Synthèse des commentaires recueillis : Consultations sur la mise en œuvre de la Loi sur les langues autochtones — 24 novembre 2020 — Yukon
Contexte
Le gouvernement du Canada a entrepris une série de consultations partout au Canada sur la mise en œuvre de la Loi sur les langues autochtones, et plus particulièrement sur le commissaire aux langues autochtones, les directeurs et le modèle de financement des langues autochtones.
Ces séances de consultation aideront le ministre du Patrimoine canadien à formuler des recommandations à l’intention du gouverneur en conseil pour la nomination du commissaire aux langues autochtones et d’au plus trois directeurs. Les commentaires obtenus dans le cadre de ces séances contribueront à l’élaboration du modèle de financement des langues autochtones.
Pour en savoir plus sur la Loi sur les langues autochtones et les consultations en cours, consultez notre Guide de discussion : Consultations et mobilisation sur la mise en œuvre de la Loi sur les langues autochtones.
Un résumé de la plus récente séance de consultation est présenté ci-dessous. Il ne s’agit pas d’un compte rendu exhaustif des discussions. On y expose plutôt les principaux thèmes ressortis de la séance. Pour faire connaître votre opinion ou d’autres points de vue, rendez-vous sur notre portail de consultation en ligne et lisez le Guide de discussion.
Commentaires généraux et suggestions des participants
Bureau du commissaire aux langues autochtones
Voici les considérations et les thèmes soulevés lors des discussions concernant le Bureau du commissaire aux langues autochtones :
Rôles et responsabilités :
De nombreux participants se sont dits préoccupés par le risque que le Bureau du commissaire aux langues autochtones devienne une autre institution qui ne traite pas des enjeux pressants en matière de revitalisation des langues autochtones, y compris ce qui touche :
- la perte des personnes parlant couramment une langue autochtone dans les communautés;
- la situation critique dans laquelle se trouvent de nombreuses langues autochtones;
- le besoin immédiat de prendre des mesures pour revitaliser les langues autochtones et soutenir celles-ci.
Les participants s’inquiétaient également du fait que le temps, les efforts et les ressources servant à la création du Bureau pourraient détourner l’attention de ces enjeux.
Certains participants ont par ailleurs mentionné que bon nombre des tâches proposées pour le Bureau font double emploi avec le travail déjà accompli au Yukon à l’échelle locale (p. ex., la recherche et la planification). Les participants ont néanmoins suggéré que, advenant que le Bureau mette en œuvre des activités de recherche, il devrait tenir compte des travaux menés à l’échelle locale et régionale. Aussi, ils ont indiqué que ces activités devraient être dirigées par les communautés, respecter les normes éthiques et se faire selon les principes de propriété, de contrôle, d’accès et de possession établis par les Premières Nations.
Plans et priorités, et premiers succès – Bureau du commissaire aux langues autochtones :
Certains participants ont suggéré que le Bureau pourrait lutter pour la reconnaissance accrue des langues autochtones, notamment à titre de langues premières du Canada.
Choix du commissaire et des directeurs :
Les participants ont indiqué que les personnes nommées au Bureau du commissaire aux langues autochtones devraient présenter ces principales caractéristiques :
- être d’origine autochtone et parler couramment une langue autochtone;
- être capables de bien défendre et représenter les intérêts des communautés, et être choisies par celles-ci;
- être ancrées dans une vision du monde autochtone et posséder une compréhension profonde du besoin de guérison dans les communautés.
Les participants ont également mentionné que les nominations au Bureau ne devraient pas être de nature politique.
Modèle de financement des langues autochtones
Voici les considérations et les thèmes soulevés lors des discussions sur le modèle proposé de financement des langues autochtones :
Vitalité de la langue et capacité de gouvernance :
Les participants ont soulevé un certain nombre d’éléments dont il faudrait tenir compte au moment d’élaborer un modèle de financement des langues autochtones :
- le financement actuel n’est pas suffisant pour répondre aux besoins;
- le financement doit être durable;
- une approche fondée sur la population ne marchera pas pour les petites communautés – le financement devrait plutôt être fondé sur les besoins, et chaque langue devrait faire l’objet d’un examen individuel;
- La priorité devrait être accordée aux langues en danger critique d'extinction;
- le financement initial des efforts de revitalisation des langues autochtones devrait être substantiel, notamment pour les communautés qui amorcent à peine le travail connexe.
