Intégration de la substitution éclairée et de l’évaluation des solutions de rechange dans le programme canadien sur les produits chimiques

Ce rapport a été préparé par le Lowell Center for Sustainable Production de l’Université du Massachusetts, à Lowell, aux termes d’un marché conclu avec Environnement et Changement climatique Canada

Juin 2018

Les opinions exprimées dans ce rapport ne reflètent pas l’opinion du Gouvernement du Canada, ni ses politiques actuelles ou futures.

Table des matières

Introduction

Le gouvernement du Canada est en train d’explorer les possibilités de renouveler et de moderniser son plan de gestion des produits chimiques (PGPC) et examine actuellement la Loi canadienne sur la protection de l’environnement (1999) [LCPE (1999)]. La LCPE (1999) et le PGPC constituent des éléments fondamentaux de l’approche canadienne en matière de gestion des produits chimiques. La LCPE (1999) présente une approche préventive, selon laquelle la prévention de la pollution est la pierre angulaire des efforts nationaux pour réduire les risques liés aux substances toxiques.

Le PGPC, créé en 2006, constitue une approche pangouvernementale axée sur une stratégie unique. Cette stratégie vise à classer par ordre de priorité les substances préoccupantes et à prendre des mesures connexes pour respecter les obligations internationales du Canada en vue d’atteindre les objectifs de 2020, fixés par le Sommet mondial sur le développement durable et l’Approche stratégique de la gestion internationale des produits chimiques (ASGIPC) des Nations Unies, en matière de gestion rationnelle des produits chimiques. Le PGPC combine, sous une même stratégie, les efforts de l’ensemble des programmes et lois à l’échelle fédérale qui traitent de l’évaluation et de la gestion des substances, notamment la LCPE (1999), la Loi canadienne sur la sécurité des produits de consommation (LCSPC), la Loi sur les produits antiparasitaires (LPA), la Loi sur les aliments et les drogues (LAD) et la Loi sur les pêches.  D'ici 2020, le PGPC aura tenu ses engagements internationaux, offrant l'occasion «après 2020» d'élargir les éléments du programme.

Figure 1. Loi canadienne sur la protection de l’environnement (1999)
Figure 1 - Loi canadienne sur la protection de l’environnement (1999)
Figure 1 - Équivalent textuel

La figure montre comment le PCM a rassemblé diverses lois et réglementations relatives à la gestion des produits chimiques. Les activités du CMP en vertu de la LCPE comprennent l’évaluation et la gestion des risques des produits chimiques existants et nouveaux au Canada depuis 1994. Les activités en vertu de la Loi sur les produits antiparasitaires comprennent l’enregistrement et la réévaluation (tous les 15 ans) des pesticides. En vertu de la Loi sur les produits dangereux et de la Loi canadienne sur la sécurité des produits de consommation, la recherche, l'évaluation des risques et la gestion des risques pour la sécurité des produits de consommation sont entreprises. La Loi sur les pêches assure la protection de l'habitat du poisson, essentiel à la survie d'autres espèces. La Loi sur les aliments et drogues (produits de santé) garantit l'accès à des médicaments et à des produits de santé sûrs et efficaces. La Loi sur les aliments et drogues (aliments) comprend des politiques, des normes et des informations relatives à la sécurité des aliments (emballages, contaminants, additifs).

Dans le cadre du PGPC, Environnement et Changement climatique Canada (ECCC) et Santé Canada ont acquis une grande expertise en matière de méthodes d’examen préalable rapide ainsi qu’un certain nombre de méthodes techniques pour l’évaluation simplifiée des risques liés aux produits chimiques. Ces efforts se sont traduits par des réalisations importantes, notamment l’évaluation d’environ 3 470 substances chimiques prioritaires existantes et la prise de mesures de gestion des risques d’environ 437 substances chimiques existantes sur une période de douze ans, en plus de l’évaluation préalable à la mise en marché de près de 5 700 nouvelles substances chimiques.

