Page 5 : Recommandations pour la qualité de l'eau potable au Canada : document technique – le tétrachlorure de carbone

Partie II. Science et considérations techniques

4.0 Propriétés, utilisation et sources dans l'environnement

4.1 Propriétés et utilisation

Le tétrachlorure de carbone (CCl4; masse moléculaire relative de 153,82), ou tétrachlorométhane, est un liquide dense, incolore et ininflammable qui dégage une odeur sucrée, aromatique et non irritante (PISSC, 1999; Lide, 2005-2006). À la température ambiante, c'est un liquide volatil dont le point d'ébullition est de 76,5 °C (ATSDR, 2005). Ses seuils de perception olfactive sont de <64 mg/m³ dans l'air et de 0,52 mg/L dans l'eau (Amoore et hautala, 1983). Ce solvant chloré est miscible avec les solvants organiques, mais il est peu soluble dans l'eau (800 mg/L à 20 °C) (ATSDR, 2005). Le tétrachlorure de carbone se caractérise par un coefficient de partage n-octanol/eau (log Koe) de 2,64, une pression de vapeur élevée (12,2 kPa à 20 °C; 15,36 kPa à 25 °C) et une grande volatilisation à partir de l'eau (constante de la loi de henry = 2,98 kPa·m³/mol à 25 °C) (PISSC, 1999; OMS, 2004a).

Le tétrachlorure de carbone est une substance appauvrissant la couche d'ozone (PNUE, 1994, 2002). Un accord international (le Protocole de Montréal relatif à des substances qui appauvrissent la couche d'ozone) a été signé en 1987 afin de réglementer la production et l'utilisation de certaines substances appauvrissant la couche d'ozone dont le tétrachlorure de carbone. Au Canada, le tétrachlorure a été éliminé progressivement et n'est plus produit depuis 1996 (Environnement Canada, 2006a). Toutefois, on peut encore l'importer comme matière première destinée à des usages limités, comme la fabrication de produits chimiques (CCME, 1999, 2001). Selon Environnement Canada (2006b), toutes les autres utilisations du tétrachlorure de carbone sont interdites au Canada. Aux États-Unis, bien qu'il soit encore fabriqué, les quantités importées et exportées ont diminué (ATSDR, 2005).

Dans le passé, le tétrachlorure de carbone a servi principalement de matière première pour la fabrication de chlorofluorocarbures (réfrigérants). En raison de ses propriétés de solvant, il entrait également dans la composition des produits nettoyants domestiques et était employé comme agent de dégraissage dans l'industrie. En raison de ses propriétés ininflammables, il a été employé dans les extincteurs d'incendie. Il a également été utilisé comme solvant pour les huiles,les graisses, les laques, les vernis, les cires, le caoutchouc et les résines et comme fumigant pour les céréales, agent de nettoyage à sec et dans des produits pharmaceutiques (ATSDR, 2005).

4.2 Sources et devenir dans l'environnement

La présence de tétrachlorure de carbone dans l'air résulte en grande partie de rejets directs dans l'atmosphère (ATSDR, 2005). Dans la basse atmosphère (la troposphère), le tétrachlorure de carbone est assez stable et résiste à la dégradation. À mesure qu'il se diffuse dans les couches plus hautes (la stratosphère, à plus de 20 km de la surface de la Terre), il subit une photodégradation en présence de rayons ultraviolets (courtes longueurs d'onde, 185 à 225 nm) et produit des atomes de chlore et d'autres espèces chlorées, qui appauvrissent la couche d'ozone. Selon les estimations, la durée de vie du tétrachlorure de carbone dans l'atmosphère (troposphère et stratosphère combinées) varie de 30 à 100 ans, 50 ans étant une moyenne raisonnable (ATSDR, 2005).

La présence de tétrachlorure de carbone dans les eaux de surface est associée aux activités industrielles et aux précipitations. La volatilisation y est le principal mécanisme d'élimination, aucune dégradation mesurable découlant de l'hydrolyse, de l'oxydation ou de la photolyse n'ayant été constatée (Howard, 1990; CCME, 1999; ATSDR, 2005). Quelques études ont montré une biodégradation en laboratoire dans des conditions tant anaérobies qu'aérobies (Howard, 1990). Malgré un coefficient de partage n-octanol/eau de 2,64, son potentiel de bioaccumulation dans les poissons ne devrait pas être élevé, compte tenu de sa courte durée de vie dans les tissus de certaines espèces (PISSC, 1999).

La majeure partie du tétrachlorure de carbone rejeté dans le sol par suite de déversements, du ruissellement ou du lessivage se volatilise rapidement et aboutit donc dans l'air (PISSC, 1999). Des études expérimentales ont montré une courte demi-vie (5 jours dans le loam argileux et le loam sableux) dans des sols stériles et non stériles (Anderson et coll., 1991). Selon son coefficient d'adsorption au sol (Koc = 71), le tétrachlorure de carbone ne devrait pas se lier fortement au sol ni s'y déplacer rapidement (PISSC, 1999; OEHHA, 2000; ATSDR, 2005). Par conséquent, le tétrachlorure de carbone peut être entraîné par lessivage jusqu'à la nappe souterraine (Letkiewicz et coll., 1983).

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