentiment d’appartenance en rapport avec la grande catégorie d’immigration.
  • Étudier plus en profondeur la discrimination perçue et le sentiment d’appartenance.
  • Étudier le sentiment d’appartenance en rapport avec un éventail d’indicateurs de la diversité des contacts sociaux, par exemple, selon divers types de liens sociaux (personnels, professionnels, communautaires, etc.) et divers types de diversité (ethnoraciale, ou fondée sur le statut socioéconomique, etc.).
  • Étudier le sentiment d’appartenance en tenant compte de facteurs liés à géographie locale et à la situation du répondant; par exemple, diversité ethnoraciale dans la zone de résidence et si le répondant est en situation minoritaire ou majoritaire.
  • Comparer les facteurs associés aux réponses qui tombent dans la catégorie « très fort » du sentiment d’appartenance avec ceux qui sont associés aux réponses qui tombent du côté positif d’une échelle d’appartenance, sans être nécessairement dans la catégorie très fort.

Certaines orientations de recherche mentionnées ci-dessus sont tirées du rapport complémentaire intitulé « Le sentiment d’appartenance : étude empirique » (à venir), fondé sur l’ESG de 2008. L’étude empirique servira à comparer les résultats obtenus pour le sentiment d’appartenance au Canada, à la province et à la communauté locale; à analyser le sentiment d’appartenance en rapport avec certains indicateurs distincts de la diversité des contacts sociaux; et à comparer les facteurs associés aux réponses qui tombent dans la catégorie « très fort » avec ceux qui sont associés à des réponses qui tombent du côté positif de l’échelle.

1. Introduction : sentiment d’appartenance à quoi et pourquoi?

Sur le plan intuitif, l’idée de l’appartenance est incontestable et très pertinente dans les domaines de la politique qui s’intéressent à la promotion de la capacité de construire une vie réussie et commune entre les Canadiens, les nouveaux arrivants et en incluant des personnes d’horizons divers. Au-delà de cette vaste perspective, en pratique, l’appartenance peut faire référence à de nombreuses échelles géographiques différentes, à des groupes et ressources connexes, en se fondant sur toute une gamme de critères, qui ne sont pas toujours compatibles. Ce qui soulève d’autres questions, à savoir comment les diverses manifestations de l’appartenance peuvent se combiner et dans quel but. La présente section d’introduction dresse une vue d’ensemble de la manière dont les connaissances disponibles sur les formes d’appartenance sont structurées, comment ces connaissances sont pertinentes pour Citoyenneté et Immigration Canada (CIC), et comment la revue de la littérature qui suit est organisée.

1.1 Appartenance à …?

Le sentiment d’appartenance peut se rattacher à diverses échelles géographiques, ainsi qu’à divers segments de population et ressources reliés entre eux d’une manière qui ne correspond pas nécessairement à la géographie territoriale des États ou à leurs sous-régions administratives. Du point de vue des échelles géographiques, la littérature présente deux principaux champs d’enquête, tandis que trois autres approches sont possibles qui ne correspondent à aucune géographie territoriale particulière.

  • Premièrement, le concept de l’appartenance, en rapport avec le pays, figure de manière prépondérante dans les études sur l’identité nationale et la citoyenneté. Ce champ d’enquête comprend notamment l’attention aux niveaux sous-nationaux dans les cas, comme au Canada, où il existe de nombreuses visions ou des visions contestées de l’identité nationale associées aux populations régionales. Dans ce cas, la structure administrative de l’État et de ses régions correspond aux échelles géographiques, et ce, même si fréquemment, les études sur l’appartenance ne se concentrent pas explicitement sur les institutions.
  • Deuxièmement, nous constatons un intérêt pour l’appartenance communautaire, ou pour l’environnement immédiat où se déroule la vie de tous les jours, et où le sentiment d’appartenance est soutenu par des interactions continues. L’appartenance communautaire a été étudiée à la fois de manière indépendante et en relation avec l’appartenance à des échelles géographiques supérieures. L’appartenance communautaire est souvent étudiée en tant que déterminant d’autres résultats souhaitables, comme la santé.
  • Troisièmement, du point de vue des caractéristiques qui ne correspondent pas à l’État ni aux géographies régionales, le centre d’intérêt le plus pertinent consiste en l’appartenance au patrimoine ethnoculturel de la personne. La principale enquête canadienne ayant adopté un centre d’intérêt ethnoculturel – l’Enquête sur la diversité ethnique (2002) – comprenait une question spécifique sur la force du sentiment d’appartenance au « groupe ethnique ou culturel » de la personne, analysé dans certaines des études que nous avons passées en revue ici. De plus, la prochaine Enquête sociale générale sur l’identité sociale comprendra une question sur l’appartenance au pays d’origine de la personne.
  • Quatrièmement, le centre d’intérêt non territorial peut de toute évidence aller au-delà de l’ethnicité, y compris, de manière générale, l’appartenance à un large éventail d’organisations politiques ou fondées sur les intérêts, d’autres institutions ou organismes non étatiques, et leur identité et sous-cultures. Ce dernier angle exige l’adoption de stratégies de recherche particulières selon les types d’organismes qui intéressent les chercheurs, et majoritairement, il dépasse la portée de la présente revue, sauf en ce qui a trait à la mesure dans laquelle les institutions dont les compétences correspondent aux échelles géographiques mentionnées ci-dessus au premier point peuvent être considérées comme des facteurs indirects, par le truchement de réponses individuelles sur le sentiment d’appartenance.
  • Dernièrement, il est important de mentionner que l’étude du sentiment d’appartenance, dans toutes ses variantes, ne fait que commencer à se pencher sur les avancées des technologies de la communication, ainsi que sur la prolifération des déplacements et l’aspect temporaire de la résidence. La littérature connexe sur le transnationalisme et les diasporas met en lumière la complexité contextualisée des expériences transnationales, y compris les rapports complexes entre les dimensions urbaines locales et mondiales de l’appartenance.

1.2 Pourquoi un sentiment d’appartenance?

Cette section donne un aperçu des raisons pour lesquelles le sentiment d’appartenance est un sujet valable d’enquête pour CIC et ses secteurs de politique. Elle présente aussi la portée et l’organisation de cette revue de la littérature.

1.2.1 Pertinence générale du sentiment d’appartenance pour le mandat de Citoyenneté et Immigration Canada (CIC) et son résultat stratégique 3Note de bas de page 1 (RS 3)

Le sentiment d’appartenance et ses indicateurs peuvent contribuer à aider CIC à mieux comprendre comment son mandat est exécuté. Un bref examen de l’énoncé de mission de CIC illustre pourquoi.

  • Le premier élément de la mission de CIC consiste à « faciliter la venue et l’intégration des personnes de manière à optimiser leur apport ». À cet égard, il est plausible de s’attendre à ce que le sentiment d’appartenance au Canada facilite la volonté des personnes de maximiser leur contribution, et de ce fait, il est un indicateur utile de l’intégration des immigrants. De plus, il est intéressant de déterminer s’il existe un lien quelconque entre le flot d’immigrants qui arrive et sa capacité de développer un sentiment d’appartenance au Canada.
  • Deuxièmement, la mission de CIC énonce le but suivant : « renforcer les valeurs associées à la citoyenneté canadienne et promouvoir les droits et les responsabilités qui y sont attachés ». À cet égard, il est intéressant d’effectuer une enquête en vue de déterminer si un plus grand sentiment d’appartenance au Canada est susceptible d’être associé à l’acquisition de la citoyenneté canadienne.
  • Ensuite, l’énoncé de mission de CIC mentionne précisément l’intention de « sensibiliser tous les Canadiens et d’accroître la compréhension interculturelle tout en favorisant la création d’une société intégrée qui offre des chances égales pour tous, peu importe la race, l’origine ethnique et la religion. » À cet égard, le fait que des Canadiens ayant des antécédents différents sur le plan de l’immigration ou sur le plan ethnique, racial, ou religieux sentent néanmoins qu’ils appartiennent à ce pays (ainsi qu’à leur communauté immédiate) constitue une indication potentiellement utile de succès.

Dans le Plan stratégique de CIC, les politiques et les secteurs de programme que sont la citoyenneté, le multiculturalisme, l’établissement et l’intégration relèvent tous du vaste résultat stratégique 3, défini comme suit : « pleine participation des nouveaux arrivants et des citoyens à l’appui d’une société intégrée. » Ce résultat stratégique reflète les deux derniers points de l’énoncé de mission, et il est en outre aligné avec le résultat du gouvernement du Canada dans le domaine des affaires sociales : « une société diversifiée favorable à la dualité linguistique et à l’inclusion sociale. » Dans le contexte d’un objectif large et à multiple facettes, tel que celui du RS 3, le sentiment d’appartenance et ses indicateurs sont, et devraient normalement continuer d’être, un élément qu’il est utile de bien comprendre.

1.2.2 Pertinence par rapport à certaines politiques et certains programmes propres à CIC

Les échelles, distances focales et angles différents que l’on peut adopter au sujet du sentiment d’appartenance, tel que décrit à la section 1.1 « Appartenance à…? », font appel de diverses manières à des politiques et secteurs de programme particuliers de CIC. Dans l’ensemble de ce rapport, des entités géographiques de diverses tailles telles que le Canada, la province, la ville ou la collectivité seront décrites comme des échelles ou échelles géographiques.

  • L’échelle du pays présente un intérêt pour la politique de citoyenneté et son but qui est d’améliorer la valeur de la citoyenneté canadienne.
  • De toute évidence, l’échelle de la collectivité présente une certaine pertinence pour les politiques et les programmes d’établissement, qui visent plus particulièrement à faire en sorte que les nouveaux arrivants disposent des services et des contacts nécessaires pour s’attaquer aux éventuels problèmes dans les diverses sphères de leur vie sociale et économique, et pour qu’ils se sentent les bienvenus dans leur collectivité immédiate.
  • D’une manière un peu moins évidente, l’attention portée à la combinaison des échelles géographiques, et d’autres manifestations de l’appartenance, fournit potentiellement d’autres éléments probants pour la politique, en dévoilant des processus qui sont parfois contre-intuitifs ou curieux. Dans des recherches effectuées dans le passé, par exemple, la manifestation ethnoculturelle de l’appartenance a été étudiée de concert avec celle de l’échelle géographique de pays. Dans ce cas, la question d’intérêt pour la politique de multiculturalisme consistait à déterminer si les deux manifestations d’appartenance concordent – un résultat souhaitable – ou si elles se révèlent contradictoires, ce qui pourrait éventuellement nécessiter une politique et des programmes en vue d’empêcher la fragmentation sociale ou l’isolement.
  • L’attention portée aux combinaisons d’échelles géographiques et d’autres référents culturels a aussi fourni d’importantes descriptions panoramiques du paysage historique et géographique particulier du Canada, ce qui a permis de situer les segments de population et les politiques et les programmes dans leur contexte. À cet égard, l’accent mis sur le Québec et, les données le permettant, sur les peuples autochtones, en combinaison avec les segments de population issus d’autres contextes, a fourni des aperçus intéressants. La prise en compte des nombreuses échelles géographiques et de leurs divers modèles est importante aussi d’un point de vue méthodologique, afin de produire des descriptions réalistes de la situation globale au Canada.

1.3 Organisation de la revue

La revue qui suit comprend notamment des rapports de recherche sur les politiques produits par des gouvernements, des organisations internationales, ou des organismes de recherche, ainsi que des publications universitaires. Les documents analysés ont été trouvés à l’aide de moteurs de recherche de sources universitaires, dans des publications gouvernementales, et à l’aide de moteurs de recherche généraux sur Internet. La revue porte principalement sur des documents qui présentent de la recherche empirique.

La littérature théorique fait l’objet d’une analyse sélective en vue de fournir un contexte et des stratégies nécessaires pour organiser les connaissances sur le sentiment d’appartenance, mais elle n’a pas été revue de manière systématique. La littérature qui résulte de la production de rapports sur le suivi des questions d’enquête sur le sentiment d’appartenance dans les sondages d’opinion n’a pas été revue systématiquement elle non plus, mais les connaissances fournies par ce type d’exercice en vue de déterminer des modèles stables sont mentionnées lorsqu’elles sont complémentaires aux constatations des études revues. Le thème du transnationalisme a été tiré d’un corpus de documents qui a lui aussi fait l’objet d’une analyse sélective en vue d’obtenir des liens et de fournir des contextes.

La présentation est organisée en partant du général et en progressant vers le particulier. Plus précisément, les grands concepts théoriques et les stratégies utilisés pour organiser les connaissances sur le sentiment d’appartenance en faisant référence à des concepts plus larges sont abordés en premier; viennent ensuite les approches internationales et les approches pour lesquelles le sentiment d’appartenance est un élément parmi plusieurs mesures empiriques; puis l’intérêt se porte sur les projets canadiens qui étudient de manière empirique le sentiment d’appartenance en tant que l’une des nombreuses dimensions parmi des concepts plus généraux (et plus répandus à l’échelon international); et enfin, sont analysés les projets canadiens dans lesquels le sentiment d’appartenance est considéré en soi comme le principal centre d’intérêt de l’étude empirique, plutôt qu’à titre d’une dimension parmi d’autres.

La revue montre aussi que lorsque le sentiment d’appartenance et ses indicateurs empiriques sont considérés comme des dimensions d’un concept plus général indiquant un résultat social souhaitable (bien-être, cohésion sociale, etc.), deux types d’approches se distinguent :

  • La première consiste à créer des mesures composites complexes en réunissant plusieurs indicateurs en vue de faire le suivi dans le temps d’un vaste résultat social et de toutes ses composantes. Cela est manifeste dans les exemples revus ci-après, à la fois dans les approches internationales (sur la cohésion et le bien-être en Nouvelle-Zélande, sur la qualité sociale en Europe, etc.), et dans des approches canadiennes (plus particulièrement sur le bien-être).
  • La deuxième approche consiste à étudier les déterminants des divers indicateurs servant à mesurer plusieurs dimensions du grand concept choisi, et à comparer les résultats obtenus pour de tels déterminants (par exemple, comparer les déterminants du sentiment d’appartenance, de la confiance, de la participation, compris comme des éléments de la cohésion sociale). Cette approche se révélera évidente plus loin dans les études canadiennes analysées, et plus particulièrement, celles qui utilisent le grand concept de la cohésion sociale.

Lorsque le sentiment d’appartenance en lui-même constitue le principal centre d’intérêt d’une étude empirique, plutôt que de figurer parmi un éventail d’indicateurs, l’objectif principal qui a été constaté dans la littérature consistait à analyser ses déterminants, et souvent, à les comparer avec ceux du sentiment d’appartenance par rapport à diverses échelles géographiques ou à divers groupes ethniques. Comparativement, dans le cas de l’appartenance à l’échelle de la communauté locale, le sentiment d’appartenance est souvent étudié à titre de déterminant des résultats sur le plan de la santé.

Dans l’ensemble du rapport se trouvent des encadrés qui résument les principales constatations, les leçons apprises et les recommandations, ainsi que des encadrés donnant des exemples précis tirés de recherches qui sont pertinentes pour la revue, et des zones de texte présentant des éléments probants, tels que des statistiques descriptives calculéesNote de bas de page 2 à partir de sources de données publiques, à l’appui de la revue. Ces éléments graphiques facilitent la navigation dans tout le document.

2. Le sentiment d’appartenance en tant qu’élément de concepts plus généraux – fondement théorique et outils conceptuels

Le sentiment d’appartenance a été utilisé en tant que dimension de concepts théoriques plus généraux, ou encore en tant qu’indicateur empirique de tels concepts. À titre d’exemple, il est essentiel dans la perspective théorique plus large de la théorie de la citoyenneté qui englobe le statut juridique, les droits, l’engagement civique et le sentiment d’appartenance, en tant que dimensions clés de la citoyenneté. Le sentiment d’appartenance est aussi inclus en tant que dimension ou indicateur de résultats sociaux souhaitables au sens large selon plusieurs conceptualisations : inclusion ou exclusion sociale, bien-être, cohésion sociale, capital social et identité nationale. Cette section présente une brève discussion de la place occupée par l’appartenance dans la théorie de la citoyenneté, et une stratégie pour comprendre la manière quelque peu contradictoire et fragmentée dont le sentiment d’appartenance s’inscrit dans les discussions et les études fondées sur d’autres grands concepts.

2.1 Observations sur la théorie de la citoyenneté

La théorie de la citoyenneté se concentre sur ce qui définit et soutient l’adhésion à une communauté de citoyens, englobant le statut juridique, les droits, l’engagement civique, et l’appartenance (voir, par exemple, Bloemraad, Korteweg et Yurdakul, 2008), et de ce fait, incluant le savoir analytique lié non seulement au secteur de la politique de la citoyenneté, mais aussi celui de l’intégration et du multiculturalisme.

Certaines vues d’ensemble de la théorie de la citoyenneté n’établissent pas de distinction entre les droits et le statut juridique, et au contraire, elles incluent les droits comme une conséquence du statut juridique.Note de bas de page 3 Cette distinction additionnelle est pertinente en ce qui concerne la priorité de la politique de CIC parce qu’elle a fini par représenter des questions liées à la migration. Cette distinction est devenue de plus en plus répandue à la suite d’enquêtes sur le régime actuel des droits internationaux et transnationaux (Soysal, 1995), notamment, les droits des travailleurs immigrants à l’extérieur de leur pays de citoyenneté, et aussi les droits transnationaux des membres d’entités supranationales telles que l’Union européenne (p. ex. récemment, Joppke, 2010).

