Charte des principes régissant les relations se rapportant au territoire de la nation Nishnawbe Aski

Le 24 juillet 2017, Jane Philpott, ministre fédérale de la Santé, et Eric Hoskins, ministre de la Santé et des Soins de longue durée de l'Ontario, ont rencontré Alvin Fiddler, grand chef de la Nishnawbe Aski Nation, pour annoncer la signature de la Charter of Relationship Principles Governing Health System Transformation in Nishnawbe Aski Nation Territory (la Charte). La Charte constitue un exemple concret de la relation renouvelée avec les peuples autochtones. Elle établit des objectifs communs et engage les trois partenaires à travailler ensemble pour transformer la prestation des soins de santé aux communautés des Premières Nations.

CHARTE DES PRINCIPES RELATIONNELS :
RÉGISSANT LA TRANSFORMATION DU SYSTÈME DE SANTÉ SUR LE TERRITOIRE DE LA NATION NISHNAWBE ASKI (NA)

Entre le gouvernement du Canada, le gouvernement de l’Ontario, et la nation Nishnawbe Aski (NA), au nom des Premières Nations de son territoire.

(collectivement appelés les « Parties »)

1.0
ATTENDU QUE, la nation Nishnawbe Aski (NA), le ministère de la Santé et des Soins de longue durée de l’Ontario et Santé Canada reconnaissent ensemble l’importance pour les collectivités des Premières Nations, pour l’Ontario et pour le gouvernement fédéral de collaborer en vue de subvenir à la nécessité d’une nouvelle approche flexible et globale en matière de santé pour le territoire de la nation NA ;
2.0
ATTENDU QUE, la présente charte exprime l’engagement politique des Parties à établir et maintenir une relation renouvelée sous forme de partenariat, et que les Parties comptent apporter des changements transformateurs immédiats, à moyen terme et à long terme au système existant de soins de santé dans les collectivités de la nation NA ;
3.0
ATTENDU QUE,
  • la nation Nishnawbe Aski (NA) est une organisation territoriale politique représentant 49 collectivités des Premières Nations dans le nord de l’Ontario, et que les objectifs de la nation NA consistent notamment à améliorer la qualité de vie des Autochtones résidant sur son territoire, y compris la qualité et l’efficacité des soins de santé ;
  • l’Ontario finance, administre et assure un leadership, par l’entremise du ministère de la Santé et des Soins de longue durée, pour la prestation de services de soins de santé à tous les résidents de l’Ontario, conformément au cadre législatif de la province et aux dispositions de la Loi canadienne sur la santé ;
  • le Canada travaille avec les Premières Nations, les Inuits ainsi que ses partenaires provinciaux et territoriaux, par l’entremise de la Direction générale de la santé des Premières nations et des Inuits de Santé Canada, en vue de favoriser la santé des Autochtones et des Inuits, de leur famille et de leur collectivité, et que le Canada finance ou administre un éventail de programmes, de services et d’avantages médicaux non assurés pour les collectivités, afin d’améliorer les résultats en matière de santé et de favoriser un rôle plus important des Premières Nations et des Inuits dans le système de soins de santé.

