Page 8 : Recommandations pour la qualité de l'eau potable au Canada : document technique – l'arsenic

7.0 Technologie de traitement

Dans l'eau où le pH varie de 4 à 10, les espèces As(III) prédominantes ont une charge neutre tandis que les espèces As(V) portent une charge négative. À cause de la charge neutre de l'As(III), l'efficacité de son élimination est médiocre comparativement à celle de l'As(V) (U.S. EPA, 2001a).

Il est possible de convertir l'As(III) en As(V) en recourant à une étape de pré-oxydation. Le chlore, le chlorure ferrique, le permanganate de potassium, l'ozone et le peroxyde d'hydrogène sont efficaces pour oxyder l'As(III) en As(V). La pré-oxydation au chlore peut toutefois créer des concentrations indésirables de sous-produits chlorés de désinfection (U.S. EPA, 2000).

Le choix d'un processus de traitement approprié dans le cas d'un approvisionnement d'eau en particulier dépendra des caractéristiques de l'approvisionnement en eau brute ainsi que de nombreux autres facteurs. Il est important de déterminer, le cas échéant, le type de prétraitement requis. Un prétraitement peut être nécessaire : pour supprimer les ions en compétition tels que le fer, le sulfate et le silicate, ainsi que les solides totaux dissous; pour régler le pH; et pour oxyder l'As(III) en As(V). Le prétraitement est crucial pour garantir l'efficacité de l'élimination de l'arsenic à l'aide de toute technique de traitement ultérieure. On peut effectuer une spéciation pour déterminer les espèces d'arsenic présentes; toutefois, cette méthode n'est pas très avantageuse, vu le temps et les coûts requis. L'oxydation de l'As(III) en As(V) constitue la méthode de prédilection pour éliminer l'arsenic inorganique, car elle garantit la réduction de l'arsenic total de manière efficiente. La plupart des méthodes de traitement sont utilisées conjointement avec un prétraitement et une étape d'affinage, qui consiste essentiellement à affiner l'eau traitée par un échange d'ions afin d'éliminer les ions As(V) résultants. De plus, la durée du contact, l'entretien du système et le rapport coût-efficacité constituent des facteurs clés dont il faut tenir compte dans le choix d'un processus de traitement pour l'élimination de l'arsenic. Une analyse approfondie des diverses techniques de traitement utilisées pour éliminer l'arsenic de l'eau potable dépasse la portée du présent document. Une étude de Thirunavukkarasu et Viraraghavan (2003) contient toutefois des renseignements détaillés sur l'efficacité et l'application des diverses techniques de traitement pour l'élimination de l'arsenic.

7.1 Échelle municipale

Les techniques municipales les plus pratiques pour éliminer l'arsenic de l'eau potable comprennent la coagulation/filtration, l'adoucissement à la chaux, l'alumine activée, l'échange d'ions, l'osmose inverse et la filtration sur sable vert au manganèse. La U.S. EPA a estimé que l'électrodialyse inverse était la meilleure technique disponible pour l'élimination de l'arsenic. Le taux d'élimination obtenu par certaines des techniques indiquées peut être très bon (> 90%), mais la filtration sur sable vert au manganèse et l'électrodialyse inverse donnent généralement des taux d'élimination plus faibles (U.S. EPA, 2001a). L'adsorption/filtration s'est récemment révélée prometteuse elle aussi pour éliminer l'arsenic.

Bien qu'il soit difficile de ramener les concentrations d'arsenic à de faibles niveaux en utilisant seulement la technique de la coagulation/filtration, lorsque l'on combine la coagulation/filtration au prétraitement (oxydation pour convertir l'arsenic en sa forme pentavalente) et à une étape d'affinage (affinage de l'eau traitée par échange d'ions), il est possible de ramener les concentrations d'arsenic total dans l'eau potable prête au débit à des niveaux d'à peine 0,003-0,005 mg/L (U.S. EPA, 2000).