Il convient aussi de mentionner que les deux termes « identité » et « sentiment d’appartenance » ont été utilisés de manière interchangeable dans la littérature analytique et théorique sur la citoyenneté. À ce niveau conceptuel élevé, appartenance et identité peuvent être utilisés de manière interchangeable, toutefois, lorsqu’il est question d’études empiriques, il est important de tenir compte explicitement des deux différentes formulations.Note de bas de page 4

La dimension appartenance/identité de la citoyenneté fait référence au sentiment d’appartenir à une communauté, de faire partie d’un « nous » collectif, qui facilite l’agir ensemble en vue d’atteindre des buts communs.

Exemples – 1 : L’appartenance comme sujet de discussion dans le champ de la théorie de la citoyenneté. Chez les théoriciens de la citoyenneté, sentiment d’appartenance et identité alimentent un débat qui suscite passablement d’intérêt, par exemple :

  • leur importance pour la citoyenneté et leur incidence sur cette dernière,
  • ce sur quoi ils devraient idéalement porter (p. ex. territoire, ethnicité, patrimoine, langue, une certaine combinaison de ces derniers),
  • quelles seraient les conséquences, dans l’éventualité où ils ne correspondraient pas aux limites territoriales d’un État,
  • comment ils pourraient être touchés par un accroissement de la diversité et du transnationalisme,
  • quels sont les processus sociaux, politiques et psychologiques les plus pertinents qui les génèrent,
  • l’incidence sur eux des processus liés aux autres dimensions de la citoyenneté – droits, engagement civique et statut juridique.

Même si une revue de la littérature sur la théorie de la citoyenneté dépasse la portée de la présente étude, il est important de savoir que le concept de l’appartenance figure de manière prépondérante dans ses réflexions, et que les articulations les plus importantes du concept dérivent de cette littérature.

Aussi, qu’ils l’énoncent de manière explicite ou non, les sujets d’étude et de recherche qui incluent l’appartenance comme l’un de leurs éléments, ont en commun avec la théorie de la citoyenneté une préoccupation générale à l’égard de la capacité d’une société de soutenir l’« acceptation » de ses membres actuels et nouveaux. Le lien avec la théorie de la citoyenneté est habituellement établi de manière explicite dans les études sur l’identité nationale, le nationalisme ou le régionalisme. Dans les études qui font appel aux concepts de cohésion sociale, d’inclusion/exclusion sociale, de capital social et de bien-être, la référence à la théorie de la citoyenneté est moins répandue. Néanmoins, tous ces vastes concepts différents ont en commun une préoccupation fondamentale eu égard au soutien de la capacité des individus et des groupes d’une société d’agir ensemble et d’avoir accès à des ressources qui entretiennent cette capacité.

2.2 L’appartenance en tant que dimension de résultats sociaux souhaitables plus larges : un outil conceptuel

Le sentiment d’appartenance peut représenter une dimension de résultats sociaux souhaitables plus larges, tels que cohésion sociale, inclusion/exclusion sociale, capital social, et bien-être. Dans ce contexte, un cadre conceptuel pour organiser l’information trouvée est nécessaire. De fait, comme la revue présentée dans les sections qui suivent le montrera, plusieurs différences et contradictions se révèlent de même que plusieurs parallèles lorsque l’on compare la manière dont le sentiment d’appartenance est compris au travers des approches adoptées pour étudier ces résultats sociaux plus larges, et même si l’on compare différentes formulations du même grand résultat social. Que faut-il penser de ces différences? Est-il nécessaire de fournir une clarification finale ou peut-être, une classification explicative? Dans cette section, la discussion vise à faciliter la compréhension des raisons pour lesquelles une clarification peut se révéler très utile dans le cadre de certaines applications, mais qu’il est peu probable d’en arriver à un consensus final.

Tout d’abord, ci-après, plutôt que d’utiliser la longue expression « concepts indiquant des résultats sociaux souhaitables au sens large » (cohésion sociale, etc.), c’est le terme plus court « concepts généraux » qui sera utilisé. Comme l’ont mentionné plusieurs observateurs (p. ex. Bernard, 1999, Beauvais et Jenson, 2002, McNeill, 2006, Jenson, 2007), même si la clarté des concepts généraux peut souvent être améliorée par rapport à des applications particulières, la popularité de ces types de concepts résulte principalement non pas de leur capacité à susciter le consensus sur une formulation en particulier, mais plutôt de leur capacité à mobiliser le débat. De façon plus particulière, ces concepts généraux tirent leur légitimisation de leur capacité de s’attaquer à des enjeux sociaux émergents complexes, tout en maintenant aussi un certain degré d’ambivalence.

Exemples – 2 : Comment voyagent les concepts généraux. Desmond McNeill (2006) utilise le terme « idées » pour ce qui est appelé ici « concepts généraux ». Il retrace « comment trois idées choisies – " le secteur informel ", le " développement durable " et le " capital social " – ont pris leur envol et se sont répandues dans l’ensemble des domaines universitaire, de la politique et populaire » entre 1972 et 2002, et constate que [Traduction] « les idées les plus populaires [c.-à-d. les plus répandues] ne sont pas celles qui sont les plus rigoureuses sur le plan analytique, mais plutôt celles qui sont les plus malléables. » Même si seulement le capital social, parmi les concepts généraux étudiés par McNeill, se révèle faire explicitement référence au sentiment d’appartenance, il reste que le point avancé par McNeill revêt une pertinence générale pour les autres concepts généraux, notamment la cohésion sociale, le bien-être et l’inclusion/exclusion sociale.

L’ambivalence des concepts généraux permet aux participants à la discussion de mobiliser leur attention sous le même terme générique, et ce, tout en tirant un éventail de conclusions et d’implications légèrement différentes par rapport à des domaines d’intérêt particuliers. Ces concepts larges et malléables facilitent l’établissement de liens et de débats entre les domaines, comme le monde universitaire, les gouvernements, les ONG, les organismes internationaux ou en établissant des ponts entre des sous-disciplines auparavant séparées des sciences sociales. Parmi ceux-ci, il est fréquent que les tentatives de clarification ne parviennent pas à mettre un terme aux discussions en cours, et contribuent plutôt à les alimenter, même si elles définissent aussi des terrains d’entente interdisciplinaires et des applications spécialisées, lesquels peuvent avoir une incidence considérable sur les politiques dans les domaines locaux.

Exemples – 3 : Comment les concepts généraux font référence à diverses applications particulières. Jane Jenson (2007) a documenté comment le grand concept (le « quasi-concept » dans sa terminologie) de l’« investissement social » a influencé les politiques sociales en Amérique latine, où il a pris la forme de « transferts pécuniaires conditionnels » ciblant les décisions des ménages individuel concernant les investissements dans les enfants, en Europe avec la politique « d’intervention éducative auprès de la petite enfance » visant à lutter contre la pauvreté, et au Canada avec le Bon d’études canadien, établi en 2004 et destiné aux enfants des familles à faible revenu. Elle a montré comment les concepts généraux englobent souvent plusieurs applications pratiques différentes.

La présente revue utilise les observations tirées de ces études à titre de point de départ. Elles offrent un cadre conceptuel utile qui aide considérablement à comprendre la documentation examinée dans les sections ci-après.

Leçons apprises – 1 : Il arrive fréquemment que les concepts généraux soient largement utilisés parce qu’ils mobilisent le débat sur des enjeux actuels. Le sentiment d’appartenance est souvent un élément de ces concepts généraux, par exemple, du bien-être, de la cohésion sociale, du capital social, et de l’inclusion/exclusion sociale. Le but consistant à obtenir une clarté d’ensemble en fin de compte par rapport à ce type de concepts généraux fait probablement fausse route. Il est plus important, au contraire, d’améliorer la clarté sur le plan analytique et la pertinence par rapport à des applications particulières dans les secteurs de politique et dans des questions d’intérêt connexes, tout en sachant que d’autres applications sont possibles et probablement différentes, même si elles relèvent du même grand concept.

Par conséquent, deux stratégies de recherche utiles sont possibles :

  • Une stratégie à forte intensité de ressources consisterait à prendre un grand concept (ou même à en créer un tout nouveau) et à clarifier comment ses dimensions, dont le sentiment d’appartenance, pourraient être fructueusement définies et analysées en référence à un secteur de politique particulier, à l’intérieur d’une perspective institutionnelle définie et à l’aide de ressources existantes pour ce qui est de la collecte de données. Un exemple clairement pertinent consisterait à élaborer cette approche pour l’actuel RS 3 de CIC – une société intégrée fondée sur une vaste participation – dans le contexte d’une capacité de données qui est durable au fil du temps.
  • Une autre stratégie, exigeant une moins forte intensité de ressources, mais aussi très pertinente, nécessiterait plutôt le ciblage d’un élément conceptuel récurrent particulier parmi les nombreux autres éléments inclus dans les concepts généraux, et suivrait la trace de son étude au travers de nombreuses approches et disciplines cherchant à mettre en lumière sa pertinence pour des secteurs de politique concrets présentant un intérêt pour CIC.

Cette revue adopte la dernière approche : tout en gardant à l’esprit la capacité de mobilisation des concepts indiquant des résultats sociaux souhaitables plus larges, elle suit la trace des applications de la recherche qui mettent en cause le sentiment d’appartenance au travers de concepts généraux et de disciplines au sens large. Elle montre des exemples d’applications de concepts généraux qui incluent le sentiment d’appartenance en tant qu’élément, mais elle ne fournit pas une revue complète de la littérature sur les concepts généraux eux-mêmes. Elle cherche à évaluer les éléments probants issus des études disponibles portant sur le sentiment d’appartenance, mettant l’accent sur la clarté analytique et la pertinence pour les secteurs de politique qui présentent un intérêt pour CIC. La revue permet aussi de repérer des lacunes sur le plan des connaissances et des données ainsi que de cerner de futures orientations de recherche sur le sentiment d’appartenance.

3. Exemples internationaux du sentiment d’appartenance en tant que dimension de résultats sociaux plus larges

Cette section aborde les approches internationales qui se concentrent sur des concepts largement répandus indiquant des résultats sociaux plus larges, mais aussi sur la mesure empirique de leurs nombreuses dimensions, au moyen d’indicateurs qui consistent habituellement en questions d’enquête. Dans ces approches, le sentiment d’appartenance est une dimension parmi plusieurs autres, chacune assortie de ses propres indicateurs, et susceptible ou pas d’être mesurée au moyen d’une question d’enquête qui utilise littéralement l’expression « sentiment d’appartenance ».

3.1 L’indice de cohésion sociale Scanlon-Monash (Australie – de 2007 à nos jours)

Le centre pour la recherche sociale australien, sous la direction du professeur Andrew Markus de l’Université Monash, et grâce à la contribution financière de la Fondation Scanlon, mène une enquête régulière depuis 2007 (répétée en 2009, et chaque année par la suite) en vue de surveiller divers aspects de la cohésion sociale. L’introduction conceptuelle du projet reconnaît que, malgré une longue tradition, il n’existe « aucune définition reconnue de la cohésion sociale », mais que certains éléments communs peuvent être définis. Parmi les difficultés liées au concept, le rapport fait remarquer que les définitions actuelles « reposent sur des impondérables » dont ceux-ci : « sentiment d’appartenance, attachement au groupe, volonté de participer et de partager les résultats ». L’introduction conceptuelle déclare avoir adopté une approche éclectique, mais fait aussi référence explicitement à l’influence des travaux des chercheurs canadiens Jane JensonNote de bas de page 5 et Paul Bernard.

Le projet Scanlon-Monash détermine cinq domaines de cohésion sociale, opérationnalisés comme suit :

Un indice nominal de cohésion sociale a été élaboré à partir des constatations de l’enquête nationale de 2007 en vue de fournir des données de référence. Les questions suivantes, validées par une analyse factorielle, ont été employées pour construire l’indice pour les cinq domaines de la cohésion sociale :

Appartenance :
Indication de fierté à l’égard du mode de vie et de la culture australiens; sentiment d’appartenance; importance de maintenir le mode de vie et la culture australiens.
Valeur :
Satisfaction à l’égard de la situation financière présente et indication de bonheur quant à l’année précédente.
Justice sociale et équité :
Perceptions du caractère adéquat du soutien financier offert aux personnes à faible revenu; écart entre les revenus élevé et faible; l’Australie en tant que pays offrant des possibilités économiques; confiance dans le gouvernement australien.
Participation (politique) :
Participer à un scrutin politique; signer une pétition; communiquer avec un député; participer à un boycottage; participer à une manifestation.
Acceptation et rejet, légitimité :
L’échelle mesure le rejet, indiqué par une perception négative de l’immigration à partir de nombreux pays différents; expérience déclarée de discrimination subie au cours des 12 derniers mois; désaccord avec le soutien offert par le gouvernement aux minorités ethniques en vue du maintien de leurs coutumes et traditions; sentiment que d’ici trois ou quatre ans, les choses vont empirer (Markus, 2011, p. 13).

Les cinq dimensions constituant l’indice de cohésion sociale sont suivies au fil du temps, et les séries temporelles sont rapportées sous la forme de cinq résultats séparés, de même qu’en présentant un score moyen global.

Exemples – 4 : L’indice de cohésion sociale de Scanlon-Monash inclut l’« appartenance » parmi l’une de ses cinq principales dimensions. La dimension « appartenance » est mesurée à l’aide d’indicateurs du « sentiment d’appartenance à l’Australie », de la « fierté » et de l’« importance du maintien » du « mode de vie et de la culture australiens ».

3.2 L’Enquête sociale générale de la Nouvelle-Zélande (depuis 2008)

L’Enquête sociale générale de la Nouvelle-Zélande se déroule tous les deux ans depuis 2008, et a été conçue en vue de fournir de l’information sur le bien-être des Néo-Zélandais âgés de 15 ans ou plus. Elle couvre un large éventail de résultats économiques et sociaux et montre comment les gens s’en sortent. De manière plus particulière, l’enquête donne un aperçu de la manière dont les résultats liés au bien-être sont répartis entre les différents groupes qui composent la population néo-zélandaise (Statistiques de la Nouvelle-Zélande, 2008). Elle inclut des questions sur le sentiment d’appartenance à la Nouvelle-Zélande et à « tout autre pays » à l’intérieur d’un module sur la « culture et l’identité », qui comprend aussi une batterie de questions à savoir s’il est « facile ou difficile d’exprimer son identité » en Nouvelle-Zélande et, si c’est difficile, d’en formuler les raisons (Statistiques de la Nouvelle-Zélande, 2010b). Les résultats de ces enquêtes ont été par la suite analysés en adoptant le point de vue de la cohésion sociale, et le sentiment d’appartenance en tant que l’une de ses dimensions (Statistiques de la Nouvelle-Zélande, 2011).

Exemples – 5 : La publication intitulée « Faits relatifs à la cohésion sociale en Nouvelle-Zélande tirés de l’Enquête sociale générale de 2008 » (Statistiques de la Nouvelle-Zélande, 2011) analyse le sentiment d’appartenance en tant que dimension de la cohésion sociale. Les autres dimensions de la cohésion sociale incluses dans l’analyse sont : discrimination perçue, capacité d’exprimer sa propre identité et tolérance à la diversité (p. 3).

L’analyse conceptuelle fondée sur la cohésion sociale, et incluant le sentiment d’appartenance dans ses éléments constitutifs, avait débuté en Nouvelle-Zélande à une époque antérieure, et comprenait aussi une conversation avec le Canada et une étude des travaux menés par des chercheurs canadiens spécialisés dans le domaine des politiques (voir Spoonley et Pearce, 2007, et Spoonley et autres, 2005).

3.3 L’approche de la qualité sociale (Europe, de 1997 à nos jours)

L’European Foundation on Social Quality (fondation européenne sur la qualité sociale) a mis au point un large cadre conceptuel qui comprend notamment quatre domaines (sécurité socioéconomique, cohésion sociale, inclusion sociale et habilitation sociale), chacune assortie de ses propres sous-domaines et indicateurs relatifs. L’approche visait à créer un cadre qui inclut des dimensions de la qualité de vie allant au-delà du domaine des résultats économiques. Dans le cadre de cette approche, le sentiment d’appartenance a été proposé comme une dimension de l’inclusion indiquant l’identification avec la communauté, de concert avec une autre dimension indiquant la participation et l’interdépendance (Berman et Phillips, 2000). Dans sa version la plus récente, le sentiment d’appartenance apparaît comme un indicateur au sein du domaine de la « cohésion sociale », et du sous-domaine de l’« identité » (van der Maesen et autres, 2005).

Exemples – 6 : Le sentiment d’appartenance dans l’approche relative à la qualité sociale. Le sentiment d’appartenance à la famille et au réseau des proches apparaît comme un indicateur de l’« identité interpersonnelle », de concert avec d’autres indicateurs de l’« identité nationale/européenne » et de l’« identité régionale/communautaire/locale », qui utilise des concepts différents, quoique associés, soit respectivement : identification aux symboles nationaux et européens, sentiment de fierté nationale, sentiment d’identité régionale/communautaire/locale (van der Maesen et autres, 2005).

3.4 Considérations générales sur les approches internationales

Le concept de l’appartenance en particulier est souvent cité dans les discussions qui accompagnent la recherche associée aux approches cherchant à déterminer et à combiner les nombreuses dimensions des résultats sociaux souhaitables. L’encadré ci-après fournit quelques exemples européens.

