Archivé - Document de consultation sur le régime de protection des contribuables et de recapitalisation des banques
Dans le Plan d'action économique de 2013, le gouvernement a annoncé son intention de mettre en œuvre un cadre exhaustif de gestion des risques pour les banques d'importance systémique nationale du Canada, et notamment un régime de protection des contribuables et de recapitalisation des banques (ou « recapitalisation interne ») pour ces institutions. Le présent document de consultation propose une structure relativement au régime de protection des contribuables et de recapitalisation des banques, et vise à obtenir des commentaires sur les principaux éléments du régime.
Le ministère des Finances invite tous les Canadiens à lui faire part de leurs commentaires sur la proposition. Les commentaires peuvent être transmis par courriel à ConsultationsFSS-SSF@fin.gc.ca.
Il est également possible d'envoyer des observations écrites par la poste à l'adresse suivante :
Division du secteur financier
Direction de la politique du secteur financier
Ministère des Finances
140, rue O'Connor
Ottawa (Ontario)
K1A 0G5
Tous les commentaires doivent avoir été reçus d'ici le 12 septembre 2014.
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Le système financier canadien a fait preuve de résilience tout au long de la crise financière mondiale de 2008, aucune banque canadienne n'ayant fait faillite. En fait, les banques canadiennes ont été en mesure de conserver leur accès aux marchés des titres d'emprunt et des actions durant toute la crise. Aujourd'hui, les banques canadiennes sont encore plus solides et mieux capitalisées.
Cette situation a montré la valeur de l'approche canadienne en matière de réglementation et de surveillance du secteur financier. La crise a néanmoins mis en exergue le fait que certaines banques ont une « importance systémique » – elles jouent un rôle à ce point important dans le fonctionnement du système financier et dans l'économie qu'elles ne pourraient disparaître au terme d'un processus courant de faillite et de liquidation sans qu'il s'ensuive des coûts inacceptables pour l'économie. Ces institutions sont habituellement désignées comme étant « trop grandes pour faire faillite ». Compte tenu des outils inadéquats dont elles disposaient pour composer avec la faillite de grandes banques, les autorités d'autres administrations ont dû se résigner à injecter des capitaux publics pour soutenir ces institutions, dans le but d'assurer la stabilité financière et économique en général.
Outre les coûts directs qu'imposent aux contribuables ces mesures de renflouement, le soutien public implicite dont font l'objet certains des risques de perte que prennent les dirigeants de banque incite ceux-ci à prendre des risques excessifs avant qu'une faillite ne survienne, et leur permet d'emprunter à des conditions plus favorables. Cela fait en sorte d'accroître l'exposition des contribuables, car ces banques sont alors encouragées à devenir encore plus grandes (au détriment des banques de dimensions plus modestes).
La solution à ce problème consiste en l'établissement d'un régime spécial pour les banques d'importance systémique. Un tel régime devrait réduire le risque de faillite pour ces banques et fournir aux autorités les moyens de replacer une banque sur la voie de la viabilité dans le cas peu probable où celle-ci ferait faillite, et ce, sans perturber le système financier ou l'économie et sans recourir à des fonds publics.
Le gouvernement procède à la mise en place d'un tel régime au Canada. En effet, dans le Plan d'action économique de 2013, le gouvernement a annoncé un cadre exhaustif de gestion des risques pour les banques d'importance systémique nationale (BISN) canadiennes[1]. Ce cadre comprend une surveillance améliorée de la part du Bureau du surintendant des institutions financières (BSIF – l'organisme fédéral de réglementation prudentielle), l'élaboration de plans de redressement propres aux institutions ainsi que de plans de résolution des défaillances, des exigences de fonds propres plus élevées[2] et l'établissement d'un régime de protection des contribuables et de recapitalisation des banques (ou « recapitalisation interne »).
Le régime de protection des contribuables et de recapitalisation des banques visant les BISN canadiennes permettrait la conversion opportune de certains passifs en fonds propres réglementaires en cas de défaillance d'une BISN (c.-à-d. lorsqu'une institution devient non viable). Cela rendrait possible la mise en œuvre d'une stratégie de résolution qui protégerait les contribuables en faisant en sorte que les pertes soient assumées par les actionnaires et les créanciers de la banque en faillite, tout en permettant à la banque de conserver la même entité juridique et les mêmes contrats (c.-à-d. maintenir l'institution en activité) et de préserver les services essentiels qu'elle fournit à ses clients.
