ARCHIVÉ : Annexe B : Manuel de pratique sensible à l'intention des professionnels de la santé : Leçons tirées des personnes qui ont été victimes de violence sexuelle durant l'enfance – Prévalence de la violence sexuelle à l'endroit d'enfants

 

Annexe B : Prévalence de la violence sexuelle à l'endroit d'enfants

Dans bien des cas, la violence sexuelle ne fait l'objet d'aucun signalement pendant l'enfance ou à l'adolescence ; par conséquent, l'évaluation de la prévalence du phénomène s'appuie le plus souvent sur des études rétrospectives menées auprès d'adultes. Selon les estimations les plus récentes et les plus fiables du taux de prévalence à tout âge de la vie, jusqu'à un tiers de toutes les femmes auraient survécu à une agression sexuelle pendant l'enfance alors que pour les hommes, cette proportion s'établirait à quatorze pour cent23,29,61. La comptabilisation précise des cas de violence sexuelle pendant l'enfance soulève des questions méthodologiques relatives aux obstacles qui gênent le signalement (p. ex., la honte, le sentiment de culpabilité, le blâme de soi et la peur), aux polémiques que soulèvent certaines définitions, aux choix des populations étudiées (p. ex., échantillonnage dans les collectivités plutôt qu'en milieu clinique), aux méthodes de cueillette des données (p. ex., entrevues plutôt que questionnaires d'auto- évaluation), aux taux de réponse observés de même qu'au nombre de questions posées par les chercheurs et chercheuses au sujet de la violence sexuelle pendant l'enfance61,121,134,184. Ces questions expliquent en partie le large éventail de résultats tirés des recherches et dictent une certaine prudence au niveau de l'interprétation des données ou de la conduite d'analyses comparatives à partir de données provenant d'études diverses.

Rares sont les grandes études communautaires ayant examiné l'incidence et la prévalence de la violence sexuelle pendant l'enfance chez les enfants et les jeunes. L'étude la plus complète est l'oeuvre de David Finkelhor et Jennifer Dziuba- Leatherman64, qui ont réalisé une enquête téléphonique auprès de deux mille résidents des États-Unis âgés de dix à seize ans. Cette recherche révèle que dans l'année précédant l'entrevue, trois et deux dixièmes pour cent des filles interrogées déclaraient avoir été victimes de violence sexuelle au sens de « toucher des parties sexuelles de l'enfant au travers de ses vêtements ou sous ces derniers, pénétration de l'enfant ou contact oral-génital avec l'enfant de la part d'une personne qui l'agresse »64p.419 [traduction] alors que cette proportion était de six dixièmes pour cent chez les garçons. Pour l'échantillon complet, le taux de prévalence des actes sexuels tentés ou commis contre des enfants s'établissait à dix et cinq dixièmes pour cent.

De façon générale, l'analyse d'échantillons aléatoires prélevés dans les collectivités révèle que la proportion de personnes ayant vécu des expériences sexuelles non désirées avant l'âge de dix-huit ans varierait entre douze et trente-cinq pour cent chez les femmes et entre quatre et neuf pour cent chez les hommes121. Après avoir tenu compte des écarts entre les définitions, l'échantillonnage et les taux de réponse relevés pour un échantillon transversal de seize enquêtes par sondage réalisées dans des collectivités, Kevin M. Gorey et Donald R. Leslie70 concluent que le taux de prévalence de la violence sexuelle pendant l'enfance serait de seize et huit dixièmes pour cent chez les femmes et sept et neuf dixièmes pour cent chez les hommes. Pour sa part, après s'être penchée sur les résultats de grandes études communautaires menées dans dix-neuf pays du monde, Finkelhor62 conclut que ces mêmes taux varieraient entre sept et trente-six pour cent chez les femmes et entre trois et vingt- neuf pour cent chez les hommes. Ainsi, la violence sexuelle pendant l'enfance serait un phénomène planétaire qui s'observe dans toutes les régions où des recherches ont été menées sur la question un constat que confirment certaines enquêtes récentes réalisées dans des pays non occidentauxp. ex.,39,98. Quant à eux, après avoir analysé les taux de prévalence à l'échelle des collectivités observés dans différents pays, David Murray Fergusson et Paul E. Mullen59 concluent qu'entre quinze et trente pour cent des femmes et trois et quinze pour cent des hommes déclareraient avoir été exposés à une quelconque forme d'intérêt sexuel non désiré pendant l'enfance. Ces résultats correspondent à ceux tirés d'une récente étude, publiée par John Briere et Diana Elliot29, selon laquelle les taux de signalement d'agressions sexuelles pendant l'enfance s'établiraient à trente-deux et trois dixièmes pour cent chez les femmes et à quatorze et deux dixièmes pour cent chez les femmes. Briere et Elliot ajoutent que vingt-et-un pour cent des adultes ayant fait état de violences sexuelles pendant l'enfance auraient également subi des sévices physiques.

La prévalence de la violence sexuelle pendant l'enfance est encore plus marquée chez les personnes handicapées. Une analyse bibliographique83 portant sur les enfants ayant des incapacités au sens de « l'éventail complet des déficiences physiques, mentales et émotionnelles »83p.1018 [traduction] cite des études selon lesquelles ces enfants seraient plus à risque de souffrir de négligence (écart de près de cent pour cent), de sévices physiques (écart de soixante pour cent) ou d'agressions sexuelles (écart de cent vingt pour cent) que les enfants n'ayant aucune incapacité83. D'autres recherches font état de taux de violence sexuelle encore plus élevés chez les enfants ayant des incapacités.

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