Exemples – 7 : Approches européennes

  • L’Initiative du vivre mieux de l’OCDE mentionne notamment, à l’intérieur de l’indicateur du vivre mieux « le domaine de l’engagement civique et de la gouvernance » : [Traduction] « L’engagement civique peut aussi contribuer à accroître le sentiment d’efficacité personnel et de maîtrise de sa propre existence (Barber, 1984). Finalement, l’engagement civique permet aux individus de développer un sentiment d’appartenance à leur communauté, la confiance dans les autres et un sentiment d’inclusion sociale. » (OCDE 2011, p.189)
  • L’Étude de faisabilité pour le développement d’indicateurs du bien-être en Europe, de l’Eurostat, aborde un domaine spécifique soit le « lien de parenté – appartenance » y compris le sous-domaine des « interactions sociales » et les « droits fondamentaux à un niveau social ». (Eurostat, 2010)
  • L’Enquête sociale Eurobaromètre, menée en 2003 (Groupe de recherche sur l’opinion européenne, 2004) avait pour thème « Citoyenneté et sentiment d’appartenance ». L’enquête visait à en apprendre davantage sur « les attitudes à l’égard d’un éventail de sujets, dont la famille et l’amitié, les sports, la religion, la politique et l’apprentissage des langues ». (Ibid., p. 4)

Il arrive souvent, toutefois, que ces approches n’utilisent pas une méthode particulière de mesure du sentiment d’appartenance dans le cadre de leur enquête. Au contraire, elles ont plutôt tendance à s’en servir comme s’il s’agissait d’un concept général à évaluer au moyen d’autres indicateurs d’interdépendance et d’attachement. Ces indicateurs ont des significations qui se rapprochent du sentiment d’appartenance, mais comportent aussi des différences non négligeables dans les réponses. Ils comprennent principalement des indicateurs de confiance, d’identification, d’identité, de fierté et de confiance dans les institutions.Note de bas de page 6

Leçons apprises – 2 : En général, même si le concept de l’appartenance est couramment utilisé à l’échelon international, les questions d’enquête qui font spécifiquement référence au « sentiment d’appartenance » sont couramment utilisées et ont donné des résultats de recherche valables en Nouvelle-Zélande, en Australie et au Canada (voir aussi les sections ci-après), mais elles sont moins répandues dans les sources européennes et les autres sources internationales.

Les exemples mentionnés dans cette section donnent un aperçu des types de débats qui tournent autour du sentiment d’appartenance en tant que dimension de concepts généraux à l’extérieur du Canada. La section montre que les indicateurs d’appartenance fondés sur des questions d’enquête varient tant sur le plan de la conceptualisation que de la formulation. De ce fait, il peut être difficile d’effectuer une analyse comparative entre pays, et ce, même si les thèmes de la recherche et les concepts fondamentaux utilisés montrent plusieurs points de convergence.

Recommandations – 1 : Une première étape en vue de faciliter la comparabilité des études sur le sentiment d’appartenance à l’échelon international serait d’effectuer une analyse systématique des différents indicateurs d’appartenance utilisés, en s’efforçant de clarifier la manière dont les constatations pourraient être influencées par les différentes mesures.

4. Conclusions similaires sur les déterminants du sentiment d’appartenance dans les études canadiennes : principaux facteurs démographiques, économiques et liés au capital humain

Plusieurs des études examinées dans les sections ci-après portent sur des études canadiennes visant à comprendre les déterminants du sentiment d’appartenance, selon une ou plusieurs échelles géographiques au Canada; certaines le font en comparaison avec les déterminants d’autres mesures de résultats sociaux souhaitables plus larges, et d’autres pas. De plus, toutes ces études qui portent sur les déterminants du sentiment d’appartenance comprennent dans leur analyse un ensemble normalisé de facteurs démographiques, économiques et liés au capital humain couramment utilisés. Pour cette raison, il est utile de discuter dès le début des conclusions sur cet ensemble normalisé de facteurs, d’autant plus que certaines ont tendance à être constantes, et d’autres régulièrement peu probantes d’une étude à l’autre. Cette section présente un aperçu de ces conclusions similaires.

La première conclusion constante dans toutes les études sur les déterminants du sentiment d’appartenance a un rapport avec l’effet net clair et marqué de l’âge : en référence avec toutes les échelles du sentiment d’appartenance, les répondants dans la tranche d’âge la plus élevée ont tendance à exprimer leur appartenance en plus fortes proportions.

Élément probant – 1 – ESG 2008 :

Le sentiment d’appartenance pour les trois échelles géographiques augmente avec l’âge (à partir de la tranche d’âge de 18-19 ans), plus particulièrement dans la catégorie de réponse « très fort ». (Voir Figure 4-1 à 4-3).

Il y a un recul dans le très fort sentiment d’appartenance à la communauté locale entre les tranches d’âge de 35 à 39, et celles de 40 à 44, et l’écart se creuse davantage dans les autres tranches d’âge qui suivent.

Figure 4-1 : Sentiment d’appartenance au Canada
Graphique de Sentiment d’appartenance au Canada décrit ci-dessous
Version texte : Figure 4-1 : Sentiment d’appartenance au Canada
Catégorie d’âges 15 à 17 18 à 19 20 à 24 25 à 29 30 à 34 35 à 39 40 à 44 45 à 49 50 à 54 55 à 59 60 à 64 65 à 69 70 à 74 75 à 79 80 + Total
Très fort 45,1 % 42,1 % 51,6 % 51,3 % 56,2 % 54,6 % 57,9 % 57,2 % 61,6 % 65,0 % 68,4 % 70,9 % 73,1 % 73,8 % 77,1 % 59,2 %
Plutôt fort 39,9 % 37,6 % 34,9 % 35,2 % 32,1 % 35,5 % 33,0 % 32,4 % 30,2 % 27,1 % 24,7 % 23,2 % 21,5 % 21,8 % 17,0 % 30,8 %
Plutôt faible 11,7 % 13,9 % 8,8 % 8,3 % 7,5 % 6,6 % 5,3 % 6,6 % 4,8 % 4,6 % 4,2 % 3,8 % 3,0 % 2,0 % 2,6 % 6,3 %
Très faible 2,2 % 5,5 % 4,4 % 4,5 % 3,3 % 2,4 % 3,4 % 2,6 % 3,1 % 2,7 % 2,0 % 1,8 % 1,6 % 1,6 % 1,8 % 3,0 %
Pas d’opinion 1,1 % 0,9 % 0,4 % 0,6 % 0,9 % 0,9 % 0,4 % 1,2 % 0,3 % 0,6 % 0,7 % 0,2 % 0,8 % 0,9 % 1,5 % 0,7 %
Figure 4-2 : Sentiment d’appartenance à la province
Graphique de Sentiment d’appartenance à la province décrit ci-dessous
Version texte : Figure 4-2 : Sentiment d’appartenance à la province
Catégorie d’âges 15 à 17  18 à 19  20 à 24 25 à 29 30 à 34 35 à 39 40 à 44 45 à 49 50 à 54 55 à 59 60 à 64 65 à 69 70 à 74 75 à 79 80 + Total
Très fort 28,5 % 26,6 % 28,0 % 30,6 % 32,4 % 32,8 % 36,5 % 36,6 % 40,4 % 44,2 % 48,0 % 48,1 % 49,9 % 53,3 % 52,9 % 37,9 %
Plutôt fort 53,4 % 47,4 % 49,9 % 48,5 % 48,0 % 49,1 % 47,4 % 48,4 % 45,8 % 43,7 % 40,9 % 40,9 % 41,8 % 37,7 % 35,6 % 46,2 %
Plutôt faible 12,2 % 19,8 % 16,3 % 14,0 % 14,3 % 12,3 % 10,4 % 10,6 % 8,8 % 7,8 % 6,8 % 7,4 % 5,2 % 5,0 % 5,3 % 10,8 %
Très faible 3,5 % 5,3 % 4,7 % 5,4 % 3,6 % 4,0 % 3,9 % 2,9 % 3,4 % 3,2 % 2,2 % 2,4 % 1,7 % 2,1 % 2,2 % 3,5 %
Pas d’opinion 2,5 % 0,9 % 1,1 % 1,5 % 1,8 % 1,8 % 1,8 % 1,6 % 1,7 % 1,2 % 2,1 % 1,2 % 1,4 % 1,8 % 4,1 % 1,7 %
Figure 4-3 : Sentiment d’appartenance à la communauté locale
Graphique de Sentiment d’appartenance à la communauté locale décrit ci-dessous
Version texte : Figure 4-3 : Sentiment d’appartenance à la communauté locale
Catégorie d’âges 15 à 17 18 à 19 20 à 24 25 à 29 30 à 34 35 à 39 40 à 44 45 à 49 50 à 54 55 à 59 60 à 64 65 à 69 70 à 74 75 à 79 80 + Total
Très fort 22,4 % 21,0 % 22,4 % 26,6 % 29,1 % 32,3 % 22,4 % 21,0 % 22,4 % 26,6 % 29,1 % 32,3 % 31,6 % 32,4 % 34,7 % 21,9 %
Plutôt fort 53,8 % 55,1 % 55,5 % 50,6 % 50,6 % 49,1 % 53,8 % 55,1 % 55,5 % 50,6 % 50,6 % 49,1 % 52,7 % 52,6 % 47,6 % 51,8 %
Plutôt faible 16,2 % 15,5 % 15,3 % 15,7 % 12,8 % 12,6 % 16,2 % 15,5 % 15,3 % 15,7 % 12,8 % 12,6 % 10,4 % 10,6 % 10,0 % 17,5 %
Très faible 6,5 % 7,0 % 6,1 % 5,8 % 6,7 % 5,0 % 6,5 % 7,0 % 6,1 % 5,8 % 6,7 % 5,0 % 3,8 % 2,5 % 5,1 % 7,5 %
Pas d’opinion 1,1 % 1,4 % 0,8 % 1,4 % 0,8 % 0,9 % 1,1 % 1,4 % 0,8 % 1,4 % 0,8 % 0,9 % 1,6 % 1,8 % 2,7 % 1,3 %

De plus, le sentiment d’appartenance au Canada, mais pas aux petites échelles géographiques, suit une variation régionale constante : avec une stabilité considérable au fil du temps, au Québec, de plus faibles proportions de la population globale déclarent une forte appartenance au Canada.Note de bas de page 7

Élément probant – 2 – ESG 2008 :

À l’extérieur du Québec, les différences dans le sentiment d’appartenance au Canada sont très petites (93 % à 96 % des réponses se situent dans les catégories Plutôt fort et Très fort). Au Québec, le sentiment d’appartenance au Canada est plus faible – 74 % des réponses se situent dans les catégories Plutôt fort et Très fort.

La proportion de répondants dans la catégorie « Très fort » (partie rouge des histogrammes) est globalement plus grande pour la réponse sur le sentiment d’appartenance au Canada que pour les réponses sur l’appartenance aux plus petites échelles.

Les différences entre les provinces pour ce qui est du sentiment d’appartenance à la fois à la province et à la communauté locale sont petites, et ne montrent pas un modèle distinct pour le Québec. (Voir Figures 4-4 à 4-6).

Figure 4-4 : Sentiment d’appartenance au Canada
Graphique du Sentiment d’appartenance au Canada décrit ci-dessous
Version texte : Figure 4-4 : Sentiment d’appartenance au Canada
Provinces TN IPE NE NB QC ON MB SK AB CB Total
Très fort 57,0 % 67,5 % 65,6 % 67,3 % 36,1 % 67,2 % 67,1 % 71,1 % 67,2 % 63,4 % 59,2 %
Plutôt fort 36,1 % 28,7 % 29,2 % 26,7 % 41,9 % 26,1 % 28,0 % 23,6 % 26,4 % 30,9 % 30,8 %
Plutôt faible 3,9 % 1,9 % 3,5 % 3,5 % 13,5 % 4,3 % 3,9 % 2,6 % 4,4 % 4,0 % 6,3 %
Très faible 1,6 % 1,0 % 1,3 % 1,9 % 8,0 % 1,7 % 0,8 % 1,6 % 1,2 % 1,0 % 3,0 %
Pas d’opinion 1,5 % 0,9 % 0,4 % 0,7 % 0,5 % 0,8 % 0,2 % 1,2 % 0,8 % 0,8 % 0,7 %
Figure 4-5 : Sentiment d’appartenance à la province
Graphique du Sentiment d’appartenance à la province décrit ci-dessous
Version texte : Figure 4-5 : Sentiment d’appartenance à la province
Provinces TN IPE NE NB QC ON MB SK AB CB Total
Très fort 58,1 % 44,3 % 42,0 % 40,3 % 45,5 % 33,3 % 35,0 % 44,2 % 34,6 % 35,5 % 37,9 %
Plutôt fort 35,7 % 43,7 % 45,4 % 45,2 % 40,7 % 47,9 % 51,7 % 43,6 % 50,0 % 48,5 % 46,2 %
Plutôt faible 3,8 % 7,9 % 7,9 % 9,1 % 9,6 % 12,3 % 9,1 % 7,3 % 10,5 % 11,7 % 10,8 %
Très faible 1,4 % 3,2 % 2,7 % 4,6 % 3,5 % 4,1 % 3,0 % 2,9 % 3,6 % 2,3 % 3,5 %
Pas d’opinion 1,1 % 1,0 % 2,1 % 0,8 % 0,7 % 2,4 % 1,3 % 2,0 % 1,3 % 1,9 % 1,7 %
Figure 4-6 : Sentiment d’appartenance à la communauté locale
Graphique du Sentiment d’appartenance à la communauté locale décrit ci-dessous
Version texte : Figure 4-6 : Sentiment d’appartenance à la communauté locale
Provinces TN IPE NE NB QC ON MB SK AB CB Total
Très fort 35,3 % 30,3 % 28,1 % 29,1 % 23,4 % 20,6 % 21,2 % 27,9 % 17,1 % 20,7 % 21,9 %
Plutôt fort 48,4 % 50,2 % 51,1 % 51,2 % 50,5 % 52,2 % 50,2 % 48,7 % 52,3 % 54,5 % 51,8 %
Plutôt faible 11,3 % 14,2 % 14,0 % 11,4 % 15,8 % 18,3 % 20,0 % 16,5 % 21,0 % 18,0 % 17,5 %
Très faible 4,3 % 3,9 % 5,5 % 7,0 % 9,8 % 7,1 % 7,1 % 5,4 % 8,2 % 5,6 % 7,5 %
Pas d’opinion 0,7 % 1,6 % 1,3 % 1,3 % 0,6 % 1,8 % 1,6 % 1,5 % 1,4 % 1,3 % 1,3 %

Les résultats de l’analyse différenciée selon les sexes montrent une propension légèrement supérieure à appartenir chez les femmes, et ce, même si dans certains cas ce résultat n’est pas significatif pour le sentiment d’appartenance au Canada. La différence entre les hommes et les femmes se creuse et devient plus claire à mesure que l’échelle géographique mise en correspondance avec l’appartenance devient plus petite.

Le niveau d’instruction n’avait qu’un effet mineur sur l’échelle de la communauté locale et de la province, ceux affichant un niveau d’instruction plus élevé se montrant légèrement moins enclins à appartenir (p. ex. Carpiano et Hystad, 2011). Le niveau d’instruction ne donne pas des résultats constants à l’échelle du Canada, les études fondées sur l’EDE (2002) montrant un faible effet négatif pour ceux ayant un niveau d’instruction élevé (p. ex. Banting et Soroka, 2012 et Wu, Hou et Schimmele, 2011), et celles fondées sur l’ESG (2003 et 2008) montrant un faible effet positif pour le même niveau d’instruction (Schellenberg 2004, et l’étude empirique effectuée à la suite de cette recherche, à venir). En se fondant sur l’EDE (2002), il est possible de constater que l’appartenance au groupe ethnique affiche une association positive avec les niveaux d’instruction inférieurs (Wu, Hou et Schimmele 2011).

Principales conclusions -1- tirées de la littérature :

  • Les répondants dans les tranches d’âge plus élevées expriment une appartenance plus forte dans de plus grandes proportions.
  • Les femmes expriment une forte appartenance dans des proportions légèrement plus grandes que les hommes, et ce, plus particulièrement pour l’échelle de la communauté locale.
  • Au Québec, de plus faibles proportions expriment une forte appartenance au Canada.
  • Les résultats relatifs au niveau d’instruction et au revenu ajusté du ménage sont faibles et parfois contradictoires, ce qui pourrait indiquer l’absence d’un rapport constant avec le sentiment d’appartenance.

L’indicateur économique le plus courant inclus dans les analyses du sentiment d’appartenance est le revenu ajusté du ménage individuel – c’est-à-dire la mesure de la part individuelle du revenu du ménage mis en commun, ajusté en fonction du nombre de membres dans le ménage. En règle générale, les résultats montrent une incidence plutôt faible de cette mesure sur le sentiment d’appartenance. Les études sur le sentiment d’appartenance au Canada ont révélé une incidence positive faible, mais seulement dans la catégorie du relevé élevé comparativement aux autres (p. ex. Banting et Soroka, 2012 et Wu, Hou et Schimmele, 2011). Certaines analyses à variables multiples de la littérature sur la santé revue ci-après révèlent que le revenu du ménage n’a aucune incidence significative sur le sentiment d’appartenance à la communauté, et une faible incidence négative dans les autres. Les résultats fondés sur l’ESCC fournis par l’Indice canadien du mieux-être (2010) montrent que les ménages qui affichent un plus faible revenu expriment un plus faible sentiment d’appartenance à la communauté locale. Les résultats sous forme de tableaux publiés par Schellenberg (2004) et fondés sur l’ESG 2003 de même que sur la plus récente ESG 2008 (les tableaux sont disponibles sur demande) montrent un manque de différence appréciable dans le sentiment d’appartenance à la communauté, à la province et au Canada selon les catégories de revenu des ménages. Toutefois, l’étude empirique fondée sur l’ESG qui suivra la présente revue a permis de constater une faible association positive nette entre le revenu élevé et le sentiment d’appartenance au Canada, et entre le faible revenu et l’appartenance à la communauté locale et à la province. Selon l’EDE (2002), l’appartenance à un groupe ethnique présente une association positive avec les faibles niveaux de revenu (Wu, Hou et Schimmele, 2011). Ces constatations faibles et contradictoires peuvent s’expliquer en partie par la faible qualité des données sur le revenu des ménages établies en fonction des réponses données par les répondants eux-mêmes en se situant dans des fourchettes. Ce type de données a tendance à être imprécis et à souffrir du fait qu’un nombre élevé de répondants ne se donnent pas la peine de répondre.

