Ligne directrice sur la qualité de l'air intérieur résidentiel pour le dioxyde d'azote
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Contexte
Le dioxyde d’azote (NO2) appartient à la famille des oxydes d’azote (NOx). C’est un gaz brun rougeâtre, ayant une faible hydrosolubilité, présent dans l’air intérieur et extérieur. Les Directives d’exposition concernant la qualité de l’air intérieur des résidences publiées par Santé Canada en 1987 ont identifié ce contaminant comme étant l’oxyde d’azote pouvant avoir des effets nocifs aux concentrations susceptibles d’être rencontrées dans l’air intérieur (Santé Canada 1987). Le présent document passe en revue les études épidémiologiques, toxicologiques et d’exposition portant sur le NO2 publiées depuis 1987 et propose de nouvelles limites d’exposition de courte et longue durées dans l’air intérieur.
Organisation:
Sujets connexes
Sources et exposition
Le NO2 présent dans le milieu intérieur provient à la fois de l’infiltration du NO2 ambiant et des émissions de sources de combustion à l’intérieur. Les principales sources anthropiques de NO2 ambiant comprennent les émanations de véhicules, d’avions, de locomotives, de centrales à combustible fossile, de procédés industriels et de systèmes de chauffage des bâtiments. Les sources intérieures potentielles de NO2 comprennent les appareils à gaz, au bois ou au kérosène tels que les fournaises, les appareils de chauffage d’appoint, les cuisinières et les chauffe-eau. Les émanations provenant de ces appareils sont minimes si celles-ci sont efficacement évacuées vers l’extérieur. Toutefois, ces émanations peuvent devenir substantielles si ce n’est pas le cas. Dans le cas des cuisinières à gaz, le degré d’évacuation dépend de la présence et de l’efficacité d’une hotte au-dessus de la cuisinière. Il varie également selon que les occupants utilisent ou non la hotte lorsqu’ils cuisinent.
Les concentrations de NO2 dans l’air intérieur varient considérablement d’une habitation à une autre en raison des différences de sources extérieures et intérieures. Dans des études portant sur des habitations de différentes villes canadiennes (Halifax, Hamilton, Regina, Windsor, Edmonton et Toronto), les concentrations médianes intérieures de NO2, mesurées en été ou en hiver, variaient généralement entre 4 et 10 µg/m3 (Santé Canada 2013, Santé Canada 2012, Santé Canada 2010, Héroux et al 2010). Ces concentrations variaient toutefois entre 9 et 22 µg/m3 lorsque seules les habitations munies de cuisinières à gaz étaient prises en compte, les concentrations les plus élevées étant mesurées en hiver. La gamme complète des concentrations mesurées dans ces études variait de moins de 1 µg/m3 à environ 90 µg/m3.
Effets sur la santé
Des études toxicologiques, épidémiologiques et d’exposition humaine contrôlée ont examiné les effets sur la santé de l’exposition au NO2. Dans la présente évaluation, la limite d’exposition de courte durée est établie à partir de résultats d’études d’exposition humaine contrôlée, alors que la limite d’exposition de longue durée repose sur les données épidémiologiques émanant d’études menées dans des habitations ou des écoles. Les résultats des études épidémiologiques portant sur les effets sur la santé du NO2 ambiant et les données toxicologiques émanant des études réalisées sur des animaux de laboratoire fournissent des données probantes.
Études d’exposition humaine contrôlée
En général, les études d’exposition humaine contrôlée menées sur des adultes en santé semblent indiquer que le système cardio-respiratoire n’est pas affecté par l’inhalation d’une concentration maximale de NO2 de 1880 µg/m3 durant une à six heures, avec ou sans exercice (Gong et al. 2005; Frampton et al. 2002; Vagaggini et al. 1996; Jorres et al. 1995; Kim et al. 1991; Rubinstein et al. 1991; Frampton et al. 1989a, Frampton et al. 1989b; Adams, Brookes and Schelegle 1987; Folinsbee et al. 1978; Morrow et al. 1992; Frampton et al. 1991; Hazucha, Ginsberg and McDonnell 1983; Bylin et al. 1985). Des effets hématologiques, inflammatoires et immunologiques légers ont toutefois été constatés chez certains adultes en santé lorsqu’exposés à une concentration de NO2 de 1100 µg/m3 (Frampton et al., 1989a; Frampton et al., 1989b; Frampton et al, 2002).
