Chapitre 4 : Faits nouveaux dans la justice militaire : Bilan de l’année

Ce chapitre met en relief des cas de jurisprudence sélectionnés pour la période visée par ce rapport, ainsi que certaines initiatives législatives et réglementaires.

Jurisprudence – De la cour martiale

Agression sexuelle - R. c. Yurczyszyn, 2014 CM 2004, 2005

Le Major (Maj) Yurczyszyn était le commandant de la base des Forces canadiennes (BFC) Wainwright. Après avoir représenté la BFC Wainwright aux cérémonies du jour du Souvenir, le Maj Yurczyszyn a consommé de l’alcool à plusieurs endroits avant de se rendre à une fête chez un particulier pendant la soirée. Lorsqu’il est arrivé, étant visiblement ivre et portant encore son uniforme, il a continué à boire et à se conduire de façon embarrassante en présence des autres officiers et civils invités. Le maj Yurczyszyn a été présenté à une civile, il lui a demandé si elle portait un soutien-gorge coussiné et il lui a touché les seins.

Le Maj Yurczyszyn a été accusé d’agression sexuelle (en contravention du Code criminel et punissable en vertu de l’article 130 de la LDN), et d’ivresse. Le Maj Yurczyszyn a plaidé coupable à l’accusation d’ivresse et a été reconnu coupable de l’accusation d’agression sexuelle. Il a été condamné à une rétrogradation au grade de capitaine.

Désertion - R. c. deJong, 2014 CM 2008

Le Lieutenant de vaisseau (Ltv) deJong servait à bord du NCSM PRESERVER comme élève-stagiaire de la logistique. Lors d’une visite dans un port en Floride, le Ltv deJong a envoyé une lettre à son commandant, dans laquelle il alléguait qu’il avait une « relation de travail toxique » avec l’officier d’approvisionnement du navire, et a demandé d’être rapatrié immédiatement à Halifax. Il s’est aussi rendu à l’infirmerie pour demander à l’adjoint au médecin du navire un rapatriement pour des raisons médicales. Insatisfait du rythme auquel se déroulait le processus de prise de décision, le Ltv deJong a quitté le navire vêtu en civil et est retourné en avion à Halifax, à ses frais, où il s’est présenté à la police militaire. Les autorités navales ont réaffecté le Ltv deJong à des fonctions basées à terre, où il a reçu de très bons rapports d’évaluation du rendement de ses nouveaux supérieurs.

Le Ltv deJong a été accusé de désertion, et finalement a plaidé coupable. Lorsqu’il a prononcé la sentence, le juge militaire a fait observer que même si le Ltv deJong sentait qu’on le harcelait et qu’on lui manquait de respect, il disposait de nombreux recours pour régler ces problèmes. Le Ltv deJong a été condamné à un blâme et une amende de 5 000 $.

Conduite - R. c. Miller, 2014 CM 2018

La Lieutenant-colonel (Lcol) Miller a été accusée de 11 infractions pour avoir porté diverses médailles et distinctions honorifiques sur son uniforme sans y avoir droit. La Lcol Miller a plaidée coupable à trois de ces accusations, et les autres ont été retirées. Le juge militaire a reconnu que l’enjeu peut sembler mineur pour certaines personnes à l’extérieur des forces armées, mais qu’il n’en est rien. Selon le juge militaire, les honneurs doivent, pour conserver leur sens, être décernés avec rigueur et être portés seulement par ceux et celles qui les ont mérités. De plus, les infractions en disaient long à propos de l’intégrité de la Lcol Miller comme officier supérieur, notamment puisqu’elles suivent d’autres condamnations pour des infractions liées à la malhonnêteté. Dans le cadre d’une soumission conjointe, la Lcol Miller a été condamnée à un blâme et une amende de 5 000 $.