À la suite des récentes réunions des intervenants du PGPC sur la situation après 2020 et de l’examen parlementaire de la LCPE (1999), il a été déterminé qu’une substitution éclairée et une évaluation des solutions de rechange constituent des éléments prioritaires à prendre en considération lors de l’élaboration de futures politiques sur la gestion des produits chimiques. Plus important encore, alors que le gouvernement commence à envisager sa stratégie en matière de gestion des produits chimiques après 2020, il est en mesure de faire passer ses efforts à un niveau supérieur en s’appuyant sur les compétences, les connaissances et les outils élaborés dans le cadre du processus d’évaluation du PGPC pour s’harmoniser avec les leçons retenues et les activités internationales concernant la substitution éclairée et l’évaluation des solutions de rechange. Ainsi, le Canada pourrait se positionner comme chef de file mondial dans l’élaboration d’un cadre global de gestion des produits chimiques axé sur une chimie plus sûre et plus durable.

L’objectif d’une substitution éclairée est « de réduire au minimum la probabilité de conséquences imprévues, qui peuvent résulter de la substitution préventive d’une substance chimique dangereuse sans bien comprendre le profil des solutions de rechange possibles, et de mettre en place un plan d’action fondé sur les meilleurs renseignements disponibles ou pouvant être estimés. »

- Traduction de l’Environmental Protection Agency des États-Unis

L’évaluation des solutions de rechange se définit comme un « processus d’identification et de comparaison des solutions de rechange chimiques et non chimiques qui pourraient remplacer les substances chimiques préoccupantes, en fonction des dangers qu’elles posent, de leur rendement et de leur viabilité économique. »

- Traduction du National Research Council des États-Unis

Dans ce contexte, le gouvernement du Canada a chargé le Lowell Center for Sustainable Production (LCSP) de l’Université du Massachusetts à Lowell — qui compte des experts reconnus en matière de substitution éclairée et d’évaluation des solutions de rechange — de réaliser une analyse sur l’intégration de la substitution éclairée et de l’évaluation des solutions de rechange dans le programme canadien sur les produits chimiques. L’analyse a été guidée par un examen des politiques, des cadres, et des outils de substitution éclairée et d’évaluation des solutions de rechange mis en œuvre à l’échelle internationale; par des entrevues avec le gouvernement, l’industrie et des intervenants non gouvernementaux; par un examen des documents de politique canadiens pertinents. L’analyse prend en considération les approches réglementaires et non réglementaires à l’intérieur et à l’extérieur du contexte de la LCPE (1999). Ainsi, le gouvernement canadien dispose de possibilités pour améliorer l’écosystème et la santé humaine tout en appuyant l’innovation et la compétitivité des entreprises canadiennes.

Intégration de la substitution éclairée et de l’évaluation des solutions de rechange au Canada

Les récentes recherches du LCSP effectuées à la demande de l’Union européenne et du Canada sur les politiques et les programmes en matière d’évaluation des solutions de rechange et de substitution à l’échelle internationale ont permis de cerner cinq points clés pour guider les mesures gouvernementales, notamment :

  1. Une combinaison d’approches volontaires et réglementaires est nécessaire pour soutenir plus efficacement la transition vers des substances chimiques plus sûres;
  2. La réglementation et les mesures stratégiques représentent d’importantes mesures incitatives de substitution;
  3. Une plus grande collaboration entre les ministères, la chaîne d’approvisionnement et la communauté scientifique est nécessaire à l’obtention de données, à l’élaboration d’outils et au renforcement de la capacité qui appuient une substitution éclairée et l’évaluation des solutions de rechange;
  4. La collaboration à l’échelle mondiale peut aider à combler les lacunes dans les données et les outils, à identifier les pratiques exemplaires ainsi qu’à renforcer et à uniformiser les activités relatives à la substitution éclairée et à l’évaluation des solutions de rechange;
  5. Les activités visant la substitution devraient être plus efficacement liées à la recherche, au développement et à l’innovation dans le domaine de la chimie durable.

Fondé sur ces éléments, ce rapport décrit une approche et un programme pour après l’an 2020 comptant quatre secteurs de mesures stratégiques en vue d’intégrer la substitution éclairée et d’appuyer les activités d’évaluation des solutions de rechange au Canada. Cette approche est conforme à celles décrites dans la Stratégie de substitution de 2017 de l’Agence européenne des produits chimiques, aux conclusions tirées en novembre 2017 par le Conseil consultatif des intervenants du PGPC et à celles tirées en janvier 2018 par le Comité scientifique du PGPC ainsi qu’aux recommandations du rapport de juin 2017 du Comité permanent de l’environnement et du développement durable.