Recommandations – 2 : De meilleures données économiques, obtenues si possible grâce au couplage avec des données fiscales, pourraient contribuer à clarifier davantage le rapport qui existe entre le revenu des ménages et le sentiment d’appartenance à diverses échelles géographiques. Jusqu’ici, les résultats relatifs à ces rapports se sont révélés faibles et, dans certains cas, contradictoires. Toutefois, il n’est pas possible d’affirmer clairement que cela est dû à la faible qualité des données sur le revenu des ménages ou à l’absence réelle d’un rapport clair.

4.1 Qualifier l’incidence du revenu des ménages sur l’appartenance

Une récente analyse qualitative fournit quelques éléments probants intéressants montrant comment, sous les résultats fondés sur les questions d’enquête, on peut trouver des différences dans la manière dont les individus ayant un statut socioéconomique différent comprennent leur appartenance à la communauté. Stewart et autres (2009) ont effectué une étude comparant les expériences d’isolement social et le sentiment d’appartenance à la communauté qui en résulte pour les personnes à faible revenu et à revenu élevé. L’étude est principalement qualitative.Note de bas de page 8 Elle montre que l’isolement et un faible sentiment d’appartenance sont plus prononcés chez les membres du segment défavorisé, tandis que l’appartenance et l’engagement social sont le résultat prépondérant chez ceux qui affichent des revenus élevés. Elle montre aussi que même si les répondants à revenu élevé se décrivent eux-mêmes comme appartenant à de nombreuses communautés, par l’entremise de liens institutionnels et organisationnels, les répondants à faible revenu se définissent quant à eux comme appartenant à un nombre plus limité de réseaux d’amis et de voisins. De plus, l’étude montre que les restrictions du revenu entraînent une limite de la capacité financière à participer, de même que le sentiment de souffrir d’un stigmate social associé à la pauvreté. Ces deux facteurs ont montré qu’ils ont une incidence sur le sentiment d’appartenance. Comparativement, les répondants à revenu élevé étaient capables d’utiliser leurs moyens financiers non seulement pour participer à la collectivité, mais aussi pour y investir en redonnant un peu de ce qu’ils avaient reçu par des dons et des interventions compétentes.

Exemples – 8 : Stewart et autres (2009) montre, par l’entremise d’une étude qualitative sur l’appartenance à la communauté, que les personnes à revenu élevé voient la communauté à laquelle ils appartiennent comme étant plus étendue, institutionnalisée et à forte intensité de ressources, que celles à faible revenu.

Même si elle ne porte pas sur les immigrants ou sur les minorités ethno-raciales, cette recherche est indicative du niveau de profondeur que l’on peut obtenir lorsque les résultats d’une enquête sont complétés par une recherche qualitative.

Leçons apprises – 3 : Une recherche qualitative peut être très utile pour explorer la manière dont des catégories de population affichant des origines ou des capacités différentes sont susceptibles de comprendre d’une manière différente une question d’enquête. Cette différence de compréhension peut être masquée par des réponses semblables aux questions de l’enquête.

Recommandations – 3 : Une question d’enquête qu’il pourrait être utile d’étudier sur le plan qualitatif fait référence au « sentiment d’appartenance à la communauté locale », en vue d’analyser les variations et les modèles systématiques dans la compréhension de ce que l’on entend par communauté locale.

5. Études canadiennes dans lesquelles les indicateurs empiriques du sentiment d’appartenance et d’autres résultats sociaux mesurent des dimensions de résultats sociaux plus larges

Les approches examinées dans cette section comprennent toutes le sentiment d’appartenance en tant que l’une des nombreuses dimensions qui composent un résultat social plus large, qui est le centre d’intérêt principal de la recherche. Dans les exemples examinés, plusieurs dimensions, y compris le sentiment d’appartenance, sont mesurées de manière empirique à l’aide d’indicateurs. Dans ces approches canadiennes, la dimension du sentiment d’appartenance est mesurée à l’aide de questions d’enquête formulées en termes de sentiment d’appartenance, dans la majorité des cas, en se fondant sur des enquêtes de Statistique Canada. Les approches et les études varient dans la manière dont elles sélectionnent, combinent ou comparent les questions d’enquête sur le sentiment d’appartenance axées sur diverses échelles géographiques et, pour ce qui est des études fondées sur l’Enquête sur la diversité ethnique (EDE, 2002), aussi sur l’appartenance à son propre groupe ethnique.

5.1 Le sentiment d’appartenance en tant qu’indicateur de bien-être

Le concept de bien-être s’est établi internationalement pour contrebalancer l’accent mis sur les résultats économiques en tant qu’indicateurs clés de la réussite individuelle et sociale, comme le revenu individuel ou le PIB. Plusieurs variantes existent, avec comme fil conducteur l’inclusion de dimensions qui importent dans l’existence des gens, et qui sont vues comme non réductibles au seul indicateur économique. Pour ce qui est du bien-être au niveau agrégé, deux initiatives canadiennes qui comprennent notamment le sentiment d’appartenance sont présentées ici, toutes deux destinées à faire le suivi de mesures composites complexes du bien-être et de leurs divers éléments et indicateurs. Pour ce qui est du bien-être sur le plan individuel, une étude qui cherche à comprendre les déterminants des indicateurs de niveau individuel de bien-être séparément est examinée.

5.1.1 Indicateurs du bien-être au Canada : l’approche RHDCC

Ressources humaines et Développement des compétences Canada (RHDCC) a formulé une série d’indicateurs du bien-être couvrant les domaines suivants : travail, logement, vie familiale, participation sociale, loisirs, santé, sécurité, environnement, sécurité financière et apprentissage. Dans ce cadre, les indicateurs du sentiment d’appartenance à la communauté locale, à la province et au Canada sont inclus dans le domaine de la participation sociale.

Exemples – 9 : Le sentiment d’appartenance dans le cadre du bien-être de RHDCC. Les indicateurs du sentiment d’appartenance aux trois échelles géographiques (communauté locale, province et Canada), de concert avec les indicateurs de la confiance dans les autres et des réseaux sociaux, sont conceptualisés comme des « influences clés », représentant les ressources sociales et individuelles qui facilitent la condition de participation. Les indicateurs du « statut » mesurent la quantité de participation : participation aux activités politiques, participation aux activités sociales, dons et bénévolat. (RHDCC, sans date).

Le site Web de RHDCC sur le bien-être publie des résultats sur le sentiment d’appartenance en se fondant sur l’ESG 2003, il s’agit du pourcentage de répondants déclarant ressentir une appartenance Plutôt forte ou Très forte aux trois échelles géographiques, ainsi que de quelques résultats selon l’âge, le sexe et la région qui confirment les tendances connues abordées à la section 4 du présent rapport, tandis que les résultats fondés sur l’ESG 2008, plus récente, peuvent aussi être consultés.Note de bas de page 9

5.1.2 L’Indice canadien du mieux-être (ICME)

Principales conclusions -2- tirées du domaine du dynamisme communautaire de l’indice canadien du mieux-être (2010, p. 83) :
- Selon l’ESCC, en 2009, le niveau le plus élevé de sentiment d’appartenance à la communauté locale se retrouvait chez les jeunes âgés de 12 à 19 ans (75,1 %). Ce niveau chute brusquement, toutefois, chez les jeunes adultes – pour atteindre 58,1 % chez ceux qui sont âgés de 20 à 34 ans. Le niveau d’attachement à la communauté augmente après 35 ans.

L’Indice canadien du mieux-être (ICMÊ) a été mis au point au fil des années avec le soutien principal de l’Atkinson Charitable Foundation (ACF) et actuellement, c’est la Faculty of Applied Health Sciences de l’Université de Waterloo qui en est l’hôte. L’indice consiste en une mesure composite couvrant huit domaines : dynamisme communautaire, participation démocratique, éducation, environnement, populations en santé, loisirs et culture, niveaux de vie et aménagement du temps. Chaque domaine, à son tour, est mesuré en combinant huit indicateurs additionnels. Le domaine du dynamisme communautaire comprend notamment le sentiment d’appartenance à la communauté locale parmi ses indicateurs.

Exemples – 10 : Le sentiment d’appartenance dans l’Indice canadien du mieux-être. Le pourcentage de personnes déclarant éprouver un sentiment d’appartenance à la communauté plutôt fort ou très fort figure parmi les huit indicateurs dans le domaine du dynamisme communautaire (les autres sept indicateurs du dynamisme communautaire sont le pourcentage de participation à des activités organisées, le pourcentage de personnes ayant six (6) amis ou plus, le taux de délits contre les biens, le taux de crime avec violence, le pourcentage de personnes se sentant en sécurité de marcher seul le soir, le pourcentage de personnes venant en aide à d’autres gratuitement et de leur propre chef).

On se sert de l’Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes (ESCC) pour faire le suivi de l’appartenance à la communauté locale, dont le pourcentage à cet égard augmente au fil du temps (Indice canadien du mieux-être, 2010 et 2012).

5.1.3 Appartenance à la communauté et bien-être des immigrants

Principales conclusions -3- de Burton et Phipps (2010) :

  • Les immigrants adultes affichent une plus faible propension à appartenir à la communauté locale que les Canadiens d’origine, mais ils deviennent de plus en plus semblables aux Canadiens d’origine à ce chapitre au fil du temps passé au Canada.
  • Les jeunes immigrants (de 12 à 17 ans), et plus particulièrement les filles, affichent une plus faible propension à appartenir à la communauté locale que leurs pairs.

Dans un récent document de travail intitulé « The well-being of immigrant children and parents in Canada », les économistes Peter Burton et Shelley Phipps (2010) de l’Université Dalhousie utilisent des questions d’enquête sur la « satisfaction quant à la vie » et le « sentiment d’appartenance à la collectivité » à titre d’indicateurs du bien-être chez les immigrants adultes et leurs enfants âgés de 12 à 17 ans, en se fondant sur l’Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes (ESCC). Il s’agit d’une étude empirique utilisant le concept général du bien-être, mais qui, en réalité, se concentre sur les résultats empiriques concernant deux sous-dimensions et deux sous-populations en particulier, ayant obtenu des résultats détaillés par rapport à celles-ci. Ils analysent les deux résultats séparément, et constatent que l’association négative entre le statut d’immigrant et tant la satisfaction quant à la vie que le sentiment d’appartenance à la collectivité est plus marquée pour les adultes que pour les enfants, mais aussi que, pour les adultes cette association négative diminue au fil du temps passé au Canada. De plus, en ce qui concerne les jeunes, les filles immigrantes affichent un écart plus marqué du sentiment d’appartenance au Canada comparativement à leurs pairs canadiens que les garçons immigrants.

5.1.4 Considérations sur le sentiment d’appartenance dans le contexte des approches à l’égard du bien-être

Les trois approches susmentionnées correspondent très bien à l’image du bien-être en tant que concept suffisamment clair pour englober les préoccupations actuelles à l’égard de la qualité de vie, mais assez malléable pour permettre d’établir plusieurs moyens distincts de conceptualiser les définitions détaillées et les indicateurs utilisés. Et c’est le cas même dans le contexte canadien, où toutes les approches ont accès aux mêmes sources de données, souvent les enquêtes réalisées par Statistique Canada, qui offrent un ensemble cohérent de questions formulées directement en termes de sentiment d’appartenance. Même si l’approche utilisée par RHDCC recourt à trois échelles géographiques et les conceptualise en tant que facilitateurs de la participation sociale, il reste que l’ICMÊ choisit d’utiliser uniquement l’appartenance à la communauté locale à titre d’élément de la vitalité communautaire. L’analyse causale dans l’étude sur l’appartenance et la satisfaction quant à la vie se limite à l’appartenance à la communauté locale. Cette analyse exploite aussi la grande taille de l’échantillon de l’ESCC, ce qui permet aux chercheurs de se concentrer sur les résultats pour les immigrants, et d’obtenir des résultats intéressants selon la durée du séjour et la catégorie d’âge, notamment des mesures de contrôle des caractéristiques ethnoculturelles. Dans cette approche et aussi dans celle de l’ICMÊ, il est possible que la décision de ne prendre en considération que l’échelle géographique de la communauté locale ait été dictée par la préférence pour la source de données comportant un échantillon de grande taille, et seulement une question sur le sentiment d’appartenance (à la communauté locale).

Compte tenu de la diversité des intérêts stratégiques de CIC, que nous avons mentionnés dans l’introduction, tant l’échelle du pays que l’échelle locale d’appartenance sont pertinentes, ainsi que leur évolution au fil du temps pour les immigrants. De plus, les indicateurs de la diversité présentent aussi un intérêt, à la fois du point de vue des formes d’appartenance (par exemple au pays d’origine ou au groupe ethnique) et de l’identité ethnoculturelle et raciale du répondant. Les indicateurs de la diversité, tel qu’illustré dans les sections qui suivent, sont plus répandus dans les approches fondées sur le grand concept de la cohésion sociale.

Leçons apprises – 4 : L’Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes présente un échantillon de très grande taille, mais seulement une question sur le sentiment d’appartenance à la communauté locale, et l’Enquête sociale générale présente trois échelles géographiques d’appartenance, mais un échantillon de plus petite taille. Ces enquêtes régulières actuellement disponibles offrent des possibilités de recherches récentes définies.

5.2 Le sentiment d’appartenance en tant qu’indicateur de la cohésion sociale

Le concept de la cohésion sociale est devenu à la mode sur la scène internationale dans les années 1990 pour indiquer un résultat social souhaitable au sens large qui englobe des éléments liés aux interactions sociales et aux valeurs communes, en plus des résultats économiques. L’optique d’analyse de la cohésion sociale a été appliquée à l’étude du sentiment d’appartenance au Canada à partir de deux principaux points de vue :

  1. Comparer les modèles ancrés historiquement d’appartenance au Canada, y compris surtout ceux des Franco-Québécois, et des Canadiens d’origine anglo-européenne ou d’Europe du Nord, et, lorsque les données le permettent, ceux qui ont un rapport avec l’identité autochtone, avec ceux de catégories de population qui s’identifient à des segments de minorités ethnoculturelles qui peuvent remonter à une immigration relativement récente. (Principale recherche publiée : Soroka, Johnston et Banting, 2007)
  2. Comparer la population canadienne « blanche » d’origine principalement européenne avec des segments de population de minorité visible, et le sentiment d’appartenance au Canada avec le sentiment d’appartenance au groupe ethnique. (Principale recherche publiée : texte publié dans l’ouvrage sous la direction de Reitz et autres, 2009)

Ces deux approches se concentrent sur l’analyse des déterminants de plusieurs dimensions de la cohésion sociale et de ses indicateurs, plutôt que de faire le suivi de mesures composites de la cohésion sociale au fil du temps (l’approche par le suivi est utilisée pour la cohésion sociale par la Fondation Scanlon en Australie, mentionnée à la section 3.1).

5.2.1 Cohésion sociale et identités historiques

Soroka, Johnston et Banting (2007) abordent la cohésion sociale en adoptant trois points de vue différents :

  1. une approche durkheimienne, qui met l’accent sur les valeurs communes et l’identité,
  2. une approche axée sur l’inclusion/exclusion sociale, qui met l’accent sur le pluralisme des valeurs et l’égalité de la participation dans plusieurs sphères de la société,
  3. une approche axée sur le capital social, qui met l’accent sur un équilibre vertueux entre les liens sociaux à l’intérieur des divisions culturelles et entre les divisions culturelles – le capital social « bonding » (fermé) et le capital social « bridging » (ouvert).

Puisant dans ces divers points de vue, les auteurs formulent une approche à indicateurs multiples fondée sur la deuxième vague du sondage Equality, Security and Community Survey (ESCS, 2002), et sur l’Étude électorale canadienne de 2004. Leur approche consiste à comparer les résultats des mesures de la cohésion sociale entre des catégories ethnoculturelles, déduction faite de l’effet d’un ensemble de facteurs socioéconomiques, démographiques et liés à l’immigration. Les résultats sont comparés à une catégorie de référence « majoritaire » constituée de Canadiens dont l’origine ethnique est anglaise ou nord-européenne. Le sentiment d’appartenance au Canada est inclus dans la comparaison, de même que des indicateurs de confiance, de valeurs sociales et de participation communautaire.

Exemples – 11 : Dans cette étude par Soroka, Johnson et Banting (2007), les indicateurs de cohésion sociale sont : fierté à l’égard du Canada, sentiment d’appartenance au Canada, confiance généralisée, confiance stratégique, attitude favorable au mariage gai, attitude favorable au choix des femmes de rester à la maison, appartenance à des organismes sociaux qui dépassent les frontières ethnoculturelles (pour lesquels les auteurs utilisent l’expression « bridging groups » ou groupes ouverts, tirée de la littérature sur le capital social), et participation électorale.

Les constatations de leur étude mettent en évidence certains modèles clés, dont le plus marqué est la spécificité des réponses données par les Québécois francophones aux indicateurs qui sous-entendent un attachement à une identité collective pancanadienne.

