Systèmes d'extinction automatiques pour les musées – Notes de l'Institut canadien de conservation (ICC) 2/8

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La Note de l'ICC 2/8 fait partie de la deuxième série des Notes de l'ICC (La conservation préventive)

Introduction

Le personnel de muséesNote de bas de page craint depuis longtemps les dégâts causés par les systèmes d'extinction automatiques à eau (appelés aussi systèmes de gicleurs ou de sprinkleurs). Heureusement, les mythes rattachés à ces systèmes sont graduellement détruits. Contrairement à ce que l'on pourrait croire, les gicleurs ne s'activent pas tous en même temps; ils ne le font qu'au besoin, un par un, et généralement, il suffit d'un à trois gicleurs pour maîtriser un incendie. Les systèmes ne sont pas activés par la fumée, mais seulement par la chaleur (normalement à une température qui se situe entre 57 °C et 77 °C). En outre, les gicleurs causent beaucoup moins de dégâts que les tuyaux d'incendie. Ils fournissent de l'eau à un débit d'environ 113,75 L (25 gallons) par minute au cœur du foyer d'incendie, alors que les tuyaux d'incendie débitent environ dix fois cette quantité, avec une très grande pression, dirigée dans la direction générale de l'incendie, endommageant parfois les collections plus qu'il n'est nécessaire. Les gicleurs sont actuellement le moyen le plus efficace dont nous disposons pour protéger les collections contre le feu et de plus en plus de musées en font maintenant l'installation. Le choix du meilleur système peut être une tâche intimidante pour n'importe quel gestionnaire de musée. La présente Note de l'ICC fournit de l'information importante visant à aider le personnel de musée à faire les bons choix dès les premières démarches.

Fiabilité du système

La fiabilité des systèmes de gicleurs est réellement impressionnante. Selon la National Fire Protection Association (NFPA), de à , ces systèmes ont fourni un rendement satisfaisant dans pratiquement 96% des casNote en fin de texte 1 (sur un total de plus de 80 000 incendies déclarés dans des édifices dotés de ces systèmes). De plus, les statistiques de l'Australian Fire Protection Association révèlent un taux de fiabilité de 99,5% basé sur tous les incendies déclarés dans les édifices dotés de ces systèmes, en Australie et en Nouvelle-Zélande, de à Note en fin de texte 2. La plupart des défaillances auraient pu être prévenues par une meilleure conception et de meilleures mesures d'entretien. Le manque d'eau attribuable à des vannes d'arrêt fermées, à une protection partielle (par exemple, système installé au sous-sol seulement), un approvisionnement d'eau insuffisant dû à des calculs de conception erronés, le gel et la présence de systèmes étendus d'extinction sous airNote en fin de texte 3, sont certaines des causes de défaillance du système. Théoriquement, la fiabilité peut dépasser 99%, ce qui est probablement aussi élevé ou plus élevé que la fiabilité de n'importe quel système de protection contre les incendiesNote en fin de texte 4.

Systèmes

Certains musées ont procédé à l'installation de systèmes perfectionnés conçus de façon à réduire les risques de dégâts d'eau. Les gicleurs on/off, les systèmes à préaction et les systèmes à fonctionnement intermittent en sont quelques exemples. Ils sont très coûteux à l'achat et très coûteux à installer, causent souvent des problèmes d'entretien et sont moins fiables que les systèmes de gicleurs classiques. Un exemple typique est l'expérience de la Library of Congress des États-Unis. Environ 1 800 gicleurs on/off ont dû être remplacés par des gicleurs classiques dans les rayons des livres des édifices Adams et Jefferson, en raison d'un défaut rare de fabrication. On espérait réduire grandement les dégâts d'eau en utilisant les gicleurs on/off, mais ils doivent tout de même fonctionner pour une durée minimale avant de se fermer d'eux-mêmes. Que les gicleurs soient activés durant 15 minutes ou 25 minutes, l'importance des dégâts d'eau que subiront les collections situées dans la zone d'incendie sera la même. C'est ce que soutient le Conseil national de recherches du Canada à la suite de ses essais de gicleurs on/off dans la Bibliothèque nationale du Canada. Les systèmes à préaction et à fonctionnement intermittent ne sont pas recommandés pour les collections de musée parce qu'ils dépendent totalement d'un système de détection d'incendie pour être activés. Le danger de décharge d'eau accidentelle est souvent exagéré. Les gicleurs sont très résistants et sont fabriqués de façon à supporter des pressions d'eau beaucoup plus grandes que nécessaires. Des systèmes spéciaux ne sont pas requis pour protéger les collections contre les dégâts d'eau.

