Chapitre 6 : Diagnostic du paludisme : Recommandations canadienne pour la prévention et le traitement du paludisme (malaria)

Une déclaration d'un comité consultatif (DCC) du Comité consultatif de la médecine tropicale et de la médecine des voyages (CCMTMV)

Mis à jour en 2023

Nouveautés

Veuillez noter que ce chapitre a été dernièrement mis à jour en 2017, avec une révision partielle effectuée au cours de l'été 2023 pour refléter des nouvelles informations sur le test d'amplification isotherme à médiation en boucle (LAMP) et des cas de souches de P. falciparum génétiquement déficientes en HRP-2/3.

Table des matières

Préambule

Le Comité consultatif de la médecine tropicale et de la médecine des voyages (CCMTMV) donne de façon continue à l'Agence de la santé publique du Canada (ASPC) des conseils opportuns de nature médicale, scientifique et sanitaire concernant les maladies infectieuses tropicales et les risques pour la santé associés aux voyages internationaux. L'ASPC reconnaît que les recommandations et les conseils formulés dans cette déclaration reposent sur les meilleures pratiques médicales et connaissances scientifiques actuellement accessibles et les diffuse dans le but d'informer les voyageurs ainsi que les professionnels de la santé qui sont appelés à leur prodiguer des soins.

Les personnes qui administrent ou utilisent des médicaments, des vaccins ou d'autres produits devraient bien connaître la monographie des produits, ainsi que toute autre norme ou instruction approuvée concernant leur usage. Les recommandations relatives à l'usage des produits et les autres renseignements présentés ici peuvent différer de ceux qui figurent dans la monographie ou toute autre norme ou instruction approuvée pertinente établie par les fabricants autorisés. Les fabricants font approuver leurs produits et démontrent l'innocuité et l'efficacité de ceux-ci uniquement lorsque ces produits sont utilisés conformément à la monographie ou à toute autre norme ou instruction approuvée semblable.

Sommaire

  • Le diagnostic du paludisme est considéré comme une urgence médicale, et chaque site clinique où des cas potentiels sont évalués devrait disposer d'un système garantissant un test rapide et fiable, soit sur place, soit par l'intermédiaire d'un système d'orientation rapide.
  • La microscopie nécessite un niveau élevé de formation et d'expertise et reste le test de référence.
  • Les tests de diagnostic rapide, qui reposent sur la détection d'antigènes, devraient toujours être disponibles rapidement. Ils ont une sensibilité imparfaite, une bonne spécificité, mais des résultats de spéciation modérément fiables.
  • Le test LAMP (un type de test d'amplification des acides nucléiques) est un test rapide et simple qui présente un niveau élevé de sensibilité et de spécificité; cependant, il ne permet pas actuellement d'obtenir une spéciation. Le test LAMP peut être utilisé pour exclure le paludisme sans effectuer d'autres tests. Ce test est approuvé au Canada.
  • Seule la microscopie peut fournir une spéciation et une parasitémie fiable. Les résultats sont importants pour la gestion définitive. Tous les laboratoires devraient s'efforcer de mettre en place un protocole permettant d'obtenir les résultats de la microscopie en quelques heures.
  • La méthode PCR peut fournir une spéciation très précise, en particulier pour les infections mixtes, mais elle n'est pas commercialisée et n'est pas facilement ou rapidement disponible pour la plupart des centres au Canada.

Contexte

Le paludisme à Plasmodium falciparum peut entraîner rapidement la mort, en particulier chez un hôte non immun. C'est le diagnostic le plus urgent à confirmer ou à exclure chez le voyageur qui présente une fièvre à son retour d'un voyage dans une région impaludée. Les signes et symptômes qui peuvent se manifester chez des personnes atteintes de paludisme ne sont ni sensibles ni spécifiques. Par exemple, la fièvre n'est souvent pas cyclique, et la splénomégalie est rarement présente en début d'évolution du paludisme à P. falciparum Note de bas de page 1. Par conséquent, une évaluation clinique, même effectuée par des experts, peut ne pas confirmer ou écarter de façon fiable un diagnostic de paludisme Note de bas de page 2.

