Test ponctuel à la diphénylamine pour déceler la présence de nitrate de cellulose dans les objets de musée – Notes de l'Institut canadien de conservation (ICC) 17/2

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La Note de l'ICC 17/2 fait partie de la dix-septième série des Notes de l'ICC (Tests ponctuels en conservation)

Introduction

Dans son article sur l'instabilité des adhésifs à base de nitrate de cellulose, Koob () décrit un test ponctuel à la diphénylamine, qui permet de déceler la présence de nitrate de cellulose. La diphénylamine est un réactif très courant et les publications qui traitent de chimie font état de nombreuses façons de le préparer. On recommande d'avoir recours, après l'avoir légèrement modifié, au réactif dont se sert Koob. On pourra ainsi détecter rapidement la présence de nitrate de cellulose non pas seulement dans les adhésifs mais dans tout objet de musée ou dans tout matériau dont l'usage est recommandé dans les musées ou dans le domaine de la conservation.

Préparation du réactif

Le réactif est constitué d'une solution de diphénylamine à 0,5%, mélangée à de l'acide sulfurique à 90%. On le prépare en ajoutant lentement 90 mL d'acide sulfurique concentré à 10 mL d'eau, sans jamais cesser d'agiter; puis on ajoute cette solution, progressivement et par petites quantités, à 0,5 g de diphénylamine. Il faut être très prudent lorsqu'on ajoute l'acide à l'eau. Il se dégage une quantité importante de chaleur pendant la dilution du mélange. Pour éviter les éclaboussures, il faut toujours ajouter lentement l'acide à l'eau en agitant constamment. Cette opération doit être effectuée près d'un évier ou à proximité d'une source abondante d'eau courante, de façon à pouvoir nettoyer le matériel utilisé et éliminer toute trace de produit renversé involontairement. En cas d'accident, rincer immédiatement avec beaucoup d'eau.

Comme elle est très corrosive, la solution obtenue présente des risques pour les humains et pour les objets. Elle peut se conserver plusieurs années et garde son efficacité même après avoir pris une légère teinte brune ou bleue. La quantité préparée (100 mL) est suffisante pour plusieurs centaines d'essais. La solution doit être stockée dans des bouteilles de verre dont l'étiquette porte les mentions « diphénylamine à 5% dans de l'acide sulfurique à 90% » et « corrosif ». Les bouteille de verre avec bouchons à vis en plastique (et non en métal) peuvent être utilisées seulement si la garniture des bouchons résiste à l'acide sulfurique à 90%. Les garnitures en papier, en liège ou en feuille métallique sont inefficaces; par contre, les garnitures et les bouchons en polyéthylène ou en polypropylène conviennent à cet usage.

Méthode

Sur une partie peu visible de l'objet, prélever un échantillon (de dimension plus petite que la tête d'une épingle) et le déposer sur une surface de verre (comme une lame de microscope) ou sur une plaque à godets en porcelaine émaillée blanche. Il est important de mettre l'objet à l'écart pour s'assurer que le réactif n'entre pas en contact avec celui-ci. Si l'on utilise un microscope, l'échantillon pourra être de taille microscopique. Déposer une seule goutte de réactif sur l'échantillon à l'aide d'une pipette, d'un compte-gouttes ou d'une tige en verre. L'apparition sur l'échantillon, en l'espace de quelques secondes, d'une tache bleu-violet qui se répand dans la goutte déposée révèle la présence de nitrate de cellulose. Si aucun changement de couleur n'est observé ou si l'on voit apparaître d'autres couleurs, comme l'orange, le jaune, le brun ou le vert, le résultat est négatif, ce qui indique l'absence de nitrate de cellulose. Laver à l'eau tout le matériel utilisé au cours de l'essai et jeter soigneusement les eaux de lavage. Ne l'oubliez pas, le réactif est corrosif.