Harcèlement - R. c. McKenzie, 2014 CM 2016

L’ex-Adjudant (ex-Adj) McKenzie a gardé contact avec la plaignante après que celle ci ait essayé de mettre un terme à leur relation extraconjugale qui durait depuis quatre ans. L’ex-Adj McKenzie a continué d’envoyer des courriels à la plaignante et de provoquer des rencontres, bien qu’il ait été avisé que ces gestes n’étaient pas désirés et qu’il ait reçu l’ordre d’arrêter de communiquer avec la plaignante. Celle-ci a accepté jusqu’à un certain point, et ils ont eu quelques rencontres intimes. Certains courriels de l’ex-Adj McKenzie avaient un ton inquiétant; par exemple, l’un d’entre eux contenait le message : « Je n’arrêterai jamais de te hanter. »

L’ex-Adj McKenzie a été accusé et a plaidé coupable d’avoir désobéi à un ordre légitime pour n’avoir pas obéi à l’ordre de s’abstenir de communiquer avec la plaignante. Il a aussi été accusé de harcèlement criminel (en contravention du Code criminel et punissable en vertu de l’article 130 de la LDN) et, subsidiairement, d’avoir eu une conduite préjudiciable au bon ordre et à la discipline pour avoir contrevenu aux ordonnances générales concernant le harcèlement dans l’ensemble des FAC. Le juge militaire a déclaré l’accusé non coupable de harcèlement criminel, car il a estimé que quoique sa conduite ne fût pas professionnelle, elle n’avait pas amené la plaignante à craindre raisonnablement pour sa sécurité. Cependant, le juge militaire a déclaré l’accusé coupable de conduite préjudiciable au bon ordre et à la discipline puisque cette accusation ne requiert pas que la plaignante ait eu une crainte raisonnable de subir un préjudice. Lorsqu’il a prononcé la sentence, le juge militaire a souligné l’effet négatif du harcèlement sur les FAC, soulignant que « Le harcèlement mine le fondement de la discipline militaire et porte un préjudice grave au moral, à la cohésion et à l’efficacité opérationnelle de toute unité au sein de laquelle il survient. » L’ex-Adj McKenzie a reçu un blâme et une amende de 3 000 $.

Fraude - R. c. Parent, 2014 CM 2012

Les FAC versent des indemnités pour frais d’absence du foyer aux militaires qui remplissent les conditions requises et qui sont séparés de leurs conjoints pour des raisons de service militaire. En 2009, le Caporal (Cpl) Parent a changé son statut marital et a présenté une demande d’indemnité. Il a soumis des documents attestant qu’il avait une relation de conjoint de fait avec une femme avec qui il a eu un enfant quelques années auparavant, même s’ils étaient séparés et n’étaient pas des conjoints de fait. Pour recevoir ces indemnités pour frais d’absence du foyer, les membres des FAC doivent attester par écrit chaque mois qu’ils ont une personne à charge et qu’ils ne se sont pas séparés avec l’intention de demeurer séparés au cours de la période précédente, ce qu’a fait le Cpl Parent pendant 39 mois consécutifs. En tout, le Cpl Parent a réclamé frauduleusement un total de 46 773 $ en indemnités pour frais d’absence du foyer.

Le Cpl Parent a plaidé coupable à un chef d’accusation de vol de plus de 5 000 $ (contrairement au Code criminel et punissable en vertu de l’article 130 de la LDN), et les accusations subsidiaires ont été retirées. En acceptant une soumission conjointe et en condamnant le Cpl Parent à une peine de détention de 90 jours, le juge militaire a souligné qu’il est fondamental que le public en général et les autres militaires soient convaincus de l’honnêteté, de l’intégrité, de la discipline, de la maturité et du bon jugement des membres des FAC pour que celles-ci soient efficaces dans l’exercice de leurs fonctions importantes. Le juge militaire a ajouté que le bon fonctionnement du système des prestations financières repose sur l’intégrité de ces mêmes militaires.