La vaste majorité des cas de paludisme liés aux voyages diagnostiqués dans des pays où le paludisme n'est pas endémique se déclarent plusieurs mois après le retour des voyageurs d'une région impaludée Note de bas de page 3. Cependant, certains cas, y compris les cas de P. falciparum, se déclareront après une période plus longue, parfois six mois ou plus après l'exposition. Le CCMTMV recommande donc que les voyageurs qui tombent malades et ont une fièvre inexpliquée dans l'année suivant leur retour (qu'une prophylaxie antipaludéenne ait été prescrite ou non, ou suivie ou non) consultent immédiatement un médecin et l'informent de leurs antécédents de voyage. Il faut être particulièrement attentif aux fièvres qui se déclarent dans les trois mois suivant le retour d'un voyage, car plus de 90 % des maladies liées au paludisme à P. falciparum surviennent au cours de cette période.

Les fournisseurs de soins de santé devraient en informer les voyageurs lors de l'évaluation effectuée avant un voyage et les médecins devraient inclure un recueil des antécédents de voyage dans l'évaluation des patients qui présentent une fièvre.

Méthodologie

Le présent chapitre a été élaboré par un groupe de travail composé de bénévoles du CCMTMV. Le groupe de travail, avec le soutien du secrétariat, était chargé d'évaluer la littérature disponible, de synthétiser et d'analyser les données probantes, de rédiger des recommandations et de composer ce chapitre. La version définitive du chapitre a été approuvée par tous les membres du CCMTMV.

Les recommandations n'ont pas été élaborées à l'aide de la méthode GRADE (Grading of Recommendations Assessment, Development and Evaluation). Cette décision, motivée par les directives contenues dans la Déclaration du CCMTMV quant au Processus fondée sur les preuves pour l'élaboration de lignes directrices et de recommandations liées à la médecine de voyage et à la médecine tropicale Note de bas de page 4, repose sur plusieurs considérations. La plupart des recommandations formulées dans le présent chapitre appartiennent à la catégorie des « bonnes pratiques », en ce sens qu'il n'y a pas de solution de rechange raisonnable (p. ex. un test de dépistage du paludisme devrait être effectué chez un voyageur fiévreux de retour d'une région endémique). Dans certains cas, des recommandations sont formulées sans évaluation GRADE, car elles présentent des avantages importants, avec des effets potentiels minimes pour le participant (p. ex. l'utilisation de tests diagnostiques rapides lorsque les frottis de paludisme ne sont pas disponibles rapidement). Enfin, on a jugé que l'utilisation d'une approche GRADE pour comparer les différentes modalités de diagnostic nécessitait probablement d'importantes ressources sans toutefois avoir une grande influence sur la nature des recommandations. Par conséquent, les recommandations formulées dans le présent chapitre sont fondées sur l'analyse et la synthèse des données probantes disponibles, combinées à l'opinion d'experts.

Microscopie

Pour confirmer ou exclure un diagnostic de paludisme, un échantillon de sang doit être analysé à l'aide de tests parasitologiques. Le test standard consiste en un examen microscopique de frottis sanguins (étalement mince et goutte épaisse). Il faut beaucoup de formation et d'expérience pour bien analyser les frottis sanguins, notamment pour interpréter les gouttes épaisses, identifier l'espèce de parasites et pour la quantification des parasitémies. L'absence de personnel expérimenté peut limiter l'exactitude du diagnostic du paludisme dans les laboratoires au Canada Note de bas de page 5, alors que le diagnostic dans des pays à faible revenu est rendu plus difficile par la qualité de la microscopie, ainsi que par la supervision et le contrôle de la qualité dans le laboratoire Note de bas de page 6. Par exemple, le diagnostic de paludisme établi après l'analyse de frottis sanguins dans des cliniques locales en Afrique subsaharienne n'a pu être confirmé que chez 25 % des cas diagnostiqués parmi des membres d'un Corps des volontaires de la paix des États-Unis Note de bas de page 7.

Si l'on soupçonne un cas de paludisme, un laboratoire canadien devrait être en mesure de confirmer la présence du parasite et, dans la plupart des cas, de déterminer l'espèce en cause, moins de 2 heures après la réception d'un échantillon sanguin Note de bas de page 5. Dans de rares cas, lorsque la parasitémie est faible, un frottis initial et/ou un test rapide peut être faussement négatif. Par conséquent, deux frottis supplémentaires doivent être examinés à 6 ou 12 heures d'intervalle pour confirmer ou exclure le diagnostic, ou un test de diagnostic rapide (TDR) doit être effectué (à moins qu'un autre diagnostic ne puisse être fermement établi). Il est important de répéter les frottis à intervalles réguliers (généralement au moins une fois par jour) afin d'évaluer l'évolution de la maladie. Il n'y a aucun avantage à tenter de planifier le prélèvement d'échantillons sanguins en fonction du cycle de la fièvre, et cela pourrait retarder le diagnostic Note de bas de page 8.