De nombreuses études menées auprès d’asthmatiques et d’adultes souffrant de maladie pulmonaire obstructive chronique (MPOC) ont révélé des effets nocifs sur la fonction respiratoire à une concentration de NO2 aussi basse que 500 µg/m3 (Vagaggini et al., 1996; Morrow et al., 1992, Roger et al., 1990; Bauer et al., 1986; Avol et al., 1989; Strand et al., 1996; Bylin et al., 1988). Une altération de la fonction pulmonaire ou une hyperréactivité bronchique (HRB) a été observée chez des enfants et des adultes asthmatiques après une provocation bronchique (soit l’administration de bronchoconstricteurs) (Bauer et al., 1986; Avol et al., 1989). De plus, une diminution de la fonction pulmonaire (Strand et al. 1997, Jenkins et al. 1999, Tunnicliffe, Burge and Ayres 1994) ou une exacerbation de l’inflammation pulmonaire s’est manifestée chez les asthmatiques souffrant d’allergies lorsque l’exposition au NO2 était suivie d’une exposition à un allergène (Barck et al. 2002; Barck et al. 2005, Wang et al. 1995a. Wang et al. 1995b). Les adultes souffrant de MPOC ont présenté une altération de la fonction pulmonaire liée au NO2, bien qu’aucun autre effet sur la santé n’ait été observé (Vagaggini et al. 1996; Gong et al. 2005).
Il existe une incohérence au niveau des effets sur la santé respiratoire lorsque les concentrations de NO2 sont inférieures à 500 µg/m3. Quelques études démontrent que ces expositions peuvent provoquer une altération de la fonction pulmonaire chez les adultes asthmatiques après une provocation bronchique (Orehek, Massari and Gaynard 1976; Kleinman et al. 1983; Hazucha, Ginsberg and McDonnell, 1983), alors que d’autres n’ont pas pu le démontrer (Bylin et al., 1985; Bylin et al., 1988; Roger et al., 1990; Jorres and Magnussen, 1991). La réaction marquée de la part de certaines personnes au NO2 après une provocation bronchique semble indiquer une importante variabilité au sein de la population, même parmi les asthmatiques. Il est toutefois important de noter que cette sensibilité n’est pas corrélée avec la gravité de l’asthme ou la sensibilité à un certain bronchoconstricteur. En général, aucune donnée actuelle ne semble indiquer que la sensibilité au NO2 soit liée à l’âge ou au sexe, bien que peu d’études aient évalué cette question auprès des personnes âgées ou des enfants asthmatiques.
Études épidémiologiques liées à la qualité de l’air intérieur
En ce qui a trait à l’exposition chronique, de nombreuses études épidémiologiques ont démontré des associations positives entre la fréquence des symptômes respiratoires (p. ex., la respiration sifflante et le serrement au niveau de la poitrine) et l’exposition de longue durée au NO2 dans une habitation. Toutefois, ces mêmes études ont généralement révélé que le NO2 n’a que peu ou pas d’effets sur les paramètres de la fonction pulmonaire. Les associations positives entre le NO2 présent dans l’air intérieur et les symptômes respiratoires ont été le plus souvent observées dans le cadre d’études durant lesquelles des enfants asthmatiques ont été exposés à des concentrations intérieures de NO2 approximativement deux à trois fois supérieures à celles généralement mesurées dans les habitations au Canada.
Deux études d’intervention randomisées ont établi un lien entre une diminution de l’exposition au NO2 et aux polluants qui y sont associés et une amélioration des symptômes respiratoires, particulièrement chez les enfants asthmatiques (Pilotto et al. 2004, Marks et al. 2010). L’intervention consistait à remplacer un appareil de chauffage au gaz sans évacuation vers l’extérieur par un appareil de chauffage électrique ou au gaz avec une évacuation vers l’extérieur. Les études examinant le lien entre l’exposition personnelle au NO2 et les résultats sur la santé respiratoire ont également confirmé l’existence d’un lien entre l’exposition chronique au NO2 et les effets nocifs.