CONTEXTE HISTORIQUE

4.0
ATTENDU QUE, le Comité des chefs sur la santé (CCS) du territoire des Sioux Lookout et les chefs de la nation NA ont produit, le 24 février 2016, une déclaration d’état d’urgence sanitaire et de santé publique, qui réclamait une rencontre entre les autorités des Premières Nations et les ministres provinciaux et fédéral de la Santé ;
5.0
ATTENDU QUE, le 31 mars 2016, une rencontre a eu lieu entre les autorités des Premières Nations et les ministres provinciaux et fédéral de la Santé, et que, pendant cette rencontre, les Parties se sont engagées à collaborer pour déterminer les priorités de la nation NA en matière de santé, ainsi que pour procéder ensemble à une planification des soins de santé et à l’élaboration d’une stratégie connexe pour la transformation du système de soins de santé dans le cadre d’un dialogue direct, en établissant un comité de représentants-cadres des Parties, qui relève des autorités politiques de la nation NA, du ministre fédéral de la Santé et du ministre de la Santé et des Soins de longue durée de l’Ontario ;
6.0
ATTENDU QUE, les appels à l’action de la Commission de vérité et de réconciliation invitent les gouvernements fédéral et provinciaux à s’efforcer de combler les lacunes dans la qualité de vie et la disponibilité des services de soins de santé qui existent entre les peuples autochtones et les autres Canadiens ;
7.0
ATTENDU QUE, le Rapporteur spécial sur les droits des peuples autochtones des Nations Unies a recommandé, dans le rapport de 2004 sur sa mission au Canada, que des mesures d’urgence soient prises pour résoudre le problème critique des taux élevés de diabète, de tuberculose et de VIH/sida dans les populations autochtones, et que le problème social des suicides autochtones constitue une priorité des institutions publiques de services sociaux et de services de santé ;
8.0
ATTENDU QUE, le vérificateur général du Canada recommandait, dans son rapport de 2015 sur l’accès aux services de santé pour les collectivités éloignées des Premières Nations, qu’« en collaborant avec les organisations et les communautés des Premières Nations, ainsi qu’avec les provinces, Santé Canada devrait jouer un rôle clé dans l’établissement de mécanismes de coordination efficaces, ayant le mandat d’intervenir en ce qui concerne les questions de santé prioritaires et les enjeux liés aux divers secteurs de compétence connexes » ;
9.0
ATTENDU QUE, les collectivités de la nation NA ont émis ou réalisé de nombreuses déclarations, recommandations, résolutions et études, qui offraient des solutions particulières et exhaustives pour résoudre la crise qui les touchait ;
10.0
ATTENDU QUE, dans des accords bilatéraux et multilatéraux précédents et existants (c.‑à‑d. l’accord quadripartite sur les services hospitaliers de Sioux Lookout, l’accord bilatéral entre le Canada et la nation NA sur les relations en matière de soins de santé et l’Entente-cadre d’intégration des services de santé de la région de Weeneebayko), les parties à ces accords se sont engagées à approfondir leurs relations, à améliorer la santé et les services de soins de santé, à équilibrer les services de santé entre la prévention et le traitement des maladies ainsi qu’à intégrer des services aux collectivités.

INTENTION ET MANDAT

L’intention de la présente charte consiste à officialiser l’engagement des Parties à approfondir et à maintenir une relation renouvelée sous forme de partenariat, ainsi qu’à préciser le soutien des Parties pour une nouvelle approche flexible et globale en matière de santé pour le territoire de la nation NA.

Le présent document vise à approfondir une relation. Il n’a donc pas pour but de créer des obligations juridiques pour la nation NA, pour les Premières Nations, pour le Canada ou pour l’Ontario, ni de modifier des obligations juridiques existantes, ni de constituer un traité, ni de créer ou de redéfinir tout droit, toute revendication de droit ou toute compétence de la nation NA, des Premières Nations, du Canada ou de l’Ontario, ni d’en modifier l’interprétation, ni de préjudicier ou de nuire à de tels droits, à de telles revendications de droits ou à de telles compétences. En outre, la Charte est sans préjudice à toute revendication d’un droit à la santé conféré par traité de toute Première Nation membre de la nation Nishnawbe Aski. Les Parties s’engagent à respecter l’autonomie et la diversité des conseils tribaux et des collectivités. Les Parties n’ont aucunement l’intention, dans tout accord futur découlant de cette relation approfondie, de porter atteinte à tout droit inhérent ou conféré par traité des Premières Nations.

La Charte a été créée dans le but de reconnaître et d’orienter les travaux de la table mixte de concertation (décrits dans le mandat* joint à la présente en tant qu’annexe A*), et elle ne doit servir à aucune autre fin.