Un des éléments essentiels de l'interprétation d'un frottis pour la détection du paludisme est l'identification de l'espèce du parasite. Il est essentiel de bien identifier l'espèce afin de choisir le traitement adéquat et la gestion des patients. La quantification de la parasitémie est également importante pour le pronostic, la détermination de la nécessité d'un traitement parentéral et l'admission dans une unité de soins intensifs.

Tests diagnostiques rapides

Les tests diagnostiques rapides (TDR) ne font pas appel à la microscopie ni à des techniques spécialisées de laboratoire et peuvent jouer un rôle d'appoint utile dans le diagnostic du paludisme Note de bas de page 9. Santé Canada a homologué divers TDR qui peuvent être utilisés au Canada et passés en revue dans la Liste des instruments médicaux homologués Note de bas de page 10. Les TDR sont des méthodes immunochromatographiques qui utilisent des anticorps monoclonaux pour capturer des antigènes spécifiques du paludisme dans un échantillon de sang, produisant un changement de couleur visible. Tous les tests comportent une bande témoin positive qui devient visible lorsque l'échantillon migre le long de la bandelette. L'absence d'une bande témoin indique que le test n'est pas valide, mais la présence d'une bande témoin visible n'est pas un gage de fiabilité Note de bas de page 11.

Les TDR utilisent de petites quantités de sang (de 2 à 50 μL) et peuvent être effectués sur des prélèvements par ponction digitale ou sur du sang ou du plasma traité à l'anticoagulant. Les cibles actuelles des TDR sont la protéine 2 riche en histidine de P. falciparum (PfHRP-2) ou des enzymes de la voie glycolytique du parasite, par exemple la lactate déshydrogénase spécifique de l'espèce (pLDH) ou l'aldolase pan-espèce de Plasmodium. Les tests basés sur la lactate déshydrogénase permettent de détecter toutes les espèces de paludisme (pan-spécifique) ou peuvent être spécifiques au P. falciparum ou au P. vivax. Les tests basés sur l'aldolase sont pan-spécifiques et ne peuvent différencier aucune des espèces de paludisme.

L'Organisation mondiale de la Santé énumère les TDR recommandés, qui peuvent être classés en sept catégories différentes Note de bas de page 12. On peut utiliser des combinaisons d'antigènes cibles pour détecter l'infection à P. falciparum, à P. vivax, l'infection mixte à P. falciparum et à P. vivax ou l'infection mixte à P. falciparum et à d'autres espèces Note de bas de page 13. À ce jour, il n'existe pas de tests spécifiques pour P. malariae et P. ovale Note de bas de page 14 Note de bas de page 15. Les parasites P. knowlesi présentent une réaction croisée avec la pLDH, et les tests peuvent donc signaler à tort une infection par P. falciparum ou P. vivax Note de bas de page 16 Note de bas de page 17. La sensibilité de la plupart de ces tests de P. falciparum est plus ou moins comparable à la microscopie, même s'ils ne sont pas aussi sensibles que les frottis effectués par les experts en microscopie. Il est aussi important de comprendre que, notamment en raison d'un manque de sensibilité pour l'ensemble des espèces autres que P. falciparum, l'obtention d'un TDR négatif n'exclut pas le paludisme Note de bas de page 18.