  1. Les réponses aux questions sur l’exercice du vote, l’appartenance à des « groupes ouverts »Note de bas de page 10 et l’appui à des opinions sur les valeurs sociales montrent que ni les diverses catégories ethnoculturelles ni les Québécois francophones ne diffèrent de manière significative de la catégorie de référence, sauf dans le cas des Québécois francophones qui sont légèrement plus favorables au mariage gai.
  2. Plus particulièrement en ce qui concerne le sentiment d’appartenance au Canada, les réponses montrent que les différences les plus significatives entre les catégories de population, après l’introduction de mesures de contrôle socioéconomiques, démographiques et liées à l’immigration sont celles entre les Québécois francophones et la catégorie de référence. Comparativement, le sentiment d’appartenance au Canada des catégories ethnoculturelles d’origine immigrante a tendance à se rapprocher des résultats de la catégorie de référence « majoritaire » à mesure que le temps et les générations depuis l’immigration passent. Même si quelques petites différences entre les catégories d’immigrants demeurent, il reste qu’elles tendent à être plus petites que celles qui existent entre les Québécois francophones et la catégorie de référence. Dans leur analyse, les auteurs incluent aussi un indicateur de l’identification autochtone, et constatent que les résultats du sentiment d’appartenance au Canada pour ce segment ne diffèrent pas de manière significative de ceux de la catégorie de référence, après l’introduction de mesures de contrôle.
  3. De plus, leurs constatations sur la confiance varient légèrement de celles sur le sentiment d’appartenance : en effet, pour certaines catégories ethnoculturelles (Europe méridionale, Asie de l’Est, et Afrique/Caraïbes, les limites des données n’ont pas permis d’apporter des distinctions plus fines), elles convergeaient de façon moins marquée vers celles de la catégorie de référence avec le passage du temps et des générations.
  4. Elles montrent aussi un contraste plus marqué entre les Québécois francophones et les autres pour l’indicateur de fierté que pour les autres indicateurs. Dans le cas de la fierté, les Québécois francophones ont donné des réponses dans lesquelles ils expriment vraisemblablement une fierté beaucoup moins grande que les membres du groupe de référence, tandis qu’aucune des catégories ethniques n’a soutenu d’opinion vraiment différente par rapport à la catégorie de référence (une moins grande fierté a été constatée seulement dans les catégories d’immigrants de l’Asie de l’Est et de l’Afrique/des Caraïbes, sauf pour la deuxième génération).
  5. Pour ce qui est de l’auto-déclaration de la participation électorale, les Autochtones ont montré une propension un peu plus faible à voter, de même que les immigrants (sauf ceux qui sont nés au Canada) de l’Asie de l’Est et les immigrants (sauf ceux qui sont nés au Canada) de l’Afrique/des Caraïbes.

Principales conclusions -5- de Soroka, Johnston et Banting (2007) :

  • Les Québécois francophones affichent le plus faible sentiment d’appartenance au Canada comparativement à la catégorie de référence des Canadiens dont l’origine ethnique est anglaise ou du nord de l’Europe.
  • Le sentiment d’appartenance au Canada des immigrants appartenant aux catégories ethnoculturelles a tendance à converger vers celui de la catégorie de référence, au fil du temps passé au Canada.

Les auteurs concluent en analysant les résultats au travers des trois optiques de cohésion sociale définies au début du chapitre (et résumées au début de cette section), et en mentionnant que la deuxième optique, qui met l’accent sur la participation, conduit à une perception plus optimiste que la première, laquelle met en évidence la communauté de valeurs et d’identités. Les différences majeures, toutefois, demeurent celles qui sont ancrées dans les identités historiques, et non celles qui sont introduites par l’immigration. Pour ce qui est de l’optique du capital social, l’analyse ne montre aucune différence entre les diverses catégories ethnoculturelles.

Leçons apprises – 5 : Lorsque l’on inclut un indicateur du sentiment d’appartenance au Canada dans une analyse, il est important de prendre en compte explicitement les plus faibles proportions constatées de manière constante d’appartenance au Canada distinctes du Québec, afin d’obtenir une interprétation correcte des constatations globales.

Peu importe les préférences que l’on peut entretenir pour les approches à l’égard de la cohésion sociale ou du capital social abordées par les auteurs, cette étude et ses résultats empiriques ont, en général, le mérite de mettre en évidence les contours du paysage canadien des populations historiques et régionales quant au sentiment d’appartenance au Canada et aux autres indicateurs. Après tout, c’est précisément cela, et non quelque moyenne canadienne généralisée, qui constitue le terrain avec lequel les immigrants et les segments de population de tous les horizons doivent interagir.

5.2.2 Cohésion sociale et diversité ethno-raciale

Jeffrey Reitz et une équipe de collaborateurs (2009) ont publié un ouvrage intitulé Multiculturalism and Social Cohesion, fondé entièrement sur l’analyse de l’Enquête sur la diversité ethnique (EDE). Le livre se concentre principalement sur le rapport entre les formes d’attachement dirigées vers l’ethnicité (p. ex. l’appartenance à un « groupe ethnique ou culturel » et l’importance de l’« identité ethnique ») et d’autres mesures de la cohésion sociale qui, entre autres, comprennent le sentiment d’appartenance au Canada ou à une plus petite échelle géographique (et administrative) – province, et ville.

Dans une bonne partie du livre, sauf dans le premier et le cinquième chapitre, les chercheurs ont choisi de réunir en un indice additif le sentiment d’appartenance au Canada, à la province et à la « ville ou communauté locale » (l’échelle géographique la plus petite disponible dans l’EDE). Cet indice composite est ensuite utilisé pour établir des comparaisons. Compte tenu de ce choix, les trois échelles géographiques sont traitées comme si elles étaient équivalentes, ou, pour être plus précis, équivalentes pour les fins de la comparaison avec les autres indicateurs mentionnés dans les divers chapitres. À cet égard, le centre d’intérêt de cette équipe de chercheurs est très différent de celui des chercheurs dont il a été question dans la section précédente, et ci-après, dans la section sur les études canadiennes du sentiment d’appartenance en tant que sujet d’intérêt particulier. Comme il en sera question ci-dessous, l’approche retenue par Reitz et autres fonctionne dans certains cas, mais peut manquer de clarté dans d’autres.Note de bas de page 11

Chapitres utilisant l’« appartenance au Canada » en tant qu’indicateur de cohésion sociale

Comme il a déjà été mentionné, plutôt que d’utiliser une mesure de l’appartenance qui réunit les échelles géographiques, l’analyse du chapitre 1 porte sur l’appartenance au Canada seulement, et sur d’autres mesures de cohésion, notamment : confiance, satisfaction quant à la vie, identité canadienne, citoyenneté canadienne, vote lors d’élections fédérales et bénévolat. Les mesures de l’attachement ethnique en rapport avec lesquelles les mesures de la cohésion sont analysées comprennent notamment : importance de l’origine ethnique, importance des coutumes et traditions, et appartenance au groupe ethnique. Les résultats, de manière générale, montrent que les attachements ethniques ont un lien positif avec le sentiment d’appartenance au Canada. Il existe un lien positif entre les attachements ethniques et d’autres mesures de la cohésion : satisfaction quant à la vie, bénévolat et exercice du droit de vote. Comparativement, les attachements ethniques ont montré un lien négatif avec l’identité et la citoyenneté canadiennes, de même qu’avec la confiance généralisée. L’orientation de ces associations s’est révélée largement cohérente pour le statut de minorité visible et le statut d’immigrant.

Le thème de la cohésion, à l’échelle du Canada, est repris au chapitre 5 qui porte sur la perception de l’inégalité et de la discrimination par les catégories de population caractérisées par le statut de minorité visible, de même que leur proximité avec l’immigration au sens de générations ou de durée du séjour au Canada. Dans ce chapitre, les mêmes mesures de la cohésion sont utilisées que dans le chapitre 1.

Exemples – 12 : Dans les chapitres 1 et 5 de l’ouvrage sous la direction de Reitz et autres (2009), les auteurs analysent le sentiment d’appartenance au Canada en tant qu’indicateur de cohésion sociale de concert avec la confiance, la satisfaction quant à la vie, l’identité canadienne, la citoyenneté canadienne, l’exercice du vote à l’échelon fédéral et le bénévolat. Ils comparent comment chacune de ces dimensions est associée aux indicateurs de l’attachement ethnique (ch. 1); et à la discrimination et à la crainte des crimes haineux (ch. 5).

L’analyse multivariable montre, après déduction de l’effet de l’âge et de la durée du séjour au Canada, que le statut de minorité visible présente un lien positif avec le sentiment d’appartenance au Canada pour les immigrants récents, et dans une moindre mesure, pour les immigrants antérieurs.Note de bas de page 12 Toutefois, on constate que les enfants des immigrants appartenant à une minorité visible (c.-à-d. la deuxième génération) affichent un sentiment d’appartenance au Canada légèrement inférieur à celui de ceux qui ne font pas partie des minorités visibles.

Principales conclusions -6- de Reitz et autres (2009), ch. 1 et 5 :

  • L’attachement ethnique est associé positivement au sentiment d’appartenance au Canada.
  • Les immigrants récents faisant partie des minorités visibles affichent des niveaux d’appartenance au Canada plus élevés que les immigrants antérieurs membres des minorités visibles et les enfants d’immigrants.
  • La discrimination perçue exerce une influence négative sur l’appartenance au Canada. Cette incidence est plus forte pour les immigrants antérieurs et les enfants d’immigrants que pour les immigrants récents.

D’autres indicateurs sont alors ajoutés à l’analyse, notamment : revenu (mesuré en tant que part individuelle du revenu du ménage), perception de discrimination, et perception de vulnérabilité (mesurée en tant que crainte des crimes haineux). Les résultats sur le revenu du ménage sont, en général, peu concluants. La discrimination perçue, comme on peut s’y attendre, a un lien négatif avec le sentiment d’appartenance au Canada, et la taille du coefficient négatif augmente à partir des immigrants récents, jusqu’aux immigrants antérieurs et à ceux qui ont au moins un parent immigrant (c.-à-d. la deuxième génération). Pour ce qui est de la vulnérabilité perçue (crainte des crimes haineux), les résultats montrent une incidence négative pour la deuxième génération et les immigrants antérieurs, mais sont peu concluants pour les immigrants récents.

Les constatations issues de ce chapitre fournissent un intéressant contraste par rapport à la discrimination perçue et à la vulnérabilité. D’un côté, on montre qu’elles ont une incidence négative sur plusieurs aspects de l’attachement au Canada, et plus particulièrement en ce qui concerne le sentiment d’appartenance, la confiance et la satisfaction. De l’autre côté, les résultats sont peu concluants quant à l’association de la discrimination et de la vulnérabilité avec les indicateurs de comportements, tels que l’exercice du droit de vote et le bénévolat. Du point de vue de la politique, cela suggère qu’en procédant à des recherches plus poussées il serait peut-être possible d’obtenir des résultats utiles, si ces dernières permettaient de montrer avec plus de précision comment la participation et l’engagement citoyen pourraient se révéler une voie efficace pour l’inclusion des victimes de discrimination. La participation pourrait créer des possibilités de lutter contre la discrimination et de dissiper le sentiment d’isolement qui est susceptible d’avoir résulté d’expériences antérieures.

Chapitres comprenant des indices du sentiment d’appartenance avec trois échelles géographiques réunies

Dans le chapitre 3, les auteurs cherchent à déterminer si les « mesures du bien-être », parmi lesquelles une mesure qui combine les échelles du sentiment d’appartenance est incluse, sont affectées par la discrimination.Note de bas de page 13 Ils analysent aussi comment l’appartenance ethnique (« appartenance à un groupe ethnique ou culturel »), est susceptible de servir d’intermédiaire à l’effet d’expériences de discrimination sur le bien-être. Le chapitre comprend aussi des analyses sur des catégories de population séparées, définies selon leur réponse à la question sur l’origine ethnique (étant donné que les réponses concernant l’origine ethnique peuvent être multiples, un répondant peut se trouver dans plus d’une catégorie, de ce fait, les segments ainsi obtenus sont analysés séparément). Les catégories sont « Anglos », « Français », « Minorités de race blanche », et « Minorités visibles ».Note de bas de page 14 Les mesures du bien-être comprennent notamment : une mesure combinée incluant diverses questions sur le sentiment d’appartenance (qui est appelé « sentiment d’inclusion sociale » dans ce chapitre), une mesure combinée comprenant des questions sur la confiance, et l’auto-déclaration sur la satisfaction quant à la vie. Les constatations montrent que la discrimination réduit le bien-être dans tous ses indicateurs, et il y a des variations entre les répondants pour ce qui est des catégories de leur origine ethnique. De plus, l’attachement ethnique peut, dans une mesure limitée, atténuer l’effet négatif des expériences de discrimination sur toutes les mesures du bien-être, mais pas dans la catégorie « Français ». En effet, dans la catégorie d’origine ethnique « Français » utilisée dans cette analyse, la composition interne des mesures combinées du sentiment d’appartenance est considérablement différente de celle des autres catégories d’origine ethnique, et affiche un sentiment d’appartenance plus élevé pour la province et plus faible pour le Canada. Étant donné que l’analyse est effectuée sur des segments de population séparés, cependant, cela ne pose pas de problème. De plus, les constatations relatives à cette mesure combinée pour la catégorie « Français » sont cohérentes avec celles des autres mesures du bien-être – confiance et satisfaction quant à la vie, qui sont elles aussi calculées séparément.

Principales conclusions -7- de Reitz et autres (2009), ch. 3 :
L’appartenance à un groupe ethnique peut réduire l’incidence négative de la discrimination perçue sur le sentiment d’appartenance global (échelles géographiques combinées) pour toutes les catégories d’origine ethnique, sauf celle de l’origine française au Québec.

Au chapitre 4, les auteurs déterminent divers « modèles d’attachement » au Québec et dans le reste du Canada en étudiant comme un certain nombre de variables s’associent, notamment : scores élevés dans la mesure combinée de l’appartenance, importance élevée de l’« Identité canadienne », fort sentiment d’appartenance au groupe ethnique, importance élevée de l’identité ethnique, importance élevée de l’origine ethnique et importance élevée des coutumes et des traditions.

Leçons apprises – 6 : La discrimination est un important facteur à prendre en considération dans l’étude du sentiment d’appartenance, et plus particulièrement lorsque l’on se concentre sur les minorités ethnoraciales.

Dans ce chapitre, l’approche adoptée consiste à additionner toutes les réponses aux questions sur le sentiment d’appartenance posées en rapport avec trois échelles géographiques différentes, alors que la mesure de l’« appartenance ethnique » est tenue séparée. En parallèle, le chapitre fait état de l’utilisation d’une approche semblable aussi pour d’autres mesures, mais de manière quelque peu incohérente. En ce qui a trait aux mesures de l’identité, une mesure composite de l’« identité canadienne » est créée, qui combine toutes les identités faisant référence au Canada ainsi que leurs sous-unités (p. 98), par exemple, « Canadien/Canadienne », « Canadien-français », « Québécois », « Acadien », « Terre-Neuvien », etc. En même temps, d’autres identités sont séparées dans une mesure de l’identité « ethnique ». Comparativement, la mesure de l’« importance de l’origine ethnique » est définie en incluant toutes les origines ethniques ayant trait aux origines françaises et britanniques (Français, Canadien-français, Québécois, îles Britanniques, etc.) en même temps que d’autres relatives à d’autres régions du monde et à d’autres contextes d’immigration. Autrement dit, même si l’appartenance et l’identité produisent un indicateur séparé « Canadien » et « ethnique », l’importance de l’origine ethnique ne fait pas la distinction entre les deux.

Exemples – 13 : Dans les chapitres 3 et 4 de l’ouvrage de Reitz et autres (2009), les indices du sentiment d’appartenance combinent les échelles géographiques du Canada, de la province et de la « ville ou de la municipalité ». Plusieurs autres mesures composites sont aussi utilisées.

L’analyse se poursuit en comparant quatre modèles. Un modèle « marginalisé » dans lequel tous les types d’identification ont une faible importance; un « modèle ethnique » associé à une appartenance ethnique élevée, à l’importance de l’identité « ethnique » et à l’importance de l’origine ethnique; un modèle « du courant dominant », qui est associé à une importance élevée de l’identité canadienne et à une faible importance de l’origine ethnique; et un modèle « pluraliste », qui accorde une importance élevée à l’identité canadienne et à l’origine ethnique (mais, contrairement au modèle « ethnique », qui n’accorde pas une importance élevée à l’identité ethnique). De plus, d’autres mesures sont aussi combinées dans les quatre modèles, notamment : des indicateurs de relations entre les groupes (expérience de discrimination, inquiétude à l’égard des crimes haineux, majorité des amis qui font partie du groupe) et d’intégration sociale (confiance dans les personnes et les voisins, adhésion à des associations, bénévolat, exercice du droit de vote, satisfaction quant à la vie).

En règle générale, le degré élevé de complexité des mesures combinées, en l’absence d’une stratégie clairement articulée de la manière de prendre en compte comment les éléments individuels varient entre les segments de population comparés, rend les résultats de ce chapitre difficiles à interpréter.Note de bas de page 15

Recommandations – 4 : Lorsque plusieurs indicateurs sont utilisés pour constituer une mesure composite d’un concept complexe, il est important d’expliquer clairement tous les éléments, comment ils sont combinés, et comment leur composition varie entre les segments de population analysés. Au Canada, il est particulièrement important de décrire de manière explicite les modèles particuliers obtenus constamment pour les réponses relatives à l’appartenance au Canada et pour l’origine ethnique dans le Québec francophone.

