Vidéo – L'utilisation de peintures commerciales dans les musées

Transcription de la vidéo sur l'utilisation de peintures commerciales dans les musées

Durée de la vidéo : 00:12:25

[Texte à l'écran : Vidéos de l'ICC]

[Texte à l'écran : L'utilisation de peintures commerciales dans les musées]

Jean Tétreault, Scientifique principal en conservation : « La conservation préventive couvre une multitude d'initiatives pour prévenir les dommages causés par les agents de détérioration à notre patrimoine culturel. Parmi ceux-là, il y a les enjeux associés à l'utilisation de produits de construction et de leurs effets néfastes potentiels sur les collections.

Il y a un doute à propos de l'utilisation de la peinture dans les musées. Ce problème a souvent été porté à mon attention par les professionnelles de la conservation.

Les peintures émettent des odeurs et, dans le passé, les émanations de peintures ont été responsables, à plusieurs reprises, de dommages irréversibles causés aux objets de musées.

Ainsi deux questions reviennent souvent à mon attention: quelle peinture prendre pour éviter tout risque de dommage avec une collection? Et, combien de temps dois-je laisser sécher la peinture avant d'exposer les objets aux surfaces peintes?

Les risques de dommage causés par les peintures sont bien fondés mais heureusement cela arrive de moins en moins. Maintenant, nous allons voir quelles sont les conditions à risques et voir comment les éviter.

Que ce soit un revêtement pigmenté, un vernis ou une teinture, on les utilise pour peinturer les murs et les planchers. On les applique aussi sur différentes structures telles que des armoires d'entreposage, des caisses de transport et des vitrines d'exposition.

Le niveau de risques va dépendre de quelques paramètres que voici : le risque va dépendre du type de structure ou de l'enceinte à peinturer. Du type de peinture utilisé du temps de séchage alloué avant de mettre l'objet dans ce milieu et du type d'objets en présence.

Regardons de plus près chacun de ces paramètres en commençant par le type de structure. Cela est pour nous donner une idée sur la quantité de surface à peinturer par rapport au volume et avoir une idée sur le taux d'aération de ce lieu ou de cette structure.

Par exemple : est ce que l'on veut peinturer les murs d'une grande salle ou peinturer l'intérieur d'une petite vitrine d'exposition?

Les émanations d'une peinture appliquée sur les murs ou sur le plancher d'une gallérie vont habituellement bien se disperser. Ils seront évacuer par le système ventilation, par les fenêtres ouvertes ou simplement disperser dans les autres salles. Ainsi les risques de dommages sont faibles pour les objets qui seront dans ce lieu.

À l'opposé, dans une enceinte bien hermétique telle qu'une vitrine d'exposition, les émanations de peinture vont s'accumuler et peuvent atteindre de grande concentrations et possiblement sur une longue durée. Ces conditions peuvent mettre à risque les objets dans cette enceinte.

Il devient donc important de bien évaluer les autres paramètres qui sont : le type de peinture. Le temps de séchage alloué. Et le type d'objets en présence.

Examinons de plus près les types de peintures. On connait tous un peu différents types de peinture. Il y a la peinture à l'huile, la peinture à l'eau et il y en a peut-être plus que vous le penser!

On peut classer les peintures selon leur mode de formation du revêtement ou du film. Voici les catégories les plus communes : il y a les films qui se forment par coalescence par polymérisation oxydative et par polymérisation catalysée cette classification peut sembler plutôt technique mais c'est la clé pour distinguer ceux qui peuvent être utilisés à des fins muséales et ceux qui sont à proscrire.

Regardons la première catégorie; celle dont le film se forme par coalescence. C'est la peinture à émulsion bien connu en Amérique du Nord sous le nom de peinture au Latex. Le film se forme lors de l'évaporation de l'eau. Les particules de résines en suspension, peu à peu, se regroupent et coalescent.

La résine typique utilisée pour les peintures à émulsion est l'acrylique. Elle est, parfois, mélangée avec d'autres résines telles que l'uréthane, le styrène ou même l'époxy.

Lorsqu'appliquée sur le bois, elle offre une barrière acceptable contre les émanations de ce dernier. La peinture à émulsion est donc souvent recommandée dans les musées.

Ensuite, il y a les films qui se forment ou plus précisément qui se polymérisent par oxydation.

Cette catégorie réunit les peintures à l'huile, à l'uréthane modifié à l'huile, à l'alkyde, ainsi qu'à l'ester époxydique. Ce dernier on le trouve sous l'appellation de peinture époxy et elle est disponible dans un seul contenant. Vous verrez bientôt que d'autres types de peinture sont disponibles sous forme de 2 ou 3 contenants à mélanger.

Il faut éviter les peintures formant un film par polymérisation oxydative à l'intérieur de vitrine ou toutes petites structures mal ventilées. Ces revêtements en se formant libèrent des produits acides et oxydants qui peuvent réagir avec plusieurs types d'objets. Ces revêtements deviennent de moins en moins accessibles dans nos magasins de rénovation car ils ne répondent pas aux nouvelles normes de la qualité de l'air. Ils émettent généralement trop de produits organiques volatils nocives pour environnement.

Un substitut pour ce type de peinture sera la peinture à émulsion. Cette peinture libère moins de produits organiques volatils que les peintures à base d'huile mais quand même un peu.

Nous avons déjà glissé un mot sur les revêtements qui se forment en mélangeant de 2 ou 3 contenants selon un ratio bien précis. C'est la catégorie des résines d'époxy ou d'uréthane qui se polymérisent avec l'aide d'un catalyseur ou d'un agent chimique actif.