L'adoption du régime de protection des contribuables et de recapitalisation des banques serait conforme aux pratiques exemplaires internationales concernant les pouvoirs en matière de « recapitalisation interne ». La notion de recapitalisation interne constitue un élément important des Caractéristiques essentielles de systèmes performants de résolution pour les établissements financiers (Key Attributes of Effective Resolution Regimes for Financial Institutions (PDF 182 Kb - disponible en anglais seulement)) du Conseil de stabilité financière, qui ont été approuvées par les dirigeants du Groupe des Vingt (G-20) en novembre 2011, dans le cadre du programme général de réforme du secteur financier du G-20. Un certain nombre d'administrations soit ont déjà intégré des pouvoirs en matière de recapitalisation interne (ou des pouvoirs équivalents) à leur régime de résolution (p. ex., le Danemark, le Royaume-Uni, la Suisse et les États-Unis[3]), soit travaillent activement à intégrer de tels pouvoirs. Plus particulièrement, l'Union européenne met en œuvre un instrument intitulé Directive Redressement et Résolution des Banques qui inclut un régime de recapitalisation interne et entraînerait l'adoption de ce principe à l'échelle du secteur bancaire européen.
Les pouvoirs de recapitalisation interne (ou leur équivalent) que l'on met – ou que l'on prévoit mettre – en application dans d'autres pays reflètent la manière dont les grandes banques de ces pays sont structurées. Par exemple, on retrouve aux États-Unis et au Royaume-Uni des groupes bancaires de grande envergure qui ont à leur tête une société de portefeuille inactive dont relèvent des filiales bancaires actives. Les banques canadiennes ne sont pas structurées ainsi : la société mère est plutôt une banque en activité. Le gouvernement aimerait recevoir des commentaires sur les avantages pouvant être associés à un modèle de société de portefeuille (similaire à ceux d'autres grands pays) dans le contexte des mesures de réforme visant à renforcer le cadre canadien de résolution bancaire.
Le présent document vise à établir les principales caractéristiques d'un régime canadien de protection des contribuables et de recapitalisation des banques. L'objectif stratégique global qui oriente la conception du régime est la préservation de la stabilité financière ainsi que la protection des contribuables. Le régime de protection des contribuables et de recapitalisation des banques vient soutenir cet objectif; en effet :
Aux fins de la réalisation de chacun des objectifs stratégiques susmentionnés, le régime de protection des contribuables et de recapitalisation des banques serait intégré au cadre de résolution bancaire qui est déjà en place au Canada.
Au cœur de ce cadre se trouvent les outils et les pouvoirs de la Société d'assurance-dépôts du Canada (SADC) – l'organisme fédéral d'assurance-dépôts et l'autorité de résolution pour les institutions qui en sont membres (notamment les BISN). Par exemple, la SADC peut établir une institution-relais (lui appartenant) chargée d'assumer et de préserver les fonctions essentielles d'une institution membre non viable. Selon cette approche, la SADC serait nommée à titre de séquestre de la banque non viable et déterminerait les actifs et passifs qui devraient être transférés à l'institution-relais (y compris, à tout le moins, les dépôts assurés). Les actifs que n'acquiert pas l'institution-relais seraient conservés par la banque et mis en liquidation. L'institution-relais pourrait être exploitée durant une période maximale de cinq ans[4] et cesserait d'exister après la vente des actifs ou des actions ou la cessation ordonnée de ses activités.
Les exigences relatives aux fonds propres d'urgence en cas de non-viabilité (FPUNV) du BSIF constituent un autre élément important du cadre canadien de résolution. Les FPUNV sont des instruments de fonds propres non ordinaires qui comprennent des dispositions contractuelles prévoyant la conversion entière et permanente des instruments en actions ordinaires sous l'effet d'un événement déclencheur[5]. Depuis le 1er janvier 2013, tous les fonds propres non ordinaires nouvellement émis par les banques au Canada doivent satisfaire aux exigences relatives aux FPUNV pour être considérés comme des fonds propres réglementaires.