Jurisprudence – De la Cour d’appel de la cour martiale

Voyeurisme et possession de pornographie juvénile - Soldat Réjean Larouche c. Sa Majesté la Reine, 2014 CACM 6

Le Soldat (Sdt) Larouche a pris séparément des photos de nu d’un membre des FAC et d’une civile, qui avaient toutes deux donné leur consentement, à la condition que les photos soient détruites plus tard. Après que l’une des femmes ait vu des photos de nu de l’autre femme chez le Sdt Larouche, elle s’est inquiétée au sujet de ses propres photos et a porté plainte à la police militaire (PM). Dans le cadre de l’enquête sur le voyeurisme, un mandat de perquisition a été obtenu d’un juge civil. Au cours de l’exécution du mandat les enquêteurs ont trouvé une grande quantité de pornographie juvénile.

Devant la cour martiale, le Sdt Larouche a été reconnu coupable de voyeurisme et de possession de pornographie juvénile (chacune des accusations étant en contravention au Code criminel et punissable conformément à l’article 130 de la LDN). Malgré que le juge militaire a reconnu la présence de vices sur le plan constitutionnel dans le mandat de perquisition, il a quand même accepté les éléments de preuve obtenus, au motif que le refus d’admettre ces éléments preuve aurait miné la confiance du public à l’égard du système de justice militaire.

Le Sdt Larouche a interjeté appel devant la Cour d’appel de la cour martiale (CACM) pour deux motifs. Premièrement, il a contesté la constitutionnalité de l’article 130 de la LDN, qui rend les infractions au Code criminel punissables comme étant des infractions militaires. La CACM a conclu que, même si l’article 130 de la LDN a une portée excessive, il était approprié d’y voir le critère du « lien de connexité avec le service militaire ». Lu de cette manière, l’article n’était pas inconstitutionnel. Deuxièmement, le Sdt Larouche a plaidé que le juge militaire avait erré en droit en acceptant les éléments de preuve obtenu durant la perquisition. Plutôt que d’examiner l’incidence limitée de l’élément de preuve sur la réputation du système de justice militaire, le juge militaire aurait dû tenir compte du système de justice dans son ensemble. La CACM a exclu les éléments de preuve, annulé les déclarations de culpabilité et ordonné un acquittement.

Lésions corporelles infligées illégalement et négligence dans l’exécution d’une tâche militaire – Lieutenant D.W. Watts c. Sa Majesté la Reine, 2014 CACM 9

Le Capitaine (Capt) Watts était commandant de peloton en Afghanistan et il avait reçu des ordres de mener un entrainement sur la mine Claymore (un explosif directionnel à détonation télécommandée) avec son peloton. La mine Claymore n’était pas incluse dans l’entrainement de pré-déploiement de l’unité. Étant donné que le Capt Watts n’était pas qualifié pour réaliser un exercice au champ de tir avec la mine Claymore, son supérieur n’a pas nommé celui-ci officier responsable (O Resp) du champ de tir ce jour-là; un membre supérieur du rang a plutôt été choisi. Un accident survenu pendant l’entrainement, lequel a causé le décès d’un soldat et des blessures graves à plusieurs autres.

Au procès, la cour martiale a reconnu le Capt Watts coupable d’avoir causé illégalement des lésions corporelles (une infraction au Code criminel punissable en vertu de l’article 130 de la LDN) et de deux accusations pour négligence dans l’exécution d’une tâche militaire : une accusation pour ne pas avoir mené un entrainement sur une mine inerte avant de procéder au tir réel, et l’autre pour avoir omis d’arrêter le tir réel après qu’il ait commencé. Le juge militaire a condamné le Capt Watts à une rétrogradation au grade de lieutenant et à recevoir un blâme.