L'adoucissement à la chaux est très répandu dans les grandes installations de service public et est efficace car il réussit à ramener à 0,001-0,003 mg/L les concentrations d'arsenic total dans l'eau potable. L'adoucissement à la chaux coûte toutefois cher et n'est pas recommandé sauf s'il faut réduire aussi la dureté de l'eau d'alimentation brute (U.S. EPA, 2000). Il est possible d'améliorer le rendement et l'uniformité de l'adoucissement à la chaux en prétraitant l'eau brute par oxydation et en affinant l'eau prête au débit par échange d'ions.

Actuellement, la méthode d'élimination de l'arsenic la plus couramment utilisée à l'échelle municipale se fonde sur l'adsorption d'alumine activée suivie d'une microfiltration. Plusieurs études ont démontré que l'alumine activée était un moyen de traitement efficace pour éliminer l'arsenic (As(V)) de l'eau potable. Au cours d'études pilotes portant sur l'élimination de l'arsenic au moyen de l'alumine activée, on a atteint des concentrations de <0,01 mg/L d'arsenic dans les effluents (Simms et Azizian, 1997). L'EPA a classé la méthode fondée sur l'alumine activée comme étant la meilleure technique disponible pour l'élimination de l'arsenic, puisqu'elle permet d'obtenir un taux d'élimination de 95 % (U.S. EPA, 2001a). Toutefois, étant donné le traitement chimique nécessaire, ce procédé peut se révéler trop complexe et peut être dangereux pour les petites installations de service public (U.S. EPA, 2000); son usage n'est donc pas répandu dans ces petites installations.

Les procédés de traitement décrits ci-dessus sont efficaces, mais ils coûtent relativement cher à construire et à entretenir à l'échelle municipale et peuvent ne pas convenir pour les petites installations de traitement de l'eau. Ces systèmes produisent en outre des quantités importantes de boues ou de saumure qu'il faut éliminer de façon appropriée, ce qui augmente les coûts (NDWAC, 2001).

On a démontré que les procédés à base d'échange d'ions conjugués à un prétraitement par oxydation pouvaient ramener à des niveaux d'à peine 0,003 mg/L les concentrations d'arsenic total dans l'eau potable prête au débit. Des études en laboratoire effectuées au moyen de colonnes de résine échangeuses d'ions ont produit des concentrations d'à peine 0,002 mg/L dans les effluents lorsque l'influent contenait 0,021 mg/L d'arsenic (Clifford et coll., 1999). On recommande d'utiliser ces systèmes pour les approvisionnement d'eau où les concentrations de solides et de sulfates totaux dissous sont faibles (U.S. EPA, 2000).

Dans le cas de la filtration sur sable vert au manganèse, l'arsenic contenu dans l'eau qui traverse le filtre est oxydé puis retenu dans le filtre. Cette technique ne permet pas d'obtenir un taux d'élimination élevé et l'élimination de l'arsenic y dépend de la présence de fer dans l'eau. Elle peut toutefois être utilisée pour traiter les eaux d'approvisionnements riches en fer et qui ne nécessitent qu'un faible taux d'élimination de l'arsenic (U.S. EPA, 2000).

Les techniques d'adsorption/filtration semblent porteuses de promesses et être applicables aux petites installations de traitement de l'eau. L'adsorption à l'aide d'éléments tels que le fer, l'aluminium et l'oxyde de titane sont efficaces pour l'élimination de l'arsenic. Les systèmes de traitement à lit fixe, comme l'adsorption et l'échange d'ions, deviennent de plus en plus populaires pour l'élimination de l'arsenic dans les petits systèmes de traitement de l'eau en raison de leur simplicité, de leur facilité d'exploitation et d'utilisation et de leur capacité de régénération. Plusieurs études au cours desquelles on a testé l'élimination de l'arsenic de l'eau potable à la fois en laboratoire et dans le cadre d'essais pilotes ont démontré que les matières d'adsorption contenant divers oxydes de fer pouvaient éliminer l'As(III) et l'As(V). Plus précisément, le sable recouvert d'oxyde de fer et l'hydroxyde ferrique granulaire peuvent ramener la concentration de l'As(III) et l'As(V) dans l'eau à moins de 0,005 mg/L (Pierce et Moore, 1980, 1982; Fuller et coll., 1993; Hsia et coll., 1994; Wilkie et Hering, 1996; Raven et coll., 1998; Driehaus et coll., 1998; Ramaswami et coll., 2001; Thirunavukkarasu et coll., 2001, 2003a,b).