L'une des caractéristiques importantes du régime de protection des contribuables et de recapitalisation des banques est qu'il peut servir d'assise (en conjonction avec les FPUNV et d'autres outils de résolution) pour une stratégie de redressement à l'égard d'une « banque prorogée », où l'on rétablit la viabilité de la banque tout en préservant la même entité juridique, ses fonctions essentielles et ses contrats connexes.
La capacité des autorités de recapitaliser une banque non viable au moyen de la conversion de certains passifs en fonds propres réglementaires – l'élément central du régime de protection des contribuables et de recapitalisation des banques – fonctionnerait de pair avec les autres éléments du cadre canadien de résolution bancaire. Plus particulièrement, la recapitalisation d'une banque devrait s'accompagner de mesures additionnelles (p. ex., la propriété ou le contrôle public provisoire de la banque non viable) pour permettre l'adoption d'une solide stratégie globale de résolution. Par conséquent, le gouvernement examine les outils et les pouvoirs existants de la SADC pour déterminer la meilleure façon d'intégrer le pouvoir de conversion proposé à la trousse d'outils de la SADC (voir la section Examen du cadre canadien de résolution bancaire ci-dessous).
Le gouvernement propose que la pierre angulaire du régime de protection des contribuables et de recapitalisation des banques soit un pouvoir conféré par la loi permettant la conversion permanente – en totalité ou en partie – des passifs admissibles en actions ordinaires d'une banque (voir Champ d'application ci-dessous) désignée comme étant une BISN par le BSIF[6], suivant certaines conditions préalables (voir Enchaînement des événements et conditions préalables ci-dessous). Le pouvoir permettrait également (sans toutefois l'exiger) l'annulation permanente, en totalité ou en partie, des actions en circulation de la banque[7].
Le gouvernement propose que les autorités puissent exercer le pouvoir de conversion uniquement à la suite d'événements précis.
Tout d'abord, il faut que le surintendant des institutions financières ait déterminé que la banque n'est plus viable ou qu'elle est sur le point de le devenir. Ensuite, il faut qu'il y ait conversion complète des instruments de FPUNV de la banque.[8]
Il convient de souligner que ces conditions préalables sont essentielles, mais qu'elles ne suffisent pas à elles seules à rendre obligatoire l'exercice du pouvoir de conversion. Les autorités pourraient, à leur discrétion, ne pas exercer ce pouvoir même si les conditions préalables sont remplies. Par exemple, les autorités pourraient décider de ne pas exercer le pouvoir dans le cas où elles estiment que la conversion des instruments de FPUNV suffit à recapitaliser adéquatement la banque.
En outre, comme il est mentionné plus haut, le pouvoir de conversion serait exercé dans le contexte d'une stratégie générale de résolution qui convient à la situation particulière de la banque.
Afin d'assurer une transition sans heurts pour les participants au marché touchés ainsi que pour maximiser la clarté sur le plan juridique et la mise en application du régime de protection des contribuables et de recapitalisation des banques, le gouvernement propose que le pouvoir de conversion s'applique uniquement aux éléments de passif d'une BISN qui ont été émis, créés ou renégociés après une date de mise en œuvre déterminée par lui. Le régime ne s'appliquerait pas de manière rétroactive aux éléments de passif en circulation à la date de mise en œuvre.
Le gouvernement propose que les « créances de premier rang à long terme »– c'est-à-dire les créances de premier rang non garanties[9] qui sont négociables et transférables, et dont le terme à courir est au départ de plus de 400 jours – fassent l'objet d'une conversion en application du pouvoir de conversion conféré par la loi[10]. Les autorités compétentes auraient également la possibilité d'annuler en tout ou en partie les actions ordinaires existantes de la banque dans le contexte de l'exercice de ce pouvoir de conversion[11]. Ce champ d'application limiterait les éléments de nature pratique et juridique susceptibles de nuire à l'exécution d'une conversion en temps opportun. Il ferait également en sorte de réduire au minimum les répercussions négatives éventuelles sur l'accès à des liquidités pour les banques en situation de crise, en plus de soutenir la stabilité financière de manière plus générale.
Le gouvernement propose que les autorités disposent de la marge de manœuvre requise pour déterminer, au moment de la résolution, la portion des passifs admissibles qui seront convertis en actions ordinaires conformément au pouvoir de conversion. Tous les détenteurs de créances de premier rang à long terme seraient convertis au prorata – c'est-à-dire que chacun des créanciers concernés recevrait la même portion (à concurrence de 100 %) de la valeur nominale de ses réclamations converties en actions ordinaires.