PRINCIPES DIRECTEURS D’UNE RELATION RENOUVELÉE

Les Parties s’engagent donc à établir une relation renouvelée de nation à nation, qui est guidée par une approche commune à l’égard de la planification des services de santé, axée sur la collaboration, en conformité avec les principes ci-après :

  1. Toute nouvelle approche a pour but de combler les lacunes dans la santé et les services de soins de santé.
  2. Les Premières Nations doivent disposer d’un accès rapide à des services et des installations de santé culturellement sûrs, indépendamment de leur emplacement, et elles ont droit à un accès équitable à des services de santé qui répondent aux besoins particuliers des collectivités du territoire de la nation NA.
  3. Il faut élaborer des stratégies mixtes qui permettent de déterminer et d’éliminer les obstacles structuraux à la prestation de soins de santé aux Premières Nations.
  4. La transformation des services de santé est un processus communautaire qui fait appel à l’expertise des collectivités des Premières Nations et des professionnels de la santé, et qui accroît, dans un contexte de collaboration, la participation des Premières Nations, afin de faire en sorte que les décisions communautaires concernant les services de santé soient prises à l’échelle de la collectivité.
  5. Toute nouvelle approche axée sur la santé et le bien-être serait orientée par les régimes de soins médicaux existants et par les directives des collectivités.
  6. Le système devrait être flexible et efficace, et il devrait assurer une reddition de comptes.
  7. Les nouvelles approches reposeraient sur les capacités et les points forts des Premières Nations, et elles mettraient l’accent sur la gouvernance des services de soins de santé par les autorités locales.
  8. Le contrôle continu est important pour la mesure des progrès, de même que pour l’évaluation et l’amélioration systématiques de la structure, du processus et des résultats.
  9. Il est prévu que la gouvernance et la gestion du système soient orientées par des rôles et des responsabilités claires à tous les niveaux, et qu’elles incorporent les méthodes des Premières Nations et d’autres pratiques exemplaires.
  10. Les partenaires de la santé et les collectivités travailleront ensemble dans un contexte de coordination et de collaboration, tout en respectant l’autonomie des conseils tribaux et des collectivités. Celles-ci participeront à tous les niveaux (travailleurs communautaires, anciens et jeunes), de façon à ce que leurs voix soient entendues et prises en compte dans les programmes communautaires.
  11. Les Premières Nations ont un droit inhérent à l’autonomie gouvernementale, et la relation entre le Canada, l’Ontario et les Premières Nations doit respecter ce droit. Un droit inhérent à l’autonomie gouvernementale peut recevoir force de loi en raison de droits particuliers reconnus et affirmés par l’article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982 ou par le truchement d’accords négociés et de la législation.
  12. Les compétences et les obligations juridiques de la Couronne sont déterminées par le cadre constitutionnel du Canada, qui comprend la common law ainsi que les traités ratifiés par les Premières Nations et la Couronne.
  13. Les Parties comptent maintenir et approfondir une relation fondée sur la relation spéciale et fiduciaire qui existe entre le Canada et les Premières Nations de la nation NA, ainsi que sur l’engagement du Canada et de l’Ontario à respecter les principes de la Loi canadienne sur la santé, y compris les critères d’accessibilité établis pour les populations autochtones résidant sur le territoire de la nation NA.
  14. La présente charte vise à approfondir la relation entre le Canada, l’Ontario et la nation NA, et les Parties s’efforceront de travailler ensemble dans un climat de respect.

LA VISION : LA TRANSFORMATION DU SYSTÈME DE SANTÉ

Le changement global permettrait aux Premières Nations de bénéficier d’un accès équitable à la prestation de soins de qualité dans leur collectivité, prioritairement sur le territoire de la nation NA. Les Parties souhaitent que le système intègre des modèles holistiques de soins de santé, qui mettent l’accent sur la planification du bien-être, sur la santé de la population et sur les déterminants de la santé. Le système serait centré sur le patient, il tiendrait compte de l’opinion de la collectivité et des patients, et il ferait en sorte que les fournisseurs de soins de santé rémunérés par le gouvernement fédéral ou provincial aient les compétences requises pour assurer la prestation de soins flexibles, efficaces et culturellement sûrs. Les collectivités participeraient à tous les niveaux (travailleurs communautaires, anciens et jeunes), de façon à ce que leurs voix soient entendues et prises en compte dans les programmes communautaires.