Un grand nombre d’études se sont penchées sur la relation entre la santé respiratoire et la présence ou l’utilisation de cuisinières à gaz, sans mesure directe des concentrations de NO2. Des études transversales et longitudinales ont produit des résultats variables, suggérant un certain lien entre l’augmentation des symptômes respiratoires et des altérations mineures de la fonction pulmonaire chez les enfants, en présence de cuisinières à gaz dans l’habitation (OMS, 2010). La possibilité de classification erronée est plus importante dans ce type d’études, le NO2 n’y étant pas mesuré directement. Cela pourrait donner lieu à moins de résultats positifs statistiquement significatifs et expliquer en partie les incohérences dans la base de données.
Ligne directrice sur la qualité de l'air intérieur résidentiel pour le dioxyde d’azote
L’établissement d’une ligne directrice sur la qualité de l’air intérieur résidentiel (LDQAIR) se fait en deux étapes. Une concentration de référence (CRf) est d’abord déterminée en appliquant des facteurs d’incertitude aux concentrations auxquelles les plus sensibles mesures d’effets nocifs sur la santé ont été observées. La CRf est la concentration dans l’air intérieur en dessous de laquelle aucun effet nocif n’est attendu sur les personnes (y compris les sous-groupes vulnérables) qui pourraient y être exposées. En ce qui a trait à la CRf pour l’exposition de courte durée, la période d’exposition est précisée (une heure ici). En ce qui a trait à la CRf pour l’exposition de longue durée, l’exposition peut durer des mois, des années, voire toute la vie.
Les CRf pour des expositions de courte et de longue durées sont ensuite comparées aux expositions mesurées dans l’air intérieur résidentiel, puis évaluées en fonction de leur faisabilité technique. Si la CRf peut être atteinte par la mise en œuvre de mesures de contrôle raisonnables, la LDQAIR est fixée égale à la CRf. Si la CRf ne peut pas être atteinte par l’utilisation de technologies de gestion du risque actuellement disponibles ou par l’application de pratiques de gestion du risque, la LDQAIR peut être fixée à une concentration supérieure. Cela permet à la LDQAIR d’être utilisée en tant que cible réalisable pour l’amélioration de la qualité de l’air intérieur lors de l’évaluation des mesures de gestion du risque.
L’établissement de la LDQAIR à un niveau supérieur à la CRf se résumerait à une marge d’exposition plus faible entre la LDQAIR et la concentration pour lequel des effets ont été observés, lors d’études, sur la santé. Néanmoins, la LDQAIR est tout de même considérée comme protectrice pour la santé, étant donné la nature préventive du processus d’analyse de risque dans lequel des facteurs d’incertitude sont appliqués aux plus sensibles mesures d’effets nocifs sur la santé observés chez la sous-population sensible.Ligne directrice sur la qualité de l’air intérieur résidentiel pour l’exposition de courte durée
La concentration de NO2 de 500 µg/m3, reposant sur les effets chez les asthmatiques dans la plupart des études d’exposition contrôlée de courte durée, a servi de point de départ pour établir la CRf pour l’exposition de courte durée (une heure). L’altération de la fonction pulmonaire et l’exacerbation de l’inflammation constituent les effets sur la santé observés à ce niveau d’exposition. Ce point de départ se traduit également par une altération de la fonction pulmonaire chez les sujets atteints de MPOC et exposés à une concentration de NO2 de 560 µg/m3. Il convient toutefois de souligner que certaines personnes étaient plus sensibles dans certaines études, ce qui semble indiquer une importante variabilité au sein de la population.
L’exacerbation de l’HRB chez quelques asthmatiques sensibilisés, à des doses de NO2 aussi faibles que 190 µg/m3 a été prise en compte pour déterminer s’il est nécessaire d’établir un facteur d’incertitude (FI) pour la variabilité intraspécifique. L’incertitude liée aux effets pouvant survenir chez des adultes atteints de MPOC et des enfants asthmatiques soumis à des concentrations de NO2 inférieures à 500 µg/m3 a également été prise en compte. Un FI intraspécifique de 3 permet de protéger les personnes potentiellement vulnérables (c.‑à‑d., les sujets répondants, les adultes atteints de MPOC et les enfants asthmatiques). Un FI composite de 10 (3 pour l’utilisation d’une dose avec effets nocifs comme point de départ et 3 pour la variabilité intraspécifique) a donc été appliqué à la dose minimale avec effet nocif observé (DMENO) liée à l’exposition de courte durée de 500 µg/m3 afin d’obtenir une CRf de 50 µg/m3.