Lors de la détermination du montant total des passifs admissibles devant être convertis, les autorités se fonderaient sur la nécessité de faire en sorte que la BISN soit bien capitalisée à l'issue de la conversion, et qu'elle dispose d'un coussin de fonds propres supérieur aux exigences cibles en matière de fonds propres établies par le BSIF.
La conversion des passifs admissibles respecterait la hiérarchie des réclamations en liquidation de manière relative, et non absolue. Par exemple, pour chaque dollar de leur réclamation qui est converti, les détenteurs de créances de premier rang à long terme recevraient des droits économiques (sous la forme d'actions ordinaires) qui sont plus favorables que ceux fournis aux détenteurs d'anciens titres de créance subordonnés des FPUNV, mais les détenteurs de titres de créance subordonnés des FPUNV ne seraient pas sujets à des pertes de 100 % dans le contexte de l'exercice du pouvoir de conversion.
En outre, à moins que les investisseurs conviennent par contrat de modalités particulières au sujet de la conversion, la conversion d'éléments de passif admissibles respecterait le principe selon lequel la conversion ne doit placer aucun créancier dans une situation pire que celle dans laquelle il se serait trouvé si l'on avait procédé à une liquidation conventionnelle (voir la section Droit à indemnisation ci-dessous).
Comme l'indique la ligne directrice Normes de fonds propres (2014) du BSIF, tous les instruments de FPUNV doivent s'accompagner de modalités contractuelles de conversion précisant une formule pour déterminer le nombre d'actions ordinaires que recevrait l'investisseur de FPUNV après conversion de l'instrument. Ces formules de conversion doivent être liées à des facteurs comme la valeur marchande des actions ordinaires de la banque au moment de l'événement déclencheur des FPUNV ou juste avant ce moment (c.-à-d., le point de non-viabilité). Bien que les instruments de FPUNV doivent respecter certains principes réglementaires, les caractéristiques clés comme les formules de conversion sont principalement axées sur le marché, ce qui permet aux banques émettrices et aux investisseurs de déterminer à l'avance comment la valeur de la banque devrait être distribuée dans le cas où l'institution deviendrait non viable.
Tablant sur cette approche, et afin de fournir une certitude accrue ainsi qu'une transparence aux investisseurs et aux créanciers pouvant être visés par le pouvoir de conversion conféré par la loi, le gouvernement propose de corréler les modalités de conversion qu'il appliquerait aux passifs admissibles à celles des instruments de FPUNV en circulation. Plus précisément, le nombre d'actions ordinaires qui seraient accordées pour chaque dollar de la valeur nominale d'une réclamation convertie serait lié aux formules de conversion de quelconque instrument de FPUNV en circulation.
Cette approche serait communiquée au préalable à tous les participants au marché et s'appliquerait comme suit : les détenteurs de créances de premier rang à long terme recevraient, pour chaque dollar de la valeur nominale convertie, un nombre d'actions ordinaires déterminé selon un multiplicateur X fixe appliqué à la formule de conversion la plus favorable[12] parmi les FPUNV sous forme de titres de créance subordonnés de la banque (ou, s'il n'y en a pas, les FPUNV sous forme d'actions privilégiées de la banque[13]).[14]
Comme c'est le cas pour l'approche générale, le multiplicateur de conversion X fixe serait établi au préalable par les autorités au moyen d'une réglementation ou d'une orientation (et il serait donc connu du grand public).[15]
Le gouvernement propose qu'on accorde aux actionnaires et aux créanciers sujets à une conversion le droit de ne pas être placés dans une situation pire que celle dans laquelle ils se seraient trouvés si la banque avait fait l'objet d'une résolution par le biais d'une liquidation. Le gouvernement propose également que le processus employé pour déterminer une indemnisation et, s'il y a lieu, verser celle-ci aux actionnaires et aux créanciers qui ont fait l'objet d'une conversion s'appuie sur les processus existants prévus aux articles 39.23 à 39.37 de la Loi sur la Société d'assurance-dépôts du Canada.
