Chris Seidl devant le Comité permanent de l’accès à l’information, de la protection des renseignements personnels et de l’éthique

Discours

Ottawa (Ontario)
Le 6 février 2018

Chris Seidl, Directeur exécutif des Télécommunications
Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes

Priorité à l’allocution

Monsieur le Président et honorables membres du comité,

Bonjour. Je m’appelle Chris Seidl et je suis directeur exécutif des Télécommunications au Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC). À mes côtés aujourd’hui se trouve mon collègue Stephen Millington, avocat général principal et directeur exécutif du Secteur juridique du CRTC. Je vous remercie de l’occasion que vous nous donnez de venir vous parler de la neutralité du Net.

Comme vous le savez peut-être, le CRTC est un tribunal administratif indépendant qui est chargé de réglementer les activités des fournisseurs de services de télécommunications conformément à la Loi sur les télécommunications. À ce titre, toute décision que prend le CRTC doit se faire dans le but d’atteindre les objectifs stratégiques qu’a fixés la Loi.

La neutralité du Net réfère au concept selon lequel tout trafic sur Internet devrait recevoir un traitement égal de la part des fournisseurs de services Internet, avec peu de manipulation, d’interférence, de hiérarchisation, de discrimination ou de préférence, voire aucune. Ce concept est inscrit dans la Loi sur les télécommunications, par le biais de l’article 27(2), lequel interdit toute discrimination ou préférence indue, ainsi que l’article 36, lequel interdit aux entreprises de télécommunications d’influencer le contenu qu’elles transmettent, à moins qu’elles aient reçu l’autorisation expresse du CRTC pour ce faire.

Ces articles de la Loi procurent au CRTC les outils et la souplesse nécessaires afin d’établir et de faire appliquer un cadre sur la neutralité du Net qui est tout à fait approprié et raisonnable pour le Canada. De manière intéressante, il ne s’agit pas de nouvelles dispositions. Elles remontent à la Loi canadienne sur le chemin de fer de 1906 alors que le concept de transport commun assurait que les entreprises de chemin de fer transporteraient toutes les marchandises sans aucune discrimination.

Il s’avère que les mêmes principes s’appliquent, que nous parlions du fret transporté sur des wagons de chemins de fer ou des données transmises sur les réseaux de télécommunications. Il est important de garder en tête que la neutralité du Net vise le transport et non le contenu.

Nous mentionnons cela car les dispositions législatives, qui sont libellées dans des termes généraux, ont résisté à l’épreuve du temps et ont donné au CRTC la souplesse nécessaire pour s’attaquer à des préoccupations de nature plus contemporaine. Elles ont pu s’adapter à la technologie et aux besoins d’aujourd’hui, y compris la neutralité du Net.

La neutralité du Net au Canada

Le CRTC a été l’un des premiers organismes de réglementation dans le monde à mettre en œuvre une approche visant à faire respecter la neutralité du Net. Nous avons pris de nombreuses décisions qui témoignent de notre approche. Permettez-moi de vous faire part de trois décisions d’importance.

La première, en 2009, a créé le cadre pour évaluer les pratiques de gestion du trafic Internet et le respect de la Loi sur les télécommunications. Honorables membres, le CRTC a énoncé clairement qu’en cas de congestion, la première réaction des fournisseurs de services Internet [FSI] devrait toujours être d’investir dans un accroissement de la capacité du réseau.

Cela dit, nous avons reconnu que l’élargissement et la mise à niveau d’un réseau ne constitue pas toujours la solution la plus pratique. Au besoin, il arrive que les fournisseurs de services Internet adoptent des mesures économiques ou techniques afin de mieux gérer le trafic sur leurs réseaux. Par exemple, ils peuvent imposer des frais additionnels aux clients dont l’utilisation dépasse une limite prédéterminée ou ralentir le trafic sur leurs réseaux afin de gérer une situation exceptionnelle de congestion sur le réseau.

Le Comité sera peut-être intéressé de noter ceci : en dépit du fait que le CRTC permette aux FSI d’utiliser des mesures techniques pour gérer le trafic Internet, nous sommes conscients que ces mesures peuvent permettre aux FSI de voir et de faire la collecte de données et de renseignements personnels. Afin de protéger la vie privée des Canadiens, nous avons donc mis en place des mesures en vue de limiter l’utilisation de ces données et de ces renseignements personnels par les FSI uniquement aux fins de gestion du trafic Internet. C’est la seule raison pour laquelle ils peuvent utiliser ou divulguer cette information.

Nous avons exigé que les FSI soient transparents au sujet de l’utilisation qu’ils font des pratiques de gestion du trafic Internet. Ils doivent informer leurs clients de la manière dont cette pratique influera sur le service, y compris l’incidence particulière sur les vitesses. Si un consommateur estime que son FSI n’agit pas en toute transparence, il peut demander au CRTC d’intervenir. Selon nos statistiques les plus récentes, au cours de la dernière année, le CRTC a reçu 19 plaintes liées aux pratiques de gestion du trafic Internet.

