Notes d'allocution pour Ginette Petitpas Taylor, ministre de la Santé - Antifragile : s'attaquer à la stigmatisation, aux préjugés et à la discrimination pour renforcer l'intervention contre le VIH, symposium présenté à l'occasion de la Conférence internationale sur le sida 2018 (SIDA 2018)

Discours

Amsterdam (Pays-Bas)
26 juillet 2018

Introduction

Bonjour tout le monde. J'espère que tout le monde est en forme ce matin.

Je tiens à remercier la Société internationale sur le SIDA de m'avoir invitée. C'est un honneur pour moi de représenter le Canada au sein d'un groupe aussi distingué.

Nous avons beaucoup de choses à nous dire, mais aussi beaucoup de choses à apprendre.

Les points de vue des personnes qui vivent avec le VIH et le sida, de même que leur expérience vécue, sont au cœur de ce travail.

Aux personnes qui ont choisi de témoigner aujourd'hui : merci.

Vous incarnez ce que c'est que d'être « antifragile ».

Vous avez transformé vos défis en force.

Votre détermination, votre courage et votre résilience m'inspirent.

Nous avons parcouru beaucoup de chemin au cours des 30 dernières années.

Grâce au dévouement et à la passion de personnes comme vous, nous avons accompli des progrès autrefois inimaginables vers un monde sans sida.

Je suis fière de dire que le Canada a été au premier plan de l'intervention grâce au travail de notre société civile et de champions aussi extraordinaires que Stephen Lewis, le Dr Julio Montaner et, bien sûr, le Dr Mark Wainberg. Le Dr Wainberg n'est malheureusement plus des nôtres, et il nous manque terriblement à l'occasion de cette conférence.

Je tiens aussi à souligner la contribution mondiale inestimable des personnes qui vivent avec le VIH.

Nous accompli beaucoup de choses ensemble. Mais il reste encore des choses à faire.

Beaucoup de personnes ne connaissent toujours pas leur statut sérologique, se heurtent à des obstacles au traitement et n'ont pas le soutien dont elles ont besoin pour mener une vie active et saine.

Malgré nos efforts, quelque chose nous barre le chemin.

J'ai parlé à de nombreuses personnes vivant avec le VIH depuis que je suis devenue la ministre de la Santé du Canada, y compris depuis mon arrivée ici cette semaine.

Parmi les nombreuses épreuves qui m'ont été racontées, une chose qui m'a été répétée est que la stigmatisation nous empêche de progresser.

La stigmatisation : un obstacle majeur

La stigmatisation a de nombreux visages.

Nous connaissons tous la stigmatisation associée au VIH, mais elle est aggravée par d'autres formes de stigmatisation.

Racisme. Homophobie. Transphobie.

La stigmatisation associée à la maladie mentale.

La stigmatisation intériorisée.

La discrimination contre les personnes qui s'injectent de la drogue et contre celles qui travaillent dans l'industrie du sexe.

Ce ne sont que quelques-uns des nombreux visages différents de la stigmatisation et de la discrimination, qui ont des effets dévastateurs.

La stigmatisation peut isoler des personnes de leurs partenaires intimes, de leurs familles et de leurs collectivités.

La stigmatisation peut empêcher des personnes de se faire soigner.

La stigmatisation cache le VIH, et contribue ainsi à alimenter l'épidémie mondiale de sida.

Nous devons mettre fin à la stigmatisation sous toutes ses formes pour veiller à ce que toutes les personnes qui vivent avec le VIH connaissent leur statut sérologique et obtiennent les traitements dont elles ont besoin.

Une approche fondée sur les droits

Quelle est donc la solution? L'un de ses éléments clés se trouve à l'intersection des droits de la personne et de la santé publique.

Le traitement seul ne suffit pas. Pour combattre la stigmatisation, il faut une approche intégrée qui place les droits de la personne avant tout.

Au Canada, la protection et la promotion des droits de la personne font partie du tissu social de notre pays et sont essentielles à notre façon de gouverner.