Le système le plus fiable qui existe sur le marché aujourd'hui est le système d'extinction automatique sous eau. Il est rapide, efficace, simple à entretenir et relativement peu coûteux. Certains musées hésitent encore à installer des systèmes sous eau parce que la canalisation contient de l'eau. Ils craignent que l'eau ne se décharge accidentellement si un gicleur devenait défectueux ou était heurté. Cette crainte n'est pas bien fondée, et elle n'est certainement pas basée sur l'expérience des musées ou les dossiers de mauvais fonctionnement de gicleurs. On a estimé, d'après des rapports de pertes dues à une fuite de gicleurs, que le risque d'ouverture accidentelle d'un gicleur à cause d'une défectuosité est inférieur à 1 sur 16 millions de gicleurs installés par annéeNote en fin de texte 5. Les systèmes ont été conçus pour supporter une pression d'au moins 3450 kPa (500 lb/po2) sans dommages ou fuitesNote en fin de texte 5. Grâce à des méthodes d'installation appropriées, le risque d'une activation accidentelle est pratiquement inexistant. Une canalisation remplie d'eau présente aussi certains avantages : l'eau réduit la rouille et le tartre de la canalisation qu'on trouve normalement dans les systèmes sous air (figure 1), et les systèmes sous eau ne dépendent pas de soupapes d'évacuation d'air, de soupapes différentielles ni de systèmes de détection d'incendie pour débiter l'eau.

Un système d'extinction automatique.
Figure 1. Sédiments accumulés dans un système d'extinction automatique sous air. Le gicleur est ici protégé par une armature.

Les systèmes sous air ne sont pas recommandés pour la protection des collections parce qu'ils sont plus lents et qu'ils ont un taux de défaillance plus élevé que les systèmes sous eau. Le temps de réponse plus long peut aggraver la propagation de l'incendie, exigeant l'ouverture éventuelle de plus de têtes de gicleurs et un débit d'eau plus grand. Un autre argument contre les systèmes sous air est la rouille et l'accumulation de tartre dans les canalisations, parce que le tartre et les sédiments peuvent causer de sérieux dommages aux collections. Cette accumulation est causée principalement par l'oxygène et l'humidité dans les canalisations vides, et elle est augmentée par l'humidité et la condensation provenant de l'humidité de la pièce, l'alimentation d'air tirée par le compresseur d'air des canalisations sous air, l'humidification des parois de la canalisation lorsque la soupape du système sous air est déclenchée accidentellement ou durant un incendie et lorsque des essais de déclenchement à plein débit sont effectués. On peut remplir les canalisations d'azote pour réduire la rouille et le tartre, mais le coût initial augmente alors et l'entretien des canalisations devient une source de préoccupation. On ne devrait installer un système sous air que lorsque la chaleur intérieure ne suffit pas à empêcher le gel de l'eau dans le système.