L’établissement d’une politique-cadre ou d’un programme-cadre interministériel axé sur les solutions, qui relie les approches réglementaires classiques à des mesures de soutien et à des incitatifs non réglementaires favorisant l’innovation dans le domaine de la chimie et l’utilisation de substances chimiques plus sûres, pourrait servir de fondement aux efforts du Canada en matière de gestion des produits chimiques après 2020. La nouvelle vision pour « après 2020 » ne se concentrerait pas seulement sur l’évaluation et la gestion des « mauvais agents », mais elle encouragerait et faciliterait aussi l’élaboration et l’utilisation de substances et de produits chimiques qui sont plus sûrs et plus durables, afin de promouvoir les objectifs de la chimie verte

« La chimie verte consiste en la conception de produits et de procédés chimiques qui réduisent ou éliminent l’utilisation ou la production de substances dangereuses. La chimie verte concerne tout le cycle de vie d’un produit chimique, c’est-à-dire la conception, la fabrication et l’utilisation, et s’inspire de 12 principes fondamentaux sur lesquels est fondée sa mise en œuvre. La chimie verte est un élément important de la chimie durable. »

- Traduction du Green Chemistry and Commerce Council

« Une solution de rechange plus sûre correspond à une substance chimique qui, en raison de ses propriétés chimiques et physiques intrinsèques, présente une plus faible propension de persistance dans l’environnement, d’accumulation dans les organismes et de production d’effets néfastes chez les humains ou les animaux et qui assure les performances fonctionnelles requises. »

- Traduction du Green Chemistry and Commerce Council

La substitution éclairée, qui favorise l’évaluation approfondie et la prise en compte des solutions de rechange afin de réduire au minimum la probabilité de conséquences imprévues dans la transition vers des substances chimiques, des matériaux, des produits et des processus plus sûrs, devrait être le principe directeur de cette vision. Cette vision représente un changement culturel dans la manière dont les substances chimiques sont évaluées et gérées. L’approche, autrefois fondée sur la gestion et la réduction des risques pour chaque substance chimique, est maintenant axée sur l’évaluation et l’adoption des moyens les plus sûrs et les plus durables (substances chimiques, matériaux ou procédés) pour répondre aux fonctions exécutées par les substances chimiques préoccupantes dans des applications spécifiques, soit une approche de « substitution fonctionnelle »Note de bas de page 1. Cette approche permet un examen plus vaste des classes de substances chimiques et des catégories fonctionnelles, ce qui permet d’identifier de manière plus efficace les problèmes potentiels ainsi que le large éventail de solutions, notamment en tenant compte du besoin de la fonction. Elle permet de prioriser et de comparer systématiquement les substances chimiques selon certaines fonctions, de classer par ordre de priorité les fonctions chimiques les plus intéressantes par rapport aux dangers chimiques, au potentiel d’exposition, au potentiel de substitution ou à l’importance du marché, et de mettre en évidence les besoins de recherche en matière de chimie verte ou de solutions de conception.

Une telle politique ou un tel programme combinerait également un programme réglementaire qui met davantage l’accent sur la substitution éclairée ainsi que des programmes qui offrent du soutien technique, des possibilités de recherche et de financement, des possibilités de collaboration entre les entités gouvernementales et la chaîne d’approvisionnement, en plus d’offrir des activités d’enseignement et de formation. Ces programmes devront être soutenus par des politiques concrètes, une infrastructure, des ressources, du personnel, des mécanismes de collaboration et un mécanisme de reddition de comptes du programme.   

Pour réaliser cette vision et réussir la mise en œuvre d’un programme d’après 2020 qui intègre la substitution éclairée et appuie les activités d’évaluation des solutions de rechange au Canada, 4 domaines de mesures stratégiques pourraient être pris en considération :

  1. Renforcer la capacité scientifique et technique;
  2. Encourager l’utilisation de substances chimiques, de technologies et de processus plus sûrs;
  3. Faciliter la collaboration entre les gouvernements fédéraux, provinciaux, territoriaux et internationaux;
  4. Soutenir l’innovation par la recherche et le développement dans le domaine de la chimie verte et durable.

