Le mercure présent dans les collections de musée – Notes de l'Institut canadien de conservation (ICC) 1/7

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La Note de l'ICC 1/7 fait partie de la première série des Notes de l'ICC (Entretien des collections - principes généraux)

Introduction

Le mercure est un métal lourd, bon conducteur d'électricité, qui possède une réflectance élevée et se présente sous forme liquide à la température ambiante. C'est une substance très utile ayant une vaste gamme d'applications; on le trouve dans les baromètres, les pompes, les thermomètres et l'équipement médical. Il sert de conducteur dans les appareils de laboratoire de physique et dans les dispositifs de commutation et on l'emploie même comme revêtement réfléchissant de miroirs. On a utilisé le mercure pour fabriquer de nombreux composés médicinaux et fongicides et il se retrouve dans des endroits inattendus : les lumières clignotantes, sur les espadrilles à la mode, fonctionnent à l'aide de commutateurs au mercure et plusieurs types d'ampoules en contiennent.

Les musées contiennent souvent bon nombre de sources de mercure : les peintures d'intérieur appliquées sur les mursNote en fin de texte 1, les collections d'équipement pharmaceutique, médical et dentaire (par exemple, le mercurochrome, le calomel, le thimérosal et les amalgames dentaires)Note en fin de texte 2, les collections minéralogiques contenant des sels mercuriques, le matériel d'artiste qui contient des pigments tels que le cinabre et le vermillon, ainsi que les collections taxidermiques et ethnologiques dont les objets ont été traités avec des sels mercuriques utilisés comme insecticides. Barclay et ZiomkiewiczNote en fin de texte 3 ont traité en détail de l'étendue de la présence du mercure dans les collections de musée.

On connaît bien les dangers relatifs au mercure et il existe de nombreuses publications y ayant trait. Afin de prévenir les effets nuisibles, il est essentiel de savoir quels objets de collection contiennent du mercure, et comment il faut les manipuler et en prendre soin.

L'exposition au mercure

Le mercure est une neurotoxine (un poison pour le système nerveux) qui peut être absorbée par l'organisme par contact direct, par ingestion ou par inhalation de vapeur de mercure. Une fois qu'il se trouve dans l'organisme, le mercure inorganique y demeure pour des semaines ou même des mois, et il peut s'accumuler dans les reins et le cerveau, où il peut entraîner différents symptômes physiques et troubles mentaux. Le mercure qui pénètre dans le cerveau est transformé en une forme organique qui subsiste encore plus longtemps. Le mercure inorganique présent dans le sang d'une femme enceinte peut aussi pénétrer dans le fœtus qui est en pleine croissance.

La quantité de mercure métallique absorbée par l'organisme, après ingestion ou contact cutané, est assez faible, mais elle n'est pas négligeable puisqu'elle s'ajoute aux quantités provenant d'autres sources du milieu, dont l'absorption se fait de façon régulière. Par contre, la quantité après inhalation est très importante (environ 80 %), ce qui fait de la vapeur de mercure une substance très nuisible. Puisque la pression partielle du mercure à l'air ambiant et à 25 °C est très faible, soit 0,0018 mmHg, la quantité qui s'évapore est très petite. Toutefois, la vapeur de mercure, dans un endroit non ventilé, peut tout de même facilement dépasser la concentration maximale recommandée (0,025 mg/m3). Par conséquent, tout objet possédant des surfaces exposées contenant du mercure ou tout objet endommagé ayant déversé du mercure constitue un dangerNote en fin de texte 4.

Le mercure liquide que contiennent les vieux objets peut souvent être contaminé et oxydé, ce qui le rend encore plus dangereux. Ces composés du mercure peuvent facilement pénétrer l'organisme. Si des quantités, même infimes, de ces substances sont absorbées au fil du temps, elles peuvent causer des problèmes chroniques.

Détection et détermination

Il est facile de détecter la présence de mercure liquide, car c'est une substance réfléchissante visible à l'œil nu. La détection des composés du mercure est beaucoup plus difficile puisqu'il faut utiliser des techniques de vérification chimique ou électronique. On peut, par exemple, employer la fluorescence X pour déceler la présence de mercure à l'état de contaminant sur des objets métalliques. Il existe aussi des appareils électroniques de détection de la vapeur de mercure dans les aires de travailNote en fin de texte 5.