Ligne directrice sur la qualité de l’air intérieur résidentiel pour l’exposition de longue durée
Les données probantes disponibles indiquent qu’une exposition à la CRf de 10 µg/m3 pour l’exposition de longue durée ne provoque pas d’effets nocifs dans l’ensemble de la population, y compris le sous-groupe le plus vulnérable des enfants asthmatiques. Des données relatives aux habitations canadiennes munies de cuisinières à gaz semblent toutefois indiquer qu’environ 90 % d’entre elles dépasseraient une concentration moyenne de NO2 de 10 µg/m3. Environ 10 % des habitations munies de cuisinières électriques dépasseraient également cette concentration, même en l’absence d’une importante source intérieure de NO2. C’est pour cette raison que la CRf pour l’exposition de longue durée de 10 µg/m3 n’a pas été retenue comme la LDQAI pour l’exposition de longue durée.
À des fins de gestion du risque, la LDQAIR pour l’exposition de longue durée est fixée à 20 µg/m3. Des données émanant d’études canadiennes sur la qualité de l’air intérieur indiquent que la concentration de NO2 dans la plupart des habitations munies de cuisinières électriques dépasse rarement ce niveau et que cette concentration peut également être atteinte dans les habitations munies de cuisinières à gaz, en utilisant une hotte de ventilation adéquate. De plus, les preuves épidémiologiques n’indiquent pas d’effets nocifs appréciables liés à une exposition de longue durée à cette concentration. La LDQAIR de longue durée de 20 µ/m3 est donc considérée comme protectrice de la santé.
Lorsque l’on compare les concentrations de NO2 mesurées avec la limite maximale d’exposition de longue durée, la durée d’échantillonnage devrait être d’au moins 24 heures. Toutefois, étant donné les fluctuations des niveaux de NO2 durant la journée, le mois ou la saison, une période d’échantillonnage plus longue permettrait une estimation plus représentative afin d’évaluer l’exposition au NO2 ayant lieu sur plusieurs mois ou plusieurs années.
Durée de l’exposition | Concentration | Effets critiques | |
---|---|---|---|
µg/m3 | ppb | ||
Courte durée | 170 | 90 | Diminution de la fonction pulmonaire et augmentation de la réponse des voies respiratoires chez les asthmatiques |
Longue durée | 20 | 11 | Fréquence plus élevée de jours avec des symptômes respiratoires ou de l’usage de médicaments chez les enfants asthmatiques |
Les stratégies de réduction de l’exposition au NO2 à l’intérieur comprennent le contrôle des émanations provenant des appareils de combustion et la réduction de l’infiltration de NO2 provenant de sources adjacentes. Les mesures de contrôle incluent les suivantes :
- Installez et entretenez convenablement les appareils de combustion utilisés pour le chauffage (par exemple, les fournaises à gaz ou au mazout, les poêles à bois, les chauffe-eau à gaz) en s’assurant que leur évacuation soit adéquate.
- Utilisez une hotte de cuisinière à la plus haute intensité lorsque vous cuisinez avec une cuisinière à gaz, assurez-vous qu’elle ait une sortie à l’extérieur et utilisez préférablement les brûleurs du fond.
- N’utilisez pas d’équipement à gaz, au kérosène ou au propane à l’intérieur d’espaces clos non ou mal ventilés.
- Ne faites pas tourner le moteur de votre voiture ou de tout autre équipement fonctionnant à combustion dans votre garage attenant.
- N’utilisez votre barbecue qu’à l’extérieur et ne l’utilisez pas près de portes ou de fenêtres ouvertes.
L’utilisation de ces stratégies réduirait l’exposition au NO2 ainsi qu’à d’autres contaminants provenant des gaz de combustion tels que le monoxyde de carbone, les particules fines et ultrafines et les composés organiques volatils.
Références
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