Discussions sur le plaidoyer, le procès et le règlement de la sentence

Directive du DPM
Directive no : 008/00
Date d’émission : 15 mars 2000
Mise à jour : 15 décembre 2017
Renvoi: Révision postérieure à l’accusation, Infractions d’inconduite sexuelle

Sujet : Discussions sur le plaidoyer, le procès et le règlement de la sentence

Application de la directive

1. Cette directive s’applique aux procureurs1 qui engagent des discussions de résolution avec un avocat de la défense, ou un accusé non représenté, pour parvenir à une entente au sujet d’un plaidoyer de culpabilité et/ou d’une sentence ainsi que pour déterminer les questions en litige sur lesquelles il devra être statué au procès.

2. Dans la présente politique, le renvoi au « procureur militaire régional (PMR) », « procureur » ou aux « procureurs » est présumé désigner tout officier qui est autorisé par le directeur des poursuites militaires (DPM) à l’assister ou à le représenter, conformément à l’article 165.15 de la Loi sur la défense nationale dans la mise en accusation en cour martiale et dans le soutien de l’accusation en cour martiale.

Introduction

3. Les discussions de résolution désignent toutes les discussions entre le procureur et l’avocat de la défense qui visent à résoudre les questions pouvant être soulevées au cours du processus de la cour martiale. Ces discussions représentent un élément important du système de justice militaire puisqu’elles aident à délimiter les questions en litige au procès ou qu’elles peuvent aider à résoudre une question sans avoir à passer par un procès complet.

4. Bien qu’elles ne soient pas définies dans la Loi sur la défense nationale ou le Code criminel, les discussions de résolution sont habituellement classées en une de ces trois catégories : négociation d’un plaidoyer, délimitation des questions en litige au procès et négociation sur la détermination de la peine.

5. Les procureurs sont encouragés à utiliser la discussion de résolution comme outil de gestion des cas. Lorsque ces discussions sont adéquatement menées, elles réduisent les délais des cours martiales en permettant à une affaire de progresser dans le système de justice militaire de façon efficace et opportune.

6. Il faut toutefois souligner que les recommandations faites à la cour dans le cadre des discussions de résolution sont soumises au pouvoir discrétionnaire du juge militaire présidant la cour martiale, qui peut accepter ou rejeter toute soumission présentée par les parties.

Énoncé de directive

7. Le procureur peut initier et s’engager dans des discussions de résolution avec l’avocat de la défense ou un accusé non représenté, de façon coopérative et non accusatoire et dans le plus grand intérêt des Forces armées canadiennes (FAC). Ces discussions visent à s’entendre sur les termes d’un plaidoyer de culpabilité, à restreindre les questions qui devront être statuées en cour martiale, ou à s’entendre sur la sentence.

Pratique / procédure

8. Pour que le procureur puisse lancer des discussions de résolution, il doit premièrement être convaincu, lors de la révision postérieure à l'accusation, qu’il y a une perspective raisonnable de condamnation et qu'il est dans l’intérêt public de prononcer la mise en accusation. Le procureur ne peut lancer des discussions de résolution que lorsqu’il est convaincu que ces normes ont été atteintes.

9. Le procureur doit maintenir dans le dossier un compte-rendu complet de toutes les discussions de résolution. Ces notes doivent inclure la date où les discussions ont eu lieu, la nature des accusations discutées, les termes de toute entente relative à chacune des accusations, les restrictions quant à l’obtention de l’approbation du DPM, le Directeur adjoint des poursuites militaires (DAPM) ou le DAPM - Équipe d’intervention en matière d’inconduites sexuelles (ÉIIS) pour les dossiers d’inconduite sexuelle ainsi que toutes les questions non résolues et la façon dont elles seront abordées.