Les droits de la personne guident donc notre intervention contre le VIH au Canada et à l'étranger.

Nous travaillons à rétablir la confiance des groupes marginalisés.

Même si ce processus est toujours en cours, nous avons déjà pris des mesures importantes.

L'une des principales priorités est de renouveler notre relation de nation à nation avec les premiers peuples du Canada, un processus qui repose sur la reconnaissance des droits, la coopération et les partenariats.

Les droits des personnes LGBTA2 sont une autre priorité. En novembre 2017, notre premier ministre a présenté des excuses officielles à la communauté LGBTA2 pour des lois, des politiques et des pratiques fédérales qui étaient oppressives et discriminatoires.

L'été dernier, nous avons adopté une loi qui interdit la discrimination à l'endroit des Canadiens transgenres et qui les protège contre les crimes haineux.

Nous avons aussi fait d'importants changements à la politique canadienne antidrogue pour reconnaître les besoins des personnes qui consomment des drogues.

En 2016, nous avons rétabli la réduction des méfaits comme pilier de l'approche de santé publique contre la crise des opioïdes.

Nous avons aussi adopté la Loi sur les bons samaritains secourant les victimes de surdose pour offrir certaines protections juridiques aux personnes qui demandent l'aide des secours en cas de surdose.

Nous espérons que la Loi contribuera à réduire les craintes associées à la venue de policiers lors de surdoses et qu'elle encouragera les gens à aider à sauver des vies.

Nous avons récemment pris les devants à la Commission des stupéfiants de l'Organisation des Nations Unies par rapport à la stigmatisation des personnes qui consomment des drogues.

En compagnie de dix-neuf de nos alliés, nous avons adopté une résolution qui insiste sur l'importance de combattre la stigmatisation et de veiller à ce que personne ne se voit refuser de soins pour ce motif.

En dernier lieu, nous avons pris des mesures pour prévenir la criminalisation de la non-divulgation du VIH.

Nous savons que I = I : Indétectable = Intransmissible. Cela signifie qu'il n'y a effectivement pas de risque qu'une personne traitée qui conserve une charge virale supprimée transmette le VIH par voie sexuelle.

Après avoir tenu compte des éléments probants, le gouvernement du Canada a déterminé que le droit criminel ne devrait pas s'appliquer aux personnes qui ne divulguent pas leur séropositivité avant toute activité sexuelle, à condition que ces personnes conservent une charge virale supprimée.

Ma collègue la ministre de la Justice travaille avec ses homologues provinciaux afin d'aborder la criminalisation du VIH.

Parce que nous savons que la criminalisation du VIH est une manifestation, et un moteur, de la stigmatisation.

Le gouvernement du Canada accueille donc favorablement le travail entrepris par des experts pour en arriver à l'énoncé de consensus mondial sur la science du VIH dans le contexte du droit criminel, publié hier. Il appuie aussi la conclusion qu'il faut user d'encore plus de prudence lorsque des poursuites criminelles sont envisagées.

Il faut que le message d'I = I soit entendu et partagé.

Nous avons la responsabilité de réduire la stigmatisation sous toutes ses formes.

Je mets au défi mes homologues ministres de la Santé de transmettre ce message dans leurs pays respectifs.

Cadre d'action sur les infections transmissibles sexuellement et par le sang

L'intervention du Canada contre le VIH adopte une approche intégrée par rapport aux infections transmissibles sexuellement et par le sang, qui ont des voies de transmission et des facteurs de risque en commun.

Le mois dernier, le Canada a lancé un nouveau cadre d'action pancanadien sur les infections transmissibles sexuellement et par le sang.

Ce cadre contribuera à guider nos efforts communs, dont notre investissement annuel de plus de 87,5 millions de dollars en vue de réduire ces infections.

Atteindre nos objectifs

Les objectifs 90-90-90, reconnus à l'échelle mondiale, se trouvent au cœur du cadre.
C'est avec plaisir que j'ai fait rapport sur les progrès du Canada la semaine dernière. Bonne nouvelle : le Canada a atteint l'un des objectifs et fait des progrès par rapport aux deux autres.

