Chapitre 4 : Vivre avec l'arthrite au Canada: Un défi de santé personnel et de santé publique – L'arthrite chez les Premières nations, les Métis et les Inuits
Chapitre quatre: L'arthrite chez les Premières nations, les Métis et les Inuits
« Ma soif de découvrir tout ce que je pouvais sur ma maladie et mon ouverture d'esprit aux médecines douces ont été de précieux outils pour mener mes premières luttes. Ayant grandi dans une collectivité autochtone, j'ai appris les enseignements traditionnels, la langue et les légendes de notre peuple aux pieds de ma « tama » (grand-mère) et des aînés. Aujourd'hui, je mène une vie active et bien remplie. Grâce à ma détermination, à l'éducation et au soutien de ma famille et des médecins, je suis devenu la preuve vivante que l'arthrite peut être traitée avec un diagnostic précoce, même si elle touche n'importe qui n'importe quand. En faisant connaître mon expérience, je contribue à disséminer le message que nul n'est tenu de souffrir en silence dans les collectivités autochtones. »
— Personne atteinte de polyarthrite rhumatoïde
Introduction
D'après le recensement de 2006, plus d'un million de personnes au Canada ont déclaré être membres de Premières nations (698 025 membres inscrits et non inscrits), métisses (389 780) ou inuites (50 480), ce qui représente environ 3,6 % de la population canadienne. Ce pourcentage sous-estimerait cependant le nombre véritable de membres des populations autochtones, car le dénombrement n'a pas été mené à terme dans 22 réservesNote de bas de page 1.
Parmi les trois populations autochtones, les Métis ont connu la plus forte croissance démographique (91 %) entre 1996 et 2006. Cette croissance est plus de trois fois supérieure à celle qu'ont connue les Premières nations (29 %) et les Inuits (26 %)Note de bas de page 1. Plusieurs facteurs ont contribué aux hausses marquées de population chez les Autochtones (en particulier chez les Métis), notamment un taux de natalité élevé, une augmentation du nombre de personnes s'identifiant comme autochtones (à la suite d'événements politiques et sociaux) et le nombre de réserves où le dénombre- ment est complet.
Premières nations
La majorité des membres des Premières nations sont établis en Ontario et dans les provinces de l'Ouest; approximativement 60 % d'entre eux vivent en dehors des réserves. La moitié de la population des Premières nations du Canada a moins de 25 ansNote de bas de page 1.
Les deux sources de données sur l'arthrite chez les Premières nations du Canada utilisées par le présent rapport sont l'Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes (ESCC) — pour les renseignements sur les personnes qui se sont identifiées comme membres d'une Première nation et qui vivent hors réserve — et l'Enquête régionale longitudinale sur la santé des Premières nations (ERS) — pour les renseignements sur les personnes habitant les réserves.
Membres des Premières nations habitant des réserves
Selon l'ERS, les cinq problèmes de santé les plus fréquents chez les adultes des Premières nations, en 2002-2003, étaient l'arthrite ou le rhumatisme, les allergies, l'hypertension, le diabète et les maux de dos chroniques, soit des problèmes également très communs chez les adultes non autochtonesNote de bas de page 2.
En 2002-2003, 19 % des membres des Premières nations de 20 ans et plus habitant une réserve (79 400 personnes) ont déclaré avoir reçu un diagnostic d'arthrite ou de rhumatisme. Le pourcentage de personnes souffrant d'arthrite ou de rhumatisme augmente avec l'âge, et la maladie était plus courante chez les femmes que chez les hommes, tous âges confondus (figure 4-1). Près des deux tiers (64 %) des adultes atteints d'arthrite et vivant dans une réserve étaient âgés de 30 à 59 ans.
L'estimation de la prévalence de l'arthrite ou du rhumatisme normalisée selon l'âge (c.-à-d. ajustée pour tenir compte des différences de composition des groupes d'âge dans les populations) chez les adultes des Premières nations de 20 ans et plus habitant des réserves, en 2002-2003, était 1,3 fois supérieure à celle de la population canadienne de 20 ans et plus, en 2003.