5.3 Considérations sur le sentiment d’appartenance en tant qu’élément de concepts plus larges dans les études canadiennes

Les approches dont il vient d’être question montrent des variations considérables dans la manière dont les concepts généraux sont traduits en applications de recherche, et dans la manière dont ces applications incluent le sentiment d’appartenance. Jusqu’ici, il est possible de dégager quelques leçons et recommandations très claires de la revue, principalement :

  1. Toutes les échelles géographiques (Canada, province, échelle locale – actuellement, « communauté locale »), ainsi que les indicateurs de l’appartenance au pays d’origine et au groupe ethnique présentent un intérêt pour CIC. Mettre au point une source de données qui les contiennent toutes et qui est assortie d’un échantillon de taille adéquate pour analyser les immigrants en fonction de la durée de leur séjour, de même que des segments ethnoculturels tant pour les immigrants que pour ceux qui sont nés au Canada est souhaitable.
  2. Comme il a déjà été mentionné à la section 4, pour une meilleure compréhension du sentiment d’appartenance pour les trois principales échelles géographiques, il serait souhaitable de procéder à une analyse plus approfondie de ce que les répondants entendent par « communauté locale ».
  3. Des variations régionales constantes dans le sentiment d’appartenance doivent être prises en compte de manière explicite, tant pour faire l’analyse des échelles géographiques séparément que pour les combiner.
  4. La discrimination perçue est une variable importante à inclure dans l’étude du sentiment d’appartenance.
  5. Les mesures du statut socioéconomique, comme nous l’avons déjà mentionné à la section précédente (4) sur les conclusions similaires, doivent être améliorées, et il faudrait effectuer une analyse plus en profondeur afin de confirmer ou de qualifier leur manque d’incidence, ou leur faible incidence avec des orientations incohérentes sur le sentiment d’appartenance.

6. Le sentiment d’appartenance en tant que principale optique d’analyse dans les études canadiennes

Dans les études décrites ci-après, le sentiment d’appartenance est vu comme important à analyser en soi, parce qu’il est touché par d’autres facteurs ou processus sociaux. Ces facteurs sont principalement : diversité, rapports sociaux changeants, ou autres caractéristiques sociodémographiques ou facteurs économiques. Dans ce cas, on peut affirmer que le sentiment d’appartenance est une dimension d’un résultat plus large, mais l’optique d’analyse ou l’analyse empirique est que le sentiment d’appartenance est un résultat important en soi.

6.1 Sentiment d’appartenance, diversité et capital social

Wu, Hou et Schimmele (2011), dans un article intitulé « Racial Diversity and Sense of Belonging in Urban Neighbourhoods », axent leur enquête sur le sentiment d’appartenance au Canada dans la littérature sur le capital social, et plus particulièrement, sur le vaste débat sur le recul du capital social associé à la diversité croissante des quartiers, qui a été déclenché par la publication de la célèbre étude de Robert Putnam « E Pluribus Unum » (2007).

Le concept de capital social, même s’il existe dans plusieurs variantes, comprend généralement une composante comportementale faisant référence aux rapports sociaux – par exemple « réseaux d’engagement civique » – et une composante normative/affective, faisant référence à la réciprocité et à la confiance – par exemple « normes de réciprocité ».Note de bas de page 16 En pratique, même si la composante comportementale a fréquemment été mesurée avec des indicateurs de l’intensité et de la fréquence des rapports sociaux, ainsi qu’avec des indicateurs de participation dans la société civile, la composante normative est le plus souvent mesurée avec des indicateurs de confiance. Les indicateurs du sentiment d’appartenance sont utilisés moins fréquemment, sauf en ce qui a trait aux indicateurs de la communauté d’appartenance dans la littérature canadienne sur la santé (abordée dans une section à part.)

À cet égard, les travaux de ces chercheurs présentent une solution de rechange intéressante, pavant la voie à l’utilisation d’un indicateur de normes et de sentiments de réciprocité qui est potentiellement pertinent pour la politique de CIC. Il est vraisemblable qu’un indicateur du sentiment d’appartenance exprime des sentiments plus sensibles à l’expérience et moins déterminés par la formation dans l’enfance que les indicateurs de confiance.Note de bas de page 17 Même s’il faudra effectuer davantage de recherches pour l’établir de façon certaine, d’autres résultats disponibles pointent dans cette direction. Un exemple est fourni dans l’étude de Soroka et Banting (2007) analysée plus haut, qui montre une plus forte convergence avec la durée du séjour au Canada dans les indicateurs d’appartenance que dans ceux de confiance. Ce type d’indicateur, plus susceptible d’expérience, pourrait présenter un plus grand intérêt pour les politiques axées sur les immigrants adultes, ou même sur les adultes en général. De façon encore plus générale, ils pourraient fournir des résultats utiles qui sont distincts des résultats fondés sur la confiance dans des contextes de forte mobilité de la population et de diversité accrue. Actuellement, toutefois, les indicateurs du sentiment d’appartenance comportent le désavantage d’être moins disponibles dans les enquêtes internationales que les indicateurs de confiance, aussi, jusqu’à maintenant, ils n’ont pas permis d’effectuer des comparaisons transnationales.

Leçons apprises – 7 : Certaines constatations tirées de recherches existantes laissent entendre que le sentiment d’appartenance est susceptible de changer en fonction de l’expérience courante, et que la confiance généralisée tire son origine des expériences de l’enfance. Si des comparaisons systématiques pouvaient confirmer ces constatations, cette distinction présenterait une pertinence élevée pour la politique et les programmes.

Les auteurs partent du principe que le sentiment d’appartenance au Canada est un facteur qui facilite [Traduction] « l’établissement de ponts qui favorisent la coopération entre les groupes » (p. 574), étant donné que partager le même « nous », ne peut que faciliter les contacts sociaux, en encourageant la réciprocité et l’attente de réciprocité.

Recommandations – 5 : À l’intérieur du cadre conceptuel du capital social, il serait souhaitable d’effectuer davantage de recherches en vue de comparer les indicateurs de « normes de réciprocité » (Putnam 1993)fondés sur des questions portant sur la confiance avec des indicateurs fondés sur des questions portant sur le sentiment d’appartenance.

Ils déterminent trois principales positions dans le débat sur les effets de la diversité croissante, et discutent de la manière dont celles-ci conduisent à trois attentes différentes en ce qui concerne le sentiment d’appartenance :

  1. La première position – thèse du conflit – fait valoir qu’une diversité croissante entraîne des conflits à l’extérieur du groupe et accroît la solidarité à l’intérieur du groupe, ce qui pourrait se traduire par un sentiment d’appartenance plus élevé à son petit groupe restreint, et un sentiment d’appartenance plus faible aux communautés plus largement définies, comme le Canada.
  2. La deuxième position – thèse du contact– fait valoir, plus particulièrement si certaines conditions sont remplies, qu’une exposition à la diversité entraîne l’émergence d’un sentiment d’appartenance supérieur qui englobe celui aux groupes plus restreints, de ce fait, créant un plus fort sentiment d’appartenance au Canada, mais aucune attente particulière en ce qui concerne l’effet du sentiment d’appartenance sur des groupes (ethniques) plus restreints.
  3. La troisième position – « thèse du repli sur soi », telle qu’elle est suggérée par les constatations de Putnam – fait valoir que la baisse de la solidarité intra-groupe et inter-groupes, découlant du fait que les personnes font moins confiance en général, conduit à un plus faible sentiment d’appartenance en général.

Les constatations des auteurs appuient l’hypothèse du contact, montrant que le fait d’habiter dans un quartier diversifié déclenche un sentiment d’appartenance au Canada plus élevé, et un plus faible sentiment d’appartenance au groupe ethnique. Il convient aussi de mentionner que leur méthode apporte les corrections requises pour la possibilité d’endogénéité – le fait qu’une personne puisse choisir un quartier donné dans une région en se fondant sur ses préférences pour sa composition ethnoraciale – en se servant d’une approche à variable instrumentale pour mesurer la diversité à un niveau régional de dimension appropriée.

De plus, ils constatent que ces effets – sentiment d’appartenance au Canada plus élevé et sentiment d’appartenance au groupe ethnique plus faible dans les quartiers diversifiés – s’expliquent principalement par les résultats de la population blanche. De fait, la population minoritaire a tendance à avoir un sentiment d’appartenance ethnique plus fort que la population blanche en général, mais ni leur sentiment d’appartenance au groupe ethnique, ni celui d’appartenance au Canada ne sont touchés par la diversité du quartier, du moins, telle qu’elle est mesurée par l’indice de diversité raciale de Herfindahl.

Lorsque l’on considère ce résultat, il faut mentionner qu’en pratique, dans le contexte canadien actuel, une faible valeur à l’indice de Herfindahl devrait normalement entraîner des répercussions différentes pour les Blancs et les minorités visibles. De fait, la majorité des secteurs à faible diversité sont à prédominance blanche, et, malgré la croissance, plus particulièrement dans les zones métropolitaines, seulement un nombre relativement petit sont dominés par un seul groupe de minorité visible. Au moment de la collecte des données utilisées dans cette étude (Recensement de 2001 et EDE de 2002), la prédominance des secteurs blancs parmi les secteurs de faible diversité était encore plus marquée.Note de bas de page 18 De ce fait, les constatations de cette étude montrent que, en contrôlant la sélection du quartier par les répondants :

  1. les Blancs vivant dans un quartier diversifié affichent un sentiment d’appartenance au Canada plus élevé, et un sentiment d’appartenance au groupe ethnique plus faible que les Blancs vivant dans un quartier à faible diversité (dont la majorité sont à prédominance blanche), tandis que
  2. les minorités affichent le même degré de sentiment d’appartenance au Canada et de sentiment d’appartenance au groupe ethnique peu importe si elles vivent dans un quartier diversifié ou pas (où les quartiers qui ne sont pas diversifiés sont dans la majorité des cas à prédominance blanche). De plus, le sentiment d’appartenance au groupe ethnique des minorités est généralement plus élevé que celui des Blancs.

Principales conclusions -8- de Wu, Hou et Schimmele 2011 :

  • Les Blancs qui vivent dans un quartier diversifié ont un sentiment d’appartenance au Canada plus élevé, et un sentiment d’appartenance au groupe ethnique plus faible.
  • Les minorités visibles ont un sentiment d’appartenance au groupe ethnique plus fort que les Blancs.
  • Le sentiment d’appartenance des minorités visibles n’est pas influencé par la diversité du quartier.
  • Avec l’augmentation de la durée du séjour au Canada, le sentiment d’appartenance au Canada des immigrants s’accroît, et le sentiment d’appartenance au groupe ethnique diminue.

Leur analyse tient aussi compte des différences régionales et de la durée du séjour au Canada. En ce qui concerne les différences régionales, les auteurs utilisent la variable de l’EDE qui détermine des catégories séparées pour Toronto, Montréal, Vancouver, d’autres grandes RMR, et de plus petites RMR. Les résultats montrent que, en général, en contrôlant plusieurs facteurs sociodémographiques, en plus de l’indice de diversité du quartier, les grandes RMR affichent un plus faible sentiment d’appartenance au Canada et un sentiment d’appartenance au groupe ethnique plus élevé que les petites RMR. De plus, à Montréal, ce modèle est considérablement plus fort que dans les autres RMR. Concernant la durée du séjour au Canada, les auteurs constatent que ceux qui vivent au Canada depuis dix ans ou plus ont tendance à afficher un sentiment d’appartenance au Canada plus fort, alors que le sentiment d’appartenance au groupe ethnique est plus fort pour les immigrants récents et diminue au fil du temps passé au Canada. Cette étude fournit d’importants résultats sur le sentiment d’appartenance au Canada, et elle serait utile pour faire le suivi avec des approches complémentaires pour comprendre l’association entre la diversité des rapports sociaux et le sentiment d’appartenance.

Recommandations – 6 : Wu, Hou et Schimmele ont établi un lien entre la diversité du quartier et un plus fort sentiment d’appartenance au Canada pour les minorités non visibles. Il serait intéressant de poursuivre dans cette voie, en prenant en considération aussi d’autres indicateurs complémentaires de la diversité des rapports sociaux. Par exemple, il serait important d’étudier les effets de la diversité ethnoraciale en milieu de travail (ou dans d’autres lieux où l’on passe beaucoup de temps), ou en termes de choix des rapports personnels plutôt que du quartier de résidence; par ailleurs, la diversité pourrait être prise en compte en termes de statut socioéconomique plutôt que d’origine ethno-raciale, etc. De plus, des mesures de la diversité du quartier (ou d’un autre endroit où elle se situe) qui mettent aussi en évidence la position minoritaire ou majoritaire du répondant au sein du quartier (ou de l’autre endroit) fournirait d’importantes qualifications aux constatations.

Des résultats exploratoires fondés sur la proportion d’amis ayant la même origine ethnique, calculés au moyen de la mise en tableaux des données de l’EDE, sont fournis dans l’encadré ci-après.

Élément probant – 3 – EDE 2002

L’EDE inclut une question qui suit la question sur l’origine ethnique, et qui demande au répondant quelle proportion de ses amis ont la même origine ethnique que lui. Cette mesure de la diversité des rapports sociaux implique un choix actif plutôt qu’une proximité géographique.

Les constatations de cette analyse descriptive exploratoire montrent que, pour ceux qui ne font pas partie des minorités visibles, avoir un réseau d’amis ayant des origines ethniques différentes entraîne la déclaration d’un plus fort sentiment d’appartenance (65 % comparativement à 53 % au niveau 5 sur une échelle de 5 points, étiqueté « très fort », tandis que la proportion au niveau 4 (entre le point neutre et « très fort ») n’est pas significativement différente dans des deux groupes, avec environ 20 %).

Comparativement, les minorités visibles déclarent les mêmes degrés de sentiment d’appartenance au Canada, peu importe si leurs réseaux d’amis sont constitués d’amis ayant des origines ethniques différentes, et leur proportion dans la catégorie « très fort » pour le sentiment d’appartenance au Canada se situe à juste un peu en-dessous de 60 %, tandis que dans la catégorie « Plutôt fort », elle se situe juste un peu au-dessus de 20 %. (Dans l’EDE, la répartition de l’âge dans les segments appartenant aux MV et pas aux MV est suffisamment proche pour ne pas nécessiter de contrôler les résultats selon le groupe d’âge). (Voir Figure 6-1)

Figure 6-1 : Sentiment d’appartenance au Canada selon le statut de MV et pourcentage d’amis ayant la même origine ethnique
Graphique du Sentiment d’appartenance au Canada selon le statut de MV et pourcentage d’amis ayant la même origine ethnique décrit ci-dessous
Version texte: Figure 6-1 : Sentiment d’appartenance au Canada selon le statut de MV et pourcentage d’amis ayant la même origine ethnique
  Pas MV :
Tous/Maj
Pas MV :
Moitié ou moins
MV :
Tous/Maj
MV :
Moitié ou moins
5 très fort 53 % 65 % 57 % 59 %
4 (sur une échelle de 5 points) 21 % 20 % 23 % 24 %

Le résultat pour les minorités visibles – pour lesquelles la diversité des amis contactés n’a aucune incidence sur l’appartenance au Canada – est cohérent avec les constatations sur la diversité du quartier dans l’analyse réalisée par Wu, Hou et Schimmele dont il a été question ci-dessus.

6.2 Sentiment d’appartenance et nationalisme minoritaire

Banting et Soroka (2012), qui ont déjà été cités dans la section sur le sentiment d’appartenance et la cohésion sociale, analysent plus en profondeur le sentiment d’appartenance à la province, au Canada, et à « la ville ou la communauté locale » dans une analyse récente fondée sur les données de l’EDE. Cette analyse se situe directement dans la ligne du débat sur le nationalisme minoritaire. Les auteurs étudient comment les immigrants, leurs enfants et, parmi eux, les minorités visibles développent le sentiment d’appartenance à ces unités géographiques dans le contexte de la divergence préexistante entre le Québec et le « reste du Canada » en ce qui concerne la primauté du Canada et de la province, ce qui indique des points de vue contrastés sur l’identité nationale. Ils comparent le sentiment d’appartenance à chacune des trois échelles géographiques selon le statut des générations, le statut de minorité visible (oui ou non) et la région (Québec et « le reste du Canada »).Note de bas de page 19

Exemples – 14 : Banting et Soroka (2012) s’occupent principalement de comparer le sentiment d’appartenance au Canada, à la province, et à « la ville ou à la municipalité » des immigrants, de la deuxième génération après l’immigration, et de la troisième génération ou plus (troisième génération ou +), et d’effectuer des analyses comparatives selon le statut de minorité visible et la région – comparant des minorités visibles à des groupes n’appartenant pas aux minorités visibles selon la génération au Québec et dans le reste du Canada. Ils visent à obtenir un aperçu de l’incidence de points de vue contrastés sur l’identité nationale sur le sentiment d’appartenance des immigrants et de leurs enfants au Québec et ailleurs.

Il convient de mentionner que cette étude est très récente, mais qu’elle repose sur des données recueillies en 2002 (EDE), un choix vraisemblablement fait pour tirer parti du vaste sous-échantillon de minorités visibles inclus dans cette enquête.

Dans cette analyse récente, Banting et Soroka comparent les résultats de la deuxième génération séparément pour les répondants de la majorité et ceux de la minorité visible dans le contexte du Québec. Au Québec, la troisième génération ou plus du « courant dominant » est moins susceptible d’exprimer un plus fort sentiment d’appartenance au Canada qu’à la province, alors que c’est le modèle opposé que l’on retrouve ailleurs.

Les auteurs constatent qu’au Québec, les répondants de la majorité de la deuxième génération ont tendance à converger vers les proportions de très forte appartenance à la province de la troisième génération ou plus, tout en maintenant une proportion plus élevée de très forte appartenance au Canada. Comparativement, les répondants de la minorité visible de deuxième génération du Québec affichent une faible propension à exprimer une très forte appartenance à la province, tandis que leur propension à déclarer une très forte appartenance au Canada est quelque peu inférieure à celle des répondants de la majorité de la deuxième génération.