Au Canada, les TDR ne sont approuvés qu'aux fins d'utilisation dans les laboratoires agréés. Même si certains TDR avaient été mis au point au départ pour que les voyageurs qui n'auraient pas accès à un diagnostic efficace du paludisme puissent les utiliser en voyage, leur fiabilité dans un tel contexte s'est cependant avérée sous optimale. Des proportions importantes de voyageurs sont incapables de terminer le protocole du test ou d'interpréter correctementNote de bas de page 19 Note de bas de page 20 les résultats et les taux de résultats faussement négatifs sont inacceptables Note de bas de page 21. Dans certains cas, les expatriés peuvent faire partie d'une communauté assez stable, de sorte que des membres clés pourraient recevoir une formation adéquate sur l'utilisation des TDR et l'administration d'un auto-traitement. Il faut user de prudence parce qu'il existe peu de données provenant d'études contrôlées sur l'utilisation des TDR dans les populations d'expatriés ou de voyageurs qui séjournent longtemps à l'étranger. L'évaluation d'un programme de prévention du paludisme pour les expatriés dans les régions impaludées, qui comprenait des TDR et un traitement de réserve, a révélé que 15 % des participants éprouvaient des difficultés à effectuer des TDR et que 22 % avaient recours à un traitement de réserve, malgré l'obtention d'un TDR négatif Note de bas de page 22. Cependant, lorsque ces tests sont utilisés par des employés de laboratoire formés, ils peuvent permettre un diagnostic rapide du paludisme en attendant la réalisation de tests de confirmation par microscopie et/ou d'amplification des acides nucléiques Note de bas de page 9.

En général, les TDR sont le plus efficaces pour détecter le P. falciparum, les taux de sensibilité variant entre 88 % et 100 % et les taux de spécificité entre 92 % et 96 % Note de bas de page 23 Note de bas de page 24. Une méta-analyse récente a déterminé que les TDR basés sur la PfHRP-2 avaient un taux de sensibilité plus élevé, mais un taux de spécificité plus faible dans le cadre de l'évaluation de P. falciparum dans les régions très endémiques par rapport à ceux basés sur la pLDH (95 % et 95,2 % par rapport à 93,2 % et 98,5 %) Note de bas de page 15. Une méta-analyse précédente des TDR chez les voyageurs qui reviennent au pays a montré que les tests basés sur la PfHRP-2 étaient plus précis que ceux basés sur la pLDH Note de bas de page 9. À des densités parasitaires inférieures à 100/μL, la sensibilité diminue, les taux tombant à moins de 70 % à des densités de moins de 50/μL Note de bas de page 25. La sensibilité pour la détection du paludisme à P. vivax est inférieure à celle du paludisme à P. falciparum Note de bas de page 19 Note de bas de page 26. On dispose de données limitées pour le paludisme à P. vivax, mais le seuil recommandé pour une détection satisfaisante de la parasitémie doit être d'au moins 200 parasites/μL Note de bas de page 27.

Étant donné que les tests les plus courants combinent une bande aldolase ou pLDH avec une bande PfHRP-2, une réaction positive peut se produire sur les deux bandes en cas d'infection par P. falciparum uniquement, ce qui rend impossible un diagnostic précis des infections mixtes sans tests supplémentaires Note de bas de page 23. Les variations géographiques entre les souches de P. falciparum peuvent également affecter la sensibilité du test Note de bas de page 28.

Les TDR ne sont pas des outils recommandés pour évaluer la réponse au traitement antipaludique. La PfHRP-2 persiste longtemps après la clairance sanguine à l'aide d'un traitement des parasites au stade asexué (c.-à-d. les stades pertinents d'un point de vue clinique), les taux de positivité s'élevant à 68 % après sept jours et à 27 % après 28 jours de traitement Note de bas de page 25. En plus de ralentir l'élimination de l'antigène du parasite menant à des résultats faux positifs au TDR PfHRP-2, la parasitémie isolée au stade sexué (c.-à-d. gamétocytémie sexuelle), peut survenir après un traitement réussi du paludisme et entraîner un résultat positif au TDR Note de bas de page 29. Une gamétocytémie isolée à la suite d'un traitement contre le paludisme ne justifie pas la poursuite du traitement. Les TDR ont l'avantage d'être simples à utiliser, de fournir des résultats rapides, ne requièrent aucun équipement et peuvent être effectués par des employés de laboratoire qui n'ont pas reçu de formation sur la détection microscopique des plasmodies. Cependant, les résultats peuvent être inexacts si les instructions ne sont pas suivies scrupuleusement. Les résultats doivent être lus dans les délais précisés par le fabricant, car les lignées testées peuvent devenir positives après ce délai même s'il n'y a pas de parasitémie. La chaleur et l'humidité peuvent endommager les tests; les emballages des tests doivent donc être entreposés conformément aux indications et être ouverts juste avant leur utilisation.