En fonction des données pour 2016, il est estimé qu'un peu plus de 63 000 personnes vivent avec le VIH au Canada.

Parmi elles, il est estimé que 86 % ont reçu un diagnostic, que, du nombre, 81 % reçoivent un traitement et que parmi ces dernières, 91 % ont une charge virale supprimée.

Je suis fière de nos progrès, mais je sais que nous avons encore du travail à faire pour atteindre nos objectifs.

Nous devons atteindre 90 % pour tous les objectifs, et notre gouvernement appuie des initiatives pour ce faire.

À titre d'exemple, l'initiative Connaissez votre statut menée en Saskatchewan a réussi à promouvoir le dépistage du VIH dans les communautés autochtones au moyen de modèles adaptés aux réalités culturelles et montre qu'il est possible de faire baisser le nombre de nouveaux diagnostics dans ces communautés.

Notre Laboratoire national de microbiologie appuie d'autres initiatives importantes. Il travaille avec des partenaires autochtones pour donner accès à des méthodes de dépistage du VIH adaptées aux réalités culturelles dans les communautés rurales et éloignées du Canada, un défi d'envergure étant donné la géographie de notre pays.

Nous appuyons aussi des efforts pour contrer la stigmatisation et la discrimination dans le secteur de la santé. Grâce à la création de ressources et de formation à l'intention des travailleurs de la santé en première ligne, nous les aidons à fournir des services sûrs et non stigmatisants aux personnes qui vivent avec le VIH ou qui sont à risque de contracter l'infection.

Contribution internationale

Notre regard porte au-delà de nos frontières, et pendant que nous prenons des mesures au pays, nous cherchons aussi à appuyer l'intervention mondiale contre le VIH et le sida.

Nous avons déjà appuyé le Fonds mondial de lutte contre le SIDA, la tuberculose et le paludisme et continuerons de le faire.

Nous nous sommes engagés à verser 804 millions de dollars sur trois ans, ce qui contribuera à garantir que les personnes qui vivent avec le VIH et le sida aient accès aux traitements dont elles ont besoin, peu importe où elles vivent.

Je suis fière que notre gouvernement appuie ces initiatives et d'autres encore, mais je reconnais aussi que cela ne suffit pas.

Nous devons continuer d'échanger des connaissances, mais surtout, nous devons engager un dialogue constructif avec les personnes qui vivent avec le VIH et le sida.

Rien de ce qui nous concerne ne doit se faire sans nous

C'est pourquoi nous appuyons des organisations comme le Réseau canadien des personnes séropositives, un groupe qui représente les personnes vivant avec le VIH au Canada.

Des partenariats comme celui-ci facilitent le dialogue entre les décideurs, les fournisseurs de soins de santé et les personnes qui vivent avec le VIH.

À mesure que nous allons de l'avant, nous devons aussi veiller à ce que notre travail soit guidé par des voix de jeunes leaders. C'est avec un immense plaisir que j'ai rencontré hier un groupe de jeunes brillants et inspirés provenant du monde entier.

Aux jeunes : vous êtes les champions mondiaux de la lutte contre la stigmatisation, non seulement pour l'avenir, mais dès maintenant. Nous avons besoin de votre passion, de votre dévouement et de votre inspiration : d'abord pour atteindre les objectifs 90-90-90, puis pour mettre fin à cette épidémie une fois pour toutes.

Aller de l'avant ensemble

Nous avons l'occasion de rehausser le dialogue : d'explorer les défis et d'échanger des solutions.

Tout le monde a un rôle à jouer.

Ensemble, nous pouvons bâtir des sociétés inclusives en mettant fin à la stigmatisation, aux préjugés et à la discrimination.

Je souhaite que vos discussions d'aujourd'hui soient fructueuses.

Merci beaucoup et bonne fin de conférence!

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