Renforcer la capacité scientifique et technique

Afin de soutenir un effort de gestion des substances chimiques qui repose sur la substitution éclairée et l’évaluation des solutions de rechange, il est nécessaire de renforcer la capacité du gouvernement et de l’industrie. Les ministères doivent être en mesure d’appuyer l’élaboration de cadres et de directives pour la planification de la substitution ou les évaluations des solutions de rechange, d’élaborer et de perfectionner des outils, des méthodes et des sources de données pour appuyer le processus d’évaluation des solutions de rechange, et d’examiner la qualité des évaluations. L’industrie doit être en mesure d’identifier et d’évaluer des substituts ainsi que de prendre des décisions à leur égard. Il est aussi important pour ECCC et Santé Canada, ainsi que pour les autres ministères, de renforcer leur capacité à appuyer l’industrie dans la recherche, l’élaboration, l’évaluation et l’adoption de solutions de rechange plus sûres. L’industrie devrait se concentrer sur l’ensemble de la chaîne d’approvisionnement, des fabricants de substances chimiques aux détaillants, car chaque niveau joue un rôle important dans l’élaboration, l’utilisation, l’adoption ou l’approvisionnement de substances et de produits chimiques et chaque niveau a des besoins de capacité différents.

Le gouvernement canadien pourrait mettre en place un nouveau centre national d’excellence en matière de chimie plus sûre (ou un réseau de centres) qui soutiendrait aussi un réseau d’experts multipartites composé de représentants du gouvernement, de l’industrie et du milieu universitaire de partout au Canada pour : 

  • Élaborer des méthodes cohérentes pour l’évaluation des solutions de rechange aux produits chimiques prioritaires, en se fondant sur l’expérience internationale et les principaux cadres, comme celui du National Research Council des États-Unis, et en s’appuyant sur le Comité scientifique du PGPC;
  • Soutenir les évaluations des solutions de rechange pour les substances chimiques et les secteurs prioritaires nationaux grâce à la diffusion de lignes directrices, de recherches scientifiques et d’activités d’évaluation;
  • Établir des programmes de formation sur l’évaluation des solutions de rechange, la substitution des substances chimiques et la chimie verte pour le gouvernement et les intervenants intéressés tout au long de la chaîne d’approvisionnement;
  • Offrir du soutien technique et des occasions de réseautage aux entreprises, en utilisant une infrastructure élaborée grâce à des années de programmes d’aide technique en matière de prévention de la pollution;
  • Faciliter les initiatives de recherche dans les secteurs public et privé sur les substances chimiques, la conception de produits et de processus plus sûrs, et les technologies relatives aux substances chimiques et aux fonctions prioritaires;
  • Servir de foyer à la communauté de praticiens dans ce domaine afin de soutenir la formation, la sensibilisation et l’échange des expériences. 

De manière plus importante, un nouveau centre d’excellence pourrait également soutenir des discussions et des projets de démonstration dans l’ensemble des secteurs et de la chaîne d’approvisionnement en matière de chimie plus sûre. Un forum pour les agents le long de la chaîne d’approvisionnement pourrait être utile pour discuter des besoins, échanger des expériences et des ressources et renforcer les collaborations. Il est important que ces efforts de soutien ne soient pas seulement axés sur les fabricants et les ingénieurs-concepteurs de produits chimiques, mais aussi sur les marques et les détaillants, qui subissent de plus en plus la pression des consommateurs qui veulent que les substances chimiques préoccupantes dans les produits vendus soient remplacées.

Encourager l’utilisation de substances chimiques, de technologies et de processus plus sûrs

Bon nombre des activités essentielles actuellement menées pour évaluer et gérer les substances chimiques au Canada, notamment les déclarations de nouvelles substances, les avis de nouvelles activités (NAc), l’évaluation des risques et la gestion des risques, pourraient être renforcées pour offrir des renseignements sur la transition vers des substances chimiques, des technologies et des processus plus sûrs et pour encourager leur utilisation. 