Nous sommes proactifs en vue d’assurer la transparence et le suivi entourant chacune des plaintes que nous recevons. Nous croyons fermement que notre approche est efficace. Par exemple, lorsque nous recevons des plaintes alléguant que des pratiques ou des approches sont très préoccupantes, nous tenons des consultations publiques et nous traitons ces plaintes de manière définitive.

Permettez-moi certaines explications. Il y a quelques années, nous avons été informés que certaines entreprises proposaient des services sans fil mobiles où leurs propres services de télévision mobile n’entraient pas le compte des limites de données mensuelles de leurs clients. En revanche, le contenu issu d’autres sites Web ou d’autres applications était comptabilisé dans la limite de données mensuelles des clients.

En 2015, le CRTC a publié une décision obligeant ces fournisseurs à cesser de donner à leurs services de télévision mobile un avantage indu au sein du marché. De même, nous avons exigé que les entreprises en question modifient leurs pratiques. Le CRTC a indiqué que, tout en appuyant la création de nouveaux moyens destinés à permettre aux Canadiens d’accéder à du contenu audiovisuel canadien ou étranger, les fournisseurs de services mobiles ne pouvaient agir de manière discriminatoire. Cette décision a constitué la deuxième étape des mesures que nous avons prises afin de faire respecter le principe de la neutralité du Net, et ce, en faisant en sorte que le contenu audiovisuel soit mis à la disposition des Canadiens avec ouverture et équité.

La troisième et plus récente étape que nous avons franchie concerne la différenciation des prix. En vertu de cette pratique, les fournisseurs proposent aux consommateurs des produits ou des services identiques ou similaires à des tarifs différents. La différenciation des prix peut survenir lorsqu’un fournisseur de services Internet exempte une application précise du plan mensuel d’utilisation de données mobiles d’un utilisateur, ou lorsque le fournisseur d’une application conclut une entente avec un fournisseur de services afin que les données utilisées et associées à cette application soient gratuites ou facturées suivant un tarif réduit.

En avril 2017, nous avons indiqué que les FSI devraient traiter également toutes les données qui circulent sur leurs réseaux. En ayant recours à des pratiques de différenciation des prix, dans les faits, les fournisseurs influencent les choix des consommateurs relativement à l’utilisation des données. Résultat : ces pratiques viennent restreindre l’accès au contenu dans Internet — un élément qui, selon le CRTC, va à l’encontre de la Loi sur les télécommunications. Notre cadre soutient un marché juste où les FSI se font concurrence sur le plan du prix, de la qualité du service, de la quantité de données permise et des propositions de services novatrices.

La neutralité du Net dans d’autres régions du monde

La neutralité du Net, qui constitue un enjeu dans d’autres régions du monde, a été placée au premier plan des discussions publiques en raison de la décision qu’a prise la Commission fédérale des communications des États-Unis en décembre dernier.

Les membres de ce comité se demandent peut-être quelle sera l’incidence de cette décision sur les politiques du CRTC, les FSI canadiens ou les Canadiens. Le vote de la Commission fédérale des communications n’influencera pas la manière de gérer le trafic Internet au Canada. Le CRTC a exposé son approche par rapport à la neutralité du Net, conformément à ses pouvoirs et à ses obligations au titre de la Loi sur les télécommunications, et nous continuerons de la faire respecter au Canada.

De même, le CRTC n’a pas compétence sur la manière dont est assurée la gestion du trafic Internet à l’extérieur de notre pays. En conséquence, nous ne pouvons formuler de commentaires ou des hypothèses sur les effets d’une telle pratique, ni sur la façon dont la gestion des données sera assurée par les fournisseurs de services dans d’autres compétences.

Conclusion

M. le Président, nous espérons que cet aperçu vous aide à mieux saisir les mesures concrètes adoptées par le CRTC en vue de s’attaquer à l’enjeu de la neutralité du Net au Canada. Les décisions qu’a prises le CRTC, lesquelles s’appuient sur les pouvoirs actuellement énoncés dans la Loi, se conjuguent et créent une réponse efficace à la neutralité du Net, et font en sorte que les Canadiens ont toujours accès à la libre circulation des idées.

Avant de conclure, nous tenons à vous informer qu’il se peut que nous ne puissions répondre à toutes les questions que vous pourriez souhaiter nous poser aujourd’hui. Par exemple, vous avez peut-être lu qu’une coalition, Franc-Jeu Canada, a déposé récemment une demande afin que le CRTC crée un régime qui permettrait aux FSI de bloquer l’accès aux sites Web qui héberge du contenu piraté. M. le Président, j’ai confiance que vous comprendrez que nous ne pouvons commenter cette demande ou toute autre qu’examine actuellement le CRTC.

C’est avec plaisir que nous répondrons à toutes vos questions concernant notre approche à l’égard de la neutralité du Net.

Merci.

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