Si l'on soupçonne la présence de fortes concentrations de vapeur de mercure, il faut absolument prendre contact avec un hygiéniste industriel qualifié qui effectuera un échantillonnage de l'air (la section Ressources).

Renseignements en matière de sécurité

Les fiches techniques sur la sécurité des substances (FTSS) constituent une des meilleures sources d'information sur les méthodes sûres de manutention du mercure métallique et des substances contenant du mercure. Malheureusement, ces documents ne sont fournis qu'avec les produits chimiques récemment achetés, ce qui n'est pas le cas de nombreux objets de musée qui peuvent contenir du mercure. Les propriétaires de stocks d'anciens produits chimiques (par exemple des collections pharmaceutiques) doivent prendre contact avec les fabricants afin d'obtenir les FTSS qui sont disponibles. Sinon, il faudra probablement éliminer ces anciens produits chimiques (avant de le faire, il faut toutefois analyser de telles substances et en déterminer la nature, aux fins de documentation muséologique).

Les lois et règlements stipulent que tout laboratoire où des produits chimiques sont couramment manipulés doit posséder les FTSS des substances en question et les mettre à la disposition des employésNote en fin de texte 6. Les musées et les propriétaires privés peuvent trouver les renseignements pertinents sur Internet (consultez la section Resources).

Tout employé ayant à manipuler des objets ou des collections d'objets de musée qui contiennent du mercure devrait se renseigner pleinement sur la toxicité du mercure. Par exemple, le document Toxicological Profile for MercuryNote en fin de texte 7 contient des renseignements très utiles en la matière.

Les employés qui travaillent couramment avec des objets contenant du mercure, ou dans des zones où sont entreposés de nombreux objets contenant du mercure, devraient en discuter avec un professionnel de la santé, car il pourrait être nécessaire d'effectuer des mesures régulières de la concentration de mercure dans le sang, lors des évaluations de la santé au travail.

Directives relatives à la manipulation

Tous les objets de musée contenant du mercure, ainsi que les endroits où ils sont entreposés, doivent être clairement désignés à l'aide d'étiquettes appropriées, afin que l'ouverture des armoires de rangement et la manipulation des objets en question soient faites avec prudence. Il faut prendre des précautions particulières car le mercure liquide est lourd et se trouve habituellement dans des contenants de verre. Dans le cas des objets scellés ne contenant que de petites quantités de mercure (par exemple, les thermomètres), il est possible de les déplacer en les portant dans les mains, mais les gros objets doivent être déplacés sur un chariot possédant une surface rembourrée, en évitant les secousses et les chocs.

La pression de vapeur du mercure augmente considérablement avec la chaleur (c.-à-d. qu'à des températures plus élevées, davantage de vapeur de mercure s'évapore). Il est donc recommandé d'entreposer les objets contenant du mercure ou des composés mercuriels dans un endroit frais.

Les employés de musée qui ne possèdent pas les compétences requises ne doivent jamais tenter de retirer le mercure présent dans un objet de musée, de le remplacer ou d'ajouter du mercure neuf dans l'objet en question. Il est aussi fortement déconseillé de tenter d'épurer le mercure contaminé, car la saleté peut se composer de produits d'oxydation du mercure (la saleté de cette nature est très toxique). Dans le doute, obtenir l'avis d'un spécialiste.

Déversement et contamination

Le personnel de musée ne doit jamais tenter d'effectuer le nettoyage en cas de déversement de mercure, même si ce dernier est minime. On doit laisser ce soin à un spécialiste en la matière (la section Ressources).

S'il est possible que du mercure, même en très petites quantités, se soit logé dans des endroits comme les fentes de plancher, prendre contact avec un hygiéniste industriel et faire inspecter la zone entière. Si le taux de mercure dans l'air ambiant est grandement inférieur au seuil critique à partir duquel une intervention est nécessaire, épandre une poudre de zinc dans la zone et la faire pénétrer profondément, en brossant, dans les ouvertures de la surface (le zinc et le mercure s'amalgament, ce qui transforme ce dernier en une matière moins dangereuse qu'à l'état purNote en fin de texte 8). La plupart des laboratoires ayant l'équipement nécessaire, en matière de sécurité, possèdent du matériel permettant de neutraliser les matières dangereuses, en cas de déversement. Il serait bon d'avoir une trousse particulière pour les déversements de mercure. Le personnel doit compter au moins un membre ayant reçu la formation appropriée relative à la manipulation des matières dangereuses.