Par souci de transparence pour les investisseurs et les créanciers pouvant être sujets à une conversion, le gouvernement propose que toutes les BISN soient tenues :
- d'inclure des informations particulières relatives au pouvoir de conversion dans toute entente régissant un passif admissible ainsi que dans tout avis d'offre connexe;
- d'inclure dans les dispositions contractuelles régissant les passifs admissibles une clause de soumission expresse des investisseurs au régime canadien de protection des contribuables et de recapitalisation des banques, nonobstant toute indication contraire pouvant figurer dans une disposition d'une loi étrangère.
Afin que la conversion des FPUNV et des créances de premier rang à long terme s'avère efficace en tant qu'outil de base pour la résolution d'une défaillance d'une BISN et le rétablissement de sa viabilité, les BISN doivent disposer d'une capacité d'absorption des pertes suffisante pour être en mesure de résister à des pertes importantes, mais plausibles, ainsi que d'être bien capitalisée et d'avoir un coussin de fonds propres supérieur aux exigences cibles en matière de fonds propres à l'issue d'une conversion. Le gouvernement propose donc que les BISN soient assujetties à une exigence en matière de capacité supérieure d'absorption (CSA), qui devrait être respectée, avec une certaine souplesse, en faisant la somme des fonds propres réglementaires (c.-à-d. les actions ordinaires et les instruments de FPUNV) et des créances de premier rang à long terme (voir la section Champ d'application ci-dessus) directement émises par la banque mère.
Afin d'éviter que d'autres institutions soient touchées dans le cadre d'une conversion, les investissements dans les créances de premier rang à long terme d'autres banques ou dans les créances de premier rang à long terme d'une banque seraient déduits du montant de la dette en circulation de la banque aux fins du respect de l'exigence en matière de CSA, selon une approche par déduction correspondante[16].
Le gouvernement propose qu'une exigence minimale uniforme et publique s'applique à toutes les BISN en matière de CSA.
L'exigence en matière de CSA serait administrée par le BSIF. Le gouvernement pourrait, à sa discrétion, exiger des niveaux cibles d'absorption des pertes supérieurs à l'exigence minimale en matière de CSA pour certaines banques, s'il le juge nécessaire pour des raisons de stabilité financière.
Le gouvernement propose que l'exigence en matière de CSA soit assortie d'une valeur précise (au lieu d'une fourchette de valeurs). Il propose également que cette valeur se situe entre 17 % et 23 % des actifs pondérés en fonction des risques (APR). Par exemple, une exigence en matière de CSA se trouvant au bas de cette fourchette (17 % des APR) permettrait de s'assurer que les banques peuvent absorber des pertes équivalant à 5,5 % des APR et se retrouver, à l'issue d'une conversion, avec des actions ordinaires correspondant à 11,5 % des APR (ratio minimal du total des fonds propres de 10,5 % en vertu de Bâle III, auquel s'ajoute un coussin de 1 %). Le fait de fixer l'exigence en matière de CSA à un échelon plus élevé de cette fourchette fournirait une protection efficace contre des pertes éventuelles plus importantes ou ferait en sorte que la banque aurait un niveau de capitalisation supérieur à l'issue d'une conversion.
Il est entendu que l'exigence en matière de CSA ne remplacerait pas les exigences cibles et minimales de fonds propres réglementaires établies par le BSIF, et les fonds propres utilisés pour satisfaire à ces exigences seraient également admissibles aux fins du respect de l'exigence en matière de CSA.
Comme il est mentionné dans la section Champ d'application, le gouvernement propose que le régime de protection des contribuables et de recapitalisation des banques s'applique uniquement aux éléments de passif qui sont émis, créés ou renégociés après une date de mise en œuvre déterminée par lui. Il ne s'appliquerait pas de manière rétroactive aux éléments de passif en circulation à la date de mise en œuvre (ceux-ci feraient l'objet d'un droit acquis), afin d'assurer une transition sans heurts pour les participants au marché touchés ainsi que pour maximiser la clarté sur le plan juridique et la mise en application du régime.
Le gouvernement propose également de prévoir une période de transition entre la date de mise en œuvre initiale du régime de protection des contribuables et de recapitalisation des banques et une date ultérieure à laquelle les BISN seraient tenues de satisfaire à l'exigence en matière de CSA et à laquelle le pouvoir de conversion entrerait en vigueur.