Les Parties comptent prendre toutes les mesures nécessaires et raisonnables pour appuyer la transformation du système de santé pour les collectivités du territoire de la nation NA, y compris, mais sans s’y limiter :

  1. le soutien d’un processus d’harmonisation qui réunirait les décideurs afin qu’ils fassent progresser la transformation du système de santé de façon délibérée, planifiée et mesurable ;
  2. la création d’un cadre de travail qui :
    1. comprendrait un processus immédiat assurant l’examen des besoins urgents en santé déterminés par la nation NA et par d’autres entités sanitaires des Premières Nations du territoire de la nation NA, la détermination des mesures prioritaires et la mise en œuvre d’un plan d’action mixte accompagné d’un programme d’évaluation à des fins de transparence ;
    2. comprendrait un examen mixte et l’exécution des engagements pris par Santé Canada en réponse au rapport du printemps de 2015 du vérificateur général du Canada sur l’accès aux services de santé pour les collectivités éloignées des Premières Nations, qui répondent aux besoins des Premières Nations de la nation NA ;
    3. comprendrait un examen mixte du système de santé et du modèle de financement en place, ainsi que des mesures visant la transformation du système de santé, orientées par des modèles de transformation existants sur le territoire de la nation NA, qui donneraient lieu à la création de nouveaux modèles visant l’amélioration de l’accès aux services de santé ;
    4. respecterait le principe selon lequel les conflits de compétence ne devraient pas empêcher la prestation rapide de services aux enfants autochtones.
  3. l’élaboration de nouvelles approches qui permettraient d’améliorer la santé des populations et des collectivités autochtones du territoire de la nation NA et leur accès aux services de soins de santé, y compris l’accroissement et l’amélioration des services et de leur accès à l’échelle de la collectivité ;
  4. le soutien de la capacité des collectivités et des institutions autochtones d’assurer la prestation et la planification des services de santé ;
  5. la proposition d’une réforme des politiques et la prise en considération des changements législatifs nécessaires, le cas échéant, en vue de concevoir un nouveau système de soins de santé pour les Premières Nations du territoire de la nation NA, qui comprend des modèles durables de financement dans le cadre d’un nouvel arrangement fiscal, de même que des structures décisionnelles procurant aux Premières Nations un pouvoir, une maîtrise et un contrôle, et qui permet la mise en œuvre d’approches multisectorielles ;
  6. l’élimination des barrières attribuables à des problèmes liés aux domaines de compétence, au financement, aux politiques, à la culture et aux structures, qui nuisent à la capacité des Premières Nations de planifier, de concevoir, de gérer et de délivrer des services de soins de santé de qualité dans leurs collectivités et pour leurs membres ;
  7. l’établissement d’une supervision politique trigouvernementale, qui assurerait l’harmonisation des mesures et des décisions prises par les responsables organisationnels ou ministériels avec les engagements politiques de leurs supérieurs.

PROCHAINES ÉTAPES

L’élaboration de principes relationnels entre les Parties fait partie intégrante du processus de transformation du système de santé. Ces principes visent à orienter les discussions entre les parties participant à la transformation du système de santé. Chaque partie compte désigner des personnes responsables et des ressources pour un processus immédiat et permanent de planification. Les Parties mettront en place la structure et le plan de travail du processus de planification, notamment en déterminant la fréquence des réunions, tel qu’il est indiqué dans le mandat* joint à la présente en tant qu’annexe A*.

Tout au long des travaux, les Parties comptent faire régulièrement le point par écrit (au moins une fois l’an) à l’Assemblée générale des chefs des collectivités de la nation NA.

* Le mandat de la table mixte de concertation est en cours d’examen.

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