Pour se familiariser avec la méthode et pour se donner un point de référence en ce qui concerne la couleur produite et la vitesse de la réaction, analyser simultanément avec l'échantillon des produits courants qui renferment du nitrate de cellulose. Le collodion et certaines colles, comme la colle DUCO, l'adhésif transparent tout usage UHU et l'adhésif HMG, donnent des résultats positifs avec le réactif et peuvent être utilisés comme matériaux de référence.

Interférences

L'essai est basé sur l'oxydation de la diphénylamine. Ce produit incolore devient un colorant bleu de type quinoïde sous l'action des ions oxydants d'oxyde d'azote libérés lorsque le nitrate de cellulose réagit avec l'acide sulfurique (Maloney et Thornton, ). La présence de certains autres ions oxydants pourrait causer une réaction similaire. En fait, cette propriété a été exploitée dans d'autres méthodes chimiques d'analyse (Tomicek, ). Les matériaux pigmentés à l'aide de composés d'ions oxydants, comme les chromates (qui peuvent entrer dans la préparation de pigments jaunes, oranges ou verts), risquent de poser des problèmes. On a aussi signalé que la présence de résines ajoutées, comme les gommes d'ester, le copal et d'autres résines naturelles, peut empêcher la réaction de se produire (Vollman, ). En général, ces substances se rencontrent uniquement dans les vernis et les revêtements, et non dans les objets de plastique.

Trente échantillons d'objets de musée, de revêtements et d'adhésifs choisis au hasard ont été soumis à ce test ponctuel. Chaque échantillon a également été analysé par spectrophotométrie infrarouge. Tous les échantillons qui, d'après les résultats de l'analyse infrarouge, contenaient du nitrate de cellulose ont donné des résultats positifs, et tous les échantillons qui n'en contenaient pas ont donné des résultats négatifs. Il n'y a pas eu d'interférence.

L'essai est très sensible. Il peut être utilisé avec n'importe quel type d'objet sur lequel on peut prélever un échantillon microscopique. Toutefois, la présence de faibles quantités de nitrate de cellulose provenant d'un adjuvant ou dues à la contamination (causée, par exemple, par des résidus de revêtements ou d'adhésifs) peut donner un résultat positif, lequel, en réalité, est « faussement positif ». On pourrait alors faire preuve d'une prudence exagérée et inutile dans le traitement de certains objets.

Fournisseurs

On peut se procurer facilement de la diphénylamine et de l'acide sulfurique chez les fournisseurs de produits chimiques courants. Les lames de microscope et les plaques à godets sont en vente chez les fournisseurs de matériel de laboratoire courant.

Diphénylamine

  • Fisher Scientific Ltd
    Nº de cat. : 0-2611
  • J.T. Baker Chemical Co.
    Nº de cat. :

Acide sulfurique

  • Fisher Scientific Ltd
    Nº de cat. : A-300
  • J.T. Baker Chemical Co.
    Nº de cat. : 9681

Lames de microscope

Fisher Scientific Ltd
Nº de cat. : 12-500

Plaques à godets

Fisher Scientific Ltd
Nº de cat. : 13-745
Nº de cat. : 13-748B

Références

  1. Koob, Stephen P. « The Instability of Cellulose Nitrate Adhesives », dans The Conservator, 6, , p. 31-34.

  2. Maloney, R.S. et Thornton, J.I. « Color Tests for Diphenylamine Stabilizer and Related Compounds in Smokeless Gunpowder », dans Journal of Forensic Sciences, vol. 27, 2, , p. 318-329.

  3. Tomicek, O. Chemical Indicators, trad. Weir, A.R., Butterworths Scientific Publications, , p. 171.

  4. Vollman, H.F. « Detection of Nitrocellulose », dans Journal of the Oil and Colour Chemist's Association, vol. 44, , p. 308-310.


Par R. Scott Williams Laboratoire de recherche analytique

Texte également publié en version anglaise
Copies are also available in English.

© Gouvernement du Canada,
Nº de cat. : NM95-57/17-2-1989F
ISSN : 1191-7237


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