La présence d'autoanticorps, tels que le facteur rhumatoïde, les anticorps hétérophiles et les anticorps anti-souris, peut donner des résultats faussement positifs dans certaines trousses de dépistage. La probabilité d'un faux positif en présence du facteur rhumatoïde varie selon l'anticorps testé. D'autres infections pouvant causer de la fièvre chez un voyageur de retour au pays, telles que la dengue, la trypanosomiase africaine, la toxoplasmose et la tuberculose, qui peuvent entraîner de faux résultats positifs aux TDR Note de bas de page 18. Chez les patients qui présentent une forte parasitémie, on signale à l'occasion des résultats négatifs aux TDR, qui sont probablement dus au phénomène de « zone », phénomène où un excédent de l'antigène masque l'anticorps testé Note de bas de page 9 Note de bas de page 19.

On observe de plus en plus de déclarations de faux résultats négatifs de P. falciparum dans différentes régions géographiques attribuables aux souches qui présentent une déficience du gène HRP-2 Note de bas de page 30 Note de bas de page 31 Note de bas de page 32 Note de bas de page 33 Note de bas de page 34. L'émergence récente au niveau mondial de souches de Plasmodium falciparum présentant des délétions ou des mutations des gènes des protéines 2 et 3 riches en histidine (HRP-2/3) a compliqué l'interprétation des tests de diagnostic rapide (TDR) des antigènes du paludisme Note de bas de page 35. Les antigènes les plus courants pour la détection de P. falciparum dans les TDR sont la protéine HRP-2 et la lactate déshydrogénase spécifique (Pf-pLDH) Note de bas de page 36. La protéine HRP-3 partage une homologie significative avec la protéine HRP-2, de sorte que des mutations dans l'un ou l'autre de ces gènes peuvent également affecter la sensibilité des TDR utilisant la protéine HRP-2 comme antigène cible Note de bas de page 37. Étant donné que ces mutations peuvent entraîner une expression réduite ou nulle de la HRP-2, de la HRP-3 ou des deux, les infections par ces souches de P. falciparum peuvent donner un résultat négatif ou faible pour la HRP-2 lors des tests TDR PfHRP-2. Cela peut se produire malgré une parasitémie élevée Note de bas de page 35. À l'heure actuelle, les antigènes pan-espèces fréquemment utilisés en combinaison avec PfHRP-2 dans ces tests (protéines pan-espèces, telles que la lactate déshydrogénase (pan-pLDH) ou l'aldolase) et la LDH spécifique de Plasmodium falciparum ne sont pas affectés par ces mutations. Ces mutations peuvent avoir un impact significatif sur l'interprétation des résultats des TDR. Les tests qui utilisent uniquement PfHPR-2 pour la détection sélective de P. falciparum peuvent être faussement négatifs et ceux qui détectent également un antigène pan-paludéen en combinaison avec HRP-2/3 peuvent entraîner l'identification erronée d'une infection non falciparum.

Des mutations de délétion HRP-2/3 ont été signalées en Amérique du Sud (bassin amazonien péruvienNote de bas de page 30, Brésil Note de bas de page 38) en Afrique (SénégalNote de bas de page 39, ÉthiopieNote de bas de page 37 Note de bas de page 40, Érythrée Note de bas de page 41, Soudan Note de bas de page 42 et Kenya Note de bas de page 43 et en Inde Note de bas de page 37) et peuvent représenter une proportion significative de P. falciparum en fonction de la région Note de bas de page 44.

En raison des risques potentiels associés à un diagnostic erroné du paludisme à falciparum, le CCMTMV recommande que tous les patients soupçonnés d'être atteints de paludisme et dont le TDR basé sur la HRP-2 est négatif pour le Plasmodium falciparum fassent tester leurs échantillons par une méthode alternative telle que la microscopie ou l'amplification des acides nucléiques. Les patients dont l'antigène pan-paludéen est positif et dont le test HRP-2 est négatif doivent subir des tests supplémentaires afin d'exclure définitivement le paludisme à P. falciparum.