Ce contraste entre le Québec et le reste du Canada dans leur expression d’une très forte appartenance à la province et au pays ne tient plus lorsque l’on se penche sur la très forte appartenance à la ville (la question d’enquête porte sur « la ville ou la municipalité »). De fait, dans ce cas, les répondants de la première génération, avec ou sans le statut de minorité visible, et à l’intérieur ou à l’extérieur du Québec, ont tendance à montrer une plus forte propension à donner réponse très forte que tous les autres segments. Les autres segments nés au Canada aussi, n’affichent pas de différences significatives les uns par rapport aux autres.

Principales conclusions -9- de Banting et Soroka 2012 :

  • Au Québec, la troisième génération ou plus qui n’appartient pas à une minorité visible est la moins susceptible de déclarer une très forte appartenance au Canada.
  • Au Québec, la minorité visible de deuxième génération affiche une propension comparativement plus faible à exprimer un très fort sentiment d’appartenance tant au Canada qu’à la province.
  • La première génération affiche une plus forte propension que la deuxième et la troisième génération ou plus d’exprimer une très forte appartenance à la ville ou à la municipalité, à la fois au Québec et dans le reste du Canada.

Dans le reste du Canada, les répondants de deuxième génération montrent une plus faible propension à exprimer une très forte appartenance au Canada que les répondants de la majorité de la troisième génération ou plus, et l’écart est plus prononcé si les répondants de la deuxième génération appartiennent à un groupe de minorités visibles. De plus, les répondants appartenant à une minorité visible de deuxième génération affichent une propension légèrement inférieure à déclarer une très forte appartenance à la province que les répondants appartenant à la majorité de la troisième génération ou plus. Toutefois, tant les différences entre les générations et que celles entre ceux qui ont ou pas le statut de minorité visible sont moindres qu’au Québec.

Du point de vue de CIC, l’étude de Banting et Soroka offre une perspective large et intéressante comportant des aperçus importants sur le contexte canadien. Pour rendre ce type d’étude plus pertinent pour les politiques et les programmes, plus particulièrement dans le domaine de l’intégration, il serait important d’inclure pour le segment de population constitué par les immigrants – la première génération – une analyse de la manière dont les résultats changent en fonction de la durée du séjour au Canada. Les politiques d’intégration de CIC, de fait, s’intéressent aux résultats de la deuxième génération, mais accordent aussi une grande place à l’intégration des immigrants de première génération au fil du temps. La mesure dans laquelle les immigrants sont capables de contribuer pleinement à la société et de ressentir un sentiment d’appartenance au fil du temps importe beaucoup aussi parce qu’il est plausible que cela ait une incidence importante sur l’intégration et le sentiment d’appartenance de leurs enfants – la deuxième génération.

De plus, il convient de mentionner que l’étude est axée sur la réponse « très fort » à la question sur le sentiment d’appartenance, laquelle est posée dans l’EDE en donnant le choix aux répondants sur une échelle de cinq points allant de « très faible » à « très fort ». Les deux échelles géographiques inférieures – soit la province et la « ville ou la municipalité » – toutefois, affichent une distribution des réponses moins irrégulière (voir Figure 6-2), ce qui amène à se demander si des renseignements importants auraient pu être oubliés en se concentrant uniquement sur la réponse « très fort ».

Élément probant 4 – EDE 2002

La distribution des réponses par rapport à l’échelle en 5 points du sentiment d’appartenance au Canada, à la province, et à la « ville ou municipalité ».

La proportion de réponses au pôle extrême de l’échelle (5 – très fort) est beaucoup plus forte pour le sentiment d’appartenance au Canada que pour les échelles géographiques inférieures. La proportion de réponses au niveau 4 (entre neutre et très fort) et 3 (point neutre) est considérable à l’échelle de la province et de la « ville ou municipalité ».

Figure 6-2 : EDE - Distribution des réponses - sentiment d’appartenance à…
Graphique de l’EDE - Distribution des réponses - sentiment d’appartenance à… décrit ci-dessous
Version texte : Figure 6-2 : EDE - Distribution des réponses - sentiment d’appartenance à…
  Canada Province Ville ou municipalité MV :
Moitié ou moins
5 - très fort 60 % 39 % 30 % 59 %
4 20 % 25 % 24 % 24 %
3 12 % 23 % 28 %  
2 4 % 8 % 10 %  
1 - pas fort du tout 4 % 6 % 7 %  

Du point de vue du fond, aussi, il pourrait être intéressant de comprendre pourquoi les répondants déclarent se trouver du côté entièrement positif de l’échelle – incluant l’ensemble du spectre au-dessus du point de neutralité. En effet, ce qui incite des segments de population à franchir le seuil au-delà de la neutralité peut se révéler une question de politique revêtant une importance plus grande que de découvrir ce qui les amène au pôle « très fort » de l’échelle. Cette question, de fait, pourrait être plus pertinente pour certains segments de population qui présentent un intérêt et les politiques particulières qui les visent, notamment, par exemple, les immigrants récents. La question portant sur le sentiment d’appartenance « très fort » pourrait être plus pertinente pour d’autres segments et politiques, par exemple, pour cibler des immigrants établis ou de deuxième génération, et parmi ceux-ci, les minorités visibles. De plus, le fait de considérer que les réponses « au-dessus de neutre » et « très fort » sont distinctes, pourrait amener à découvrir que des facteurs différents influent sur les deux résultats; plutôt que les mêmes facteurs à une intensité plus forte poussant le degré d’appartenance au-dessus de seuils successifs. Ce serait une découverte intéressante pour les décisions stratégiques visant à déterminer efficacement les priorités pour des segments de population cibles.

Recommandations – 7 : Une recherche plus approfondie est nécessaire pour déterminer si les facteurs associés à un très fort sentiment d’appartenance sont les mêmes que les facteurs associés à un sentiment d’appartenance qui est positif (plus fort que simplement neutre), mais pas nécessairement très fort. Il est important de répondre à cette question parce que pour certains segments de population qui présentent un intérêt pour CIC, un sentiment d’appartenance positif est susceptible d’être une cible de la politique plus immédiate que de viser un très fort sentiment d’appartenance.

Finalement, une conséquence méthodologique claire et importante de la recherche susmentionnée est que toute analyse du sentiment d’appartenance au Canada qui comprend des comparaisons entre les générations, même si elles ne sont pas particulièrement axées sur des comparaisons entre le Québec et les autres provinces, doit prendre en considération – c’est-à-dire, prendre des mesures pour contrôler – la spécificité de ce modèle territorial, lequel s’est révélé remarquablement constant au fil du temps. Si on ne tient pas compte de ce modèle particulier, l’analyse court le risque de présenter de manière inexacte la moyenne des résultats hautement distincts comme s’il s’agissait d’un résultat réel qui se produit partout au Canada.

Recommandations – 8 : Dans les futures recherches sur le sentiment d’appartenance, il serait important d’effectuer des comparaisons entre les statuts générationnels (immigrants, enfants d’immigrants, enfants de parents nés au Canada), y compris dans l’analyse de la durée du séjour des immigrants au Canada.

6.3 Appartenance communautaire et santé

Le sentiment d’appartenance à la communauté a été étudié dans la littérature canadienne sur la santé. Les constatations montrent qu’il est positivement lié à la fois à la santé auto-déclarée (Ross 2002, Shields 2008) et aux comportements qui améliorent l’état de santé (Hystad et Carpiano, 2009). Cette littérature n’établit pas de lien entre le sentiment d’appartenance à la communauté et le sentiment d’appartenance au Canada, et elle n’est pas axée sur la diversité, toutefois elle fournit quelques indications qui commencent à débrouiller le rapport qui existe entre des rapports sociaux locaux et l’appartenance, dans ce cas, avec la communauté locale.

Exemples – 15 : Carpiano et Hystad (2011), cette étude motivée par l’utilisation d’indicateurs de l’appartenance communautaire en tant que substitut du capital social dans la littérature sur la santé, elle analyse la mesure dans laquelle le sentiment d’appartenance communautaire et les indicateurs de rapports sociaux sont associés.

En se fondant sur les données de l’ESG 2008, Carpiano et Hystad (2011) constatent que le sentiment d’appartenance à la communauté est fortement influencé par les indicateurs des rapports sociaux avec le quartier, plus particulièrement, le nombre de personnes que l’on connaît suffisamment pour leur demander un service, ainsi que le nombre de personnes que l’on connaît de manière générale. Avoir des amis intimes ou des parents dans la même ville/municipalité constitue aussi une variable positivement liée au sentiment d’appartenance à la communauté, mais, comparativement aux variables qui indiquent le soutien social disponible dans le voisinage (plus précisément, le nombre de voisins que l’on connaît suffisamment bien pour pouvoir leur demander un service), ces rapports ont une influence plus faible.

Les auteurs poussent l’analyse un peu plus loin, étudiant la différence qui existe entre les répondants des milieux ruraux et urbains. Ils montrent que, en général, les répondants ruraux ont tendance à afficher un plus fort sentiment d’appartenance à la communauté. Toutefois, les auteurs constatent que les rapports sociaux qui sous-tendent l’appartenance communautaire des répondants ruraux sont différents de ceux des répondants urbains. En effet, ils remarquent que les répondants ruraux comptent sur un nombre plus restreint de contacts, qui sont plus étroits et, même s’ils expriment un sentiment d’appartenance à la communauté plus fort, ce sentiment ne découle pas de la même quantité de bienfaits pour la santé que pour les résidants urbains.

Ils constatent aussi que le sentiment d’appartenance à la communauté et certains indicateurs de rapports sociaux ont une influence sur la santé auto-déclarée pour les répondants urbains, mais pas pour les répondants ruraux. Cela semble indiquer que les résidants ruraux, contraints par le contexte de la faible densité de population, ont tendance à être relativement pénalisés du fait qu’ils doivent faire appel aux mêmes relations étroites pour plusieurs besoins différents.

Les mêmes chercheurs en viennent à un résultat semblable dans une analyse séparée fondée sur l’Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes (ESCC), axée sur les changements de comportement qui contribuent à améliorer la santé (Hystad et Carpiano 2009). Ils constatent que ce comportement est positivement influencé par le sentiment d’appartenance à la communauté, et que le contexte de la région sanitaire joue un rôle, en général, en montrant que ce rapport est plus faible ou disparaît dans les contextes ruraux. Autrement dit, il existe des indications que le fait de pouvoir compter sur de l’aide dans le voisinage contribue à offrir des bienfaits pour la santé, et ce, plus particulièrement dans les milieux où il existe un plus vaste bassin de relations où puiser, plutôt que dans les milieux où l’on ressent un fort sentiment d’appartenance, mais aussi où l’on se sent contraint par l’éventail limité de relations disponibles.

Principales conclusions -10 – de la littérature sur l’appartenance communautaire et la santé :

  • Le sentiment d’appartenance à la communauté locale influence positivement les indicateurs de la santé.
  • Les rapports sociaux dans un milieu où l’on peut obtenir de l’aide influencent positivement le sentiment d’appartenance à la communauté locale.
  • Dans les régions urbaines, le sentiment d’appartenance à la communauté locale exerce une influence positive plus marquée sur la santé et il est fondé sur un plus large éventail de rapports sociaux aidants.

Une autre étude récente fondée sur l’ESCC, confirme les résultats plus faibles pour la santé, et les résultats plus élevés pour le sentiment d’appartenance dans les régions rurales (Kitchen, Williams, Chohwan, 2011). Cette analyse arrive aussi à la conclusion que le sentiment d’appartenance à la communauté est le plus fort chez les personnes âgées, celles qui habitent dans une maison unifamiliale, et les couples avec des enfants, et le plus faible chez les jeunes, les personnes qui vivent dans les tours d’habitation, et les chefs de famille monoparentale.

Les études fondées sur l’ESCC comprennent aussi dans leur analyse un indicateur du statut d’immigrant et de l’identité autochtone, mais ne signalent aucune différence significative entre ces catégories et le reste de la population. L’étude réalisée par Carpiano et Hystad (2011) fondée sur l’ESG 2008, constate que la propension à exprimer un sentiment d’appartenance à la communauté des minorités visibles est plus élevée que celle personnes n’appartenant pas à une minorité visible, alors que chez ceux qui s’auto-identifient comme des Autochtones, elle est moins élevée que chez ceux qui ne le font pas. Elles n’indiquent aucune différence significative entre les immigrants et les non-immigrants.

De manière générale, il serait intéressant de lier l’étude de l’appartenance communautaire à celle des échelles géographiques supérieures, comme la région ou la province et le Canada. Il serait aussi important d’inclure la durée du séjour et la génération pour les immigrants, et pour tous, les indicateurs de la catégorie ethnoraciale. Dans quelles conditions, et comment, l’appartenance communautaire est-elle liée à un attachement plus vaste est de toute évidence un secteur qui présente un grand intérêt, tout en demeurant relativement peu exploré.

Recommandations – 9 : Il serait intéressant de mener des recherches qui comparent systématiquement les déterminants du sentiment d’appartenance aux échelles géographiques de la communauté locale, de la province et du Canada, et qui incluent des facteurs qui présentent un intérêt pour CIC (statut générationnel, durée du séjour au Canada, indicateurs ethnoculturels, autres indicateurs du statut d’immigrant, etc.)

7. Aperçus complémentaires tirés de la recherche qualitative et de la recherche qui inclut des renseignements géographiques détaillés

L’un des résultats apportés par la recherche sur l’appartenance communautaire et la santé qui a été mentionné dans la section précédente est que l’appartenance communautaire peut faire référence à différents types de rapports sociaux et de résultats sur la santé dans des contextes ruraux et urbains. Dans le même ordre d’idées, la section 4.1 qui précède décrivait les constatations d’une étude qualitative mettant en évidence le fait que les personnes à revenu élevé et à faible revenu voient l’appartenance communautaire comme en référence à des types très différents de rapports sociaux et d’engagement.

De toute évidence, la compréhension de ce que l’on entend par communauté locale pourrait potentiellement varier assez considérablement selon la personne qui répond et l’endroit, y compris dans des manières qui sont importantes pour comprendre les intérêts stratégiques de CIC. Par exemple, pour une personne vivant dans un quartier urbain à concentration ethnique, la communauté locale aurait vraisemblablement des connotations très différentes que pour une personne vivant dans un type différent de quartier. De plus, les répercussions de leur réponse au chapitre du sentiment d’appartenance seraient différentes selon que le répondant est un immigrant récent ou qu’il appartient à une minorité ethnoraciale dans ce quartier particulier. D’autres recherches qui prendraient systématiquement en considération ce type de variations localisées et leur signification globale seraient susceptibles de donner des résultats potentiellement très utiles pour les politiques destinées à garantir un niveau constant de service dans tous les contextes locaux.

Lorsque les facteurs qui influent sur la compréhension de la communauté à laquelle une personne appartient ne sont pas associés à un modèle géographique clairement identifiable, la recherche qualitative peut déboucher sur des aperçus considérables. Même s’il est plus difficile de généraliser et même si ce genre de recherche est plus exigeant en termes de ressources, il peut constituer une contribution inestimable dans les cas où il n’est pas possible d’obtenir des renseignements satisfaisants au moyen de généralisations statistiques. Un exemple à cet égard est constitué par la littérature sur le transnationalisme, qui repose principalement sur la recherche qualitative axée sur l’expérience de segments uniques de population transnationale. Cette recherche montre que la dynamique produisant le sentiment d’appartenance au Canada ou à la communauté de résidence au Canada est fortement contextualisée et dépend d’une expérience transnationale particulière.Note de bas de page 20

Exemples – 16 : Transnationalisme et appartenance. Dans une étude sur la migration transnationale à la frontière entre le Canada et les États-Unis, Hardwick (2010) a montré que l’incidence de la décision de demeurer des citoyens américains sur le sentiment d’appartenance au Canada dépend des contextes spatiaux et temporaux de l’expérience d’établissement au Canada, notamment des motifs personnels pour avoir quitté les États-Unis, le moment de l’arrivée au Canada, et des caractéristiques individuelles telles que le genre, l’âge et le statut socioéconomique.

Une autre étude (Waters, 2009, 2011), axée cette fois sur des femmes immigrantes dont les maris étaient retournés à Hong Kong et à Taïwan pour travailler pendant qu’elles-mêmes résidaient avec leurs enfants au Canada, montre que ces immigrants transnationaux affichent souvent un degré élevé de participation civique locale et un sentiment localisé d’identité au « nouveau » pays, et ce, même s’ils continuent de pratique le transnationalisme chaque jour.

Une stratégie de recherche prometteuse est de déterminer au moyen de l’analyse statistique les segments de population qui nécessitent une enquête qualitative plus détaillée pour répondre à des questions clés en matière de politique.

Leçons apprises – 8 : En règle générale, la recherche qui possède la capacité de qualifier les généralisations statistiques à l’aide de constatations nuancées déterminées au besoin pour les questions liées à la politique représente une option importante. En référence avec l’appartenance à la communauté locale fait d’introduire à la fois des renseignements géographiques détaillés dans l’analyse statistique de segments de population, et de mener des études qualitatives ciblés de segments de population que l’on a identifiés comme mobiles géographiquement, sont des orientations susceptibles de fournir des aperçus intéressants.

8. Connaissances incomplètes et priorités de CIC qui y sont associées : acquisition de la citoyenneté et catégorie d’immigration

Dans l’introduction, la signification du sentiment d’appartenance pour la mission de CIC et son Plan stratégique a été brièvement abordée. La littérature revue dans les sections précédentes a couvert de manière assez complète l’étude du sentiment d’appartenance en tant qu’indicateur de l’intégration, tant pour les immigrants que pour des segments de population d’origine diverse au sein de la société canadienne. La revue a aussi permis de relever plusieurs constatations intéressantes et des leçons utiles pour les recherches futures ayant trait aux besoins de CIC en matière de connaissances.