De nombreux participants ont effectué une comparaison entre le niveau de financement offert pour la revitalisation des langues autochtones et ce qui est offert pour les services en français, notamment l’enseignement en français. Plusieurs participants ont souligné les importants investissements récents versés dans la construction d’écoles francophones au Yukon et souhaiteraient voir des investissements comparables pour les langues autochtones.
Éléments à financer :
D’après les participants, le modèle de financement devrait être suffisamment souple pour appuyer diverses activités, y compris :
- des mesures pour réintroduire les langues autochtones dans les foyers et d’autres axées sur la collaboration avec les Aînés, les locuteurs parlant couramment une langue autochtone et les locuteurs silencieux afin qu’ils contribuent à améliorer le bilinguisme chez les autres;
- l’élaboration et la mise en œuvre de plans linguistiques stratégiques;
- la radiodiffusion – la radio communautaire en particulier, la documentation sur les langues, les recherches sur les pratiques exemplaires et les centres de langue;
- les activités axées sur la petite enfance (programme d’aide préscolaire aux Autochtones et programmes mères-enfants) et l’innovation technologiques ainsi qu’un meilleur taux de rémunération pour les personnes travaillant à la revitalisation des langues autochtones.
De nombreux participants ont parlé de la nécessité d’avoir en place des systèmes scolaires et des écoles des Premières Nations offrant des programmes en langue autochtone, tandis que d’autres ont indiqué le besoin d’établir une meilleure infrastructure de connectivité. Certains participants ont souligné qu’un financement distinct devrait être offert pour les besoins d’infrastructure dans le domaine des langues autochtones.
Les participants ont déclaré qu’il n’était pas nécessaire de tenir des consultations sur un modèle de financement national pour les Premières Nations autonomes; elles sont déjà prêtes à négocier dans le contexte des ententes d’autonomie gouvernementale et de la relation directe qu’elles entretiennent avec le gouvernement fédéral.
Processus de financement :
Du point de vue des Premières Nations autonomes, les mécanismes de financement pour la revitalisation des langues autochtones existent déjà sous la forme d’ententes de transfert financier. De plus, de nombreuses Premières Nations autonomes ont déjà élaboré des plans en matière de langues autochtones; ce qui fait défaut, c’est le financement pour leur mise en œuvre.
Les Premières Nations qui ne sont pas autonomes ont formulé des commentaires sur la nécessité d’établir un processus simplifié (non fondé sur des propositions) et un financement pluriannuel souple.
Autres commentaires
Pendant cette séance, on a maintes fois soulevé que le temps presse sur la question des langues autochtones, car la situation de bon nombre d’entre elles est précaire et leur vitalité se détériore. Les participants ont fait remarquer qu’on trouve moins de cinq locuteurs parlant couramment une langue autochtone dans la plupart des communautés du Yukon, et certains participants ont indiqué qu’ils travaillaient au rétablissement des langues plutôt qu’à leur revitalisation.
Les participants ont mentionné que la Couronne est responsable de l’état des langues autochtones par la suite des processus de génocide culturel qu’elle a menés (comme la création de pensionnats indiens), et que les efforts maintenant déployés par le gouvernement pour revitaliser les langues autochtones devraient être aussi importants que ceux faits pour supprimer ces langues. Certains participants ont convenu que l’adoption de la Loi sur les langues autochtones était un pas dans la bonne direction, mais qu’il restait encore beaucoup de travail à faire. Les participants ont reconnu que les Premières Nations doivent jouer un rôle de premier plan dans ce travail; certaines Premières Nations autonomes ont déjà mis en place une législation en matière de langues.
Les participants ont proposé que le gouvernement fédéral s’assoie à la table de négociation sur la politique financière concertée afin de discuter de ces questions et d’entreprendre des négociations bilatérales avec les Nations autonomes. Les participants ont également demandé la divulgation complète de l’ensemble du financement disponible à l’appui des langues autochtones dans tout le gouvernement fédéral.
Les participants ont aussi tenu des discussions sur l’approche fondée sur les distinctions et ont suggéré l’adoption d’une approche de gouvernement à gouvernement pour favoriser l’inclusion des Nations signataires de traités modernes.
Enfin, certains participants ont invité le Canada à en apprendre davantage sur les visions du monde autochtones et ont évoqué le processus de guérison qui sous-tend généralement l’apprentissage des langues autochtones.