Le Capt Watts a interjeté appel pour plusieurs motifs. La CACM a conclu que le juge militaire avait commis des erreurs importantes dans ses instructions au comité de la cour martiale, y compris le fait de ne pas avoir évoqué les implications qu’une autre personne ait été l’O Resp du champ de tir. La cour a également noté qu’il n’y avait pas de munitions inertes offertes pour entrainement et par conséquent, il était impossible d’offrir de l’instruction avec ce type de munitions. La CACM a statué « qu’il ne peut pas y avoir une infraction qui entraîne des peines considérables, pour avoir été négligent dans l’exécution d’une tâche, qui était impossible à exécuter. »

La CACM a écarté les verdicts de culpabilité et ordonné la tenue d’un nouveau procès sur l’accusation d’avoir causé illégalement des lésions corporelles et de négligence dans l’exécution d’une tâche militaire se rapportant à l’incapacité d’arrêter le tir réel. La CACM a écarté le verdict de culpabilité et enregistré un verdict de non-culpabilité à l’égard de l’autre négligence dans l’exécution d’une tâche militaire liée à l’incapacité de donner l’instruction avec des munitions inertes. Le directeur des poursuites militaires a décidé de ne pas porter d’accusations pour les lésions corporelles infligées illégalement et la négligence dans l’exécution d’une tâche militaire, qui ont été renvoyées pour un éventuel nouveau procès.

Jurisprudence – De la Cour suprême du Canada

Au cours de la période visée par le rapport, une autorisation d’interjeter appel a été accordée aux personnes accusées dans les trois causes suivantes : le Soldat Alexandra Vézina c. Sa Majesté la Reine12, une question de trafic de cocaïne; le Sous-lieutenant Moriarity, et al c. Sa Majesté la Reine, et al.13, une exploitation sexuelle, une agression sexuelle et une invitation à des attouchements à caractère sexuel; et le Sergent Damien Arsenault c. Sa Majesté la Reine14, un cas de fraude. La Cour suprême du Canada (CSC) a accueilli la demande d’autorisation d’interjeter appel quant à la constitutionnalité de l’alinéa 130(1)(a) de la LDN (ce qui rend les infractions au Code criminel commises au Canada punissables comme étant des infractions militaires). La question prise en compte par la CSC est de savoir si la CACM a commis une erreur lorsqu’elle a conclu que l’alinéa 130(1)(a) de la LDN n’a pas une portée excessive puisqu’elle inclut dans son interprétation un « lien de connexité avec le service militaire » faisant en sorte que la disposition n’a pas une portée plus vaste que nécessaire pour atteindre les objectifs de la LDN.

L’autorisation d’interjeter appel par le Directeur des poursuites militaires a été rejetée sans dépens dans l’affaire de Sa Majesté la Reine c. Paul Wehmeier.15

Initiatives législatives et réglementaires

Le projet de loi C-14: Loi modifiant le Code criminel et la Loi sur la défense nationale (troubles mentaux)

Le projet de loi C-14, qui a été déposé en novembre 2013 et qui a reçu la sanction royale le 11 avril 2014 succède à au projet de loi C-54, qui est mort au feuilleton. Tout comme son prédécesseur, le projet de loi C-14 répond aux préoccupations soulevées par les victimes d’actes criminels en ce qui a trait aux personnes accusées et déclarées non responsables en raison de troubles mentaux (NRRTM).

Le projet de loi modifie le cadre législatif applicable aux troubles mentaux dans le Code criminel et dans la LDN. Le projet de loi : (1) établit explicitement que la protection de la société est le « critère prépondérant » dans le processus décisionnel relatif aux personnes accusées et déclarées NRRTM; (2) crée un mécanisme pour qu’une personne déclaré non responsable criminellement pour cause de troubles mentaux soit aussi déclaré « accusé à haut risque », qu’il soit détenu et qu’elle ne soit pas éligible à une libération jusqu’à ce que la désignation soit révoquée; et (3) accroît la « participation des victimes » dans le processus concernant les troubles mentaux.