On peut aussi produire, sans traitement, de l'eau avec des concentrations réduites en arsenic au moyen d'un mélange de l'eau. Le mélange de l'eau consiste à combiner de l'eau provenant d'une source ayant de hautes concentrations en arsenic avec de l'eau dont la teneur en arsenic est nettement moins élevée. De cette manière, on garantit que la concentration finale en arsenic de l'eau fournie au consommateur satisfait à la recommandation.

7.2 Échelle résidentielle

Le traitement de l'eau potable à l'échelle municipale est conçu afin de réduire les niveaux de contaminants à la valeur de la recommandation ou plus bas. Par conséquent, l'utilisation de dispositifs de traitement à l'échelle résidentielle pour traiter de l'eau traitée par la municipalité n'est pas une nécessité mais principalement un choix individuel. Lorsqu'un ménage tire son eau potable d'un puits privé, un dispositif de traitement de l'eau potable résidentiel privé (dispositif de traitement) peut réduire les concentrations d'arsenic dans l'eau potable. Les dispositifs de traitement résidentiels sont d'un prix abordable et peuvent réduire les concentration d'arsenic dans l'eau potable à des niveaux inférieurs à 0,010 mg/L. Pour vérifier l'efficacité du dispositif de traitement, des analyses doivent être effectuées périodiquement auprès d'un laboratoire accrédité et porter aussi bien sur l'eau qui entre dans le dispositif que sur celle qu'il produit.

Les types les plus courants de dispositifs de traitement disponibles pour l'élimination de l'arsenic de l'eau potable dans les systèmes résidentiels sont ceux à osmose inverse et à distillation à la vapeur. D'autres types de dispositifs fondés sur d'autres techniques comme l'adsorption commencent aussi à se répandre. Les systèmes de filtration peuvent être installés au point d'utilisation, c'est-à-dire au robinet, ou au point d'entrée de l'eau dans la maison.

Avant d'installer un dispositif de traitement, il faut analyser l'eau de puits pour en déterminer les caractéristiques chimiques générales et la concentration en arsenic. L'analyse doit également comprendre la détermination de la présence et de la concentration d'ions en compétition (p. ex., fluorure, fer, sulfate, silicate) et de matières organiques dans l'eau, qui pourraient nuire à l'élimination de l'arsenic.

Comme la plupart des techniques ne peuvent éliminer efficacement l'arsenic trivalent, on recommande un prétraitement par oxydation pour convertir l'arsenic trivalent (dissous) en arsenic pentavalent (filtrable) et garantir que le dispositif de traitement l'élimine bien (U.S. EPA, 2001a). Les particuliers doivent consulter la documentation du fabricant pour connaître la quantité d'arsenic que le dispositif de traitement est supposé éliminer, ainsi que les conditions d'exploitation et d'entretien.

On a démontré que les systèmes résidentiels à osmose inverse étaient efficaces pour éliminer l'arsenic total de l'eau potable. La quantité d'arsenic éliminé dépend du type de membrane filtrante utilisée par le système. L'osmose inverse exige des volumes plus importants d'influent (eau d'arrivée) pour produire le volume requis d'eau potable, car les systèmes à osmose inverse rejettent (gaspillent) une partie de l'influent. Le consommateur devra peut-être prétraiter l'eau d'arrivée afin de réduire l'encrassement et de prolonger la durée utile de la membrane. Le principal avantage des systèmes à osmose inverse est qu'ils sont très répandus, abordables et faciles à entretenir, et qu'ils peuvent éliminer jusqu'à 98 % des autres minéraux dissous, ainsi que les suspensions colloïdales fines et les matières grossières en suspension (U.S. EPA, 2000).