Le gouvernement est déterminé à faire en sorte que le cadre d'assurance-dépôts du Canada continue d'assurer la protection adéquate des économies des Canadiens. À cet égard, les dépôts seront exclus du régime de protection des contribuables et de recapitalisation des banques. Tel qu'il est mentionné dans le Plan d'action économique de 2014, le gouvernement a l'intention de lancer un examen exhaustif du cadre d'assurance-dépôts du Canada de manière à évaluer le niveau, la nature et la tarification appropriés de la protection offerte aux dépôts et aux déposants.
Le gouvernement examine les outils et les pouvoirs existants de la SADC pour déterminer la meilleure façon d'intégrer le pouvoir de conversion à la trousse d'outils de la SADC. L'examen vise à s'assurer que la conversion peut faire partie d'une solide stratégie globale de résolution (ou de plusieurs stratégies). Une telle stratégie de résolution doit correspondre aux objectifs du régime de protection des contribuables et de recapitalisation des banques qui sont énoncés au début du présent document, ce qui comprend l'objectif global consistant à préserver la stabilité financière tout en protégeant les contribuables, ainsi que les objectifs additionnels suivants :
- permettre à une banque d'attirer du nouveau financement du secteur privé après une conversion;
- limiter la propagation des répercussions à d'autres institutions financières;
- régler les problèmes sous-jacents qui ont contribué à la défaillance de la banque;
- maximiser la préservation des actifs de la banque et de la valeur de la franchise;
- faire en sorte que le secteur privé reprenne le contrôle de la banque le plus rapidement possible, d'une manière qui soit conforme au principe de préservation de la stabilité financière.
En ce qui concerne l'intégration du pouvoir de conversion à la trousse d'outils du Canada en matière de résolution, on tiendra également compte de l'évolution de la situation dans ce domaine au sein d'autres administrations. Partageant l'objectif consistant à s'assurer que les banques d'importance systémique peuvent faire l'objet d'une résolution sûre en cas de défaillance, différentes administrations ont adopté ou envisagent des approches qui tiennent compte de leur situation propre et des structures de leurs institutions financières.
Aux États-Unis, le titre II de la Dodd-Frank Wall Street Reform and Consumer Protection Act accorde à la Federal Deposit Insurance Corporation (FDIC) des pouvoirs renforcés pour assurer la résolution des institutions financières d'importance systémique. La FDIC a établi une stratégie de résolution[17] qu'elle envisage d'appliquer aux banques américaines les plus importantes et les plus complexes en cas de défaillance.
La stratégie repose sur une structure de société de portefeuille pour les grandes banques américaines. Tout d'abord, la FDIC serait nommée à titre de séquestre de la société de portefeuille mère de palier supérieur du groupe financier après la défaillance. Ensuite, la FDIC transférerait les filiales saines en activité à une (ou plusieurs) société de portefeuille financière « relais » qui, à l'origine, appartiendrait à la FDIC et serait sous son contrôle. Les pertes seraient attribuées aux actionnaires et aux créanciers non garantis de la société de portefeuille en défaillance au moyen d'une mise sous séquestre. Enfin, la FDIC pourrait convertir certaines des réclamations des créanciers de la société de portefeuille en défaillance en actions dans la nouvelle société financière-relais, dans le contexte d'un retour dans le secteur privé. Par conséquent, le résultat d'une telle stratégie pour les actionnaires et les créanciers pourrait être similaire à ceux d'une stratégie de résolution fondée sur une recapitalisation interne directe de la société de portefeuille en défaillance.
Au Royaume-Uni, les autorités s'emploient également à élaborer une stratégie de résolution pour les banques britanniques d'importance systémique qui s'appuie sur l'existence d'une structure de société de portefeuille bancaire[18]. Dans le cadre d'une résolution, les autorités britanniques appliqueraient d'abord une recapitalisation interne aux titres de créance de la société de portefeuille afin de recapitaliser le groupe. Cependant, contrairement à l'approche américaine, la stratégie de résolution du Royaume-Uni ne prévoit pas nécessairement la création d'une société de portefeuille « relais », et permet plutôt à la société de portefeuille existante d'être recapitalisée directement au moyen d'une recapitalisation interne.