10. Lorsqu’un accusé décide de plaider coupable, il admet essentiellement la commission de l’infraction d’ordre militaire. Une telle décision de la part d’un accusé signifie qu’il renonce à nombre de ses droits et que le besoin d’une cour martiale pour déterminer la question de la culpabilité est ainsi éliminé. La poursuite n’a plus besoin de prouver sa cause hors de tout doute raisonnable et l’accusé perd son droit de présenter une défense pleine et entière. Lorsque l’accusé fait connaître son désir de plaider coupable, le procureur doit être convaincu que l’accusé a fait un choix volontaire et informé d’admettre catégoriquement sa culpabilité.

Accusé non représenté

11. Les discussions de résolution avec un accusé non représenté exigent des précautions particulières. Même si le procureur peut s’engager dans ce genre de discussions avec un accusé non représenté, il est essentiel qu’elles aient lieu seulement lorsqu’il est évident que l’accusé agit volontairement et qu’il a pris la décision de se représenter lui-même, en toute connaissance de cause.

12. Le procureur doit premièrement encourager l’accusé à consulter un avocat. Lorsque l’accusé refuse de mandater un avocat et désire engager des discussions de résolution, le procureur doit prendre les dispositions pour qu’un observateur impartial soit présent pendant les discussions. Un compte-rendu détaillé de toutes les discussions doit être conservé et toutes les ententes conclues avec l’accusé doivent être consignées. Lorsqu’une discussion de résolution est mise en application, le procureur doit faire connaître au juge l’existence de l’entente et le fait que l’accusé a été encouragé à consulter un avocat, mais qu’il a refusé.

13. Le procureur ne doit pas mener de discussions de résolution avec un accusé non représenté sauf s’il est convaincu que toute la preuve a été communiquée à l’accusé ou que ce dernier a renoncé à son droit à une pleine communication de la preuve.

Perspectives des parties concernées

14. Le procureur doit, lorsqu’il est raisonnable de le faire, demander et tenir compte de l’opinion de ceux impliqués dans la cause de la poursuite, tel que la victime et l’unité chargée de l’enquête, sur les discussions de résolution, particulièrement lorsque l’infraction présumée implique la violation de l’intégrité personnelle de la victime (par exemple physique, sexuelle, émotionnelle). Cependant, après cette consultation, le procureur détient la responsabilité finale d’évaluer la pertinence d’une entente, sous réserve de l’approbation du DPM ou du DAPM approprié. Dans l’éventualité d’une entente au sujet du plaidoyer, le procureur doit s’assurer que la victime, l’unité chargée de l’enquête et la chaîne de commandement comprennent la teneur de l’entente et les motifs sous-jacents.

15. Lorsqu’il y a lieu, le procureur doit présenter toutes les ententes de résolution au juge du procès, en audience publique et consignée au dossier de la cour. Dans certaines circonstances, il peut être nécessaire de discuter de certains aspects de l’entente en privé avec le juge du procès, pour des raisons de confidentialité ou pour protéger des renseignements classifiés. Toutefois, une telle mesure ne doit être prise qu’en présence de l’avocat de la défense.

16. Le procureur doit respecter toutes les ententes négociées, sauf s’il était clairement déraisonnable de le faire. De plus, le procureur peut être justifié de refuser de respecter une entente s’il a été induit en erreur sur des faits importants. La décision de ne pas respecter une entente ne doit être prise qu’après consultation avec le DPM et avec l’approbation de ce dernier.

17. Lorsqu’un accusé a enregistré un plaidoyer de culpabilité à la suite d’une entente à cet effet ou d’une entente concernant la sentence et que la cour a statué sur la cause conformément aux recommandations, le DPM ne portera pas la cause en appel sauf en cas de circonstances extraordinaires.

Contenu des négociations

18. En échange d’un plaidoyer de culpabilité, le procureur peut discuter de la réduction d’une accusation à une infraction moindre ou incluse, du retrait d’accusations additionnelles et de la réduction des accusations multiples à un nombre moindre d’accusations qui incluraient plus de détails (lorsque la loi le permet).

19. Le procureur ne peut accepter un plaidoyer de culpabilité pour une infraction non divulguée par la preuve ni accepter un plaidoyer de culpabilité pour une accusation qui ne reflète pas suffisamment la gravité du comportement prouvable de l’accusé. Le procureur ne peut induire la cour en erreur en acceptant de minimiser les faits prouvables en échange d’un plaidoyer de culpabilité. De plus, le procureur ne peut accepter de taire un dossier criminel ou une fiche de conduite pertinent en échange d’un plaidoyer de culpabilité.