Des systèmes d'extinction automatiques à microbrouillard sont actuellement mis au point. Ils fonctionnent à une pression très élevée et déchargent dans toute la pièce un brouillard ressemblant à de la brume. Des essais effectués à l'Université du Maryland indiquent que quelques litres d'eau suffisent à maîtriser un incendieNote en fin de texte 6. Les systèmes à microbrouillard combattent les feux par refroidissement, par déplacement d'oxygène et par une réduction des transferts de chaleur entre les flammes et les objets adjacents. On peut s'attendre à ce que les coûts de ces systèmes et de leur installation soient semblables à ceux des systèmes de gicleurs standard. En , on pourra disposer de systèmes homologués et de normes pour les musées. On doit cependant garder à l'esprit qu'une période de rodage de quelques années devra être envisagée avant de procéder à l'installation de tout nouveau système.

Critères à envisager

On devrait tenir compte des critères ci-après à l'installation d'un système de gicleurs dans un musée. (La présente section peut servir de guide aux architectes et aux ingénieurs engagés pour concevoir des systèmes destinés aux musées.)

Concepteur : Bien que certaines entreprises qui vendent des systèmes de gicleurs comptent parmi leur personnel des concepteurs qui connaissent bien les systèmes, il est préférable de recourir aux services d'un ingénieur professionnel compétent accrédité dans la province d'installation. On obtient ainsi une représentation objective durant les étapes de la conception, de l'inspection et de l'essai.

Conception : Le système devrait être conçu, installé et essayé en conformité avec la norme NFPA 13, « Norme pour l'installation des systèmes d'extinction automatiques à eau ». Des calculs d'hydraulique sont recommandés dans la plupart des cas. Certaines installations devraient être basées sur des essais de rendement. La protection pour le rayonnage mobile en est un exemple.

Systèmes : Des gicleurs devraient être installés dans chaque pièce du bâtiment; une protection partielle contre le feu ne suffit pas. On devrait installer un système sous eau dans toutes les zones chauffées et un système sous air, plutôt qu'un système au glycol, dans les zones sujettes au gel.

Vannes de zone (vannes d'arrêt) : Les vannes de zone devraient être situées de façon qu'elles soient visibles et facilement accessibles. Une installation à environ 1,2 à 1,5 m (4 à 5 pieds) au-dessus du niveau du plancher, plutôt qu'au niveau du plafond (comme c'est généralement le cas), permet de couper l'eau rapidement après la suppression du feu. Un musée national a subi des dommages excessifs parce que le personnel et les pompiers n'avaient pu localiser rapidement les vannes du système.

Poste de contrôle du système : Les vannes et tout autre équipement périphérique des systèmes comme le compresseur d'air dans un système sous air devraient être situés dans une pièce réservée à cette fin. Cette pièce devrait être identifiée à l'aide d'un panneau placé sur la porte indiquant « SALLE DES VANNES DU SYSTÈME DE GICLEURS ». La porte ne devrait jamais en être verrouillée, et la pièce ne devrait pas servir à l'entreposage. On devrait apposer en permanence une étiquette sur les valves pour identification rapide et facile. Un plan du système devrait être établi et mis à la disposition des pompiers dès leur arrivée.

Répartition de la quantité d'eau : Celle-ci dépend du type et du nombre d'objets prévus dans chacune des différentes pièces, ou des collections projetées dans des pièces d'exposition temporaire. Par exemple, on devrait tenir compte des facteurs suivants : la vitesse de combustion, le débit de chaleur, la hauteur des systèmes d'entreposage et la présence de liquides inflammables et combustibles.

Système d'entreposage mobile : On utilise souvent les systèmes d'entreposage mobiles dans des pièces d'entreposage de collections et d'archives, ainsi que dans des salles de recherche et de bibliothèque. Dans les calculs de répartition d'eau, on doit tenir compte des charges combustibles plus lourdes créées par de plus grandes quantités d'objets, un dégagement minimal entre les rayonnages et le type de système de rayonnages mobiles installés. On devrait envisager un mode automatique qui laisse un espace minimal de 10 cm (4 po) entre chaque rayonnage. Cet espace peut aider les gicleurs à supprimer les incendies en fournissant une ouverture pour que l'eau atteigne les incendies à l'intérieur des rayonnages.