Les stratégies de résolution visant les sociétés de portefeuille de palier supérieur englobent certains éléments clés. Par exemple, il importe que la société de portefeuille soit une entité « inactive » qui mène des activités limitées en dehors de l'émission d'actions et de titres de créance et de la détention de placements dans des filiales (p. ex., aucune participation directe dans les infrastructures des marchés financiers). Il doit aussi y avoir, au niveau de la société de portefeuille mère, suffisamment d'actions et de titres de créance pouvant absorber les pertes en cas de résolution; une situation que les autorités américaines ont reconnue, une réglementation pouvant être adoptée pour assurer une capacité d'absorption suffisante à cet égard[19].
À l'heure actuelle, aucune BISN canadienne n'a une structure de société de portefeuille. En lieu et place, chacune d'entre elles compte une banque en activité à l'échelon le plus élevé de sa structure organisationnelle. Le gouvernement examinera les avantages que pourrait présenter l'adoption d'une structure de société de portefeuille pour les banques canadiennes (p. ex., par le biais d'une banque inactive ou d'une société de portefeuille réglementée) comme moyen de renforcer la capacité des autorités de procéder à une résolution réussie de ces banques en cas de défaillance, en tenant compte des répercussions sur les activités des banques sur le plan de la continuité.
Questions aux fins de consultation
- La portée proposée des titres et des éléments de passif qui seraient sujets au pouvoir de conversion est-elle appropriée? Pourquoi/pourquoi pas?
- Est-ce que le terme à courir minimum proposé – 400 jours – est approprié aux fins de faire la différence entre passifs à court terme et passifs à long terme?
- Le régime proposé permet-il d'atteindre un juste équilibre entre la latitude accordée aux autorités et les principes de clarté et de transparence pour les participants au marché?
- La proposition concernant un multiplicateur de conversion fixe est-elle appropriée? Pourquoi/pourquoi pas? Quels éléments devrait-on prendre en considération aux fins de l'établissement de la valeur d'un multiplicateur de conversion fixe, conformément à ce qui est proposé?
- La forme proposée concernant l'exigence en matière de capacité supérieure d'absorption est-elle appropriée? Quels éléments devrait-on prendre en considération aux fins de l'établissement de cette exigence?
- Les autorités devraient-elles avoir la latitude requise pour accorder une indemnisation sous forme d'actions privilégiées de la banque (au lieu d'actions ordinaires) aux créanciers dont les créances ont été réduites? Pourquoi/pourquoi pas?
- Quelle durée aurait une période de transition adéquate pour la mise en œuvre du régime de protection des contribuables et de recapitalisation des banques?
- Les objectifs proposés de l'examen des pouvoirs de résolution existants et de l'intégration du pouvoir de conversion au cadre canadien de résolution bancaire sont-ils appropriés? Quels éléments additionnels devrait-on prendre en considération afin de maximiser l'efficacité du pouvoir de conversion dans le contexte du cadre global de résolution?
- Est-ce qu'un modèle de société de portefeuille comporterait des avantages dans l'application de pouvoirs visant les banques-relais (de manière semblable à l'approche américaine) ou dans l'application de pouvoirs de conversion (de manière semblable à l'approche britannique)?
[1] Le 26 mars 2013, le Bureau du surintendant des institutions financières (BSIF) a désigné en tant que BISN canadiennes la Banque de Montréal, la Banque de Nouvelle-Écosse, la Banque Canadienne Impériale de Commerce, la Banque Nationale du Canada, la Banque Royale du Canada et la Banque Toronto-Dominion. De plus amples détails sont fournis sur le site Web du BSIF.
[2] Les BISN canadiennes seront assujetties à un supplément de 1 % des fonds propres pondérés en fonction du risque d'ici le 1er janvier 2016. De plus amples détails sont fournis dans le préavis suivant du BSIF.
[3] Le titre II de la Dodd-Frank Wall Street Reform and Consumer Protection Actpermet aux autorités américaines d'obtenir des résultats équivalant à ceux de la recapitalisation interne grâce à l'application de pouvoirs de résolution visant les « institutions-relais ».
[4] L'institution-relais peut être exploitée durant deux ans, avec la possibilité de trois prolongations subséquentes d'un an.