Communications privilégiées

20. Le procureur doit être conscient que toutes les communications entre le procureur et l’avocat de la défense, ou un accusé non représenté, qui ont lieu pendant des discussions de plaidoyer, sont privilégiées. L’intérêt public encourage des discussions complètes, claires et véridiques tout au long des négociations, et ce qui a été discuté pendant ces discussions n’est pas admissible au procès.

Entente sur les faits

21. Lorsqu’un accusé accepte de plaider coupable, le procureur doit présenter à la cour les faits qui auraient pu être prouvés par la preuve admissible si l’affaire s’était rendue au procès. Les discussions concernant les faits peuvent inclure à juste titre une entente de ne pas faire de représentations devant la cour pour des faits qui ont peu ou pas d’importance pour l’accusation.

22. Le procureur ne peut pas accepter de présenter les faits de façon à induire la cour en erreur, tel qu’accepter de ne pas informer la cour de certains éléments prouvables du comportement criminel ou dossier criminel de l’accusé qui sont pertinents ou qui pourraient aider la cour.

23. Le procureur doit aviser la cour de l’étendue des blessures ou des dommages subis par une victime (que ce soit un individu ou une institution) et ne doit pas cacher à la cour des faits qui sont prouvables et pertinents.

Délimitation des questions en litige pour le procès

24. Des discussions visant à délimiter les questions en litige pour le procès peuvent avoir lieu tout au long du processus précédant le procès et elles peuvent être réalisées de façon informelle, entre les parties ou avec un juge pendant la conférence préparatoire au procès. Ce genre de pratique peut réduire grandement la durée du procès.

25. Le procureur est encouragé à initier ou à s’engager dans des discussions avant le procès avec l’avocat de la défense dans le but de délimiter le plus possible les questions en litige. Ces échanges n’ont pas toujours besoin d’être officiels mais le procureur doit tout de même prendre des notes détaillées et déposer le compte-rendu au dossier.

Négociations sur les recommandations sur sentence et plaidoyers de culpabilité

26. Les négociations sur les recommandations sur sentence sont le processus par lequel le procureur et l’avocat de la défense tentent de conclure une entente sur la sentence à être suggérée. Ces ententes ne règlent pas nécessairement la question puisqu’elles sont toujours soumises à l’approbation de la cour.

27. Lorsqu’il entre dans des négociations pour la recommandation d’une sentence, le procureur doit tenir compte de la gravité de l’infraction et du degré de responsabilité du contrevenant ainsi que de tout facteur aggravant ou atténuant qui peut avoir une incidence sur la sentence. Les discussions sur la recommandation d’une sentence peuvent inclure à juste titre une recommandation du procureur relativement à certaines gammes de sentences ou à une sentence en particulier.

28. Un plaidoyer de culpabilité doit habituellement être considéré comme un facteur atténuant pendant les discussions pour la recommandation d’une sentence puisqu’il indique que l’accusé a accepté la responsabilité de son comportement. Une démonstration de remords et un plaidoyer de culpabilité offert à la première occasion possible sont des facteurs particulièrement atténuants.

29. Lorsqu’un accusé plaide coupable, le procureur peut faire des recommandations précises à la cour quant à la durée et aux conditions de la sentence et il peut également accepter de participer à une suggestion commune pour la sentence ou le règlement.

Disponibilité de cet énoncé de directive

30. Cet énoncé de directive est un document public et il est disponible aux membres des FAC ainsi qu'au public.


Note en bas de page

1 Toute référence dans cette directive à « procureur » ou « procureurs » doit renvoyer à l’officier ou aux officiers qui font partie du Service canadien des poursuites militaires ou qui ont été autorisés par le directeur des poursuites militaires à l’assister ou le représenter en vertu de l’article 165.15 de la Loi sur la Défense nationale.

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