Chez les adultes des Premières nations habitant une réserve et souffrant d'arthrite ou de rhumatisme, 60 % (55 % des hommes et 64 % des femmes) ont signalé devoir limiter la quantité ou le genre d'activités à cause de leur arthrite. Des résultats similaires ont été révélés par l'Enquête régionale longitudinale sur la santé des Premières nations au Manitoba (ERS du Manitoba) : les adultes arthritiques habitant une réserve ont déclaré une fréquence élevée de limitations des activités (68 % ont fait état de limitations causées par l'un des types d'arthrite)Note de bas de page 3.
Plus de la moitié (53 %) des membres adultes des Premières nations souffrant d'arthrite ou de rhumatisme et habitant une réserve (47 % des femmes et 57 % des hommes) ont déclaré suivre un traitement ou prendre des médicaments. La situation géographique influe sur l'état de santé et l'accès aux soinsNote de bas de page 4. Les services de santé étant parfois fournis par un représentant en santé communautaire résident et un médecin se déplaçant par avion sur une base semi-régulière, ils ne sont pas tous offerts dans toutes les collectivitésNote de bas de page 2 Note de bas de page 4. L'accès aux soins médicaux est souvent plus limité pour les populations des Premières nations des réserves, particulièrement dans les collectivités rurales et éloignées. Au nombre des obstacles, on compte les coûts élevés de transport, la barrière linguistique et le peu de services offertsNote de bas de page 2.
Membres des Premières nations vivant hors réserve
En 2007-2008, 17,7 % des membres des Premières nations de 15 ans et plus vivant hors réserve (71 704 per- sonnes) ont déclaré avoir reçu un diagnostic d'arthrite. Le pourcentage de personnes souffrant d'arthrite augmentait avec l'âge (figure 4-2) et, globalement, la maladie était plus fréquente chez les femmes (19,9 %) que chez les hommes (15,3 %). Près des deux tiers (61%) des adultes atteints d'arthrite vivant hors réserve étaient âgés de 30 à 59 ans.
L'estimation de la prévalence de l'arthrite normalisée selon l'âge chez les membres des Premières nations de 15 ans et plus vivant hors réserve, en 2007-2008, était 1,3 fois supérieure à celle de la population canadienne.
Métis
Les Métis descendent des Français qui pratiquaient le commerce de la fourrure et des femmes cries des Prairies et, dans le Nord, des commerçants anglais et écossais et des femmes dénées. Aujourd'hui, la plupart des gens qui s’identifient comme Métis vivent dans les centres urbains de l'Ontario (73 605), du Manitoba (71 805), de la Saskatchewan (48 120), de l'Alberta (85 495) et de la Colombie-britannique (59 445). La moitié des Métis du Canada ont moins de 30 ansNote de bas de page 1.
Selon l'Enquête auprès des peuples autochtones (EAPA) de 2006, les problèmes de santé chroniques les plus fréquemment déclarés par les Métis de 15 ans et plus étaient l'arthrite ou le rhumatisme (21 %), suivis de l'hypertension (16 %) et de l'asthme (14 %). Plus de femmes métisses que d'hommes ont déclaré souffrir d'arthrite ou de rhumatisme (24 % et 18 %, respective- ment). La prévalence de l'arthrite et du rhumatisme augmente avec l'âge (figure 4 -3)Note de bas de page 5.
Selon les estimations, la prévalence de l'arthrite ou du rhumatisme autodéclarés chez les Métis adultes en 2006 était 1,6 fois supérieure à la prévalence de l'arthrite ou du rhumatisme dans la population canadienne de l'ESCC de 2005, après l'ajustement effectué pour tenir compte de la jeunesse de la population métisseNote de bas de page 5.
Inuits
La plupart des Inuits vivent dans les régions nordiques du Canada, notamment le Nunavut (24 635), le Nunavik dans le nord du Québec (9 565), la région des Inu- vialuit dans les Territoires du Nord-Ouest (3 115) et le Nunatsiavut dans le nord du Labrador (4 715). Environ 17 % (8 582) de tous les Inuits vivent dans les grands centres urbains du sud du pays. La moitié des Inuits du Canada ont moins de 22 ansNote de bas de page 1.