Par exemple, l’expertise et les connaissances acquises dans le cadre des déclarations de nouvelles substances et des programmes d’évaluation des risques pourraient servir de fondement pour :

  • Élaborer des outils de prévision pour appuyer l’évaluation comparative des substances chimiques et fournir des avertissements précoces à l’industrie au sujet des substances et des structures ou classes chimiques préoccupantes;
  • Établir des mécanismes pour faciliter l’entrée sur le marché des substances chimiques plus sûres grâce à des consultations avant la déclaration du Programme de déclarations de nouvelles substances, notamment en fournissant des outils de conception et d’autres renseignements scientifiques à l’appui de la mise au point de produits chimiques plus sûrs;
  • Établir des programmes de reconnaissance pour les substances chimiques, les produits et les technologies qui ont des profils de toxicité réduits pour une fonction particulière, d’après le modèle du programme Safer Choice de l’EPA des États-Unis;
  • Créer une liste des substances chimiques qui présentent des propriétés extrêmement dangereuses préoccupantes en guise de signal d’alerte précoce pour une substitution volontaire;
  • Mettre en place des systèmes pour suivre et examiner de plus près l’information concernant l’utilisation et l’exposition recueillie par le biais des déclarations de nouvelles substances, des avis de NAc ainsi que d’autres mécanismes pour suivre les substances de rechange potentiellement regrettables et identifier les cibles potentielles des efforts de substitutions.

Les efforts de gestion des risques liés aux substances chimiques pourraient également appuyer cette vision en incluant des objectifs de substitution et des exigences de planification dans les avis relatifs à la planification de la prévention de la pollution et les codes de conduite, lorsqu’il existe un cadre légal, ou en incluant des exigences relatives à l’évaluation des solutions de rechange lorsque les règlements restreignent ou réduisent considérablement les limites d’exposition à une substance chimique préoccupante.

Faciliter la collaboration entre les gouvernements fédéraux, provinciaux, territoriaux et internationaux

La substitution éclairée nécessite une vaste gamme d’options et la prise en compte d’un éventail de compromis possibles pour les travailleurs, les consommateurs et l’environnement. De plus, l’harmonisation des politiques et des méthodes à l’échelle internationale concernant la substitution éclairée et l’évaluation des solutions de rechange pourrait appuyer l’élaboration et la mise en œuvre de ces approches de gestion des substances chimiques au Canada. Ainsi, la collaboration entre le gouvernement du Canada et ceux du monde entier est essentielle.

Comme point de départ, ECCC et Santé Canada pourraient réunir des experts des ministères fédéraux, provinciaux et territoriaux pour appuyer une approche pangouvernementale en matière de substitution éclairée et d’évaluation des solutions de rechange. Cet effort pourrait commencer par un examen des structures des politiques de gestion des substances chimiques pour comprendre les synergies ou les conflits qui existent entre les lois, les ministères et les catégories de produits, en revoyant les priorités de recherche sur les substances chimiques et les matériaux pour établir des liens entre les priorités réglementaires et celles du marché et en analysant les possibilités d’harmonisation et de collaboration. Un tel effort devrait comprendre un large éventail d’autorités qui ont un rôle à jouer dans la transition vers des substances chimiques plus sûres, y compris les autorités responsables, entre autres, de la recherche et de l’innovation, des achats, de la santé au travail, de la défense, de la protection de l’environnement, de la sécurité des produits de consommation, des produits chimiques agricoles et de la santé publique.

Étant donné le rôle de chef de file du Canada au sein des comités de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) et du Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE) qui visent les essais, l’évaluation et la gestion des substances chimiques, le Canada est également bien placé pour travailler avec d’autres gouvernements coopératifs afin de façonner les activités internationales sur la substitution éclairée et l’évaluation des solutions de rechange. Plus particulièrement, Santé Canada et ECCC pourraient partager des ressources et harmoniser des approches ou des critères en matière de solutions de rechange, de désignation de substances chimiques plus sûres et de substitution avec les États-Unis (et des États comme la Californie) au moyen d’initiatives bilatérales comme le Conseil de coopération en matière de réglementation. Santé Canada et Environnement et Changement climatique Canada pourraient travailler en étroite collaboration avec l’Agence européenne des produits chimiques dans la mise en œuvre de sa stratégie de substitution. Ils pourraient jouer un rôle actif dans l’élaboration des activités d’évaluation des solutions de rechange et de substitution dans le cadre de la boîte à outils de l’OCDE pour l’évaluation des solutions de rechange et de l’ASGIPC du PNUE. La participation du Canada à l’échelle internationale pourrait appuyer l’harmonisation des approches en matière d’évaluation des solutions de rechange, permettre de déterminer les substances chimiques prioritaires communes en vue des mesures de substitution au sein de la chaîne d’approvisionnement, permettre l’échange d’expériences afin d’établir des pratiques exemplaires et accroître l’incidence des politiques canadiennes sur les entreprises canadiennes.