Ces revêtements hautement performants sont surtout utilisés pour les planchers. On choisit les époxydiques pour leur grande résistance aux déversements de produits chimiques alors que les uréthanes offrent une bonne résistance aux égratignures et aux abrasions.

Ces revêtements d'époxy et d'uréthane formés par polymérisation catalysée sont aussi recommandés à des fins muséales. Nous venons de faire le tour des principaux types de revêtements. Nous avons vu que plusieurs sont acceptables sauf ceux formés par oxydation.

Il n'est pas toujours facile de connaitre le type de résine utilisé en regardant l'étiquette d'un contenant de peinture et c'est encore plus difficile de déterminer comment le revêtement se forme. Consulter la fiche de renseignement technique et la fiche de données de sécurité disponible sur internet. Cherchez des mots clés comme ‘alkyde, huile, uréthane modifié à l'huile, ainsi que esters époxydiques'. Ces résines sont habituellement formées par polymérisation oxydative et ils sont à éviter.

Ainsi nous savons quelles types de peinture choisir et ceux à éviter. Le prochain point à considérer est le temps de séchage. Même en utilisant les revêtements recommandés, il faut aussi porter une attention particulaire aux temps de séchage.

Les revêtements liquides contiennent des solvants et lors de leur application ces solvants sont libérés. Il peut aussi avoir des émanations des produits volatils résultants de réactions chimiques associées à la formation du film. Après l'application, les taux d'émanations de tous ces produits volatils décroissent avec le temps comme le montre ce graphique.

Un bas niveau d'émanations est généralement attend après 4 semaines. Il est donc prudent d'attendre 4 semaines avant d'introduire des objets dans une enceinte peinte. Mais il n'y a peu d'avantage à attendre au-delà de 4 semaines. Ainsi, il est peu probable que des objets soient à risque avec la sélection des revêtements recommandés et avec un temps de séchage de 4 semaines, même dans une enceinte fermée.

Cependant, le temps de séchage accordé aux vitrines d'exposition est souvent une contrainte importante pour les musées. On a beau planifier ce délai dans l'élaboration d'une nouvelle exposition mais s'il y a un retard lors de la mise en œuvre, ce temps de séchage est souvent compromis.

Si on a moins de 4 semaines, il n'aura pas nécessairement un dommage mais les risques augmentent. Souvent les gens ont seulement deux semaines. Deux semaines c'est toujours mieux que quelques jours.

Pour les grandes salles ou petites salles bien ventilées, un délai de quelques jours est largement suffisant. Dans ces lieux, les produits volatiles tendent à se dissiper facilement.

Un dernier point à considérer est la nature des objets et de leur vulnérabilité face aux produits volatils libérés par les revêtements.

Le matériau le plus vulnérable aux émanations acides des revêtements c'est le plomb. »

[Image à l'écran : Objet de plomb recouvert de corrosion blanche reposant sur un support de Plexiglas fait maison.]

Jean Tétreault : « Cela causera sa corrosion. Les alliages de plomb ou du plomb avec une patine stable sont déjà plus résistants aux acides. Cependant, à l'inverse, des objets en plomb contaminés par certains composés en particuliers des sels peuvent voir leurs sensibilités aux acides augmentées. Vue sa vulnérabilité, il est toujours possible que le plomb soit affecté par des émanations acides, dans un milieu clos, en présence de bois ou d'un revêtement recommandé même 4 semaines après son l'application.

Avec un risque de moindre amplitude, on retrouve certains verres anciens, le cuivre et ses alliages comme le bronze et le laiton. »

[Image à l'écran : Corrosion de couleur bleu-vert vif sur un robinet à base de cuivre]

[Image à l'écran : Dessin sur papier]

Jean Tétreault : « Les vapeurs acides et oxydantes de certains revêtements peuvent aussi affecter les œuvres sur papier. Ici, il n'y aura pas de signes visibles de détérioration mais les émanations risquent de réduire le temps de vie utile du papier. Autrement dit le papier risque de jaunir ou devenir friable plutôt que prévue. D'autres types d'objets pourraient aussi être affectés par les émanations de peintures mais les évidences manquent. Toutefois, la prudence demeure de mise.

Avec une bonne dose de justifications, nous avons répondu aux deux questions fréquemment posées par les professionnels des musées. Et en résumé voici, en quelques points, les réponses: éviter les peintures à l'huile ou à l'alkyde bref tous ceux qui se forme par polymérisation oxydative. En générale, favoriser les peintures à émulsion; les Latex. Il y a peu de contrainte pour les salles ventilées mais faite attention aux enceintes fermées comme les vitrines d'exposition ainsi qu'au temps de séchage. Un délai de 4 semaines est optimal pour minimiser les émanations.

Et attention, le plomb sera toujours à risque en présence de bois et de revêtement même après 4 semaines.

Comme sur cette photo; il s'est formé de la corrosion sur des petites pièces de plomb entreposées dans un meuble de bois vernis. »

[Image à l'écran : Petites pièces de plomb qui se corrodent activement; elles sont recouvertes de corrosion blanche et sont entourées de particules blanches.]

Jean Tétreault : « En suivant les recommandations que nous avons détaillées ici, il sera peu probable que de mauvaises surprises vous arrivent.

Alors, maintenant, à vos pinceaux! »

[Signature de l'Institut canadien de conservation]

[Mot-symbole Canada]

Cette vidéo fournit des réponses aux questions fréquemment posées : quelle peinture devrait-on utiliser pour éviter d’endommager une collection de musée, et combien de temps devrait-on laisser sécher une surface peinte avant que des objets puissent y être exposés? Cette vidéo a été créée par l'Institut canadien de conservation.

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