[5] Les événements suivants peuvent déclencher la conversion automatique de FPUNV :
- le surintendant des institutions financières (le « surintendant ») annonce publiquement que l'institution a été avisée par écrit qu'il ne l'estime plus viable, ou sur le point de le devenir, et qu'une fois tous les instruments d'urgence convertis et après avoir pris en compte tous les autres facteurs et toutes les autres circonstances considérés comme pertinents ou appropriés, il est raisonnablement probable que la viabilité de l'institution sera rétablie ou maintenue; ou
- l'administration fédérale ou une administration provinciale canadienne annonce publiquement que l'institution a accepté ou convenu d'accepter une injection de capitaux, ou une aide équivalente, de la part du gouvernement du Canada ou de l'administration d'une province ou d'une subdivision politique ou d'un organisme ou un agent de celle-ci, sans laquelle le surintendant aurait déterminé l'institution non viable.
De plus amples renseignements se trouvent dans la ligne directrice Normes de fonds propres (2014) du BSIF.
[6] Se reporter à la note de bas de page 1.
[7] Il est entendu que ce pouvoir viserait uniquement les actions ordinaires de la banque qui étaient en circulation avant que celle-ci atteigne le point de non-viabilité.
[8] Comme autre solution, l'événement déclenchant automatiquement la conversion des instruments de FPUNV qui consiste en l'acceptation par la banque d'une injection de capitaux (se reporter à la note de bas de page 5) répondrait également aux conditions préalables aux fins de l'exercice du pouvoir de conversion prévu par la loi.
[9] Dans le cas de créances de premier rang non garanties qui font l'objet d'une conversion partielle aux termes de modalités de conversion établies par contrat, la fraction résiduelle (non convertie) de la créance serait également assujettie au pouvoir de conversion conféré par la loi.
[10] Ainsi que cela est indiqué à la section Enchaînement des événements et conditions préalables, les FPUNV seraient assujettis à la conversion en conformité avec les modalités fixées par contrat. Les actions privilégiées et les titres de créance subordonnés qui ne sont pas assimilables à des FPUNV et qui sont émis ou renégociés après la date d'entrée en vigueurdu régime de protection des contribuables et de recapitalisation des banques seraient assujettis à la conversion en application du pouvoir de conversion conféré par la loi. Ces titres seraient entièrement convertis préalablement à la conversion de toute fraction des créances de premier rang à long terme non garanties.
[11] Se reporter à la note de bas de page 7.
[12] Dans ce contexte, les mots « la plus favorable » doivent être envisagés dans la perspective de l'investisseur ou du créancier(c'est-à-dire le détenteur du titre).
[13] Lorsque la banque n'a pas d'instruments de FPUNV en circulation avant que se produise l'événement déclencheur, la formule de conversion appliquée aux instruments de premier rang serait fondée sur la formule de conversion la plus favorable parmi tous les instruments de FPUNV en circulation émis par d'autres BISN.
[14] Il est à noter que la conversion d'actions privilégiées ou de titres subordonnés admissibles qui ne sont pas assimilables à des FPUNV (se reporter à la note de bas de page 11) serait également liée aux modalités de conversion des FPUNV en circulation. Plus précisément, l'approche suivante servirait à la conversion de ces titres :
- Les actions privilégiées non assimilables à des FPUNV seraient converties selon la formule la moins favorable à l'égard des actions privilégiées de la banque qui constituent des FPUNV.
- Les titres de créance subordonnés non assimilables à des FPUNV seraient convertis selon la formule la moins favorable à l'égard des titres subordonnés de la banque qui constituent des FPUNV.
[15] Par exemple, un éventuel multiplicateur de conversion pourrait se situer dans une fourchette allant de 1.1 à 2.0.
[16] Lorsque les titres de créance admissibles d'une BISN ne suffisent pas à justifier la déduction, le manque à gagner serait déduit de la catégorie suivante de fonds propres (c.-à-d. que si les titres de créance admissibles en circulation d'une banque sont insuffisants en vue de la déduction, le manque à gagner serait déduit des fonds propres de catégorie 2 aux fins du respect de l'exigence en matière de CSA).
[17] Des renseignements additionnels sont accessibles sur le site Web de la FDIC :
- FDIC Board Releases Resolution Strategy for Public Comment (Disponible en anglais seulement)
- Resolving Globally Active, Systemically Important, Financial Institutions (Version PDF 316 Kb - disponible en anglais seulement)
[18] Speech - Solving too big to fail: where do things stand on resolution (Version PDF 72 Kb - disponible en anglais seulement)
[19] Une telle exigence aurait la même raison d'être que l'exigence en matière de CSA visant les BISN canadiennes qui est proposée dans le présent document.
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