Soutenir l’innovation par la recherche et le développement dans le domaine de la chimie verte et durable

D’autres ministères et intervenants jouent aussi un rôle important en ce qui concerne le soutien des objectifs d’innovation d’une stratégie après 2020 pour favoriser la substitution éclairée et l’évaluation des solutions de rechange. La coordination entre les programmes canadiens de réglementation des substances chimiques, qui relèvent principalement de Santé Canada et d’ECCC, et les programmes qui offrent du financement, des incitatifs et du soutien pour une chimie plus sûre, qui relèvent principalement d’Innovation, Sciences et développement économique Canada (ISDE), est essentiel. 

Un rapport plus efficace entre les priorités réglementaires pour les substances chimiques et les programmes qui appuient la recherche fondamentale, les essais, le développement et la fabrication de substances chimiques plus durables [par exemple, Green Centre Canada, Bioindustrial Innovation Canada (BIC), Conseil national de recherches Canada (CNRC) et Technologies du développement durable Canada  (TDDC)], devrait également être envisagé. Ces programmes sont reconnus mondialement pour leurs efforts visant à soutenir l’innovation dans le domaine de la chimie plus durable.

Le fait d’établir des relations avec les programmes d’enseignement et de recherche universitaires sur la chimie verte, qui sont de plus en plus nombreux, par exemple avec l’Université McGill, l’Université de Toronto et l’Univsersité Queen’s, pourrait aussi aider à lier plus efficacement les connaissances acquises dans le cadre des efforts d’évaluation de substances chimiques à la capacité d’innovation plus sûre dans le secteur de la chimie.

L’évaluation des programmes actuels pourrait servir de point de départ pour comprendre les forces, les lacunes et la coordination d’une infrastructure en matière d’innovation plus sûre dans le secteur de la chimie. ECCC et Santé Canada pourraient entreprendre une analyse globale des programmes financés par les gouvernements à l’échelle fédérale, provinciale, territoriale (FPT) en matière de prévention des risques liés aux substances chimiques (au travail, pour l’environnement et pour la santé publique), de prévention de la pollution, de chimie verte et d’innovation des produits chimiques biologiques pour comprendre les ressources techniques disponibles, l’expertise et le financement ainsi que la recherche, le développement et les besoins de soutien de l’industrie tout au long de la chaîne d’approvisionnement. 

Conclusion

Ce rapport décrit une vision et des secteurs de mesures stratégiques pour intégrer la substitution éclairée et l’évaluation des solutions de rechange dans les prochains efforts du Canada en matière de gestion des substances chimiques. Certaines des recommandations ne sont que des prolongements relativement simples de programmes existants, alors que d’autres nécessiteront des modifications à la LCPE (1999) ou la création de nouvelles infrastructures ou la coordination de programmes existants. L’un des objectifs principaux de cette analyse est de présenter des possibilités qui peuvent stimuler les discussions entre les ministères et les intervenants de l’industrie, du milieu universitaire et des organismes sans but lucratif sur les moyens les plus efficaces de rendre les produits chimiques plus sûrs au Canada. Cette façon de faire pourrait éclairer les discussions concernant le PGPC d’après 2020.

Grâce à la mise en œuvre du PGPC et d’un certain nombre de programmes de pointe en matière de prévention de la pollution et de chimie verte, le gouvernement canadien a établi de nombreuses bases en matière d’évaluation scientifique, de recherche et de soutien nécessaires pour faciliter la transition vers des substances chimiques plus sûres. Par conséquent, le Canada est bien placé pour élaborer une politique globale de gestion des substances chimiques fondée sur la substitution éclairée après 2020, qui appuie l’innovation et la compétitivité des entreprises canadiennes et qui améliore l’écosystème et la santé humaine dans le monde.

Notes de bas de page

Note de bas de page 1

Tickner J, et al. Advancing Safer Alternatives Through Functional Substitution. Environ. Sci. Technol. 2015; 49 (2): 742–749.

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