Les dispositions du projet de loi C-14 qui modifient la LDN seront mises en vigueur à la date ou aux dates à être fixées par le gouverneur en conseil.

Projet de loi C-15 : Loi visant à renforcer la justice militaire pour la défense du Canada, (Lois du Canada (2013), chapitre 24)

Le 1er juin 2014, certaines dispositions du projet de loi C-15 sont entrées en vigueur et apportent des modifications à la LDN visant à :

  • instituer le poste de grand prévôt des Forces canadiennes (GPFC), définir les responsabilités du grand prévôt et accroitre l’imputabilité et la transparence de la police militaire, en fixant le cadre législatif régissant les rapports entre le GPFC, la police militaire et la chaîne de commandement;
  • conférer au chef d’état-major de la défense le pouvoir, sous réserve de certaines exceptions, de déléguer ses attributions à titre d’autorité de dernière instance en matière de règlement des griefs;
  • prévoir qu’une autorité initiale ne peut connaître d’un grief déposé par un juge militaire afin d’améliorer la perception de l’indépendance judiciaire;
  • exiger que la révocation du Directeur du service d’avocats de la défense ou du GPFC soit précédée d’une recommandation d’un comité d’enquête afin d’accroître la perception d’indépendance de ces fonctions et énoncer les attributions des comités d’enquête afin d’assurer que toute enquête soit menée de façon juste et équitable;
  • établir un échéancier par lequel le GPFC doit résoudre les plaintes pour inconduite concernant la police militaire et protéger les plaignants de sanctions pour avoir déposé une plainte faite de bonne foi;
  • établir des échéances par périodes de 7 ans pour réaliser les examens indépendants futurs concernant le système de justice militaire, la procédure de règlement des plaintes concernant la police militaire, le rôle et le mandat du GPFC et le processus de règlement des griefs tout en tenant compte des situations où certaines dispositions de la LDN ont été revues et modifiées conformément à l’examen indépendant précédent.

Certaines modifications aux Ordonnances et règlements royaux applicables aux Forces canadiennes qui visent à mettre en œuvre les dispositions mentionnées précédemment du projet de loi C-15 sont entrées en vigueur le 1er juin 2014.

Le Règlement sur l’enregistrement de renseignements sur les délinquants sexuels (Forces canadiennes) a aussi été modifié le 1er juin 2014 afin d’harmoniser le Règlement avec les modifications apportées par le projet de loi C-15 relativement à un changement de terminologie concernant le GPFC.

Les articles du projet de loi C-15 qui ne sont pas encore en vigueur sont reliés à la mise en œuvre du système de justice militaire. Ceux-ci entreront en vigueur à la date ou aux dates fixées par le gouverneur en conseil.


Notes en bas de page

12 Soldat Alexandra Vézina c. Sa Majesté la Reine, 2014 CACM 4, l’autorisation d’interjeter appel à la CSC a été accordée, 35873 (24 juillet 2014), la CSC a autorisé l’appel sur la question constitutionnelle, la CSC a rejeté la demande d’interjeter appel à l’égard de la question liée au droit relatif à la provocation policière.

13 Sous-lieutenant Moriarity, et al c. Sa Majesté la Reine, et al., 2014 CACM 1, l’autorisation d’interjeter appel à la CSC a été accordée, 35755 (24 juillet 2014).

14 Sergent Damien Arsenault c. Sa Majesté la Reine, 2014 CACM 8, l’autorisation d’interjeter appel à la CSC a été accordée, 35946 (11 décembre 2014), l’autorisation d’appel a aussi été accordée à l’égard de l’alinéa 117(f) de la LDN, qui criminalise certains actes non détaillés « de caractère frauduleux. »

15 Sa Majesté la Reine c. Paul Wehmeier, 2014 CACM 5, l’autorisation d’interjeter appel à la CSC a été rejetée, 35933 (30 octobre 2014).

Détails de la page

2018-12-13