Tests d'amplification des acides nucléiques

Les tests d'amplification des acides nucléiques (TAAN) pour la détection du Plasmodium sp. à partir du sang total sont très sensibles (1 - 20 parasites/mL) Note de bas de page 45, et lorsqu'ils sont disponibles dans un délai rapide, ils peuvent remplacer le besoin de recourir à de multiples frottis épais et minces pour le diagnostic du paludismeNote de bas de page 46 Note de bas de page 47 Note de bas de page 48 Note de bas de page 49 Note de bas de page 50. Les méthodes d'amplification traditionnelles basées sur la PCR ne sont pas commercialisées au Canada, leur disponibilité est limitée et elles ne sont généralement pas disponibles pour le diagnostic rapide, ce qui les rend inadaptées au diagnostic de routine. Cependant, l'approbation réglementaire des tests d'amplification rapide semi-automatisés commercialisés pour la détection de l'ADN de Plasmodium sp. a permis une plus grande disponibilité dans les laboratoires canadiens, y compris dans les régions rurales qui manquent traditionnellement d'expertise en microscopie. Actuellement, le seul test d'amplification rapide des acides nucléiques semi-automatisé autorisé au Canada est un test d'amplification isotherme à médiation en boucle (LAMP) (Alethia Malaria Plus, Meridian Bioscience, anciennement Illumigene Malaria). L'équipement est simple à utiliser et à entretenir et ne nécessite qu'une expertise technique minimale. Des études ont démontré que ce test est d'une sensibilité équivalente ou supérieure à celle de plusieurs frottis épais et qu'un seul test peut remplacer plusieurs frottis en tant que test diagnostique initial, ce qui dispense de l'évaluation microscopique de plusieurs échantillons pour exclure l'infection palustre chez les voyageurs de retour au Canada. La sensibilité et la spécificité rapportées approchent les 100 % dans les études arbitrées par la PCR conventionnelle et la microscopie Note de bas de page 46 Note de bas de page 47 Note de bas de page 48 Note de bas de page 49 Note de bas de page 50. Cependant, de nombreuses limitations doivent être prises en compte lors de l'utilisation de ces tests. Ce test LAMP ne permet pas de différencier les espèces de paludisme ni de quantifier les parasites du paludisme, et ne permet pas de distinguer l'acide nucléique résiduel des parasites intacts, c'est-à-dire qu'il peut rester positif jusqu'à trois semaines après un traitement réussi. Par conséquent, tous les échantillons positifs nécessitent des frottis épais et minces de suivi pour permettre la spéciation et la quantification en vue de la prise en charge clinique des patient Note de bas de page 47 Note de bas de page 48. Par conséquent, il convient de maintenir une expertise locale en matière de microscopie ou un système d'orientation robuste et rapide pour la spéciation et la quantification lors de l'utilisation d'un TAAN LAMP commercial pour le diagnostic du paludisme. La persistance de l'ADN de Plasmodium après le traitement et la gamétocytémie isolée nécessitent une interprétation minutieuse et une corrélation avec la microscopie et la présentation clinique.

Tableau 6.1 : Comparaison des tests pour le diagnostic du paludisme

Tests diagnostiques Seuil approximatif de densité parasitaire
par μL (%)
Identification de l'espèce Accessibilité Détection de la résistance
Microscopie – gouttes épaisses 50 (0,001) Passable Limitée Non
Microscopie – étalements minces > 100 (0,002) Bonne Limitée Non
TDR > 100 (0,002) +/- (limitée) Bonne Non
PCR 2-5 (<0,0001) Bonne Faible Oui
LAMP 2-5 (<0,0001) Aucune spéciation Limitée Non
Abréviations : LAMP = test d'amplification isotherme à médiation en boucle; PCR = réaction de polymérisation en chaîne; TDR = test diagnostique rapide.