L'Enquête auprès des peuples autochtones (EAPA) de 2006 a permis de recueillir de l'information sur les Inuits des quatre régions inuites du Nord et sur les Inuits vivant dans le sud du pays. Elle fournit des estimations relatives à l'arthrite à l'échelle nationaleNote de bas de page 6.
Selon l'EAPA de 2006, les problèmes de santé chroniques diagnostiqués les plus fréquemment déclarés par les Inuits de 15 ans et plus étaient l'arthrite ou le rhumatisme (13 %) et l'hypertension (12 %). Ces pourcentages étaient similaires à ceux observés dans la population canadienne, après l'ajustement effectué pour tenir compte des différences d'âge. L'arthrite et le rhumatisme étaient plus fréquents chez les femmes inuites que chez les hommes (16 % et 10 %, respectivement)Note de bas de page 6.
Il se peut que la plus faible prévalence estimée de l'arthrite ou du rhumatisme chez les Inuits, par rapport aux autres populations autochtones, soit le résultat d'un sous-diagnostic. Comme la majorité des Inuits vivent dans l'Arctique canadien et sont vus moins fréquem- ment par des professionnels de la santé, un bon nombre d'entre eux pourraient ne pas avoir été diagnostiquésNote de bas de page 6 Note de bas de page 7. La population inuite est par ailleurs plus jeune que les autres populations autochtones et, habituellement, les personnes jeunes sont moins nombreuses à déclarer des problèmes de santé chroniquesNote de bas de page 7. De plus, les prédispositions génétiques des Inuits et leur régime alimentaire riche en poisson, donc en acides gras oméga-3, pourraient avoir un effet protecteur contre les maladies auto-immunes et inflammatoiresNote de bas de page 8 Note de bas de page 9.
La prévalence réelle de l'arthrite chez les trois populations autochtones est probablement sous-estimée, car les personnes atteintes qui n'ont pas consulté de mé- decin ou dont les symptômes ne sont pas diagnostiqués ne sont pas comptabilisées dans les estimationsNote de bas de page 7. Au Canada, à l'instar des hommes de la population générale, les hommes autochtones ont moins tendance que les femmes à consulter des professionnels de la santéNote de bas de page 10. De plus, il se peut que certaines personnes ne sachent pas que des problèmes de santé comme la goutte ou le lupus sont des formes d'arthrite et que, par consé- quent, elles ne déclarent pas leur problème de santé comme étant de l'arthrite.
Résumé
- L'arthrite est l'une des maladies chroniques les plus fréquentes chez les membres des Premières nations vivant dans les réserves ou en dehors de celles-ci (19 % et 18 %, respectivement), les Inuits (13 %) et les Métis (21 %).
- La prévalence de l'arthrite estimée pour les adultes des Premières nations habitant les réserves, les adultes des Premières nations vivant hors réserve et les adultes métis était 1,3 à 1,6 fois supérieure à celle estimée pour la population adulte canadienne, après l'ajustement effectué pour tenir compte des différences de répartition de l'âge dans ces populations.
- L'estimation de la prévalence pour l'arthrite ou le rhumatisme dans la population inuite était similaire à celle de la population canadienne totale après normalisation selon l'âge.
- La prévalence de l'arthrite était plus élevée chez les femmes que chez les hommes dans les trois populations autochtones.
- Près des deux tiers des membres des Premières nations vivant à l'intérieur ou à l'extérieur des réserves ayant déclaré souffrir d'arthrite étaient âgés de 30 à 59 ans (64 % et 61 %, respectivement).
- Soixante pour cent des membres des Premières nations souffrant d'arthrite ou de rhumatisme et habitant les réserves ont déclaré avoir eu besoin de limiter la quantité ou la nature de leurs activités à cause de leur maladie.
- Cinquante-trois pour cent des membres des Premières nations souffrant d'arthrite ou de rhumatisme et habitant les réserves ont indiqué qu'ils suivaient un traitement ou qu'ils prenaient des médicaments.
- Les Premières nations, les Métis et les Inuits constituent de jeunes populations en croissance. Par conséquent, la prévalence de l'arthrite dans ces populations est appelée à augmenter.
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