Les systèmes de distillation peuvent éliminer presque tout l'arsenic de l'eau potable. Ils sont plus complexes que les systèmes à osmose inverse. Bien que les systèmes de distillation soient habituellement installés dans les commerces, ils deviennent maintenant disponibles pour une utilisation résidentielle. Il convient de signaler cependant que même si l'on n'a pas relevé d'effets nuisibles connus pour la santé associés à une ingestion prolongée d'eau potable provenant de systèmes de distillation ou à osmose inverse, aucune étude précise n'a été faite sur les effets de l'ingestion d'eau provenant de ces systèmes. Comme les procédés par distillation et par osmose inverse éliminent des minéraux bénéfiques comme le calcium et le magnésium, il importe d'avoir une alimentation relativement bien équilibrée pour compenser l'élimination de ces minéraux.

Les techniques d'adsorption/filtration semblent porteuses de promesses et être applicables aux petites installations de traitement de l'eau. L'adsorption à l'aide d'éléments tels que le fer, l'aluminium et l'oxyde de titane sont efficaces pour l'élimination de l'arsenic. Les systèmes de traitement à lit fixe, comme l'adsorption et l'échange d'ions, deviennent de plus en plus populaires pour l'élimination de l'arsenic dans les petits systèmes de traitement de l'eau en raison de leur simplicité, de leur facilité d'exploitation et d'utilisation et de leur capacité de régénération.

Santé Canada ne recommande pas de marques particulières de dispositifs de traitement de l'eau potable, mais conseille vivement aux consommateurs de n'utiliser que les dispositifs certifiés par un organisme de certification accrédité comme étant conformes aux normes appropriées de NSF International (NSF) et de l'American National Standards Institute (ANSI). Ces normes visent à protéger l'eau potable en aidant à garantir l'innocuité des matériaux et l'efficacité des produits qui entrent en contact avec elle. Les organismes de certification garantissent qu'un produit ou service est conforme aux normes en vigueur. Au Canada, le Conseil canadien des normes (CCN) a accrédité les organismes suivants, qu'il autorise ainsi à certifier les dispositifs de traitement de l'eau potable qui satisfont aux normes susmentionnées de NSF et de l'ANSI :

On trouve sur le site web du CCN (www.scc.ca/fr) une liste à jour des organismes de certification accrédités.

Il faut cependant noter que les normes de NSF/ANSI portent actuellement sur une réduction de l'arsenic à des concentrations de 0,01 mg/L, d'où l'importance de caractériser l'eau brute pour garantir une élimination efficace de l'arsenic. Les dispositifs certifiés sont souvent conçus pour ramener la concentration d'arsenic à des niveaux bien inférieurs à 0,010 mg/L, même si la conformité à la norme garantit uniquement qu'une concentration finale de moins de 0,010 mg/L est atteinte. Un professionnel qualifié peut concevoir un système adapté aux besoins résidentiels qui permet de réduire les concentrations d'arsenic à des niveaux inférieurs à 0,005 mg/L. Par exemple, un système comprenant deux ou plusieurs filtres en série permettra généralement d'obtenir une élimination totale de l'arsenic. Comme indiqué plus tôt, le choix d'une méthode de traitement qui convienne à un approvisionnement d'eau potable donné dépend des caractéristiques de l'approvisionnement en eau brute et de nombreux autres facteurs. Il est donc important de déterminer, le cas échéant, le type de prétraitement qui s'impose et de faire analyser l'eau prête au débit par un laboratoire accrédité pour vérifier que le système conçu atteint bien le taux d'élimination visé de l'arsenic.

Pour qu'un dispositif de traitement de l'eau potable soit certifié conforme aux normes 53 (Dispositifs de traitement de l'eau potable -- Effets sur la santé) ou 58 (Systèmes de traitement de l'eau potable à osmose inverse), ou pour qu'un système de distillation soit certifié conforme à la norme 62 (Systèmes de distillation de l'eau potable) de NSF et de l'ANSI, il faut qu'il puisse réduire de 0,3 à 0,010 mg/L la concentration d'arsenic dans l'eau. Seuls les dispositifs qui ramènent de 0,3 à 0,010 mg/L la concentration d'arsenic conviennent pour traiter l'eau de puits contenant des concentrations d'arsenic élevées. Les dispositifs certifiés qui réduisent la concentration d'arsenic de 0,05 à 0,010 mg/L sont destinés spécifiquement au traitement d'eaux ayant des concentrations initiales inférieures (soit moins de 0,05 mg/L) d'arsenic.

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