Tuyauterie : Une canalisation en acier de nomenclature 40 ou l'équivalent est acceptable dans la plupart des systèmes sous eau. La canalisation galvanisée est recommandée pour les systèmes sous air. Les canalisations thermoplastiques et en cuivre sont recommandées dans des zones où l'installation peut être difficile, comme dans une maison historique.

Protection des gicleurs : Afin de réduire les risques de dommages aux gicleurs, on devrait installer des gicleurs debout (figure 1), encastrés (figure 2), ou muraux (figure 3), plutôt que des gicleurs en position vers le bas. Lorsque des gicleurs en position vers le bas sont installés dans des zones où ils sont susceptibles de subir des dommages, on devrait les entourer d'une armature métallique.

Gicleur non apparent.
Figure 2. Gicleur non apparent. La chaleur déclenche le mécanisme de dégagement du couvercle.
Une image d'un gicleur mural.
Figure 3. Gicleur mural.

Prises d'incendie : On devrait aménager des couvercles ordinaires sur les prises d'incendie extérieures. Les couvercles en laiton sont des objets attrayants dont une personne peu scrupuleuse peut tirer un bon prix dans les parcs à ferrailles. On remarque souvent au cours des visites des lieux que ces couvercles manquent, laissant les prises sans protection pendant de longues périodes, ou jusqu'à ce qu'elles soient requises. Il n'est pas rare de trouver des déchets comme des cannettes de boisson gazeuse, des roches ou du papier, qui bloquent les prises lorsque les couvercles sont absents.

Conclusion

Les systèmes de gicleurs constituent le meilleur moyen connu aujourd'hui de protéger les collections contre le feu et contre les dégâts d'eau causés par les interventions du service d'incendie. Ces systèmes d'extinction automatiques sont résistants et ne sont pratiquement pas sujets à des fuites d'eau comme la plomberie et les tuyaux de drainage (figure 4). Les systèmes sous eau sont recommandés dans la plupart des cas. Les gicleurs devraient être installés de façon à prévenir une activation accidentelle causée par un dommage mécanique et être conçus de façon à satisfaire aux besoins spéciaux de protection des collections.

Une canalisation.
Figure 4. Fuite d'eau provenant d'une canalisation.

Lectures recommandées

  1. Artim, Nick, Director of Fire Safety Network, Middlebury, Vermont. « An Introduction to Automatic Fire Sprinklers Part 1 », WAAC Newsletter, vol. 1, 3, .

  2. Artim, Nick. « An Introduction to Automatic Fire Sprinklers », WAAC Newsletter, vol. 17, 2, .

  3. Artim, Nick. « An Update on Micromist Fire Extinguisher Systems », WAAC Newsletter, vol. 17, 3, .

  4. Baril, Paul. « Programmes de prévention des incendies dans les musées ». Bulletin technique de l'ICC, 18, Ottawa, Institut canadien de conservation, .

  5. Institut canadien de conservation. « La sécurité-incendie dans les musées », Notes de l'ICC, 2/6, Ottawa, Institut canadien de conservation, .

  6. Institut canadien de conservation. « Incendies dans les musées et pertes », Notes de l'ICC, 2/7, Ottawa, Institut canadien de conservation, .

  7. Richardson, J.K. « Fiabilité des réseaux d'extincteurs automatiques à eau », Digest de la construction au Canada, 238, , Ottawa, Conseil national de recherches du Canada.

  8. Wilson, J. Andrew, Chief, Fire Protection Division, Smithsonian Institution. « Fire Fighters », Museum News, .


Par Paul Baril

Texte également publié en version anglaise.
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© Ministre des Travaux publics et Services gouvernementaux, Canada,
Nº de cat. NM95-57/2-8-1998F
ISSN : 1191-7237


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