Deux thèmes de recherche qui avaient été définis initialement comme présentant un intérêt pour CIC et qui n’ont pas du tout été couverts dans la littérature disponible, sont abordés dans la présente section. Ce sont :

  • Le rapport entre la catégorie d’immigration et le sentiment d’appartenance
  • Le rapport entre l’acquisition de la citoyenneté et le sentiment d’appartenance

8.1 Catégorie d’immigration et sentiment d’appartenance – combler les données manquantes

Le principal problème en ce qui concerne la catégorie d’immigration est l’absence de sources de données comprenant à la fois les réponses relatives au sentiment d’appartenance et un indicateur fiable de la catégorie d’immigration. En attente d’une collecte de données intéressantes, la solution est en vue avec l’ESG 2013 sur l’identité sociale, qui disposera d’un suréchantillon d’immigrants (financé par CIC) et qui offrira la possibilité d’obtenir des résultats fondés sur la catégorie détaillée d’immigration en établissant un lien entre l’échantillon d’immigrants et la base de données longitudinale sur les immigrants (BDIM). Ces données permettront d’effectuer des analyses visant à déterminer si la catégorie d’entrée initiale a eu une incidence quelconque sur le développement du sentiment d’appartenance au Canada (ou à toute autre échelle géographique d’intérêt). Même si la politique de l’immigration est en voie de subir plusieurs changements, ces résultats fourniront un point de repère utile en vue de comparaisons futures, étant donné que la majorité des répondants immigrants de l’échantillon de l’ESG qui est actuellement sur le terrain auront obtenu le droit d’établissement avant la mise en place de ces changements.

8.2 Acquisition de la citoyenneté et sentiment d’appartenance – défis sur le plan des données et de la méthodologie

Le deuxième thème – recherche empirique sur le rapport entre l’acquisition de la citoyenneté et le développement du sentiment d’appartenance chez les immigrants – comporte certaines difficultés techniques qui pourraient être surmontées si des données de bonne qualité devenaient disponibles. Ces difficultés sont dues au fait que tant l’acquisition de la citoyenneté, que le sentiment d’appartenance, de même que plusieurs facteurs qui facilitent le sentiment d’appartenance (p. ex. le développement de rapports sociaux), sont tous dépendants du passage du temps. La durée du séjour au Canada est l’une des exigences pour l’acquisition de la citoyenneté et elle augmente la probabilité que l’immigrant « trouve le moyen » de présenter une demande et de prendre les mesures nécessaires pour franchir le processus; elle facilite aussi l’établissement de rapports et d’engagements au Canada qui contribuent à l’appartenance; et, naturellement, au fil du temps les gens prennent de l’âge, et de ce fait, ils deviennent plus enclins à développer un sentiment d’appartenance.Note de bas de page 21

De plus, même s’il est plausible de penser que la citoyenneté est associée à un sentiment d’appartenance au Canada plus fort, il est difficile de déterminer comment s’exerce cette relation de cause à effet entre les deux. Très probablement, il existe une relation de cause à effet entre l’acquisition de la citoyenneté et le sentiment d’appartenance : devenir un citoyen peut consolider et renforcer l’attachement d’une personne au Canada, mais aussi, réaliser que l’on a développé un sentiment d’appartenance peut aussi inciter une personne à acquérir la citoyenneté. Des données longitudinales contenant des renseignements sur le sentiment d’appartenance avant, pendant et après l’acquisition de la citoyenneté seraient nécessaires pour permettre d’effectuer la comparaison du sentiment d’appartenance avant et après l’acquisition de la citoyenneté.

Sans apporter aucune distinction au lien de causalité, une simple mise en tableaux des immigrants, montrant les proportions du sentiment d’appartenance au Canada selon la durée du séjour au Canada (plus ou moins que dix ans) est fournie dans l’encadré ci-après, en se fondant sur l’EDE (2002). Les graphiques fournissent quelques résultats préliminaires qui laissent entendre au moins que sans prendre en considération d’autres facteurs potentiellement importants, il existe une association positive entre le sentiment d’appartenance au Canada et la citoyenneté pour les immigrants établis, et une faible association positive pour ceux qui sont au Canada depuis moins de dix ans.Note de bas de page 22

Élément probant de l’EDE 2002 – citoyenneté selon la durée du séjour des immigrants

La Figure 8-1 présente les pourcentages du sentiment d’appartenance au Canada sur une échelle de 5 points, de 1 (pas du tout fort) à 5 (très fort) pour ceux qui ont immigré avant 1991 seulement, en comparant les citoyens et les non-citoyens. Elle montre que les immigrants établis qui ont acquis la citoyenneté expriment un très fort sentiment d’appartenance au Canada en proportion plus élevée que les immigrants établis qui ne sont pas citoyens (71 % et 56 % respectivement). De plus, en combinant le niveau 4 et le 5 (très fort et le niveau juste en-dessous), la différence entre les deux groupes est plus petite, mais elle demeure considérable et significative sur le plan statistique (89 % pour les citoyens et 79 % pour les non-citoyens).

Figure 8-1 : Citoyenneté et appartenance - immigrants établis (<1991)
Graphic de la Citoyenneté et appartenance - immigrants établis (<1991) décrit ci-dessous
Version texte : Figure 8-1 : Citoyenneté et appartenance - immigrants établis (<1991)
  Citoyens Non-citoyens
5 - Très fort 71 % 56 %
4 18 % 24 %
3 8 % 13 %
2 2 % 3 %
1 - pas du tout fort 1 % 3 %

La Figure 8-2 présente la même comparaison, mais pour ceux qui ont immigré après 1991. Il se trouve que, dans leur cas, le pourcentage déclarant une très forte appartenance au Canada est presque identique entre les citoyens et les non-citoyens (à environ 53 %), tandis que le pourcentage se situant au niveau 4 de l’échelle – entre très fort et neutre – est légèrement supérieur pour les citoyens, ce qui donne pour les réponses 5 et 4 combinées dans l’ensemble un résultat plus élevé pour les citoyens (83 % comparativement à 76 % pour les non-citoyens).

Figure 8-2 : Citoyenneté et appartenance - immigrants récents (≥1991)
Graphique de la Citoyenneté et appartenance - immigrants récents (≥1991) décrit ci-dessous
Version texte : Figure 8-2 : Citoyenneté et appartenance - immigrants récents (≥1991)
  Citoyens Non-citoyens
5 - Très fort 54 % 52 %
4 29 % 24 %
3 12 % 15 %
2 3 % 3 %
1 - pas du tout fort 2 % 5 %

Même s’il y a un manque de recherches au sujet du rapport qui existe entre l’acquisition de la citoyenneté et le sentiment d’appartenance, il existe de la littérature de recherche sur les déterminants de l’acquisition de la citoyenneté. Comme l’ont mentionné Hou et Picot (2011), la recherche disponible sur la citoyenneté a cerné trois types de déterminants. Premièrement, les caractéristiques personnelles de l’immigrant associées avec l’acquisition de la citoyenneté, notamment : un plus grand nombre d’années passées au Canada, l’arrivée à un plus jeune âge, le fait d’être de sexe masculin, la connaissance de l’une des langues officielles, et un niveau d’éducation plus élevé plutôt que moins élevé. Deuxièmement, les caractéristiques du pays d’origine associées avec un nombre plus élevé d’acquisition de la citoyenneté au Canada, notamment : reconnaissance de plusieurs citoyennetés, distance géographique, un faible PIB par habitant, et le fait de jouir de libertés civiles limitées. Troisièmement, et en association avec les deux premiers types de facteurs, la catégorie d’immigration aurait un lien avec l’acquisition de la citoyenneté, notamment, par ordre décroissant : réfugié, travailleurs qualifiés, et immigrants de la catégorie de la famille. (Tran, Kustec et Chui, 2005)

Ces nombreux facteurs sont très différents par nature, ce qui vient compliquer encore davantage la compréhension de l’incidence de l’acquisition de la citoyenneté sur l’appartenance pour des personnes qui peuvent bénéficier de motivations ou de moyens différents tout d’abord.

Leçons apprises – 9 : Les sources de données permettant de faire l’étude du sentiment d’appartenance des immigrants selon la catégorie d’immigration et l’acquisition de la citoyenneté n’ont pas été disponibles jusqu’ici, et sont actuellement en cours de développement.

Tous ces facteurs doivent être pris en compte simultanément afin de jeter de la lumière sur l’influence nette du sentiment d’appartenance sur l’acquisition de la citoyenneté. En contrepartie, tous les facteurs dont on sait qu’ils influencent le sentiment d’appartenance devraient être pris en compte dans une analyse de l’influence dans le sens opposé – de l’incidence nette de l’acquisition de la citoyenneté sur le sentiment d’appartenance. Dans les deux cas, des facteurs liés au temps ayant un lien marqué avec tant la citoyenneté que le sentiment d’appartenance devraient être inclus dans l’analyse, pour éprouver la capacité des données d’établir de fines distinctions.

Leçons apprises – 10 : L’étude du sentiment d’appartenance et de l’acquisition de la citoyenneté nécessite de tenir compte de plusieurs facteurs interdépendants, et de ce fait, des données d’une qualité particulièrement bonne.

Malgré cette complexité, des initiatives de recherche sur ce rapport revêtiraient une grande pertinence pour la politique de citoyenneté. Il existe des techniques statistiques pour modéliser ou corriger au besoin la réciprocité causale (endogénéité), ce qui nécessiterait des données de bonne qualité qui contiendraient des renseignements sur l’acquisition de la citoyenneté de même que sur le sentiment d’appartenance et sur tous les autres facteurs pertinents. Il est probable que l’ESG 2013 sur l’identité sociale, avec un suréchantillon amélioré, offrira des possibilités d’examiner plus avant ce thème de recherche.

Recommandations – 10 : En attendant l’élaboration des données nécessaires, la recherche sur le sentiment d’appartenance et sur l’acquisition de la citoyenneté, ainsi que sur le sentiment d’appartenance et les catégories d’immigration serait intéressante pour CIC.

9. Conclusion

Cette revue a permis de relever plusieurs constatations pertinentes pour les secteurs de politique de CIC, ainsi que des orientations futures pour la recherche. La présente section sur la conclusion s’efforcera de faire la synthèse des orientations futures possibles pour la recherche qui ont émergé des diverses sections de la revue. Les orientations recommandées peuvent être subdivisées en quelques rubriques séparées : recherche à l’appui d’une méthode et de résultats améliorés, conseils de méthodologie, développement de données, et thèmes de recherche.

9.1 Recherches et conseils pour améliorer la méthode

La revue a permis de formuler plusieurs recommandations utiles pour la recherche qui permettraient d’améliorer la méthode et les résultats sur le sentiment d’appartenance :

  • De la recherche en vue de comparer les différents indicateurs de l’appartenance utilisés dans les approches internationales faciliterait la compréhension de la manière dont différents résultats dépendent de différentes questions d’enquête utilisées. Ceci faciliterait aussi les comparaisons à l’échelle internationale; de plus, et à titre connexe,
  • De la recherche en vue de comparer les résultats d’enquêtes sur le sentiment d’appartenance aux résultats fondés sur la confiance serait utile pour confirmer si le sentiment d’appartenance varie en fonction d’expériences relativement récentes, alors que la confiance généralisée tire son origine principale des leçons apprises dans l’enfance. À l’intérieur du cadre de recherche sur le capital social, ceci devrait potentiellement conduire à des constatations pertinentes sur différents indicateurs de « normes de réciprocité », et sur la manière dont ils pourraient être facilités dans des segments de population d’âge différent en vue de faciliter les rapports sociaux positifs.
  • Il serait important d’utiliser des données fiscales couplées pour éclaircir le rapport entre le revenu (ou d’autres résultats économiques) et le sentiment d’appartenance. Les résultats fondés sur les catégories de revenu autodéclarées n’ont jusqu’à maintenant pas été concluants.
  • Il serait utile d’effectuer des études qualitatives sur la manière dont l’appartenance à la communauté locale peut être vue différemment chez divers types de répondants, étant donné les indications que cette compréhension pourrait varier selon les caractéristiques du quartier/voisinage, ainsi que selon les capacités et le statut économique du répondant.

Quelques suggestions sur la méthode susceptibles de jouer un rôle important dans la recherche sur le sentiment d’appartenance :

  • Afin d’obtenir une interprétation correcte des constatations globales, les analyses comprenant un indicateur du sentiment d’appartenance au Canada doivent tenir compte de plus faibles proportions de répondant déclarant une forte appartenance au Canada au Québec, ce qui est une caractéristique constante dans le paysage canadien; de plus, à titre connexe,
  • Lorsque l’on utilise plusieurs indicateurs pour construire une mesure composite d’un grand concept, il est important de décrire clairement toutes les composantes, comment elles sont combinées, et comment leur composition varie dans tous les segments de population analysés. Ceci contribue à améliorer considérablement l’interprétabilité des résultats susceptibles d’être obtenus.
  • La recherche qualitative peut fournir les détails requis dans les cas où les généralisations statistiques sont insuffisantes; par exemple, sur des populations qui sont très mobiles géographiquement, comme les populations transnationales; ou pour étudier différentes compréhensions de l’appartenance en se fondant sur le statut (tant socioéconomique qu’ethnoracial).

9.2 Développement de données

Comme il a été mentionné dans la revue, la recherche sur le sentiment d’appartenance s’est souvent heurtée à des limites en raison de la taille de l’échantillon ou du manque de variables qui véhiculent les renseignements souhaitables. L’élaboration de données est fondamentale pour améliorer les connaissances sur le sentiment d’appartenance dans les orientations qui intéressent CIC.

Recommandations – 11 : Une source de données mises à jour régulièrement qui comprendrait notamment : plusieurs questions sur le sentiment d’appartenance, un large échantillon qui permettrait l’analyse de sous-populations, l’éventail complet des variables d’intérêt associées au sentiment d’appartenance, et des identificateurs des segments de population qui intéressent CIC, est une priorité pour que les recherches futures puissent combler les connaissances qui manquent.

Un premier pas dans cette direction sera fait par l’Enquête sociale générale 2013, sur l’identité sociale, avec un échantillon amélioré d’immigrants, en cours de réalisation au moment de la rédaction du présent rapport. Cette enquête comprendra notamment des questions sur le sentiment d’appartenance : à la communauté locale, à la ville, à la province, au Canada, au pays d’origine, aux personnes appartenant à la même origine ethnique ou culturelle, et aux personnes qui parlent la même langue. L’échantillon d’immigrants amélioré et les questions étendues sur l’appartenance promettent de rendre possible une recherche qui obtient des détails considérables avec des données à jour. De plus, cette enquête comprend des renseignements sur le moment de l’immigration, le moment de l’acquisition du statut d’immigrant reçu, et sur le pays (ou les pays) de citoyenneté, ouvrant la possibilité d’examiner plus avant le thème de l’acquisition de la citoyenneté et celui de l’appartenance. L’enquête comprendra aussi des indicateurs ethnoraciaux et plusieurs questions sur la discrimination en même temps que plusieurs indicateurs de rapports sociaux, d’engagement civique, et de valeurs, ce qui ouvrira de nouvelles possibilités d’analyser la discrimination au moyen de l’engagement social et des valeurs. Enfin, il sera possible de coupler cette enquête avec des données administratives qui offrent des renseignements précis sur la catégorie d’immigration, ce qui donnera la possibilité d’explorer cet angle aussi. Les données en provenance de cette devraient être disponibles à la fin de 2014.

9.3 Thèmes de recherche

Les thèmes de recherche qui présentent un intérêt pour CIC dans le cadre de développement futurs:

  • Comparer les résultats sur le sentiment d’appartenance à : diverses échelles géographiques, à l’origine ethno-culturelle, et au pays d’origine, en tenant compte de la durée du séjour, du statut générationnel, et des indicateurs d’origine ethnoraciale.
  • Étudier le sentiment d’appartenance au Canada en rapport avec l’acquisition de la citoyenneté.
  • Étudier le sentiment d’appartenance en rapport avec les grandes catégories d’immigration.
  • Étudier de manière plus approfondie la discrimination perçue et le sentiment d’appartenance.
  • Étudier le sentiment d’appartenance en rapport avec une gamme d’indicateurs de la diversité des contacts sociaux, par exemple, selon différents types de contacts sociaux (personnels, professionnels, communautaires, etc.) et différents types de diversité (ethnoraciale, ou fondée sur le statut socioéconomique, etc.)
  • Étudier le sentiment d’appartenance en tenant compte de facteurs liés à la géographie locale et à la situation du répondant, par exemple, diversité ethnoraciale dans le secteur résidentiel et si le répondant appartient à une population minoritaire ou majoritaire.
  • Comparer les facteurs associés aux réponses qui tombent dans la catégorie « très fort » du sentiment d’appartenance à ceux associés aux réponses qui tombent du côté positif d’une échelle de l’appartenance, sans nécessairement se situer dans la catégorie très fort.

Certaines des orientations de recherche indiquées ici sont reprises dans le rapport complémentaire intitulé « Le sentiment d’appartenance : étude empirique » (à venir), fondé sur l’ESG 2008. Les sources de données utilisées dans l’étude complémentaires sont associées à certaines limites, plus particulièrement la taille des sous-échantillons d’immigrants et de minorités visibles. En tenant compte de ces limites, l’étude comparera les résultats sur le sentiment d’appartenance au Canada, à la province et à la communauté locale; analysera le sentiment d’appartenance en rapport avec certains indicateurs distincts de la diversité des contacts sociaux; et comparera les facteurs associés aux réponses qui tombent dans la catégorie « très fort » à ceux qui sont associés aux réponses qui tombent du côté positif de l’échelle, sans nécessairement se situer à cet extrême positif.


Références

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