S'il existe un doute relativement à la quantité de mercure présent ou à l'importance de la contamination, prendre contact avec un spécialiste (la section Ressources).

Le mercure s'amalgame facilement avec d'autres métaux. Si, lors d'un déversement de mercure, celui-ci entre en contact avec des objets métalliques, consulter un spécialiste en restauration des métaux. Les problèmes de stabilité de l'objet sont complexes et de plus, les résidus formés sont possiblement dangereux et il faut donc les éliminer avec soin. Les bijoux en or sont particulièrement sensibles à la contamination au mercure et ils peuvent très facilement être endommagés.

Solutions de rechange pour une présentation plus sûre des objets

Dans les expositions, il est souvent possible d'employer un produit de remplacement du mercure (qui a le même aspect que ce dernier, sans en avoir les inconvénients). Ainsi, si le réservoir cassé d'un thermomètre n'est pas visible, on peut insérer un mince fil métallique dans la section cylindrique pour imiter le mercure. Le platine serait le métal de premier choix (il est blanc et résiste très bien au ternissement), mais l'étain, même s'il n'est pas aussi brillant, serait un choix acceptable et moins coûteux. Dans le cas des grands contenants en verre, on peut appliquer de minces couches d'argent ou d'aluminium sur la paroi intérieure par des moyens chimiques ou par dépôt chimique en phase vapeur. Habituellement, un opticien peut recommander des personnes-ressources pour ce genre de service. Au besoin, on peut facilement détacher ces minces couches métalliques à l'aide d'acide, mais seulement si le verre est stable et ne sera pas endommagé par ce traitement ultérieur. Dans certains éléments d'exposition, un disque d'aluminium bien poli ou un miroir de verre peuvent remplacer le mercure.

Ressources

On peut retrouver une liste d'entreprises qualifiées en élimination des déchets dangereux dans les pages jaunes, sous les rubriques « Déchets-Gestion », « Déchets dangereux » et « Déchets industriels-Compression et enlèvement ». Dans le cas de contamination atmosphérique possible, consulter les rubriques « Environnement-Conseillers et services » et « Air-Contrôle de qualité-Services ». Les départements de chimie d'universités et de collèges peuvent aussi recommander d'autres entreprises.

Il est essentiel que l'entreprise choisie possède les qualifications et les permis appropriés. Le site Web de l'American Industrial Hygiene Association (disponible en anglais seulement) contient une liste d'entreprises agréées situées au Canada et dans d'autres pays.

Le site Web du Centre canadien d'hygiène et de sécurité au travail contient des renseignements sur les FTSS.

Les sites Web de la plupart des gouvernements contiennent de l'information sur les lois et règlements pertinents. On peut, par exemple, consulter un document du gouvernement de l'Ontario.

Remerciements

Nous tenons à remercier chaleureusement Mme Monona Rossol (courriel : actsnyc@cs.com) pour son aide précieuse lors de la rédaction du présent texte. On peut aussi s'adresser à elle pour obtenir des renseignements supplémentaires sur la sécurité en milieu de travail. Nous voulons aussi remercier Bernie Ziomkiewicz qui a attiré l'attention sur les problèmes qu'entraîne la présence de mercure dans les collections de musée et qui a fait valoir la pertinence d'une publication traitant de cette question.

Avis

L'objet de la présente Note est uniquement de fournir, à titre d'indication, des renseignements et des conseils relatifs aux ressources. L'Institut canadien de conservation n'assume aucune responsabilité relativement à l'interprétation erronée de l'information ci-incluse.


Texte également publié en version anglaise.
Copies also available in English.

©Ministre, Travaux publics et Services gouvernementaux Canada, .
Nº de cat. NM 95-57/1-7-2002F
ISSN : 1191-7237


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