Recommandations pour les tests de diagnostic du paludisme

  • Tout cas soupçonné de paludisme doit être considéré comme une urgence médicale Note de bas de page 5 Note de bas de page 51 Note de bas de page 52 Note de bas de page 53.
  • On devrait conseiller aux voyageurs qui se rendent dans des régions impaludées de consulter un médecin et de subir des épreuves de laboratoire le plus tôt possible (toujours dans les 24 heures suivant l'apparition d'une fièvre inexpliquée), à tout moment, à la fois pendant leur voyage et au cours de la première année suivant leur retour au pays. Les voyageurs devraient toujours indiquer à leur fournisseur de soins de santé les pays qu'ils ont visités Note de bas de page 5.
  • On devrait soupçonner le paludisme chez tout patient qui revient d'une région impaludée et qui présente ou a présenté une fièvre Note de bas de page 2.
  • Tous les cas suspects de paludisme doivent faire l'objet d'un test parasitologique pour confirmer le diagnostic.
  • Le sang doit être examiné immédiatement en cas de suspicion de paludisme. Si aucune expertise n'est disponible pour évaluer les frottis du paludisme, le diagnostic doit impliquer l'utilisation locale d'un TDR et/ou d'une LAMP, puis le transfert rapide d'un échantillon de sang à un laboratoire de référence (les échantillons dont la LAMP est négative ne nécessitent pas d'autres examens). Le résultat du TDR, de la LAMP ou du frottis sanguin initial doit être disponible dans les deux heures suivant la prise de sang.
  • Si les résultats ne sont pas disponibles dans un délai de deux heures, le clinicien doit envisager sérieusement un traitement antipaludéen empirique en attendant les résultats Note de bas de page 9.
  • Si les frottis initiaux sont négatifs et qu'aucun autre diagnostic n'est établi, deux autres frottis devraient être prélevés et examinés à intervalles de 12 ou de 24 heures Note de bas de page 54.
  • Avant de déclarer les frottis négatifs pour le paludisme, une personne ayant de l'expérience dans l'analyse des frottis devrait examiner un étalement mince au microscope avec de l'huile à immersion pendant 15 à 20 minutes (200 à 300 champs avec objectif à immersion grossissant 100 fois) de même qu'une goutte épaisse pendant 5 à 10 minutes (200 à 300 champs avec objectif à immersion grossissant 100 fois) Note de bas de page 55 Note de bas de page 56. Un test LAMP négatif suffit également à déclarer l'échantillon négatif pour le paludisme.
  • Un laboratoire devrait interpréter les frottis sanguins comme étant positifs ou négatifs dans l'heure où les deux heures qui suivent la réception de l'échantillon de sang et devrait identifier l'espèce immédiatement, dans la mesure du possible, ou dans un délai de 12 heures. Lorsqu'elle est disponible, on peut également utiliser la PCR pour la spéciation. Étant donné la prévalence croissante des souches mutantes HRP-2, l'absence de détection de la HRP-2 en présence d'un résultat positif pour toutes les espèces de paludisme ne doit pas être interprétée comme un paludisme non falciparum sans confirmation supplémentaire. La quantification de la parasitémie doit également être disponible rapidement Note de bas de page 54 Note de bas de page 55. Une parasitémie supérieure à 1% se produit principalement dans les infections à P. falciparum et P. knowlesi. Par conséquent, si l'on soupçonne une parasitémie de cet ordre à partir de l'examen du frottis, il convient de procéder à une numération formelle et d'en informer le clinicien.
  • Les TDR ou LAMP devraient être offerts dans chaque laboratoire clinique au Canada qui pourrait recevoir des échantillons aux fins de diagnostic du paludisme. Les TDR ou LAMP devraient être offerts comme dépistage de première intention, à moins que les résultats de la microscopie de haute qualité pour le paludisme puissent être obtenus dans les deux heures suivant la réception des échantillons Note de bas de page 5.
  • La parasitémie est importante pour la prise en charge clinique des infections à P. falciparum et à P. knowlesi. Certains laboratoires pourraient trouver plus rapide de signaler la parasitémie pour l'ensemble des échantillons, plutôt que d'attendre la confirmation de l'espèce Note de bas de page 57 Note de bas de page 58.
  • Les TDR et les LAMP ne devraient pas être utilisés pour évaluer la réponse au traitement Note de bas de page 59 Note de bas de page 60.
  • Les TDR ne devraient pas être systématiquement recommandés aux voyageursNote de bas de page 5 Note de bas de page 61 Note de bas de page 62.

Abréviations : LAMP = test d'amplification isotherme à médiation en boucle; PCR = réaction de polymérisation en chaîne; TDR = test diagnostique rapide.

Remerciements

Le présent chapitre a été préparé par : M. Libman (président) et K. Plewes (présidente du Sous-comité sur le paludisme), et a été approuvée par le CCMTMV.

Le CCMTMV souhaite remercier P. Lagacé-Wiens et M. Desroches (secrétariat du CCMTMV) pour leurs contributions aux mises à jour de ce chapitre, ainsi que A. Boggild et E. Payne (secrétariat du CCMTMV) pour leurs contributions aux précédentes versions du chapitre.

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